3 avril 2020

La Crise du Covid-19

Comment sortir du confinement généralisé ?

Un tiers de la population mondiale est confiné. Une grande partie de l’Europe, de l’Inde et des grandes villes américaines le sont. Mercredi 25 mars, le Président russe a décidé de mettre en congés l’ensemble des actifs russes.

Cette pandémie est à l’origine de la troisième et plus grave crise économique, financière et sociale du XXIe siècle, après les attentats du 11 septembre 2001 et la crise financière mondiale de 2008. Le choc est pluriel. L’offre est amoindrie par l’arrêt des usines et par la rupture des chaînes d’approvisionnement dans le monde entier ; la demande est en chute brutale avec les confinements ; la confiance des ménages est partout en forte baisse avec la crainte de la maladie et de l’effondrement de l’économie ; la menace d’une crise financière plane également avec l’augmentation sans précédent des dépenses publiques et le risque d’une multiplication des défaillances chez les débiteurs.

L’arrêt de très nombreuses usines, le maintien à domicile de millions de salariés, les restrictions de circulation, la fermeture des commerces non essentielles constituent à l’échelle mondiale une première qui devrait se traduire par une sévère récession. Celle-ci sera, en fonction des caractéristiques des pays, plus ou moins forte et plus ou moins brutale. Les évaluations sont très variables traduisant le poids des incertitudes en la matière. Il est trop tôt et sans doute inutile d’indiquer si la crise sera supérieure à celle de 1929 ou à celle de 2008. Nous avons l’avantage d’avoir des données sur ces crises précédentes, données qui doivent nous éviter de rééditer les mêmes erreurs.

Au mois de février, la production industrielle en Chine a selon les chiffres de « The Economist » baissé de 13,5 %. Les ventes au détail se sont contractées de 20,5 %. Les investissements en immobilisations, qui mesurent les dépenses dans des domaines tels que les machines et les infrastructures, ont diminué de 24 %, soit six fois plus que prévu. Les effets sur l’économie seraient plus longs qu’escompté dans un premier temps.

À l’aide d’un modèle épidémiologique, un groupe de l’Imperial College de Londres a réalisé plusieurs évaluations de l’évolution possible de la situation. Les chercheurs ont mis en avant que si le virus se propageait, il provoquerait environ 2,2 millions de morts en Amérique et 500 000 en Grande-Bretagne d’ici la fin de l’été. En France, ce chiffre pourrait atteindre 600 000. Sur une période d’un à deux ans, 80 % de la population serait infectée, permettant ainsi une immunité collective. L’augmentation très rapide du nombre de personnes contaminées par le coronavirus a incité tous les États à opter pour le confinement. Ce dernier, à défaut de régler le problème, permet un aplatissement de la courbe des personnes infectées et des décès. Un afflux important de malades dans les hôpitaux entraînerait une surmortalité importante.

Afin d’éviter un tel scénario, les gouvernements, les uns après les autres, ont opté pour des confinements qui permettent d’étaler dans le temps le nombre de malades. L’objectif est également d’atteindre un niveau de non-prolifération ou de gagner du temps pour mettre en place des tests à grande échelle permettant des confinements localisés. Après avoir officiellement enregistré plus de 80 000 cas pour une population de 1,4 milliard d’habitants, selon les chiffres officiels communiqués, la Chine lève très progressivement les restrictions de circulation. 

Le problème de la sortie du confinement

Du fait de la circulation du virus à l’échelle mondiale, l’arrêt des confinements pourrait provoquer sa résurgence. Face à ce risque, les États seront tentés de maintenir de nombreux freins aux échanges avec l’étranger. En cas d’apparition de foyers, des restrictions locales ou régionales seront prises. L’économie devra s’adapter à des phases de « stop and go » et de « lock out » permanentes. Ce cycle de marche-arrêt sera maintenu jusqu’à ce que la maladie ait traversé la population ou qu’il y ait un vaccin. Ce dernier, sous réserve qu’il soit trouvé, ne pourrait être diffusé qu’à l’automne 2021.

