13 février 2016

Le Coin de la conjoncture du 13 février 2016

De « l’Europe communauté » à « l’Europe libre-service »

 La construction européenne engagée, de manière structurée, dès la fin de la Seconde Guerre Mondiale est-elle en train de se muer en processus de déconstruction informelle. Les débats sur Schengen et sur l’appartenance du Royaume-Uni ne sont-ils pas annonciateurs d’un détricottage pur et simple ? De même, l’incapacité des pays membres d’avancer vers une Europe plus intégrée ne témoigne-t-elle pas que les idéaux des pères fondateurs se sont évanouis ?

 Aux origines, une démarche originale…

 Après la Seconde Guerre Mondiale, la volonté de mettre un terme aux guerres européennes et l’échec relatif de la Société des Nations, ont conduit à la mise en place d’un processus original initié par quelques hommes politiques issus de France, d’Allemagne, de Belgique, des Pays-Bas, du Luxembourg et d’Italie. Les pères fondateurs, Jean Monnet, Konrad Adenauer, Joseph Bech, Johan Willemn Beyen, Alcide de Gaspieri, Robert Schuman et Paul Henry Spaak, ont décidé de contourner les problèmes politiques en retenant comme moteur de la construction euroépenne, la coopération l’économie. La paix passait, pour eux, par la prospérité. C’est ainsi qu’est née, en 1951, la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier qui institue dans ces deux secteurs d’activité un marché commun. Cette première réalisation débouche sur le Traité de Rome qui institue la Communauté Economique Européenne et Euratom. En contrepartie de la suppression des droits de douane, il est décidé d’instituer un système d’aide à l’agriculture qui prendra le nom de politique agricole commune avec instauration d’une préférence communautaire. Euratom avait, de son côté, vocation de favoriser la coopération des Etats membres dans le domaine de l’énergie atomique.

 La CEE devient un pôle attractif du fait des forts taux de croissance des Etats membres et de la paix retrouvée. Elle devient un modèle de réussite en matière de coopération et de démocratie. Il en résulte une série d’élargissement. Avec la chute du mur de Berlin en 1989, elle s’ouvre à l’Europe de l’Est au moment même où est élaboré le Traité de Maastricht sur la monnaie commune. Cette dernière qui est en germe depuis la fin des années soixante (Plan Werner-Barre) vise à parachever le marché unique. Elle est jugée indispensable afin d’éviter les effets de dévaluations et des réévaluations qui minent le marché commun. Les variations des taux de change des pays membres obligent, par exemple, au niveau agricole où existent des prix d’intervention, des prix planchers…, des calculs complexes de montants compensatoires.

L’étage monétaire est alors imaginé comme une étape supplémentaire vers le fédéralisme qui est le fil conducteur de la construction, fédéralisme implicite et jamais affirmé en tant que tel.

Un pont trop loin

L’Europe a dû mener de front dans les années 90 à la fois l’élargissement vers l’Est et la création de la monnaie unique ainsi que la finalisation du marché unique lancé par Jacques Delors en 1985. Cette accumulation de défis a, sans nul doute, contribué à une perte d’identité de l’Europe. En outre, l’empirisme a montré ses limites avec une Europe à 28 Etats ayant des niveaux de développement et des objectifs différents. 70 ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le souvenir du conflit ne suffit plus à unir les Etats membres. Par ailleurs, depuis vingt ans, nul n’ose imaginer l’étape d’après. L’Europe symbole de croissance est devenue une zone en crise avec un taux de chômage et une dette élevés. L’Europe ne fait plus rêver au point que l’Islande ne l’a pas intégrée.

 Après la menace de sortie de la zone euro de la Grèce, l’Union est confrontée au chantage du Royaume-Uni. Le possible départ d’un Etat membre n’avait pas été anticipé car par nature, l’intégration européenne était un processus irréversible L’Union européenne s’est construite par analogie avec les Etats-Unis.

