23 avril 2016

C’est déjà hier! ( Édition du 23 avril 2016)

Déficits publics, la France toujours distancée

Tant au sein de la zone euro qu’au sein de l’Union européenne, le déficit et la dette publique se sont réduits en termes relatifs en 2015 par rapport à 2014. Pour la zone euro, le déficit public par rapport au PIB est passé de 2,6 à 2,1 % du PIB quand pour l’ensemble de l’Union européenne, il est passé de 3 à 2,4 %.

Le ratio de la dette publique a également reculé dans la zone euro en passant de 92,0 % à la fin de l’année 2014 à 90,7 % à la fin de l’année 2015. Pour l’Union européenne, les montants respectifs sont de 86,8 % à 85,2 %.

En 2015, trois pays ont dégagé des excédents, le Luxembourg (+1,2 %), l’Allemagne (+0,7 %) et l’Estonie (+0,4 %) ; de son côté, la Suède était en équilibre (0,0 %).

Les déficits publics les plus faibles, par rapport au PIB, ont été enregistrés en Lituanie (-0,2 %), en République tchèque (-0,4 %), en Roumanie (-0,7%) et à Chypre (-1,0 %).

La France figure parmi les 7 Ėtats ayant affiché, en 2015, un déficit supérieur à 3 %. Parmi ces mauvais élèves de la classe européenne figurent donc la Grèce (-7,2 %), l’Espagne (-5,1 %), le Royaume-Uni et le Portugal (-4,4 % chacun), la France (-3,5 %), la Croatie (-3,2 %) ainsi que la Slovaquie (-3,0 %).

Dix-sept Ėtats respectent le ratio de 60 % de dette publique. Parmi les meilleurs élèves se trouvent l’Estonie (9,7 %), le Luxembourg (21,4 %), la Bulgarie (26,7 %) et la Lettonie (36,4 %).

Dix-sept États membres ont affiché un ratio de dette publique supérieur à 60 % du PIB, les plus élevés ayant été enregistrés en Grèce (176,9 %), en Italie (132,7 %), au Portugal (129,0 %), à Chypre (108,9 %) et en Belgique (106,0 %). La France avec une dette publique de 95,8 % du PIB est au-dessus de la moyenne de la zone euro (85,2 % du PIB). Par ailleurs, son ratio de dette continue d’augmenter quand il baisse pour l’ensemble de la zone euro. De 2012 à 2015, la dette publique française a augmenté de 6,2 points. En un an, elle a progressé de 0,4 point. La stabilisation est attendue pour 2017/2018 autour de 96 % du PIB.

En 2015, les dépenses publiques dans la zone euro ont représenté 48,6 % du PIB et les recettes publiques 46,6 %. En France, les dépenses s’élevaient à 56,8 % du PIB et les recettes à 53,2 % du PIB. Ces deux montants ont très légèrement baissé en 2015.

125 % du PIB, c’est la dette des agents privés en France

Selon la Banque de France, le taux d’endettement des ménages est relativement stable. Il était de 55,8 % du PIB à fin décembre 2015 contre 55,3 % à fin 2014. La dette des ménages représente 86,4 % de leur revenu disponible brut contre 85 % à la fin de l’année 2014. Le taux d’endettement des sociétés non financières était au 31 décembre dernier de 69 % du PIB soit 136,2 % de leur valeur ajoutée. Au 31 décembre 2014, les montants respectifs étaient de 66,7 % et 132,3 %. Par ailleurs sur la même période, le taux d’endettement de l’Ėtat est passé de 95,3 à 95,7 % du PIB.

Malgré les taux bas, il n’y a pas d’emballement de l’endettement des acteurs économiques. Le niveau déjà élevé de cet endettement explique cette lente augmentation tout comme l’absence de perspectives économiques positives. Le taux d’endettement des ménages a augmenté de 0,5 point sur un an. L’endettement des sociétés non financières s’accroit de 2,3 points de PIB sur la même période.

La France dans les 10 premières mais de peu

Si la France se classe 6ème pour le PIB exprimé en dollars, elle n’est plus que 9ème en retenant le PIB corrigé des parités des pouvoirs d’achat. Dans ce dernier classement, la Chine est en tête avec un PIB de 20 778 milliards de dollars devançant les Ėtats-Unis (18 400 milliards de dollars), l’Inde (8 629), le Japon (4 866), l’Allemagne, la Russie, le Brésil et le Royaume-Uni. En parité de pouvoir d’achat, il est tenu compte du coût d’achat relatif d’un bien ou d’un service en fonction du pays dans lequel on réside. En valeur absolue, les États-Unis demeurent premier avec un PIB de 18 399 milliards de dollars suivis de la Chine (12 125), du Japon (4 136), de l’Allemagne (3 421) et du Royaume-Uni (2 448).

Brésil, il y a le feu avant les jeux

Malgré les scandales politico-financiers, malgré la récession qui n’en finit pas, la ville de Rio devrait être prête pour l’ouverture des 31èmes Jeux Olympiques prévue le 5 août prochain. Néanmoins, les organisateurs scrutent avec attention les éventuelles répercussions sociales et politiques des crises en cours.

Le Brésil qui, il y a peu, figurait parmi les pays émergents devant intégrer la classe des grandes puissances économiques semble retourner à ses traditionnels démons, la corruption, l’inflation, la dépréciation de sa monnaie, la fuite des capitaux…. Par ailleurs, le pays doit faire face à une grave crise sanitaire avec le virus Zika.