Les pouvoirs publics seront, dans les prochains mois, confrontés à des dilemmes. Convient-il de freiner au maximum l’épidémie pour limiter le nombre de morts au prix d’un blocage de l’économie qui pourrait également provoquer des décès (pauvreté, suicides, etc.) ? Il faudra évaluer le coût financier et psychologique de l’isolement répété. De même, la réduction des transports qui restent un vecteur important de diffusion des virus suppose que la localisation des entreprises et des salariés soit revue. En Chine, les ouvriers sont invités à dormir dans leur usine.

Le recours au dépistage massif tel que la Chine ou la Corée du Sud le pratiquent pourrait se généraliser, ce qui ne serait pas sans conséquences sur le plan des libertés individuelles. D’un côté, les personnes testées positives devraient se mettre en quarantaine ainsi que celles qu’elles auront côtoyées quand, d’un autre côté, celles qui sont immunisées pourraient vaquer à leurs occupations en sachant qu’elles ne peuvent pas être une source de nouvelles infections. Les voyages internationaux voire nationaux pourraient être conditionnés à la possession d’un test de dépistage. Le port du masque ainsi que l’adoption de mesures de distanciation pourraient devenir la norme. La Chine et la Corée du Sud utilisent des applications pour certifier qui est indemne de la maladie et qui ne l’est pas. Ces pays recourent aux médias sociaux pour retracer les infections, alerter les gens sur les points chauds et identifier les contacts potentiellement infectés. La Corée du Sud a modifié la loi pour permettre à l’État d’accéder aux dossiers médicaux et de les partager sans mandat.

Si les États estiment que le virus est amené à s’installer durant de nombreux mois voire années, ils devront engager des programmes de construction de centres de santé adaptés afin de prendre en charge les personnes infectées et pour pouvoir réaliser des tests de dépistage en grand nombre.

Plusieurs secteurs seraient particulièrement touchés si ce scénario devenait réalité. Le tourisme et les loisirs seraient en première ligne tout comme les centres commerciaux. La France avec l’Italie et l’Espagne serait pénalisée par l’effondrement des recettes touristiques. La Corse qui tire environ 30 % de son PIB des activités touristiques serait la région française la plus touchée.

Les populations des pays occidentaux appréhendent avec difficulté les changements que peut induire le covid-19. La polémique au sujet de la chloroquine souligne la fragilité de l’opinion qui a besoin de croire en l’existence d’une solution simple pour tourner la page. Face à un ennemi fantôme, face à des dirigeants publics contraints d’improviser, l’inquiétude ne peut qu’augmenter d’autant plus que la défiance à l’encontre des autorités était déjà palpable avant la crise. Pour autant, les moyens financiers pour lutter contre la crise sanitaire et la crise économique sont sans précédent.

L’Union européenne à la recherche des bonnes solutions

La réunion en visioconférence des chefs d’État et de Gouvernement, jeudi 26 mars, n’a pas abouti à l’adoption d’un plan d’action clair entraînant une vive réaction de la part du Président du Conseil italien, Giuseppe Conte. Ce dernier a déclaré que « nous devons réagir en employant des instruments financiers innovants ». Derrière ces mots, il promeut l’idée du lancement des « coronabonds ». 

Au moment de la crise de 2008 et surtout lors de celle des dettes souveraines entre 2011 et 2013, la question de l’émission d’eurobonds avait été soulevée. Cette antienne revient au goût du jour avec la crise sanitaire actuelle. L’idée serait de mutualiser les émissions d’obligations d’État au niveau européen pour en réduire le coût pour les États dont les écarts de taux avec l’Allemagne sont les plus élevés. Lors des précédentes crises, cette proposition n’avait pas reçu l’assentiment des États membres. L’Allemagne et les États du cœur de la zone euro ne souhaitaient pas être co-responsables des dettes des États dépensiers. D’autres États membres dont la France pouvaient être favorables à l’émission d’obligations européennes mais en refusant tout droit de tutelle de la Commission de Bruxelles. Devant ces oppositions et objections, aucune suite n’avait été donnée.

