10 septembre 2016

C’est déjà hier (10 septembre 2016)

Avis de recherche pour croissance temporairement absente

Pas de panique mais une déception se fait jour concernant la reprise européenne. À la vue des premiers résultats du 3ème trimestre et des indices publics par Markit, la zone euro ne se dirige pas vers une récession. Toutefois, la reprise de 2015 générée par le trio baisse des taux, dépréciation de la monnaie et baisse du pétrole patine de plus en plus. L’auto-alimentation, espérée par certains, reste modérée.

L’indice PMI Markit composite définitif pour le mois d’août s’établit à 52,9, contre 53,2 en juillet. Ce niveau est le plus bas depuis celui de janvier 2015 mais l’indice reste au-dessus de la barre des 50 séparant croissance et contraction de l’activité, ce qui est le cas depuis maintenant plus de trois ans. « Si, dans son ensemble, il y a une sorte de stabilité à un niveau bas avec une croissance de 0,3 % (du produit intérieur brut (PIB) induite au troisième trimestre, les données révisées indiquent que l’économie est plutôt en train de perdre de l’élan que d’en gagner » a indiqué Chris Williamson, économiste en chef chez Markit.

La croissance du secteur privé de la zone euro est tombée, le mois dernier, à son rythme le plus faible depuis le début de l’année dernière, ce qui suggère que l’économie du bloc des 19 semble être en passe de perdre le peu d’élan qui la portait jusqu’ici.

Ce palier de croissance n’est pas sans lien avec le fait que les entreprises, malgré une hausse des coûts de production (en moyenne au sein de la zone euro), ont continué d’offrir des rabais sur leurs prix.

La mauvaise séquence française est-elle finie ?

La France, depuis 2013, fait moins bien que la zone euro. Elle est distancée en matière de croissance et de chômage par un grand nombre de pays dont l’Allemagne, l’Espagne et en dehors de la zone euro par le Royaume-Uni.

Depuis 2012, la croissance du PIB français a été inférieure à 4 %. Une grande partie de cette croissance a été assurée par la consommation, le reste étant réalisé par l’investissement et les dépenses d’administrations publiques. En revanche, lors  de ces quatre dernières années, le commerce extérieur a pesé sur la croissance.

Le secteur d’activité qui a été le plus pénalisé depuis 2012 a été la construction avec un recul de sa valeur ajoutée de 5,3 %. Il faut souligner que ce secteur avait connu une très forte croissance durant les sept premières années du siècle en relation avec l’appréciation des prix de l’immobilier. Contrairement aux idées reçues, la valeur ajoutée de l’industrie s’est accrue, entre 2012 et 2016, de 4 % ; celle des services marchands augmentant de son côté de 4,9 %.

La France a mieux résisté que ses partenaires à la Grande Récession et à la crise européenne jusqu’en 2013. Le poids important des dépenses publiques a amorti les effets de la crise. Moins exposée au commerce international, notre économie a moins été touchée par le recul de ce dernier.

En raison de la crise, la France comme ses partenaires a enregistré un accroissement important de son déficit public qui est passé de 2007 à 2009 de 2,5 à 7,2 % du PIB avant de revenir à 3,6 % en 2015. La dette publique s’est accrue de 30 points de PIB depuis 2007.

Pour contrecarrer la dérive des finances publiques, les pouvoirs publics ont tenté, à compter de 2010, de mettre en œuvre des programmes d’ajustement budgétaire. A la différence de nos voisins, la France a privilégié l’arme fiscale. Ce choix qui a été opéré entre 2010 et 2013 a fortement ralenti l’activité au moment même où l’économie européenne entrait en récession.

L’amélioration du solde structurel français est de près de 3 points entre 2010 et 2016 avec un effort concentré sur la période 2010/2013.

Entre les mesures adoptées sous la présidence de Nicolas Sarkozy et celles prises par les gouvernements de François Hollande, les prélèvements ont augmenté de plus de 52 milliards d’euros entre 2012 et 2013 dont 32 ont été supportés par les ménages et 16 par les entreprises. Les ménages ont dû faire face à une augmentation de l’impôt sur le revenu, de la TVA, de la CSG (règle d’assiette), des cotisations retraite, de l’ISF et de différentes taxes.

Face à la dégradation du taux de marge des entreprises, fin 2013, début 2014, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre une politique de l’offre en diminuant les charges et les impôts acquittés. Ainsi, depuis 2012, les entreprises auront bénéficié d’un allègement de leurs prélèvements évalué selon l’OFCE à 18,5 milliards d’euros. Les ménages, en revanche, ont continué, malgré les mesures de baisse de l’impôt sur le revenu mises en œuvre depuis 2014, à subir une hausse de leurs prélèvements (+15 milliards d’euros depuis 2014).

Cet accroissement des impôts, des cotisations et des taxes a conduit le taux de prélèvement obligatoire à atteindre un sommet historique en 2014 à 44,8 % du PI. Il est très légèrement redescendu en 2015 à 44,7 % du PIB.

