30 avril 2016

C’est déjà hier (30 avril 2016)

La zone euro finit par étonner

Les pessimistes en sont pour leur grade. La croissance au cours du premier trimestre en zone euro a atteint 0,6 % marquant ainsi une accélération par  rapport à la fin de l’année dernière. Pour l’ensemble de l’Union européenne, la croissance du premier trimestre est estimée à 0,5% par rapport aux trois mois précédents et à 1,7% par rapport à janvier-mars 2015 selon Eurostat. La zone euro, trois ans après le Royaume-Uni et cinq ans après les Etats-Unis vient d’effacer l’impact de la crise de 2008/2009. Il y a presque de quoi sabrer le champagne…

 Le premier trimestre sourit à l’économie française

 Comme en 2015, la croissance démarre l’année sur les chapeaux de roue. En effet, au premier trimestre 2015, le PIB en volume a augmenté de 0,5 %, après +0,3 % au quatrième trimestre 2015.

Une croissance toujours en pointe

Cette croissance a été tirée par les dépenses de consommation des ménages qui ont augmenté de 1,2 % contre un recul de 0,1 % au dernier trimestre 2015. L’effet attentat s’est estompé et les Français ont repris le chemin des magasins. Plusieurs secteurs ont été dynamiques comme l’automobile et l’électroménager (achat de télévision en raison du passage à la haute-définition, de l’Euro 2016 et des JO de Rio).

Investissement positif pour les entreprises mais toujours négatif pour les ménages

L’investissement des entreprises est en progrès profitant des faibles taux d’intérêt. Il augmente de 0,9 % après 0,7 % au dernier trimestre 2015. Ce résultat est important car il témoigne de la confiance restaurée des chefs d’entreprise. Il pourrait déboucher sur une fortification de la croissance dans les prochains mois.

L’investissement des ménages est, en revanche, toujours en baisse malgré quelques signes positifs sur le marché de la construction. Il a reculé de 0,2 % au premier trimestre 2016. Certes, la baisse est en régression par rapport aux trimestres précédents. Elle avait atteint 0,9 % au quatrième trimestre 2015.

Le commerce extérieur le maillon faible

Le commerce extérieur continue à être un point noir pour l’économie française. Les exportations se sont contractées de 0,2 % au premier trimestre quand les importations ont progressé de 0,5 %. Certes, il y a une nette décélération des importations qui avaient cru de 2,1 % au 4ème trimestre 2015. Néanmoins, le commerce extérieur a contribué négativement à la croissance de 0,2 point. La France souffre comme tous ses partenaires du ralentissement du commerce international et des pays émergents.

Les variations de stock ont, par ailleurs, contribué négativement à hauteur de 0,2 point contre un apport positif de 0,5 point au 4ème trimestre 2015.

La croissance française qui repose fortement sur la consommation engrange toujours les effets de la baisse du pétrole qui a contribué à améliorer le pouvoir d’achat des ménages. Il est à noter que ces derniers ont au cours du dernier trimestre 2015 accru de manière significative leur effort d’épargne qui est passé de 15,4 à 15,9 % du revenu disponible brut. Le taux d’épargne financière a atteint un sommet à 7,1 %. Il est possible qu’au cours du premier trimestre 2016, les ménages aient utilisé une partie de cette épargne dont une partie non négligeable a été laissée sur les comptes courants pour réaliser des dépenses de consommation.

Compte tenu de l’acquis de croissance, 1 %, l’objectif de 1,5 % fixé par le Gouvernement n’apparaît pas inatteignable. Certes, il convient d’être prudent au regard de la situation économique internationale. La France résiste mieux que l’Allemagne, par exemple, quand le commerce international ralentit. Néanmoins, nous serons impactés si ce ralentissement se poursuit sur l’ensemble de l’année. Il est à noter que la Commission européenne et le FMI sont plus prudents que le Gouvernement en matière de prévision de croissance pour la France en ayant retenu respectivement 1,3 et 1,1 % comme taux de croissance.

Ce bon résultat qui s’accompagne d’une décrue du chômage en mars ne doit pas masquer certaines réalités. La France fait moins bien que la moyenne de la zone euro qui est à 0,6 %. La production industrielle patine. Elle est en recul sur le dernier trimestre et est loin d’avoir retrouvé son niveau d’avant crise. Par ailleurs, la confiance des ménages est sur un plateau depuis plusieurs mois traduisant un état d’esprit attentiste.