Avec la crise sanitaire et l’augmentation des dépenses publiques qu’elle génère, la création de « coronabonds » a été suggérée par neuf gouvernements parmi lesquels figurent celui de la France, de l’Italie, de l’Espagne mais aussi celui de la Belgique et du Luxembourg.

Cet appel a reçu une fin de non-recevoir de la part de l’Allemagne et des Pays-Bas qui indiquent qu’en cas de difficulté les États peuvent faire appel au fond de soutien qui a été créé à cet effet. L’intervention de ce fond est prévue pour des États en situation de banqueroute et est conditionnée à la mise en place de réformes structurelles comme ce fut le cas de la Grèce.

Les autorités allemandes craignent d’être appelées à financer des États qui n’ont pas assaini leurs finances publiques depuis la crise financière. Les électeurs allemands qui sont déjà critiques à l’encontre de la politique des taux bas de la BCE ne souhaitent pas engager leur pays dans une politique de soutien en faveur de l’Italie, l’Espagne voire la France. En revanche, les dirigeants allemands sont pleinement conscients qu’en l’absence de corde de rappel, la crise actuelle pourrait sonner le glas de la zone euro. L’Allemagne qui tire une grande partie de sa richesse des échanges commerciaux ne peut, par ailleurs, pas se priver de ses principaux clients d’autant plus que la crise sanitaire pourrait conduire à une régionalisation accrue des échanges.

La création d’eurobonds suppose d’apporter des réponses à de nombreuses questions. Sera-t-il nécessaire d’instituer une direction du Trésor européen en charge des émissions ? En cas de réponse positive, dans quelles conditions seront nommés ses responsables ? Quels seront les liens avec les ministères de l’Économie des États membres ? La question de la répartition des obligations devra être résolue. Il conviendra également de définir l’utilisation des ressources, investissement, fonctionnement. La direction du Trésor européen aura-t-elle un droit de contrôle sur les sommes allouées et selon quelle procédure ?

Compte tenu de leurs divergences, les 27 États européens ont décidé de renvoyer le problème à l’Eurogroupe qui réunit les ministres des Finances de la zone euro. Ce dernier a quinze jours pour établir un plan d’actions. Dans le communiqué final du Conseil européen du 26 mars, il n’est pas fait mention des « coronabonds » en raison de l’opposition totale des Allemands, des Néerlandais et des Finlandais. Concernant l’intervention du Mécanisme Européen de Stabilité, créé après la crise grecque pour venir en aide aux États en difficulté, les dirigeants des 27 « prennent note des progrès » des discussions et invitent l’Eurogroupe à « produire des résultats sans délai et développer les nécessaires spécifications techniques ».

L’OCDE pour le lancement d’un Plan Marshall/New Deal

L’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) est issue de l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) fondée en 1948 pour mettre en place le plan Marshall. Ce plan visait à faciliter la reconstruction de l’Europe dans un contexte de guerre froide. À partir de 1952, l’organisation se transforme en centre d’études et prend le nom d’OCDE en 1961. L’OCDE rassemble 36 États dont les États-Unis, le Canada, la plupart des États européens, le Japon, la Corée du Sud.

Pour le Secrétaire général de l’OCDE, José Ángel Gurría, la situation actuelle est comparable à celle qui prévalait à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Dans cet esprit, il a proposé que l’OCDE soit un des moteurs de la reconstruction économique. Il défend l’idée de plans internationaux afin de lutter contre les tentations protectionnistes. Il a indiqué que l’OCDE mobilisera ses compétences pluridisciplinaires pour éclairer et appuyer les actions nécessaires tant en matière de santé publique qu’en matière économique. À ses yeux, les États occidentaux devront revoir de nombreux process en matière de santé. La crise du coronavirus a, selon l’OCDE, mis en pleine lumière les faiblesses de nos systèmes de santé, depuis l’insuffisance du nombre de lits en soins intensifs et des effectifs de santé jusqu’à l’incapacité de fournir des masques en nombre suffisant et de réaliser des tests dans certains pays, en passant par les défaillances observées sur le plan de la recherche et de la fourniture de médicaments et de vaccins.

