9 mai 2025

Coin de la conjoncture – production industrielle – emploi – privations sociales

Production industrielle en hausse en mars mais toujours en recul sur un an

En mars 2025, la production, selon l’INSEE, croît, en France, pour le deuxième mois consécutif dans l’industrie manufacturière (+0,6 % après +1,3 % en février 2025) et dans l’ensemble de l’industrie (+0,2 % après +1,0 %). La  production augmente, pour le troisième mois consécutif, dans les matériels de transport (+3,1 % après +3,7 %) : elle ralentit dans les « autres matériels de transport » (+3,0 % après +4,8 %) et accélère dans l’industrie automobile (+3,3 % après +2,2 %). La production rebondit nettement dans la cokéfaction et le raffinage (+9,6 % après -7,5 %). Elle est quasi stable dans la fabrication d’« autres produits industriels » (+0,1 % après +1,0 %). À l’opposé, elle baisse de nouveau dans les industries extractives, énergie, eau (-2,0 % après -0,5 %), notamment dans la production d’électricité, gaz, vapeur et air conditionné (-2,0 % après ‑0,6 %). Elle se replie dans la fabrication de biens d’équipement (-0,6 % après +3,4 %) et diminue de nouveau légèrement dans les industries agro-alimentaires (-0,3 % après -0,4 %).

La production du premier trimestre 2025 est inférieure à celle du premier trimestre 2024 dans l’industrie manufacturière (-1,0 %) comme dans l’ensemble de l’industrie (-0,4 %).

Sur cette période, la production est en baisse dans la fabrication d’« autres produits industriels » (‑1,8 %) et dans la fabrication de biens d’équipement (‑1,4 %). Elle diminue légèrement dans la fabrication de matériels de transport (‑0,4 %) et dans les industries agroalimentaires (‑0,2 %). À l’opposé, elle est en hausse dans les industries extractives, énergie, eau (+2,6 %) et en nette hausse dans la cokéfaction et le raffinage (+10,9 %).

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Emploi stable au 1er trimestre en France

Malgré le ralentissement de la croissance, le marché du travail, en France, ne se dégrade pas. Les annonces de plans sociaux ne se traduisent pas au niveau des statistiques sur des destructions nettes d’emplois soulignant la vigueur des créations.

Au premier trimestre, l’emploi salarié du secteur privé est resté, selon l’INSEE, stable en France. Il se situe sous son niveau d’un an auparavant. 9 400 emplois ont été créés au cours du 1er trimestre 2025 quand au dernier trimestre 2024 une perte de 68 000 emplois avait été enregistrée (‑0,3 %). Sur un an, la perte d’emplois salariés dans le privé est de 69 000 (-0,3 %). Le nombre d’emplois excède en revanche encore son niveau d’avant crise-sanitaire (fin 2019), de 5,5 % (soit +1,1 million d’emplois).

Au premier trimestre 2025, l’emploi intérimaire diminue de nouveau, mais moins fortement qu’au trimestre précédent, -0,3 % après ‑2,3 % au trimestre. En 2023 et 2024, l’emploi intérimaire avait reculé de 1,6 % en moyenne par trimestre. Il se situe ainsi 5,9 % au-dessous de son niveau du premier trimestre 2024 et 8,5 % sous son niveau d’avant crise sanitaire.

Entre fin décembre 2024 et fin mars 2025, l’emploi salarié agricole recule légèrement (-0,5 %) après une quasi-stabilité au trimestre précédent (+0,1 %). Il est inférieur de 1,0 % à son niveau d’un an auparavant. L’emploi salarié privé industriel (hors intérim) est stable au premier trimestre 2025 après une quasi-stabilité au trimestre précédent (‑0,1 %). Il est aussi presque au même niveau qu’au premier trimestre 2024 (+0,1 %), et reste supérieur à son niveau d’avant-crise sanitaire (+2,5 %). Dans la construction, l’emploi salarié (hors intérim) baisse pour le neuvième trimestre consécutif. Le recul est de 0,7 % après ‑0,6 % au trimestre précédent. Il demeure au-dessous de son niveau d’il y a un an (‑2,1 %) mais dépasse encore nettement son niveau de fin 2019 (+3,9 % soit +57 500 emplois).  Au premier trimestre 2025, l’emploi salarié privé dans le tertiaire marchand hors intérim est stable, après un repli le trimestre précédent (-0,2 %). L’emploi salarié de ce secteur est quasi stable par rapport à son niveau d’un an auparavant (-0,1 %) mais dépasse encore largement son niveau de fin 2019 (+7,3 % par rapport à fin 2019 soit +852 400 emplois). En revanche, l’emploi salarié privé (hors intérim) du tertiaire non marchand est en hausse de 0,8 % après ‑0,5 % au quatrième trimestre 2024. Il dépasse son niveau du premier trimestre 2024 de 0,9 % (soit +24 500 emplois) et celui de fin 2019 de 6,1 %.