 France, un souffle d’optimisme pour l’emploi

Le nombre de demandeurs a reculé de 60 000, en mars, soit une baisse de 1,7 %. Sur les trois premiers mois de l’année, la diminution atteint 1,4 %. Néanmoins, sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi est toujours en hausse de 0,5 %. La France figure toujours parmi les mauvais élèves de l’Union européenne et de la zone euro. En un an, le taux de chômage a diminué de 0,8 point quand il est stable en France (selon les statistiques d’Eurostat qui diffèrent de celles de Pôle Emploi).

La France métropolitaine comptait, à fin mars, 3 531 000 demandeurs d’emploi. Au début du quinquennat de François Hollande, le nombre de demandeurs était de 2 922 800 (mai 2012). En quatre ans, le nombre de demandeurs d’emploi s’est accru de 20 %.

La bonne nouvelle du mois de mars provient du fait que le chômage baisse pour tous les âges, chez les jeunes de moins de 25 ans comme pour les plus de 50 ans et les 25-50 ans. Sur un an, en revanche, la situation des seniors s’est fortement dégradée : hausse de 6,5 % du chômage contre une baisse de 6,4 % chez les moins de 25 ans.

Le bon résultat du mois de mars repose sur un déplacement de demandeurs d’emploi de la catégorie A vers les catégories B et C. Le nombre de demandeurs d’emploi en catégories B (moins de 78 heures de travail par mois) et C (plus de 78 heures de travail par mois) augmentent de 2,5 % au mois de mars. De nombreux chômeurs retrouvent un emploi à temps partiel ou en intérim tout en continuant à rechercher un contrat moins précaire. L’intérim et le travail à temps partiels se développent sans pour autant, du moins pour le moment, s’accompagner d’un fort volant de création de CDI à temps complet. Par ailleurs, le nombre de radiations reste important. Les sorties pour défaut d’actualisation sont au plus haut sur ces dix dernières année (près de 230 000 sur trois mois). La multiplication des radiations témoigne sans nul doute d’un meilleur contrôle de la part de Pôle Emploi ; par ailleurs, des demandeurs d’emploi peuvent négliger d’effectuer leur déclaration du fait qu’ils ont repris un emploi. Mais, un certain nombre renoncent également à effectuer ses démarches officielles par abandon ou du fait qu’ils sont arrivés en fin de droit.

Il est à noter que si, sur un mois, la durée moyenne du chômage baisse de 8 jours (catégories A, B et C) mais elle est en augmentation de 20 jours sur un an en France métropolitaine.

Au-delà de l’effet radiation, la petite embellie de l’emploi au cours du premier trimestre 2016 est imputable à l’amélioration de la conjoncture. La consommation a connu deux bons premiers mois de l’année et le climat des affaires reste globalement bon voire en progrès pour le secteur du bâtiment et de la construction. Il convient néanmoins de souligner que la production industrielle a été en recul assez net en février (-0,9 %).

 Les États-Unis n’aiment pas vraiment l’hiver

Le premier trimestre est moins bon que prévu mais n’a pas été, pour autant, catastrophique.

Le Produit intérieur brut (PIB) américain n’a progressé que de 0,5 % de janvier à mars, en rythme annualisé et données corrigées des variations saisonnières. Il s’agit de la plus faible expansion depuis l’hiver 2014 qui s’était traduite par une contraction.

Ce chiffre a déçu les analystes qui espéraient une croissance de 0,9 %, après une croissance modérée de 1,4 % au dernier trimestre 2015.

« Le ralentissement de la croissance reflète une chute plus prononcée des investissements non résidentiels, une décélération des dépenses de consommation, un recul des dépenses fédérales et des importations devenues positives », a souligné le gouvernement.

Les dépenses des consommateurs n’ont augmenté que de 1,9 % soit leur plus faible progression depuis le 1er trimestre 2015. La baisse ou la faible augmentation des prix expliquent ce résultat.

La chute des investissements des entreprises qui a atteint 5,9 %, était en partie attendue mais peut-être pas à ce niveau. Cette contraction est la plus forte enregistrée depuis le 2ème trimestre 2009, en pleine récession. C’est évidemment l’industrie extractive qui est à l’origine de ce recul. La baisse de l’investissement atteint 86 % pour ce secteur, baisse sans précédent. Une telle baisse devrait se faire ressentir dans la production américaine de pétrole et de gaz à la fin de l’année 2016 et en 2017.

Toujours en raison du dollar fort mais aussi en raison du ralentissement des pays émergents (la Chine mais aussi l’Amérique Latine et tout particulièrement le Brésil), les exportations ont poursuivi leur retrait (-2,6%) ; les importations ont légèrement progressé (+0,2%). Le commerce extérieur a donc contribué négativement à la croissance.

