22 juillet 2016

C’est déjà hier – 23 juillet 2016

Jusqu’à maintenant tout va bien… 

Le climat des affaires, au mois de juillet, en France s’améliore. L’indicateur qui le synthétise, calculé à partir des réponses des chefs d’entreprise des principaux secteurs d’activité, gagne deux points (à 102) et se situe légèrement au-dessus de son niveau moyen de long terme (100). Le climat gagne un point dans l’industrie et le bâtiment, deux points dans le commerce de gros et trois points dans le commerce de détail et les services. Le championnat d’Europe de football a favorisé l’activité tout comme les faibles taux d’intérêt. Il y a également un effet de rattrapage après les grèves de ces derniers mois. Néanmoins, le jugement des industriels sur leurs perspectives personnelles de production perd 6 points.

Les indices PMI de Markit (estimation flash) restent bien orientés. L’indice composite remonte à 50 (+0,4 point), porté par le secteur manufacturier comme par les services. Il faut souligner néanmoins que pour la zone euro, ces indicateurs sont en baisse.

Au Royaume-Uni, le climat des affaires a évidemment été touché par le résultat du référendum du 23 juin dernier. L’indicateur perd près de 5 points dans les services (à 47,4) et 3 points dans l’industrie (à 49,1). L’indice composite chute ainsi de 4,7 points, à 47,7.

 

Mais l’Europe se prépare à une croissance plus faible

A l’occasion de sa dernière réunion, sa BCE a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour 2017 et 2018.

Selon l’enquête de conjoncture de la Banque centrale, le produit intérieur brut (PIB) de la zone euro ne prévoit plus qu’une hausse de 1,4 % l’année prochaine contre 1,6 % attendu dans l’édition précédente de cette enquête. Pour 2018, l’estimation a été ramenée à 1,6 % contre 1,7 %. En revanche, pour 2015, la prévision reste fixée à 1,5 %.

Les prévisionnistes considèrent que le Brexit réduira en 2017 la croissance  européenne de 0,26 point de pourcentage en moyenne et l’inflation de 0,07 point.

La prévision de baisse de la croissance est liée à une diminution attendue des exportations vers la Grande-Bretagne qui seront pénalisées par la dépréciation de la livre sterling, ainsi que par l’incertitude sur la nature de la future relation entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne. La volatilité accrue des marchés financiers pourrait peser sur les investissements.

En matière d’inflation, les prévisionnistes tablent sur une hausse des prix de 1,2 % dans la zone euro l’an prochain, de 1,5 % en 2018 et de 1,8 % dans cinq ans, des chiffres inférieurs mais qui se rapprocheraient de la cible des 2 % fixée par la BCE.

 

Dette publique, la France 7ème sur 19 au sein de la zone euro

Avec une dette publique qui atteignait, au 1er trimestre de cette année, 97,5 % du PIB, la France se situe au 7ème rang des pays les plus endettés de la zone euro. Elle est devancée par la Grèce, l’Italie, le Portugal, Chypre, la Belgique et l’Espagne. Le niveau de l’endettement public de la France est nettement supérieur à la moyenne de la zone euro de l’Union européenne. En effet, à fin du premier trimestre, le ratio de la dette publique par rapport au PIB s’est établi à 91,7 % dans la zone euro et de 85,3 % au sein de l’Union européenne.

La France se démarque de la majorité des États membres par le fait que sa dette publique continue de progresser. Elle est passée en un an de 97,3 à 97,5 % du PIB quand celle de la zone euro est passée de 93,0 % à 91,7 %  et celle de l’UE de 88,1 % à 84,8 %.

Par rapport au premier trimestre 2015, treize États membres ont enregistré une hausse de leur ratio de dette publique par rapport au PIB à la fin du premier trimestre 2016, quatorze autres une baisse, tandis qu’il est resté stable en Italie. Les plus fortes hausses du ratio ont été enregistrées en Grèce (+5,8 pp), en Finlande (+3,7 pp), en Lettonie (+2,9 pp) ainsi qu’en Lituanie (+2,1 pp), tandis que les baisses les plus marquées ont été observées en Irlande (-16,7 pp), aux Pays-Bas (-4,3 pp), au Danemark (-4,1 pp) ainsi qu’en Allemagne, en Croatie et à Malte (-3,3 pp chacun).

La Turquie tourne-t-elle une page ?

La Turquie qui frappait à la porte de l’Union européenne semble, avec le coup d’État de la mi-juillet, tourner une page de son histoire.

Le coup d’État a-t-il été organisé, selon le pouvoir en place, par le prédicateur Fethullah Gülen, exilé aux États-Unis ? Ce dernier a démenti toute implication. Dans ces conditions, le coup d’État a-t-il été organisé ou par une branche kémaliste de l’armée qui ne supporte plus la dérive présidentialiste et islamique du régime ? Cette tentative a-t-elle été menée par une coalition hétéroclite d’opposants kémalistes, proches de Gülen… ; à moins que ce soit le Président Erdogan qui ait incité ou laissé faire le coup d’État pour asseoir son autorité….