L’OCDE appelle au déploiement d’efforts importants et coordonnés au niveau international pour assurer les ressources nécessaires afin de faire face à l’urgence de santé publique immédiate ainsi que pour atténuer le choc économique et trouver le chemin de la reprise. Ces efforts doivent s’articuler autour de quatre axes :

  1. Intensification de la coopération internationale en réponse au défi sanitaire. Cette coopération doit en premier lieu concerner la recherche de traitements et de vaccins. Quand ils auront été trouvés, les gouvernements devront veiller à ce que leur diffusion soit la plus large et équitable possible. La FDA aux États-Unis et l’Agence européenne des médicaments devraient s’employer ensemble à supprimer les obstacles d’ordre réglementaire pour les vaccins et les traitements.
  1. Élaboration de politiques publiques communes. Les Gouvernements devraient mobiliser sans délai les ressources nécessaires pour permettre aux économies d’atténuer l’impact négatif de la crise et accélérer la reprise, notamment en consacrant au plus vite des dépenses :
  1. Coordination financière accrue. L’OCDE s’inquiète de la vulnérabilité de la sphère financière et demande que les États membres soient solidaires en cas de défaillance d’un établissement financier.
  1. La restauration de la confiance. La reprise économique suppose la création d’un climat favorable aux affaires, un climat qui s’était détérioré avec la montée des tensions protectionnistes.

L’OCDE a, par ailleurs, annoncé le lancement d’une plateforme qui diffusera des informations actualisées et complètes sur les mesures prises par les pouvoirs publics des pays du monde entier, accompagnées de conseils dispensés par l’Organisation dans certains cas.

Pour le Secrétaire général de l’OCDE, la situation actuelle impose la combinaison du New Deal de Roosevelt et du Plan Marshall sous l’administration Truman.

Les principales ordonnances à dominante économique et sociale prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

Promulguée le 23 mars 2020, la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 instaure un état d’urgence sanitaire pour une durée provisoire de deux mois et habilite le gouvernement à légiférer par ordonnances pour prendre les mesures d’adaptation et de soutien qu’imposent cette crise sans précédent. Objectif : donner au gouvernement la capacité d’agir pour garantir la santé publique et limiter au mieux les conséquences économiques et sociales de l’épidémie, quitte à restreindre les libertés d’aller et venir, de réunion et d’entreprendre, pour un temps donné et sous le contrôle du Parlement et du Conseil d’État. L’articulation de ces mesures avec le droit européen fait l’objet d’un « cadre temporaire » adopté le 19 mars 2020 par la Commission européenne et visant à soutenir l’économie dans le contexte de crise sanitaire.

Le soutien aux entreprises

Le Fonds de solidarité

Afin de soutenir la trésorerie des entreprises au ralenti voire à l’arrêt en raison du confinement, une ordonnance crée un Fonds de solidarité doté d’1 milliard d’euros, (dont 250 millions d’euros en provenance des régions) pour une durée de trois mois prolongeables par décret jusqu’à six mois. Ce fonds de solidarité concerne les très petites entreprises, les micro-entrepreneurs, les indépendants, et les professions libérales les plus touchés par l’épidémie. Pour en bénéficier, il faut un chiffre d’affaires inférieur à 1 million d’euros et un bénéfice annuel imposable inférieur à 60000 euros, avoir fait l’objet d’une fermeture administrative et subi une perte de 70% de chiffre d’affaires en mars 2020 par rapport à mars 2019. A compter de début avril, une aide de 1500 euros sera versée par l’État. Une aide complémentaire de 2000 euros pourra être attribuée, au cas par cas, par les régions, uniquement aux TPE.

