30 mai 2020

C’est déjà hier

Sur fond de CDD et de missions d’intérim, envolée du chômage

Avec le confinement total du mois d’avril, le nombre de demandeurs d’emploi inscrits en catégorie A à Pôle Emploi a connu une progression sans précédent, +843 000 faisant suite à une hausse de +246 000 en mars. Depuis la création des données statistiques sur le nombre de demandeurs d’emploi, jamais une telle hausse n’avait été enregistrée. Le nombre d’inscrits atteint le nombre record de 4,575 millions. Sur trois mois, 1 065 200 demandeurs d’emploi supplémentaires ont été comptabilisés. L’augmentation est en grande partie imputable au basculement des demandeurs d’emplois des catégories B et C, en activité réduite vers la catégorie A (personne sans emploi, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi, à la recherche d’un emploi quel que soit le type de contrat).

Au total, l’effectif des catégories A, B, C s’accroît de 209 300 au mois d’avril (soit +3,6 %). Les entrées à Pôle emploi sont en retrait de 19,1 % en avril avec les restrictions de circulation et le placement en chômage partie d’une grande partie de la population active. Les sorties de Pôle Emploi sont naturellement en net retrait (-34,9 %). Le gonflement du nombre d’inscrits est également lié à la réduction des radiations compte tenu des consignes de mansuétude données par les pouvoirs publics.

Cercle de l’Epargne – données DARES

La hausse ce mois-ci concerne toutes les tranches d’âge : les moins de 25 ans (+149 800, soit +29,4 %), les 25-49 ans (+530 000, soit +24,0 %) et les 50 ans ou plus (+163 200, soit +16,1 %). Elle est par ailleurs plus forte chez les hommes (+480 300, soit +25,2 %) que chez les femmes (+362 700, soit +19,8 %). Elle concerne toutes les régions de France, les départements et régions d’Outremer (Drom) étant toutefois un peu moins touchés.

Progression du nombre d’inscrits à Pôle Emploi catégorie A en %

Les mauvais résultats du mois d’avril sont avant tout les conséquences des fins CDD et des missions d’intérim. Près de 140 000 personnes au terme de leur CDD se sont inscrites tout comme 80 000 personnes qui ont achevé une mission d’intérim. Le nombre d’inscrits à Pôle Emploi devrait, en mai, continuer d’augmenter avec la poursuite de la purge des CDD et de l’intérim. La hausse devrait être néanmoins plus faible. La montée des licenciements économiques ne devrait se faire sentir qu’à partir de juin et à la rentrée de septembre en fonction de l’état de la reprise économique.

La consommation en chute libre en avril

L’ensemble des ménages ayant été confinés durant la totalité du mois d’avril, la consommation a connu une chute sans précédent depuis l’établissement de la série statistique par l’INSEE. Elle a baissé de 20,2 % par rapport à mars qui s’était déjà caractérisé par une contraction de 16,9 %. Le mois d’avril 2020 restera dans les annales du fait que dans son intégralité il aura été placé sous le confinement.

La consommation de biens fabriqués s’est contractée de 42,6 % après –42,1 % en mars. La consommation de matériels de transport a baissé de 36,4 %, du fait de la fermeture des concessions automobiles. Les dépenses d’équipement du logement diminuent également, en particulier les ventes de meubles et d’appareils électroménagers. Les achats de lunettes sont en forte baisse. Les achats d’habillement-textile ont connu une contraction de 67,4 %

Les dépenses alimentaires ont régressé de 5,4 % après avoir connu une progression de 9,2 % en mars qui avait été marqué par la constitution de stocks de précaution.

Avec les restrictions de circulation et les conditions climatiques plutôt favorables, les dépenses en énergie ont enregistré un repli de 22,8 % après une baisse en mars de 10,2 %.

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Poursuite de la baisse de l’inflation en mai

Selon l’INSEE, sur un an, les prix à la consommation augmenteraient de 0,2 % en mai, après +0,3 % le mois précédent. Cette baisse de l’inflation résulterait d’un recul accentué des prix de l’énergie et des produits manufacturés et d’un ralentissement des prix de l’alimentation après la hausse intervenue en avril. En revanche, les prix des services et du tabac accéléreraient sur un an.

Sur un mois, les prix à la consommation seraient stables, comme le mois précédent. Les prix de l’alimentation seraient nettement moins dynamiques que le mois précédent, en lien notamment avec le ralentissement de ceux des produits frais. Les prix des produits manufacturés reculeraient à peine. En revanche, la baisse des prix de l’énergie serait moins prononcée que le mois précédent. Les prix des services et du tabac augmenteraient, après une stabilité en avril.