La progression des dépenses publiques s’est fortement infléchie passant de 2 % (le taux moyen de 2000/2007) à 0,5 % par an. Ce freinage se fait néanmoins ressentir sur l’activité.

Le pouvoir d’achat des Français, en 2016, est, par ménage, inférieur de 350 euros à son niveau de 2010. Comme par ailleurs, ils ont maintenu voire accru leur effort d’épargne, la consommation a stagné depuis quatre ans. Une légère amélioration à compter de 2015 en raison de la chute des cours du pétrole.

De 2012 à 2016, selon l’OFCE, la France est avec l’Espagne le pays qui a le plus fortement ajusté à la baisse sa masse salariale. La rémunération du travail au sein du PIB s’est contractée de 1 point de PIB de 2012 à 2016.

Avec la mise en place du CICE et du pacte de responsabilité, les entreprises ont amélioré leur taux de marge à partir de 2014. Il est désormais revenu à son niveau du début des années 2000. L’amélioration a été sensible pour l’industrie qui a, en outre, bénéficié de la baisse de l’énergie et des matières premières.

Cette amélioration tardive du taux de marge n’a pas encore débouché sur un rattrapage au niveau de l’investissement et sur une augmentation de l’emploi. Depuis 2008, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de plus de 750 000. De 2012 à 2016, il s’est accru de près de 200 000. Entre les personnes figurant dans le halo du chômage et ceux en sous-emploi, plus de 6 millions de personnes se trouvent dans une situation fragile au regard du travail. En 4 ans, près de 450 000 personnes en plus sont dénombrées dans cette catégorie.

Si la France se démarque de l’Allemagne, du Royaume-Uni ou de l’Espagne, c’est qu’elle a tardé à réduire son déficit public et que son économie est plus dépendante des dépenses publiques. Les difficultés que les gouvernements rencontrent pour mettre en œuvre des réformes structurelles expliquent également le retard accumulé. Avec le retour du déficit autour de 3 % du PIB, avec la reprise de l’investissement, la France devrait revenir au taux moyen de la croissance de la zone euro. Les réductions de charges devraient produire tous leurs effets à compter de 2017 ce qui pourrait améliorer notre compétitivité-prix. Par ailleurs, le cycle de croissance à venir devrait reposer moins sur l’industrie et plus sur les services ce qui est censé avantager notre pays.

 La pierre, toujours la pierre !

Si sur le long terme, comme cela a été mentionné dans la lettre du 3 septembre dernier, les cours de l’immobilier sont amenés à s’orienter à la baisse, le niveau des taux d’intérêt et un effet de précaution relative incitent les Français à revenir à la pierre. De ce fait, les prix après une période de baisse entre 2012 et 2015 repartent légèrement à la hausse en ce qui concerne le résidentiel. Le commerce et le bureau premium sont, de leur côté, toujours très demandés par les institutionnels qui tentent de s’affranchir, à la marge, de la contrainte des taux bas.

Les emprunteurs bénéficient de taux de plus en plus bas. Ainsi au mois de juillet, les taux d’intérêt des crédits à l’habitat à long terme à taux fixe s’élevaient en moyenne à 1,78 % contre  1,85 % en juin.

Dans ces conditions, les crédits à l’habitat poursuivent leur hausse, +3,3 % en juillet dernier (variation de l’encours) comme au mois de juin.

L’investissement en habitat locatif progresse dans le contexte de taux financiers très bas et des mesures d’encouragement fiscal : 12 % des crédits nouveaux à l’habitat ont pour motif un investissement locatif contre moins de 10 % il y a un an.

Il convient néanmoins  de souligner que 44 % des nouveaux prêts à l’habitat ont été accordés dans le cadre de la renégociation d’anciens prêts. Les ménages en profitent pour réduire leurs mensualités ou pour réduire la durée de leur prêt.

Ce retour des particuliers sur le marché immobilier génère une petite hausse des prix. Selon l’indice Notaires-Insee communiqué jeudi 8 septembre, au deuxième trimestre 2016, les prix des logements anciens sont stables par rapport au premier trimestre 2016 (en données provisoires corrigées des variations saisonnières), après trois trimestres de légère hausse. Cette stabilité recouvre cependant des situations différentes : les prix des appartements augmentent (+0,5 %), tandis que ceux des maisons, plus erratiques, se replient légèrement (-0,3 %).

Pour le deuxième trimestre consécutif, les prix des logements anciens s’accroissent sur un an : +0,7 % par rapport au deuxième trimestre 2015. Cette légère reprise fait suite à une période d’érosion des prix depuis mi-2012. Elle concerne les maisons (+0,9 %) et aussi, pour la première fois depuis quatre ans, les appartements (+0,6 %).

Au deuxième trimestre 2016, les prix des logements anciens en Île-de-France augmentent pour le deuxième trimestre consécutif (+0,8 % par rapport au premier