23 janvier 2016

C’est déjà hier !

Chine, quand l’Empire du milieu cherche sa voie

La croissance de la Chine, en 2015, a été de 6,9 % soit la plus faible de ces vingt-cinq dernières années. La publication des résultats de la croissance de l’année dernière a donné lieu à de nouvelles interrogations sur la fiabilité des statistiques économiques chinoises.

La première interrogation provient de la capacité des autorités chinoises à établir des statistiques fiables moins de trois semaines après la fin de l’année, statistiques qui sont censées refléter l’activité de 1,3 milliard d’habitants. Les pays membres de l’OCDE mettent, en moyenne entre 4 et 6 semaines, pour les réaliser avec, en outre, plusieurs révisions.

Les collectes de données sont effectuées sur des échantillons qui ne sont pas suffisamment représentatifs. De plus, certains secteurs ne sont que partiellement comptabilisés. Pour la vente au détail, seule la restauration serait prise en compte.

Le taux de croissance, en Chine, est éminemment politique. Les pouvoirs publics ont longtemps considéré que le taux de 8 % était le bon taux. De ce fait, afficher un taux trop faible pourrait traduire un échec du Gouvernement à maintenir l’activité. Le ralentissement en cours, au regard des statistiques des importations, de la consommation énergétique et des photographies satellitaires sur les activités portuaires, serait intervenu dès 2014 et de manière plus violente que ce que les statistiques semblent vouloir indiquer. Pour 2015, plusieurs analystes évoquent un taux réel de croissance autour des  de 3 %. Une division par deux du taux de croissance chinois n’est pas sans incidence car cela correspond, par exemple, à la production d’une année de la Turquie.

Il y a au moins un consensus sur le fait que la croissance chinoise ralentit. En 2016, en version chiffres officiels, elle pourrait n’être que de 6,3 %. La tertiarisation de l’économie et la moindre croissance des exportations de biens industrielles expliquent cette évolution. La Chine se banalise avec des coûts salariaux en hausse et des gains de productivité moins importants. Les sorties de capitaux sont la conséquence de la réduction de la rentabilité des investissements, des doutes sur la solidité de certains établissements financiers, de la multiplication des délocalisations et des menaces de dévaluation de la monnaie. Les autorités chinoises sont prises entre deux feux, accepter le mouvement de fond ou tenter de sauver un minimum de croissance au prix d’une fuite en avant avec un contrôle des capitaux et une dévaluation du yuan. En 2015, la Banque centrale a perdu 13 % de ses réserves de change qui demeurent néanmoins conséquentes (plus de 3 300 milliards de dollars). Les autorités doivent également suivre la montée en puissance des dettes des entreprises qui représentaient plus de 165 % du PIB à la fin de l’année 2015 contre 100 % du PIB à fin 2008. Pour éviter un blocage financier et afin que les banques puissent prêter à moindres coûts, la Banque centrale a réduit les coefficients de réserves obligatoires qu’elles doivent respecter ainsi que les taux d’intérêt de référence (de 6 à 4,35 %). Une action en faveur de l’investissement des collectivités locales est également prévue.

 

Le FMI et de nombreux experts broient du noir !

Sur fond de pétrole de plus en plus bon marché, la tendance est au pessimisme au FMI comme à Davos. Les prévisions de croissance sont revues à la baisse. Certains annoncent l’arrivée d’une récession, d’un retournement économique aux Etats-Unis d’autres la survenue d’une crise financière d’une ampleur au moins comparable à celle de 2008/2009.

 Le FMI a révisé à la baisse ses précédentes prévisions.

Le FMI prend acte que les pays avancés ne connaîtront qu’une reprise modeste quand les pays émergents et en développement éprouveront des difficultés à rebondir.

