10 juin 2017

Le Coin de la Conjoncture du 10 juin 2017

Petite révision à la hausse de la croissance française

La croissance française pourrait atteindre 1,4 % en 2017 selon la Banque de France, soit 0,1 point de plus que prévu lors de la précédente prévision. En 2018 et 2019, le PIB augmenterait de 1,6 % pour chacune des années. Malgré cette amélioration, l’économie française resterait en retrait par rapport à la moyenne de la zone euro, pour laquelle la Banque centrale européenne a revu également jeudi ses prévisions de croissance à la hausse (+0,1 point), à 1,9 % pour 2017, 1,8 % en 2018 et 1,7 % en 2019. Pour expliquer la révision à la hausse de la croissance française, la Banque de France met en avant la possible amélioration des exportations. En revanche, la consommation des ménages serait moins dynamique car les gains de pouvoir d’achat liés à la baisse des prix du pétrole s’estompent.

La Banque de France considère que le déficit public sera, cette année, de 3,1 % après 3,4 % en 2016, alors que la France s’est engagée à le ramener sous 3,0 % en 2017. L’écart avec la prévision d’un solde public 2017 à -2,8 % du PIB visé par l’ancien gouvernement provient à parts égales « d’une croissance nominale du PIB plus faible et d’une progression plus dynamique des dépenses ».

S’agissant de l’inflation, la Banque de France voit toujours une accélération à 1,2 % cette année après 0,3 % en 2016 mais revoit en baisse ses prévisions pour 2018 et 2019 à 1,2 % puis 1,4 % (contre 1,4 % et 1,5 % respectivement auparavant).

 

Chômage keynésien ou chômage classique

Trois grands pays d’Europe, la France, l’Italie et l’Espagne, enregistrent des taux de chômage supérieurs à la moyenne européenne. Ce sous-emploi perdure depuis plus de 8 ans. Face à ce chômage installé qui mine le tissu social de ces pays, la question est de savoir s’il est de nature keynésienne, lié à une demande insuffisante, ou classique liée à un problème d’offre.

Un chômage keynésien est imputable à des revenus trop faibles. Les ménages du fait d’une insuffisance de salaires ne peuvent pas satisfaire leurs besoins ni acheter les biens produits. L’anémie de la demande intérieure génère une spirale dépressive entraînant la faillite d’entreprises, ce qui limite d’autant les rémunérations versées.

Le chômage classique tient à un problème de profitabilité et de compétitivité des entreprises. Le salaire réel est trop élevé par rapport à la productivité. La demande intérieure est, dans ce cas, satisfaite en ayant un recours croissant aux importations, ce qui aboutit à un déséquilibre de la balance commerciale.

Ces deux formes de chômage peuvent se cumuler, ce qui ne rend pas facile la mise en œuvre de politique économique visant à les réduire.

De 1999 à 2017, le salaire réel a augmenté, en France, plus vite que la productivité, respectivement de 20 et 15 %. En Espagne, l’écart est plus faible, les salaires réels ont augmenté de 9 % et la productivité de 6 %. Sur la même période, l’Italie est dans une situation nettement moins favorable car une baisse des salaires réels d’un point est constatée quand la productivité par tête a décliné de plus de 5 points.

La France se caractérise par de très faibles taux de marge et de profitabilité des entreprises. Les profits – après taxes, intérêts et avant dividendes – ne représentent que 10 % du PIB en France contre 17 % en Italie et 19 % en Espagne. Le taux de marge des entreprises non financières s’élève en France à 32 % contre 42 % en Espagne et 43 % en Italie. La profitabilité est donc anormalement faible en France mais pas en Espagne ou en Italie.

De 1999 à 2016, les importations ont progressé de 120 % en France quand le PIB ne s’est accru que de 33 %. Les importations ont, sur cette période, constamment augmenté plus vite que la demande totale. En Espagne, l’écart est moindre. Les importations et le PIB se sont accrus respectivement de 90 % et de 45 %. En Italie, les taux comparables sont de 48 et de 8 %. Avec la reprise économique enregistrée de la croissance constatée depuis 2014, en France et en Italie, les importations ont tendance à augmenter rapidement. En Espagne, en raison d’une baisse sensible du coût du travail, l’appareil de production arrive à satisfaire la progression de la demande intérieure.

