3 avril 2020

Le Coin de la Conjoncture

L’économie française touchée mais pas coulée

L’INSEE a publié son enquête de conjoncture du mois de mars qui a été réalisée du 26 février au 23 mars. Elle inclut donc en partie la phase de confinement du pays. L’institut statistique a précisé qu’à partir du 14 mars, les réponses « papier » n’ont pas été gérées.

Selon les données recueillies, le climat des affaires a perdu 10 points, à 95. Il s’agit de la plus forte baisse mensuelle de l’indicateur depuis le début de la série (1980). En octobre 2008, après la faillite de Lehman Brothers, l’indicateur avait chuté de 9 points. L’indicateur de climat de l’emploi connaît également sa plus forte chute depuis le début de la série (1991). Il perd 9 points et atteint 96.

Cercle de l’Épargne – données INSEE

Au niveau sectoriel, les indicateurs de climat des affaires se dégradent considérablement dans les services (-14 points) et dans le commerce de détail (-13 points). Ils se détériorent également dans le commerce de gros (-5 points) et dans l’industrie (-3 p

Au niveau sectoriel, les indicateurs de climat des affaires se dégradent considérablement dans les services (-14 points) et dans le commerce de détail (-13 points). Ils se détériorent également dans le commerce de gros (-5 points) et dans l’industrie (-3 points).

Sans surprise, les perspectives générales d’activité dans chaque secteur sont en forte baisse, -15 points dans les services, -25 points dans le commerce de détail, -33 points dans l’industrie et dans le commerce de gros.

Pour l’INSEE, les indicateurs concernent le climat des affaires dans l’industrie du bâtiment qui ressortent stables, reflètent la situation au début du mois de mars.

En fonction des données en sa possession fin mars, l’INSEE estime que la perte d’activité économique atteint 35 % par rapport à une situation normale.

La France se distingue par le poids très important du secteur tertiaire et par celui des dépenses publiques. Si au niveau des services, le confinement a entraîné l’arrêt des activités liées au tourisme, aux transports et aux loisirs, il a un effet moindre sur les secteurs des télécommunications ou de la finance. A la fin mars, l’industrie française ne fonctionnerait qu’à 50 %. En particulier, les entreprises de l’automobile qui sont à l’arrêt (PSA, Renault, Michelin). En revanche, l’industrie agro-alimentaire maintient, pour le moment, ses niveaux de production. La production agricole n’a pas connu une forte variation mais ce résultat n’est pas significatif étant donné que nous sortons de l’hiver. Le secteur de la construction est très touché à la fois par l’absence de personnel mais aussi par les ruptures de stock.

En France, les dépenses publiques, notamment sociales, devraient jouer, comme en 2008, un rôle d’amortisseur important. La réduction de certaines activités non-marchandes comme les crèches, les garderies, les bibliothèques, les centres sportifs, ponctionnera le PIB.

Le niveau de la consommation des ménages serait également inférieur de 35 % à la « normale ». Les chutes les plus importantes concernent les dépenses en biens industriels. Les achats de textile auraient baissé de 90 à 100 %. Il en est de même pour les voitures.

La consommation de services marchands s’est contractée de 33 %, contribuant à la baisse totale de la consommation à hauteur de 15 points. Avec la fermeture des cafés et restaurants, la consommation en la matière a quasiment disparu. La consommation de services non marchands baisserait de 34 %, contribuant à hauteur de 2 points à la baisse d’ensemble. Du fait de la suspension des travaux de rénovation, la consommation des ménages dans la branche de la construction baisserait de 90 %, contribuant à une baisse de 1 point de la consommation totale des ménages.

Les secteurs enregistrant des hausses sont ceux de l’eau et de l’industrie pharmaceutique. La consommation des ménages en produits agricoles et agro-alimentaires augmenterait de 6 %. Les ménages, en raison du confinement, s’alimentent à domicile.

Les services immobiliers se maintiendraient en raison du caractère récurrent du versement des loyers.

L’INSEE évalue la perte de PIB pour un mois de confinement à 12 points en rythme trimestriel entraînant une perte de 3 points sur l’année, sous réserve d’un rebond rapide. Les modalités de sortie de la crise sanitaire, la nature des plans de soutien et le niveau de confiance de la population sont autant de facteurs cruciaux pour l’évolution de la croissance dans les prochains mois.

Durée de confinement Effet sur le PIB trimestriel Effet sur le PIB annuel
Un mois -12 -3
Deux mois -24 -6

Source : INSEE

Une dégradation sans précédent dans l’ensemble de la zone euro

Selon l’institut IHS Markit, l’activité s’est arrêtée d’un coup dans la zone euro. L’indice flash PMI composite des directeurs d’achats, synthèse entre les secteurs manufacturier et des services, a baissé à 31,4 en mars, son plus bas historique, après 51,6 en février. Les mesures de soutien n’ont pas empêché cette chute qui est imputable aux fermetures d’usine et au confinement croissant de la population.

Cette contraction est supérieure à celle observée au moment de la crise financière. Selon le chef économiste chez IHS Markit, la diminution du PIB en rythme trimestriel serait d’au moins 2 %. Cette évaluation n’est qu’un point d’étape. La baisse pourrait être bien plus importante en fonction de l’évolution de la crise sanitaire.

Début mars, la confiance fragilisée des Français

L’INSEE a réalisé son enquête mensuelle sur le niveau de confiance des ménages du 26 février au 17 mars. Les résultats reflètent l’état d’esprit des Français juste avant le confinement. À mi-mars, la confiance des ménages dans la situation économique était en baisse tout en restant au-dessus de sa moyenne de longue période. L’inquiétude dans l’avenir était néanmoins en augmentation. Ainsi, la proportion de ménages estimant qu’il est opportun de faire des achats importants diminuait fortement par rapport au mois précédent. Le solde correspondant a perdu sept points et bascule en dessous de sa moyenne de longue période.

Le solde d’opinion des ménages quant à leur situation financière future a diminué de deux points et est repassé en dessous de sa moyenne de longue période. Malgré tout, le solde relatif à leur situation financière passée a gagné deux points et se maintenait au-dessus de sa moyenne de longue période.

Début mars, le solde d’opinion des ménages sur leur capacité d’épargne future était en augmentation et restait au-dessus de sa moyenne de longue période. Le solde d’opinion des ménages sur leur capacité d’épargne actuelle avait gagné un point et demeurait également au-dessus de sa moyenne de longue période. La part des ménages estimant qu’il était opportun d’épargner était en progression.

Concernant l’évolution du niveau de vie, les Français étaient plus pessimistes au début du mois de mars qu’en février. En revanche, la part des ménages qui considèrent que le niveau de vie en France s’est amélioré au cours des douze derniers mois était en augmentation. Avant même l’annonce du confinement, les craintes des ménages concernant l’évolution du chômage étaient en très forte augmentation, +22 points. Enfin, début mars, les ménages estimant que les prix vont augmenter au cours des douze prochains mois étaient nettement plus nombreux que le mois précédent.

L’enquête du mois d’avril prendra en compte la période du confinement qui s’est traduit par le développement du chômage partiel, plus de 1,6 million de personnes concernées (26 mars). Les jugements des Français devraient être tout autre que ce soit sur l’évolution du niveau de vie et de l’épargne.