Sur un an, l’indice des prix à la consommation harmonisé ralentirait à +0,2 %, après +0,4 % en avril. Sur un mois, il serait stable, comme le mois précédent.

Pour l’ensemble de la zone euro, en mai, le taux d’inflation annuel a été, estimé, pat Eurostat, à 0,1 %, contre 0,3 % en avril. S’agissant des principales composantes de l’inflation de la zone euro, l’alimentation, alcool & tabac devrait connaître le taux annuel le plus élevé en mai (3,3 %), suivie des services (1,3 %) et des biens industriels hors énergie (0,2 %). Les prix de l’énergie ont, de leur côté, baissé de 12,0 %.

Le taux d’épargne en pleine ascension au 1er trimestre 2020

En raison du confinement qui a été mis en place mi-mars et de l’anxiété générée par la situation économique, les ménages ont augmenté leur taux d’épargne au cours du premier trimestre. Il a atteint 19,6 % du revenu disponible brut contre 15,1 % au dernier trimestre 2019. Le taux d’épargne financière est passé de 4,6 à 10,4 % du revenu disponible brut sur la même période.

Cette augmentation sans précédent du taux d’épargne est la conséquence d’une forte baisse de la consommation, -5,6 % sur le premier trimestre, et du maintien du revenu disponible brut des ménages. Celui n’a diminué que de 0,1 % au premier trimestre après avoir enregistré une augmentation de 0,9 % au dernier trimestre 2019. Avec le recours au dispositif d’activité partielle, la masse salariale reçue par les ménages est, en revanche, en baisse de 1,8 % après une augmentation de 0,7 %. A contrario, les prestations sociales en espèces sont en hausse de 2,8 % après +0,4 %.

Au total, la baisse du pouvoir d’achat reste très limitée (–0,4 % après +0,7 %) étant donné le choc économique subi. Mesuré par unité de consommation pour être ramené à un niveau individuel, le pouvoir d’achat baisse de –0,5 % (après +0,5 %).

La gestion complexe du dégonflement de l’épargne des ménages

La réduction de la poche de l’épargne de précaution constituée durant les deux mois de confinement sera progressive. Le retour à la normale des dépenses de consommation y aidera mais il est fort  probable que le taux d’épargne reste élevé. Les mauvaises nouvelles sur le front économique et surtout de l’emploi incitent les ménages à conserver un volant important d’épargne. A chaque crise, l’encours de l’épargne liquide augmente sans retrouver son niveau initial durant la période de croissance qui suit. La succession de crises depuis une trentaine d’années contribue à cet effet cliquet, aidé en outre par le vieillissement de la population.

Le taux d’épargne avait, avant même la crise sanitaire, tendance à augmenter en France comme au sein des autres pays de l’OCDE. Au point de dépasser l’investissement privé de deux points de PIB. Les dépôts à vue, les livrets bancaires et le numéraire des ménages ne cessent d’augmenter. Au sein des pays occidentaux, ils représentent désormais 95 % du PIB contre 65 % en 2002. Cet excédent d’épargne profite aux Etats qui peuvent s’endetter à bon prix. De 2002 à 2020, l’encours d’obligations publiques détenu par les ménages et les investisseurs institutionnels est passé de 45 à 56 % du PIB au sein de l’OCDE. Le recyclage de l’épargne passe de plus en plus par la dette publique même si les pouvoirs publics multiplient les annonces en faveur de réorientation au profit des entreprises.

La production industrielle française, mise à la cape en mars

Au mois de mars, le chiffre d’affaires s’est contracté de 14,6 % après une baisse de 0,2 % en février. Pour l’ensemble de l’industrie, la baissa a atteint 13,0 %. Ce résultat traduit l’impact du confinement intervenu au milieu du mois de mars.

Le chiffre d’affaires a diminué de 20 % dans les matériels de transport. Pour le seul secteur automobile, la contraction est de 41,3 % après –0,3 %. Il diminue également fortement dans les biens d’équipement (–16,5 % après –2,5 %) avec une baisse nettement plus modérée dans les produits informatiques, électroniques et optiques (–1,3 % après –7,7 %). Le chiffre d’affaires diminue moins fortement dans les industries agricoles et alimentaires (–3,7 % après –0,7 %) et l’énergie (-5,5 % après -2,8%) mais chute dans la cokéfaction et raffinage (–24,2 % après –0,4 %).