 L’Europe, un bouc émissaire commode

 L’Europe depuis les années 90 et surtout depuis 2008 est devenue un bouc émissaire facile. Les Gouvernement ont imputé à l’Europe la responsabilité des politiques de rigueur et des réformes structurelles impopulaires. A 28, l’Europe est devenue difficilement gouvernable d’autant plus que la Commission de Bruxelles, organe de nature fédérale, a perdu de son aura et de son influence. La seule institution fédérale est de fait la Banque centrale européenne qui joue de son indépendance pour élaborer des politiques réellement européennes.

 L’Europe n’a pas de toute façon les moyens de ses ambitions. Le budget européen représente 1 % du PIB de l’Union. Faute de volonté politique suffisante et de consensus sur les objectifs, les institutions européennes réagissent dans l’urgence aux problèmes auxquels elles sont confrontées : crise des dettes publiques, crise des migrants…

 L’épuisement du modèle

 Le traité de Schengen traduit bien l’épuisement d’une certaine forme de coopération. Si l’effacement des frontières est logique à l’intérieur d’un espace de libre circulation des biens, des services, des personnes et des capitaux, la question de l’organisation de la surveillance des frontières de ce dit espace nécessite un minimum d’organisation fédérale. Le contrôle des frontières pèse essentiellement sur les pays se situant aux marges et qui ne sont pas obligatoirement des grands Etats. La Slovénie, la Slovaquie, la Hongrie… ont-ils les moyens d’assurer le contrôle des frontières ? La création d’une véritable police des frontières européenne s’impose mais tarde à prendre forme. Les moyens de Frontex, l’agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières,  sont faibles (environ 300 millions d’euros).

 L’abandon de la convention de Schengen se traduirait, en revanche, par un surcoût de plusieurs milliards d’euros du fait de la réinstauration des contrôles aux frontières et du manque à gagner dans les échanges commerciaux (ralentissement des échanges, surcoûts administratifs….). Les deux pays qui seraient les plus pénalisés sont la France et l’Allemagne. Une telle suppression pourrait réduire de 10 % les échanges commerciaux entre Etats membres.

 En refusant l’instauration d’un étage spécifique à la zone euro, la construction européenne bute sur des problèmes institutionnels majeurs. En effet, l’idée reste que la zone euro doit, à un moment ou à un autre, coïncider avec le périmètre de l’Union européenne or plusieurs Etats membres ne veulent pas entendre parler de la monnaie unique. De ce fait, ils n’entendent pas être soumis à la réglementation économique et financière qui y est attachée. De même, ils ne veulent pas être financièrement solidaires des Etats membres de la zone euro qui pourraient rencontrer des difficultés. Etant donné que ces Etats ont souvent défini un taux de change fixe avec l’euro, ils ont la tentation d’être des passagers clandestins. C’est ainsi que le Royaume-Uni, dans le cadre des négociations avec la Commission, demande à pouvoir échapper à la réglementation liée à l’euro. En acceptant l’idée que l’euro n’est pas l’avenir commun de tous, les Etats membres acceptent de facto le principe d’une union à la carte. Ce ne sera plus une communauté mais un libre-service.

 Le Royaume-Uni avait, déjà, sous Margaret Thatcher, obtenu la reconnaissance de juste retour avec le fameux « I want my money back ». Les Britanniques bénéficient du fait qu’ils sont d’importants contributeurs nets d’un remboursement pris en charge par les autres Etats qui versent plus qu’ils ne reçoivent de l’Europe. A ce précédent, risque de s’ajouter toute une série de dérogations que les autres Etats membres pourront également revendiquer.

L’Europe, une puissance sans outil

Bruxelles est accusé de tous les maux. Or, que pèse le poids de l’administration est marginale. L’Europe est accusée d’en faire trop ou pas assez.

 Au niveau économique, juridiquement, les institutions européennes n’ont pas de compétences directes pour à s’occuper de l’emploi, de la conjoncture économique…. Mais, avec l’instauration de la monnaie unique, l’Europe se retrouve en première ligne. Faute de gouvernement économique ou de direction du Trésor européen, faute de fonds de soutien conjoncturel, l’Union dispose de peu d’outils pour venir en aide à un Etat faisant face à un choc asymétrique.