Face à une croissance de la demande intérieure, les appareils productifs français comme italien peinent à répondre. De ce fait, une augmentation du pouvoir d’achat se traduit par un déséquilibre de la balance commerciale. Le coût du travail n’est pas seul en cause. En effet, le coût français est comparable avec celui de l’Allemagne et des pays d’Europe du Nord. Celui de l’Italie est inférieur à la moyenne de la zone euro sans pour autant que cela lui donne un avantage.

Le problème de la production française est lié à un positionnement « gamme moyenne ». De ce fait, il est en concurrence directe avec celle des pays d’Europe centrale et orientale ainsi que celle des pays émergents d’Asie.

La politique d’Emmanuel Macron qui entend concilier offre et demande pourrait aboutir, du moins dans un premier temps, à un accroissement du déficit commercial. L’augmentation du pouvoir d’achat apparaît comme le prix à payer pour engager des réformes plus impopulaires sur le droit du travail.

 

Le monde de mieux en mieux

Selon l’OCDE, en 2017, le PIB mondial pourrait s’accroître de 3,5 %, ce qui constituerait sa plus forte progression enregistrée au cours de ces six dernières années. Néanmoins, il convient d’être prudent ; entre les évaluations de printemps et les résultats définitifs, les déconvenues n’ont pas été rares depuis 2011. En outre, l’OCDE qui a présenté mercredi 7 juin ses « Perspectives Economiques », a affiché un optimisme tout relatif. Le secrétaire général de l’organisation, Angel Gurria, s’est ainsi félicité du retour de la croissance tout en affirmant qu’elle demeure trop modeste « pour obtenir des gains importants de niveau de vie dans les pays de l’OCDE ». Il note que l’économie mondiale est loin d’avoir retrouvé son niveau d’expansion d’avant crise.

Le raffermissement de la confiance des entreprises et des consommateurs, l’augmentation de la production industrielle, le redressement de l’emploi et la reprise des exportations sont autant de facteurs qui devraient jouer positivement en faveur de la croissance dans les prochains mois.

Parmi les grandes économies avancées, l’OCDE considère que le taux de croissance des États-Unis passera de 2.1 % en 2017 à 2.4 % en 2018. La zone euro devrait enregistrer une hausse de son PIB de 1.8 % en 2017 comme en 2018. Au Japon, l’expansion économique devrait atteindre 1.4 % en 2017 et 1 % en 2018.

En Chine, la croissance devrait ralentir pour s’établir à 6.6 % en 2017 puis à 6.4 % en 2018, tandis qu’elle devrait au contraire s’accélérer en Inde pour atteindre 7.3 % cette année et 7.7 % en 2018. Au Brésil, le PIB devrait recommencer à augmenter en 2017 pour croître au rythme de 1.6 % en 2018.

Pour affermir la croissance, l’OCDE met en avant la nécessité de rajeunir le stock de capital vieillissant des entreprises. Depuis 2009, les entreprises ont reporté le renouvellement de leurs équipements. En France, leur âge moyen s’est accru de plus de deux ans. Un effort en la matière pourrait contribuer à des gains de productivité.

La faiblesse des salaires constitue également un autre problème soulevé par l’OCDE L’absence de hausse empêche l’enclenchement d’un cycle d’expansion par la demande intérieure. 

Dans les conclusions de son rapport, l’OCDE demande sans surprise un effort accru en matière d’innovation. Elle incite les États membres à prendre des mesures en faveur de la création d’entreprises. Conjointement, elle souhaite que des dispositifs soient adoptés afin d’accompagner les individus et les régions en difficulté en raison de l’évolution des technologies. Elle rappelle que les pays doivent travailler de concert pour combler les lacunes existantes dans la gouvernance de l’économie mondiale. Elle préconise le développement de la coopération dans de nombreux domaines : droit du travail, environnement, fiscalité, lutte contre la fraude, etc.