1 avril 2017

Le Coin de la Conjoncture du 1er avril 2017

Tout ne va-t-il pas trop bien madame la marquise ?

 Depuis le début de l’année, une douce euphorie semble gagner les milieux économiques. La bonne orientation des indices de confiance au sein de l’Union européenne semble prédire un affermissement de la croissance économique. L’amélioration du niveau de confiance s’illustre également par les bons résultats des indices boursiers tant aux États-Unis qu’en Europe. En s’appuyant sur ces bons indices, l’INSEE, dans ses dernières prévisions, parie sur un taux de croissance de l’économie française de 0,3 % pour le 1er trimestre et de 0,5 % pour le 2e.

Pour autant, ne sommes-nous pas victime d’une bulle spéculative de confiance ? La confiance au sein de la zone euro n’est-elle pas une illusion ? N’est-elle pas surévaluée ?

Les indices mesurant la confiance, le climat des affaires sont, en règle générale, des indicateurs fiables des tendances. Il convient de ne pas négliger le fait que pour certains d’entre eux, (notamment le climat des affaires et la confiance des consommateurs mesurés par l’INSEE), ils sont calculés en retenant une moyenne glissante. De ce fait, en cas de longue période de dégradation du climat, la remontée sera d’autant plus visible.

Pourquoi les indices sont-ils actuellement bien orientés ?

Après une longue période de stagnation en Europe, une légère reprise est constatée  depuis la fin de l’année 2015. L’augmentation de l’investissement, à la fin de l’année dernière, a été jugée comme suffisante pour garantir la pérennité de la croissance. Il est admis que l’Europe a un déficit de croissance à combler. Les annonces de la BCE de maintien d’une politique monétaire accommodante, au moins jusqu’à la fin de l’année voire au-delà, sont bien perçues par le milieu économique. Les pays émergents connaissent une amélioration de leur situation conjoncturelle. La remontée des cours du pétrole et des matières premières favorise l’activité et les importations des pays producteurs. Le ralentissement économique chinois reste modéré et plus lent que prévu. Par ailleurs, les intentions de relance budgétaire du nouveau Président américain ont été jugées favorablement par les milieux économiques.

En Europe, les entreprises enregistrent une hausse de leurs profits, gage de la poursuite de la hausse de l’investissement. Le chômage continue de baisser même si ce recul se fait à petite vitesse en ce qui concerne la France et l’Italie. Les ménages dans de nombreux pays européens ont repris le chemin de l’investissement résidentiel.

Plusieurs facteurs pourraient contrecarrer ces bons indices

La remontée des prix pourrait peser, en Europe et notamment en France, sur la consommation. La reprise de l’activité, en 2015, est imputable, essentiellement, à la baisse des cours du pétrole. Le pouvoir d’achat des ménages s’est accru, en moyenne, de plus de 1 000 euros entre 2015 et 2016.

La remontée de l’inflation due à la hausse du prix du pétrole réduit le pouvoir d’achat des ménages et pourrait peser sur la demande intérieure. Certes, la hausse du baril de pétrole semble avoir atteint un palier. En raison de l’augmentation de la production américaine, le baril s’échange même autour de 50 dollars à la fin du mois de mars contre plus de 55 au mois de février.

La progression des taux d’intérêt pourrait également jouer un mauvais tour à la croissance. Elle réduirait les marges de manœuvre budgétaires en aggravant le coût de la dette publique. Les agents économiques pourraient revoir leurs projets d’investissement en raison de l’augmentation des taux d’intérêt. Selon certains économistes dont ceux de Natixis, une hausse durable de 150 points de base des taux serait susceptible d’affecter la croissance.

La montée du protectionnisme est susceptible de ralentir la croissance de l’économie mondiale. Dans la catégorie des menaces, figurent également les négociations sur le Brexit.

Pour endiguer un éventuel ralentissement, les États européens ne disposent que de peu d’outils. La BCE ne peut pas rendre sa politique monétaire plus expansionniste car l’inflation est revenue dans certains pays dans la zone cible des 2 %. De même, l’arme de la dépréciation est, de plus en plus, délicate à manier. Elle entraînerait une réaction des États-Unis et, en outre, il n’est pas certain que son effet sur l’activité soit réel.

La dépréciation de l’euro depuis 2014 n’a pas généré le surcroit d’activité. Elle a certainement contribué à augmenter l’excédent de la balance commerciale allemande.  Une dépréciation supplémentaire de l’euro avec une politique monétaire expansionniste dans la zone euro aurait donc comme effet essentiel de faire monter les prix des importations de la zone euro et pourrait aboutir à  un ralentissement de l’activité.

 

Le voilier, une spécialité française

La France est reconnue pour la qualité de sa production de voiliers domaine dans lequel elle est leader mondial. Ce secteur porté par de nombreux champions, exporte une grande partie de sa production. Il a comme caractéristique d’être très concentré géographiquement dans les Pays de la Loire et notamment en Vendée à l’exemple de Jeanneau et de Bénéteau qui y ont conservé leur siège social. Ces firmes ont contribué sont à la base du renouveau économique de ce secteur et de ce département. Elles ont favorisé l’émergence de synergies avec les sous-traitants tout en misant sur l’innovation.