 Quand la norme tue l’imagination au pouvoir

 Les gouvernements européens se sont enfermés dans un schéma juridique. Le respect de la norme est censé résoudre tous les problèmes. Le respect des normes budgétaires a pour objectif de corriger les comportements déviants, respect qui est tout relatif depuis 1999. Les normes apparaissent comme des murailles bien virtuelles quand la dette publique dépasse 100 % du PIB ou quand le chômage frappe le quart de la population active comme c’est le cas en Grèce.

 L’Europe depuis vingt ans s’interdit d’être imaginative. Ainsi, sur la question des travailleurs détachés, il eut été possible d’imaginer la création d’un régime de sécurité sociale spécifique au niveau européen. Les travailleurs détachés acquitteraient leurs cotisations selon un barème européen défini afin d’éviter des distorsions de concurrence trop fortes.

 De même, aujourd’hui, les différents Etats européens ont une tendance non plus à converger sur le plan économique mais à diverger. L’Allemagne et certains Etats du nord demeurent des pays industriels quand ceux du Sud ont des économies de plus en plus tertiaires. Il en résulte des déséquilibres croissants au niveau des balances commerciales. En outre, du fait que les gains de productivité dans l’industrie sont supérieurs à ceux constatés dans les services, le taux de croissance du Nord est plus élevé que celui du Sud de l’Europe.

 Pour corriger ces divergences, la solution passe par l’organisation de transferts sociaux à l’intérieur de la zone euro. L’assurance-chômage et l’assurance-retraite devraient être européanisées. Certes, cela suppose un large consensus car dans un tel schéma, les Etats d’Europe du Nord financeraient ceux du Sud. Un tel mode de financement aurait l’avantage de ne pas générer de surendettement dans les Etats du Sud et d’équilibrer les balances des paiements.

L’Europe a-t-elle perdu le sens de l’histoire ?

Le politologue, Robert Kagan, considère que l’Europe en ayant consacré beaucoup d’énergie à la monnaie unique, s’est désengagée de l’histoire du monde. L’Europe a négligé les évolutions économiques et géostratégiques internationales (pays émergents, Afrique, situation au Moyen Orient, révolution digitale…). Les pays européens qui ont cru dans les années 90/200 à l’avènement d’un « paradis post-historique » sont confrontés depuis 2008 à une succession de crises à laquelle ils n’étaient pas préparés. Les pères fondateurs avaient opté pour un jeu éminemment politique qui se faisait fort de faire oublier que toute construction étatique passe par le politique. Aujourd’hui, avec l’absence d’une volonté politique forte, le vélo européen vacille de plus en plus à défaut de trouver la bonne vitesse.…

 Quand le financement de marché remplace le crédit bancaire…

 Avec les politiques de « Quantitative Easing » menées par les grandes banques centrales, la base monétaire mondiale connait, depuis le début du siècle, une croissance sans précédent. Pour les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et la zone euro, la base monétaire est passée, de 2003 à 2016, de 9 à 27 % du PIB. Une telle progression a obligatoirement des conséquences sur les différentes classes d’actifs et sur le financement de l’économie. A ces données quantitatives il faut également ajouter les durcissements de la réglementation prudentielle pour comprendre les récentes évolutions du financement de l’économie.

 Dans le cadre des plans d’injections de liquidités mis en œuvre par les banques centrales, les banques commerciales ont été ou sont amenées à revendre leurs obligations d’Etat aux banques centrales. Avec les liquidités ainsi obtenues, elles sont censées acquérir des obligations ou des actions et aussi accroître le volume de de crédit à destination des entreprises ou des particuliers.

 Depuis le début du programme de la BCE, en 2015, l’effet crédit n’est pas nul tout en étant inférieur aux attentes. Ce programme n’a pas, en revanche, arrêté le processus de désintermédiation bancaire. Le financement bancaire représentait en moyenne 88 % du financement des entreprises, en 2008, au sein de la zone euro. Ce taux était de 80 % en 2015. Le mouvement de désintermédiation a été très rapide en France, plus de 12 points en sept ans. La France est désormais un des pays européens où le financement bancaire est le plus faible avec un taux de 61 % contre 87 % en Allemagne et 89 % dans les Etats d’Europe du Sud.