Le maintien de la fourniture d’électricité, de gaz et d’eau

Afin de prévenir et limiter la cessation d’activité des très petites entreprises éligibles au Fonds de solidarité, une ordonnance interdit la suspension, l’interruption et la réduction de la fourniture d’électricité, de gaz et d’eau afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, et prévoit la possibilité d’un paiement échelonné sans pénalité. En cas de défaut de paiement de loyers ou de charges locatives, les pénalités financières, dommages et intérêts, clauses résolutoires ou pénales, de même que les garanties ou cautions ne pourront pas être appliquées pendant cette période d’état d’urgence sanitaire.

L’adaptation des contrats de voyage et de séjours touristiques

Fortement touché par la pandémie, le secteur du tourisme fait l’objet d’une ordonnance relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages et de séjours en période d’épidémie, et permet pour une période déterminée et limitée dans le temps, un remboursement des prestations annulées sous forme de reports ou de bons d’achats.

La simplification des règles

Trois autres ordonnances ont pour objectifs de simplifier et de sécuriser le fonctionnement des entreprises durant cette période :

  • en prorogeant les délais pour l’établissement, l’arrêté, l’audit, la revue, l’approbation et la publication des comptes et des autres documents et informations que les entreprises doivent déposer ou publier annuellement ; 
  • en adaptant les règles et en prorogeant les délais pour la passation, le paiement, l’exécution et la résiliation des contrats publics, notamment les règles relatives aux contrats de la commande publique. Le Ministre de l’économie et des finances, Bruno le Maire, a indiqué qu’il n’y aura plus de limite au paiement des avances, dont le plafond est habituellement fixé à 60% ;
  • en aménageant les règles de convocation, d’information, de réunion et de délibération des assemblées et des organes collégiaux d’administration, de surveillance ou de direction des entreprises, afin de leur permettre de continuer d’exercer leurs missions malgré les mesures de confinement. Ces instances pourront être reportées au mois de septembre.

L’accès facilité aux services et réseaux de communication

Une ordonnance raccourcit les délais et simplifie les procédures préalables à l’implantation ou à la modification d’une installation de communications électroniques afin d’assurer le fonctionnement des services et des réseaux de communications électroniques très sollicités dans cette période de confinement.

L’assouplissement temporaire du droit du travail

La fixation des congés payés, des RTT et des jours de repos

Une ordonnance précise les conditions et limites dans lesquelles un accord d’entreprise ou de branche autorisera l’employeur à imposer ou à modifier les dates de prise d’une partie des congés payés dans la limite de 6 jours ouvrables, en respectant désormais un délai d’un jour franc seulement à l’avance (au lieu de quatre semaines). Les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait et des jours de repos affectés sur le compte épargne temps du salarié, pourront être imposées ou différées unilatéralement par l’employeur sans qu’il y ait un accord collectif.

Travailler plus sur la base du volontariat

Cette ordonnance prévoit d’élargir les possibilités de dérogations en matière de durée du travail et des dérogations en matière de repos hebdomadaire et dominical pour permettre aux entreprises des secteurs essentiels qui ont un surcroît d’activité, de déroger aux règles actuellement en vigueur et de fonctionner jusqu’à 7 jours sur 7 sur une période limitée au 31 décembre 2020. Sont notamment concernés l’énergie, les télécoms, la logistique, les transports, les activités agricoles ou encore la filière agroalimentaire. Concrètement, le seuil de 44 heures hebdomadaires en moyenne sur 12 semaines consécutives au-delà duquel on ne peut travailler, pourra être porté à 46 heures (plafond fixé au niveau européen). Fixée à 48 heures, la durée maximale hebdomadaire pourra être portée jusqu’à 60 heures. A partir de la 36ème heure de travail, la majoration pour heure supplémentaire de 25 % s’appliquera, avec un minimum de 10 %, ainsi que les repos compensateurs dans les conditions de droit commun. Le repos compensateur minimal entre deux journées de travail pourra être réduit de 11 heures à 9 heures.  Le travail dominical pourra être élargies sur la base du volontariat des salariés. En cas d’application occasionnelle, le volontariat ne sera pas nécessaire.