Une crise politique tentaculaire

Le 17 avril dernier, Dilma Roussef, première femme présidente du Brésil, ancienne résistante au temps de la dictature militaire a fait l’objet d’une demande d’impeachment de la part des députés. Cette demande devrait être, d’ici le mois de mai, confirmée par le Sénat. Pour obtenir réellement son départ de la présidence, le Congrès devra se prononcer par un vote requérant une majorité des deux tiers. Le motif de l’impeachment n’est pas lié au système de corruption mis en place par plusieurs sociétés dont Petrobras mais à une accusation de maquillage des comptes publics. La Présidente aurait masqué la réalité du montant des déficits publics. Evidemment, que ce motif est un prétexte. Dilma Roussef n’est pas directement accusée de corruption. Elle aurait fermé les yeux sur les nombreuses affaires concernant Petrobras et dans lesquelles sont impliquées de nombreux dirigeants politiques dont l’ancien Président Lula. La moitié des députés seraient suspectés d’avoir été corrompus. Il faut, par ailleurs, se souvenir que Dilma Roussef a été ministre des mines et de l’énergie de 2003 à 2005 et Présidente de Petrobras. Elle ne peut guère plaider l’ignorance sur les affaires en cours. En revanche, le Président de l’Assemblée nationale, Eduardo Cunha, membre d’un parti ultraconservateur et à l’origine de la procédure d’impeachment, a été mis en examen pour « corruption et blanchiment d’argent ».

Pour tenter de sauver sa présidence et pour protéger l’ancien Président Lula, Dilam Roussef, a tenté de le faire nommer au Gouvernement. Sa nomination lui aurait permis de bénéficier d’une immunité. Elle est, pour le moment, bloquée par le tribunal suprême fédéral. La décision finale du Tribunal devrait intervenir après le vote de l’éventuelle destitution de la Présidente.  

D’ici le 11 mai, il suffira d’un vote à la majorité simple, considéré comme très probable, pour prononcer la mise en accusation de la Présidente et l’écarter du pouvoir pour au maximum six mois avant le jugement final. Son ex-allié et désormais rival, le vice-président Michel Temer, assumerait alors immédiatement ses fonctions. Il consulte déjà pour former un gouvernement. Le Parti des Travailleurs serait en train de négocier une alliance avec le principal parti d’opposition, le PSDB avec un programme de réformes. Du fait de la très grande fragmentation du paysage politique brésilien, 23 partis dont 12 forment l’actuelle majorité, le pays risque d’être difficilement gouvernable dans les prochains mois.

L’opinion publique qui a toujours eu quelques réticences vis-à-vis de Dilma Roussef souhaite très largement son départ. Plus des deux tiers des Brésiliens demandent le départ de la Présidente.

Une crise économique sans précédent

La crise économique accentue évidemment le climat politique délétère. En 2015, le PIB a reculé de 3,8 %. L’inflation a atteint 9 % et le solde budgétaire a été négatif de 10 % du PIB. La dette publique dépasse 66 % du PIB. Par ailleurs, la balance des paiements courants est déficitaire de 3,3 % du PIB. Même s’il reste officiellement faible, le chômage progresse. Il est passé de 2,6 à 4 % de la population active de 2014 à 2015. L’investissement a diminué de 14 % et la consommation de 4 % en 2015. Les importations ont reculé de 14 % quand les exportations ont progressé de 6 %. Ces dernières ont été soutenues par la dépréciation du real de 33 % par rapport au dollar. Malgré le développement des exportations, le secteur industriel est en situation de surcapacités ; près de 70 % pour le secteur de l’automobile.

Pour 2016, le PIB devrait encore reculer de 3,5 à 4 %. De ce fait, en deux ans, la contraction pourrait atteindre 10 points de PIB. Depuis le début du 20ème siècle, le Brésil n’a connu que, par deux fois, un recul durant deux ans de son PIB, lors de la grande crise de 1929 et durant la Seconde Guerre Mondiale.

Le pays pourrait sortir de la récession en 2017 sous condition de mettre en œuvre des réformes structurelles. Les autorités doivent, au plus vite, redonner une crédibilité à la politique budgétaire. A cette fin, la croissance des dépenses publiques devrait être plafonnée et faire l’objet d’une réelle programmation dans le temps. Une réforme fiscale est également indispensable. A l’heure actuelle, il existe plus de 66 taxes (la France fait mieux en la matière). Le problème provient que toute réforme fiscale suppose l’accord des 27 Etats constituant le Brésil, ce qui est quasiment impossible à obtenir. Il faudrait également un fonds de péréquation de ressources entre les Etats afin d’enrayer la guerre fiscale qu’ils se mènent.

Pour enrayer l’inflation et limiter les sorties de capitaux, la Banque centrale a relevé ses taux, plus de 14 % pour le taux « selic ». Compte tenu de la situation, des pressions se sont manifestées pour les relever davantage mais au regard de la situation économique, le statuquo a prévalu. L’inflation devrait rester autour de 9 % cette année avant de redescendre lentement (7 % en 2017). Une désindexation de l’économie serait nécessaire. Les prestations sociales et les salaires sont indexés sur l’inflation. Mais durant l’année des Jeux Olympiques, une telle mesure serait socialement difficile à faire admettre et serait porteuse de tensions sociales. Compte tenu du manque de main d’œuvre, les pressions à la hausse des salaires est forte. Pour augmenter la population active et pour réduire la progression des dépenses sociales, il conviendrait de reculer l’âge de départ à la retraite. La libéralisation du pays et l’augmentation de la concurrence permettraient également de lutter contre l’inflation et de relancer l’économie.

Le Brésil arrivera-t-il à tenir jusqu’à la fin des Jeux Olympiques prévue le 21 août ? Tout le pari est là. Il faut éviter de montrer un pays à feu et à sang durant ce qui doit être une grande fête et symboliser l’avènement d’un potentiel grand pays. A priori, la portée de l’enjeu devrait contribuer à calmer les esprits…