En 2016, la croissance mondiale serait de 3,4 % pour le FMI et de 3,6 % en 2017. Ces taux peuvent apparaître encore bien optimistes au vu des résultats de ces derniers mois. Maurice Obstfeld, le conseiller économique et Directeur du Département des études du FMI, reste de toute façon très prudent en soulignant que « l’année qui commence sera marquée par de redoutables défis et les gouvernants devront porter leur attention sur la résilience à court terme et les moyens de la renforcer, sans perdre de vue les perspectives de croissance à plus long terme ».

La croissance des pays avancés devrait atteindre à 2,1 % et se maintenir en 2017, soit un rebond un peu plus timide que celui prévu en octobre 2015. Le FMI reste relativement optimiste pour l’économie américaine qui sera portée par des conditions financières restant globalement accommodantes. La bonne tenue des marchés du logement et du travail constitue un élément positif. Néanmoins, l’organisation internationale a abaissé la croissance des Etats-Unis de 0,2 point tant en 2016 qu’en 2017. Le PIB augmenterait de 2,6 points pour chacune de ces deux années. Elle s’inquiète, en revanche, des difficultés que pourraient entraîner l’appréciation du dollar.

Dans la zone euro, l’augmentation de la consommation privée attribuable à la baisse des prix du pétrole et aux conditions financières accommodantes devrait plus que  compenser le fléchissement des exportations. En 2016 et 2017, le taux de croissance serait de 1,7 %. Le FMI a néanmoins abaissé la croissance de la France de 0,2 et 0,1 point respectivement pour 2016 et 2017. La croissance est ainsi ramenée à 1,3 et à 1,5 %. En revanche, l’organisation internationale a relevé la croissance allemande de 0,1 et de 0,2 point l’amenant à 1,7 % tant en 2016 et 2017.

Au Japon, la croissance serait de retour, mais toujours à petite vitesse grâce au pétrole et grâce à la politique monétaire accommodante. Le PIB augmenterait cette année de 1 % et de 0,3 % en 2017.

La situation des pays émergents et des pays en développement ne devrait que faiblement s’améliorer en 2016. La croissance de ces pays qui a été, en 2015, la plus basse enregistrée depuis la crise de 2008-2009, à 4 %, devrait passer à 4,3 % en 2016 et à 4,7 % en 2017.

Ce chiffre global est peu significatif tant les écarts sont importants au sein des pays émergents. Le Brésil devrait toujours être en récession comme la Russie, du moins pour le premier semestre, quand l’Inde devrait devenir la nouvelle référence en matière de croissance.

Le FMI a établi un catalogue des risques qui pourraient remettre en cause ses prévisions. Figurent dans cette longue liste, la poursuite du ralentissement chinois, l’évolution des cours des matières premières et de l’énergie, les taux d’intérêt américains, l’appréciation du dollar, une soudaine poussée de l’aversion pour le risque à l’échelle mondiale – quel qu’en soit l’élément déclencheur – pouvant entraîner de nouvelles dépréciations prononcées et éventuellement des tensions financières dans les pays émergents vulnérables et une escalade des tensions géopolitiques actuelles dans plusieurs régions qui pourrait miner la confiance et perturber le commerce mondial, ainsi que les flux financiers et touristiques.

Le FMI, sans surprise, demande l’engagement de réformes structurelles en particulier par les gouvernements des pays avancés. Il demande l’amélioration de la participation à la population active (Japon, zone euro) et l’augmentation du niveau global d’emploi afin de compenser le vieillissement démographique. Il réclame une réduction du surendettement privé. Il souligne que les pays émergents et en développement doivent réorienter l’activité vers de nouveaux pôles de croissance. Le relèvement de la croissance assurera en outre le maintien d’une convergence vers les niveaux de revenu des pays avancés. Ces pays doivent aussi poursuivre leurs réformes structurelles pour corriger les déficits d’infrastructure, promouvoir un climat des affaires dynamique et propice à l’innovation, et mettre en valeur le capital humain à la faveur de réformes de l’éducation et des marchés du travail et des produits.