La stabilité de l’emploi salarié en début d’année 2025, malgré le ralentissement conjoncturel, confirme l’inertie du marché du travail. La dynamique de long terme reste favorable, avec un niveau d’emploi supérieur à celui d’avant-crise, mais les signaux négatifs dans l’intérim et la construction pourraient annoncer un retournement si la croissance venait à fléchir davantage.

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Privation matérielle et sociale en France : un léger mieux

Début 2024, environ 13 % de la population française, soit 8,6 millions de personnes, se trouvent dans une situation de privation matérielle et sociale. Cet indicateur mesure les difficultés à assumer certaines dépenses essentielles du quotidien : il suffit de rencontrer au moins cinq limitations parmi treize, comme se chauffer correctement, renouveler ses vêtements, disposer d’une connexion Internet à domicile ou partager un repas ou un verre avec des amis au moins une fois par mois.

La majorité des Français échappent à toute forme de privation (55 %), mais une frange non négligeable (6 %) cumule sept privations ou plus. Cette privation sévère concerne principalement des personnes locataires et précaires : seuls 21 % des individus dans cette situation sont propriétaires, contre plus de 75 % parmi ceux qui ne connaissent aucune restriction de ce type.

En France métropolitaine, le taux de privation matérielle et sociale atteint 12,7 % début 2024. Il reste proche de celui observé avant la crise sanitaire (12,1 % entre 2013 et 2020). La baisse marquée constatée en 2022, liée aux mesures exceptionnelles de soutien, a été effacée par la remontée des prix, qui a fait repartir à la hausse les privations dès 2023.

P : données provisoires

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Ces difficultés recoupent en grande partie des tensions budgétaires : 21 % des personnes interrogées déclarent avoir du mal à boucler leurs fins de mois. Cette proportion dépasse les 20 % pour la troisième année consécutive. À l’inverse, près de six Français sur dix affirment s’en sortir assez facilement ou aisément.

Certaines privations persistent à un niveau élevé : 12 % des personnes ne parviennent pas à chauffer correctement leur logement, soit le double du niveau observé il y a dix ans. Cela s’explique par le renchérissement de l’énergie. En revanche, la part des individus se privant de repas incluant une source de protéines (viande, poisson ou équivalent végétarien) recule (10 % en 2024 contre 12 % en 2023), probablement grâce à un ralentissement de l’inflation alimentaire.

Les vacances restent un luxe inaccessible pour beaucoup : 21 % des personnes déclarent ne pas avoir les moyens de partir une semaine hors de leur domicile, un chiffre néanmoins en légère amélioration par rapport à 2023 (24 %). Cette progression est surtout visible chez les ménages les plus modestes, qui ont davantage voyagé qu’en 2022 selon les données touristiques.

D’autres formes de privation semblent refluer : les difficultés à acheter des chaussures concernent aujourd’hui 3 % de la population, contre 6 % dix ans plus tôt. L’accès à Internet à domicile, autrefois un marqueur de précarité numérique, est désormais marginalement entravé (1 % en 2024 contre 3 % en 2014).

Les chômeurs restent les plus durement touchés : plus d’un tiers d’entre eux sont en situation de privation, avec une moyenne de 3,3 restrictions déclarées, contre 1,2 pour les personnes en emploi ou retraitées. Parmi les actifs, ouvriers et employés sont les plus exposés. Certaines structures familiales cumulent les vulnérabilités. Les familles monoparentales demeurent les plus concernées, même si leur situation s’améliore légèrement (39 % déclarent des fins de mois difficiles contre 43 % en 2023). Les couples avec trois enfants ou plus suivent la même tendance (29 % contre 34 % l’année précédente), avec une amélioration notamment du côté des vacances et des loisirs.

Enfin, les femmes sont plus fréquemment touchées que les hommes (13,5 % contre 10,4 %). Cette surreprésentation s’explique en partie par leur rôle plus fréquent de cheffe de famille monoparentale, mais aussi par des renoncements spécifiques : elles déclarent plus souvent ne pas pouvoir dépenser pour elles-mêmes ou se permettre une activité de loisir régulière sans contrainte budgétaire.

Le statut résidentiel reste un critère fortement discriminant. Seules 5 % des personnes propriétaires sont en situation de privation matérielle et sociale, contre 19 % des locataires du parc privé et 31 % de ceux du parc social.

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Si la fin de la poussée inflationniste semble avoir apporté un répit à certaines catégories de la population, les situations de privation matérielle et sociale demeurent t corrélées à la précarité de l’emploi, à la composition familiale, au sexe ou encore au statut d’occupation du logement. Cette fragilité persistante rappelle que les politiques sociales doivent rester attentives non seulement aux seuils de pauvreté monétaire, mais aussi à ces formes de privation du quotidien, souvent invisibles mais profondément déstabilisantes. Plus qu’un simple indicateur, la privation matérielle et sociale dessine une géographie sociale des manques, des renoncements et des inégalités concrètes.