Protection sociale, prime et intéressement

Une ordonnance adapte temporairement les conditions et modalités d’attribution de l’allocation complémentaire à l’indemnité journalière perçue en cas d’arrêt maladie ou d’accident du travail en cas de risque sanitaire grave et exceptionnel (notamment d’épidémie), et élargit le champ des salariés éligibles. Avec le nouveau dispositif, le délai de carence de 3 jours est supprimé, de même que la condition d’ancienneté demandée dans certaines entreprises pour verser l’allocation complémentaire.  Le versement aux salariés des sommes au titre d’un régime d’intéressement ou de participation qui leur sont dues au titre de l’exercice 2019 est reporté au 31 décembre 2020. Cela concerne également la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat dite prime Macron reconduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 et dont le versement était conditionné à la signature d’un accord d’intéressement avant le 30 juin. Cette condition préalable a été levée et la prime de 1000 euros défiscalisée peut être versée aux salariés mobilisés pendant la crise sanitaire.

Le chômage partiel pour tous les salariés

S’inspirant de l’expérience allemande lors de la crise financière de 2008, une ordonnance permet d’étendre le chômage partiel à tous les salariés, y compris les assistantes maternelles, les employés à domicile, les intérimaires (dont la mission est en cours ou interrompue), les VRP, certains saisonniers, et les salariés, travaillant sur le territoire national, employés par des entreprises étrangères ne comportant pas d’établissement en France. L’ordonnance aménage les règles d’indemnisation en faveur des salariés et des apprentis et les adapte pour tenir compte des situations dans lesquelles les salariés sont soumis à des régimes d’équivalence en matière de durée du travail ou dans lesquelles ils ne sont pas rémunérés sur la base d’une durée horaire. Afin de faciliter la mise en œuvre de ce dispositif par les employeurs, elle simplifie pour les salariés les modalités de calcul de la contribution sociale généralisée de manière exceptionnelle et temporaire. L’État assurera la prise en charge totale des indemnisations versées aux salariés par les entreprises en cas d’activité partielle, jusqu’à hauteur de 4,5 SMIC. Un délai de 30 jours sera accordé aux entreprises pour déposer leur demande, avec effet rétroactif. La ministre du travail, Muriel Pénicaud, a précisé qu’en cas de non-réponse à l’entreprise au bout de 48h, son dossier est accepté et elle est remboursée dix jours plus tard. Au 25 mars, le ministère du travail annonçait 730.000 personnes en chômage partiel, soit presque le double en six jours.

L’offre de modes de garde élargie

Pour faciliter l’accueil des enfants dont les parents travaillent dans les secteurs d’activités essentiels, en particulier les personnels soignants, une ordonnance autorise les assistants maternels à accueillir simultanément jusqu’à six enfants (contre quatre dans le droit commun). Un service unique d’information des familles permettra de connaître en temps réel les places de crèches et d’assistants maternels disponibles.

Mesures sociales

Le maintien des revenus de remplacement

Une ordonnance prolonge le bénéfice de l’allocation chômage, de l’allocation de solidarité spécifique, de l’allocation d’assurance dont la charge est assurée par les employeurs publics et des allocations spécifiques pouvant être versées aux intermittents du spectacle, pour les demandeurs d’emploi qui ont épuisé leur droit à compter du 12 mars 2020. Ces droits sont prolongés jusqu’au mois d’avril et tant que durera la période de confinement.

L’emploi et les ressources des personnes en situation de handicap

Une ordonnance assure le maintien des droits et prestations attribués aux personnes en situation de handicap (l’allocation aux adultes handicapés, l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé) ainsi que la continuité des droits des personnes bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Dans la même logique, une ordonnance relative aux adaptations des règles d’organisation et de fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux permet le maintien de la rémunération pour les travailleurs accueillis en établissement et service d’aide par le travail, en cas de réduction de l’activité ou de fermeture de l’établissement.

La prolongation de la trêve hivernale

Une ordonnance prolonge la trêve hivernale du 31 mars au 31 mai et sursoit aux mesures d’expulsion et d’interruption de fourniture d’eau, de gaz et d’électricité durant cette période.