Par ailleurs, toujours dans le cadre du plan d’assainissement des comptes publics, en ce début d’année, les dépenses de l’État fédéral ont enregistré une baisse de 1,6 %.

Malgré ces points négatifs, il est à noter que le marché immobilier, à travers les dépenses résidentielles, a enregistré une progression de 14,8 % soit le rythme de croissance le plus fort depuis la fin 2012.

La croissance du 1er trimestre est de moins en moins représentative de la croissance annuelle aux États-Unis, même si cette année le climat a été plus clément qu’en 2014 et qu’en 2015. Il ne faut pas extrapoler le résultat de ce premier trimestre qui est très marqué par les problèmes que rencontre le secteur énergétique en raison de la chute du prix du pétrole. Malgré l’échec de la conférence de Doha, les producteurs de pétrole semblent vouloir stabiliser le marché. Les problèmes de plusieurs pays de l’OPEP alliés de l’Arabie Saoudite devraient conduire cette dernière à assouplir sa position maximaliste vis-à-vis de l’Iran.

La Fed joue la montre

Sans trop de surprise, la Réserve fédérale américaine a décidé de maintenir inchangé ses taux tout en déclarant  que la porte était ouverte à une hausse pour le mois de juin. Ainsi après deux jours de débat, le comité de politique monétaire (FOMC) de la Fed a conservé la fourchette de 0,25 % à 0,50 % pour son principal taux, fourchette qui date du mois de décembre. Elle a donc décidé de temporiser après ce relèvement de taux qui était le premier depuis près de dix ans.

Le FOMC a souligné dans son communiqué que l’amélioration du marché du travail se poursuit en dépit du récent ralentissement de la croissance et qu’il continue de surveiller l’évolution des prix. Le FOMC se déclare attentif aux facteurs défavorables liés à la situation économique et financière internationale. Dans le communiqué, le mot « risque », lié à ces facteurs a disparu, traduisant un léger retour de l’optimisme. L’amélioration depuis plus d’un mois des marchés financiers et une certaine banalisation du ralentissement économique chinois ont sans nul doute conduit à cette révision lexicologique.

La prudence de la FED n’est pas sans lien avec les résultats de la croissance qui, sans être catastrophiques, soulignent que l’économie américaine doit faire face à des vents contraires.

 La croissance retient son souffle au Royaume-Uni

Cela avait été prédit mais cela se concrétise, la campagne pour le référendum du 23 juin prochain tend à refroidir la croissance britannique. Le taux de croissance n’a été que de 0,4 % au premier trimestre de 2016 par rapport au précédent, selon l’Office des statistiques nationales (ONS) britannique. Ces chiffres, conformes aux attentes des économistes, marquent néanmoins un ralentissement car, au dernier trimestre 2015, le PIB s’était accru de 0,6 %.

 

Dans un rapport présenté à Londres, l’OCDE souligne qu’un éventuel Brexit « conduirait à un choc négatif majeur pour l’économie du pays et aurait des incidences pour tous les membres de l’OCDE, en particulier en Europe ».

Selon les calculs de l’OCDE, le PIB serait 3 % plus faible d’ici 2020 en cas de sortie de l’Union comparé au scénario d’un maintien. Le manque à gagner par ménage britannique serait de 2.250 livres (2.900 euros). Avec le temps, le manque à gagner augmenterait ; ainsi, en 2030, le PIB serait inférieur de plus de 5 % comparé au statu quo et les ménages seraient privés de 3.200 livres. Ce choc sur le niveau de vie des foyers britanniques reviendrait, dans les faits, à un « impôt Brexit » permanent prélevé sur les ménages, indique l’OCDE

Sur le court terme, l’économie « serait affectée par le durcissement des conditions financières et l’affaiblissement de la confiance » puis « par le relèvement des obstacles aux échanges et les conséquences précoces des limitations à la mobilité de la main-d’œuvre ». A plus long terme, le Royaume-Uni serait pénalisé au niveau des capitaux, de l’immigration et du progrès technique. La moindre exposition à la concurrence réduirait les gains de productivité tout comme le ralentissement des échanges.

 

L’arrêt du financement du budget de l’Union européenne ne serait pas une bonne affaire pour le Royaume-Uni. En effet, le gain de 0,3 % à 0,4 % du PIB par an avec l’annulation des transferts nets vers le budget de l’UE serait plus qu’effacé par l’impact de la moindre progression du PIB. Le déficit budgétaire augmenterait de 0,9 point de pourcentage de PIB d’ici 2019 en cas de sortie.