La remise au pas est dans tous les cas rapide. Une grande opération de nettoyage a été menée au sein de toutes les grandes administrations l’armée, la justice mais aussi l’enseignement. 9 322 militaires, magistrats et policiers ont l’objet d’une procédure judiciaire. Le ministère de l’éducation turc a annoncé, mardi 19 juillet, la suspension de plus de 15 000 de ses employés soupçonnés d’être liés au prédicateur Fethullah Gülen, Plus de 1 500 recteurs et doyens d’université font l’objet d’une de demande de démission. Des journalistes ayant fait preuve de complaisance à l’égard de Gülen pourraient être suspendus voire poursuivis.

Cette crise politique de grande ampleur intervient au moment où la Turquie commençait à surmonter la crise de 2008 et celle de 2011/2012  malgré un contexte régional pesant. La croissance qui avait atteint près de 9 % avant la Grande Récession permettant à la Turquie d’intégrer le club des pays émergents voire celui des pays industrialisés, se situe désormais entre 2 et 4 %. L’activité de ce pays est très liée à celle de l’Union européenne.

Huitième puissance économique d’Europe avec un PIB de 718 milliards de dollars (juste devant la Suisse), la Turquie doit faire face à un déficit de sa balance des paiements, 4,5 % du PIB en 2015 et à une inflation qui atteint les 8 %. Le déficit de la seule balance commerciale s’élève à 6 % du PIB. Très dépendant de l’extérieur pour son énergie, le pays profite de la baisse des cours du pétrole mais elle ne permet pas à elle seule à rééquilibrer les comptes extérieurs.

La dette extérieure de la Turquie atteint plus de 400 milliards de dollars. Dans les douze mois à venir, le pays devra renouveler près la moitié de cette dette correspondant au quart de la richesse de ce pays. La Turquie a donc un impérieux besoin d’attirer des capitaux pour équilibrer sa balance des paiements courants. Avec le coup d’État et les investisseurs, déjà prudents en raison des crises précédentes, risquent de se faire plus rares.

Néanmoins, l’économie turque fait montre d’une certaine résistance. Au premier trimestre, en rythme annuel, selon l’OCDE, la croissance a atteint 4,8 %. Sa résilience repose en grande partie sur la vitalité de la consommation des ménages qui représente 68 % du PIB. Elle a progressé de 4,5 % en 2015 grâce notamment à l’augmentation de la population. La Turquie compte 78,7 millions d’habitants en 2015. L’arrivée de plus de 3 millions de réfugiés syriens et irakiens soutient également la consommation.

La vitalité de la consommation est en partie artificielle car elle est alimentée par la hausse des dépenses publiques. Le Président Erdogan a pris ces derniers mois des mesures augmentant les retraites et facilitant l’accès aux soins. Pour des raisons électorales, au début de l’année, le salaire minimum a été augmenté de 30 %. Du fait de cette couverture sociale, le pouvoir d’achat des Turcs est un des plus élevés par rapport à celui des autres habitants de pays émergents, à l’exception des Russes.

Les Turcs consomment beaucoup mais, revers de la médaille, épargnent trop peu. En tout cas pas suffisamment pour financer les investissements des entreprises. « Le pays est donc très dépendant des flux de capitaux étrangers », explique Sylvain Bellefontaine. C’est sur ce point que le putsch manqué présente un risque pour l’économie turque.

En raison d’un faible taux d’épargne, la Turquie dépend des capitaux extérieurs pour l’investissement. Le coup d’État manqué pourrait freiner les flux de capitaux. Néanmoins, dans un second temps, les investisseurs pourraient être rassurés par le fait que le pouvoir central ait réussi à déjouer ce putsch.

En revanche, les derniers évènements devraient peser sur l’activité touristique qui avait été déjà touchée par la multiplication des attentats, notamment contre les touristes (34 étrangers sont morts en Turquie en 2016) et la crise diplomatique avec la Russie (l’armée turque avait abattu un bombardier russe en novembre 2015). Le nombre de touristes internationaux était en baisse de plus d’un tiers ces derniers mois. Selon certains experts, le manque à gagner pour l’économie turque pourrait être de 10 milliards de dollars.

Avant même le putsch raté, l’OCDE, dans le cadre d’une étude publiée au mois de juillet, demande aux pouvoirs publics d’accélérer le processus de réformes et d’améliorer la gouvernance et l’état de droit. Elle souhaite également un accroissement de la  lutte contre la corruption. Elle préconise une réduction des obstacles à l’investissement direct étranger. Elle souhaite également une maitrise accrue du  crédit à la consommation et le développement des plans d’épargne-retraite privée.

Afin d’éviter des problèmes de liquidité, l’OCDE considère qu’il est urgent pour la Turquie d’augmenter ses réserves de change, de resserrer la politique monétaire, sauf si l’inflation recule plus vite que prévu. Elle préconise aussi une meilleure maîtrise des salaires.