En 2015, la production française de bateaux de plaisance représente 40 % de la construction navale, comme dans l’Union européenne (UE). La production française de bateaux de plaisance s’élève à 873 millions d’euros, soit 13 % de la production européenne ; la seule fabrication de voiliers atteint 573 millions d’euros, soit 34 % de la production européenne.

La France, premier producteur européen de voiliers

 Les voiliers représentent 66 % de la production française (573 millions d’euros), quand les yachts à moteur n’en représentent que 27 % (239 millions d’euros) et les autres bateaux de plaisance (bateaux pneumatiques, hors-bord, bateaux à rames…) 7 % (62 millions d’euros)

Au sein de l’Union européenne, le classement est tout autre. Les yachts à moteur représentent 66 % de cette production (4,6 milliards d’euros) et les voiliers 25 % (environ 1,7 milliard d’euros). La production de yachts à moteur est dominée par l’Italie, l’Allemagne et les Pays-Bas. Ces trois pays assurent à eux seuls 80 % de la production européenne avec des parts respectives de 40 %, 20 %, et 20 %. En Europe, le deuxième pays pour la production de voiliers est le Royaume-Uni (25 % de la production européenne).

 La France a amélioré ses positions depuis 2010

 Entre 2010 et 2015, la production française de voiliers et de yachts à moteur a crû de 8 % en volume en connaissant une évolution en dents de scie. De 2011 à 2013, elle s’est repliée de 10 % avant d’augmenter de 20 % entre 2014 et 2015. Les autres pays européens n’ont pas bénéficié d’une telle reprise de leurs ventes. La production européenne en 2015 est en retrait de 18 % par rapport à celle de 2010. La progression de la production française est imputable tant à celle des yachts à moteur (+9 %) qu’à celle des voiliers (+ 8 %). De leur côté les productions européennes ont diminué de 14 % pour les voiliers et de 20 % pour les yachts à moteur. Ainsi, la part française de ces productions au sein de l’Union européenne s’est accrue de 10 % en 2010 à 13 % en 2015

Les flux d’exportations de bateaux de plaisance sont très importants car ils intègrent la commercialisation des bateaux d’occasion sachant que la durée de vie d’un voilier ou d’un yacht à moteur peut atteindre couramment quarante ans. En France, le montant des exportations dépasse depuis quelques années d’environ 10 % la production sortant des entreprises. Pour l’Union européenne dans son ensemble, le montant des exportations représente 90 % du montant de la production. Les importations sont moins importantes. Pour la France, elles représentent 24 % de la production, et pour l’UE 35 %.

En 2015, les exportations françaises de voiliers et de yachts à moteur s’élèvent à 16 % des exportations des pays membres de l’Union européenne. L’Italie assure  29 % des exportations et l’Allemagne 21 %. Les exportations françaises sont réalisées au profit de clients situés en Europe, étendue au bassin méditerranéen : (58 % des exportations). Les pays de l’espace Amérique Caraïbes représentent le 2e marché avec 29 % des exportations suivis par l’espace Asie Pacifique (12 % des exportations). La société « Bénéteau » est devenu le premier exportateur mondial de voiliers en ayant acquis à elle seule de 20 % des parts de marché.

En France, 120 entreprises assurent la production de bateaux de plaisance. Le secteur est très concentré avec 6 entreprises réalisant près de 80 % de la production. Les établissements dont c’est l’activité principale sont essentiellement localisés dans l’ouest de la France. Les deux tiers sont implantés le long du littoral atlantique, depuis la Bretagne jusqu’à la côte aquitaine (132 des 196 établissements recensés en 2015). Ces établissements concentrent près de 90 % de l’emploi, avec 6 300 personnes employées sur un total de 7 000. La région Pays de la Loire est dominante, avec 3 800 personnes, suivie par la région Nouvelle-Aquitaine avec 1 900 personnes, 600 personnes étant employées dans la région Bretagne.

En élargissant aux sous-traitants, la filière nautique comprend 5.319 entreprises employant plus de 40 000 personnes. Le chiffre d’affaires total a atteint, en 2015, 4,5 milliards d’euros. Ce secteur peut s’appuyer sur 4 millions de plaisanciers réguliers, 9 millions de pratiquants occasionnels. Toujours en 2015, 11.757 nouvelles immatriculations de bateaux ont été enregistrées tout comme 63 569 mutations de propriété. La France possède plus de 400 ports de plaisance avec 252 000 places. Pour le stockage, plus de 40 ports à sec, avec 11 000 places, ont été dénombrés.

Les entreprises françaises ont su s’adapter à la demande, monter en gamme et innover. Une solidarité au sein de la filière leur a permis de surmonter les crises. La profession n’a pas craint lors de la crise de 2008 à diversifier ses activités. Ainsi, le groupe Bénéteau, avec l’appui des pouvoirs publics locaux, crée une filiale dédiée à la fabrication de maisons en ossature bois (filiale BH).