L’encours de la dette des entreprises françaises, à fin décembre 2015, était de 1 426 milliards d’euros en hausse de 4,5 % sur un an. Il est à noter que pour l’année 2014, avant l’entrée en vigueur du Quantitative Easing, la progression avait été de 5,1 % (sources Banque de France – décembre 2015). Les crédits bancaires s’élevaient, en 2015, à 871 milliards d’euros en hausse de 4,1 % sur un an quand le financement par le marché était de 555 milliards d’euros en progression de 5,1 % sur un an. Néanmoins, le financement par le marché reste inférieur au niveau d’avant éclatement de la bulle Internet

Au niveau de la zone euro, les flux de dettes de marché françaises représentent 49 % des émissions totales. Le poids de l’encours d’actions françaises au niveau de la zone euro est de à 28 % quand la part de l’Allemagne est de 27 %. Cette surreprésentation française s’explique par le poids plus important des grandes entreprises en France que chez nos principaux partenaires économiques européens.

 Le marché du financement est dual. Il y a, d’un côté, les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire à rayonnement international qui peuvent opter pour le crédit bancaire ou pour le financement par le marché ; de l’autre, les PME qui doivent essentiellement se financer par le crédit bancaire. Le durcissement des conditions d’accès au crédit bancaire en raison de la réglementation prudentielle constitue un frein au développement de certaines entreprises. Sur ce sujet, entre dirigeants de PME et banquiers, les avis sont divergents. Les premiers considèrent qu’ils ont de plus en plus de difficultés à obtenir un financement bancaire quand les seconds mettent en avant les enquêtes de la Banque de France qui soulignent que les crédits progressent et qu’il n’y pas de problème d’accès. Dans les faits, les crédits bénéficient surtout aux grandes PME bien implantées. La qualité de la signature compte évidemment pour les prêts de moyen à long terme. Au-delà de cette divergence d’appréciation  il est clair que l’accès au financement par le marché est peu accessible aux PME en raison des contraintes de communication et de notation. Les dirigeants des PME éprouvent des difficultés à rendre publiques certaines informations et le cas échéant à ouvrir leur capital. Dans un contexte de forte aversion aux risques, les investisseurs rechignent à souscrire dans des titres d’entreprises de petite taille. L’émission de titres pour les PME est d’autant plus compliquée que leurs besoins sont limités. Les coûts opérationnels, les coûts de contrôle, les coûts de gestion sont élevés au regard de l’épaisseur des lignes de financement, ce type de titres posent de réels problèmes de liquidité et de fongibilité.

Plusieurs initiatives à venir pourraient changer la donne

Au niveau européen, la création d’une base de données sur les PME/ETI (SME database) permettra la centralisation des informations comptables. Avec un système de notation harmonisée, le recours à des véhicules collectifs sera plus aisé. En se regroupant pour émettre des titres cotés, les PME mutualisent les risques.

Pour faciliter le financement des PME, certains préconisent la titrisation des crédits des PME. A cette fin, en 2014, la réglementation prudentielle des banques a été assouplie. Les dangers d’une titrisation à outrance sont connus surtout depuis la crise immobilière américaine de 2008 avec une dilution des risques.

Le recours aux placements privés permet également de contourner les difficultés que rencontrent les entreprises incitées à aller se financer sur les marchés. Dans ce type d’opération, les titres émis sont placés auprès d’investisseurs sélectionnés au préalable. Il s’agit, en règle générale, d’investisseurs financiers (banques, assurances, sociétés d’investissement…). En France, ce marché est encore restreint, 10 milliards d’euros en France mais il a atteint, en 2014, 33 milliards d’euros en Allemagne.

Face aux problèmes de financement des entreprises, le crowdfunding pourrait constituer une solution. Dans les faits, le crowdfunding est une source marginale de financement, 296,8 millions d’euros en 2015. Néanmoins, de plus en plus de Français interviennent sur ces plateformes de financement, 2,3 millions en 2015 contre 1,3 million en 2014. Les entreprises qui y recourent le font par communication ou parce qu’elles ne peuvent pas accéder aux autres types de financement. La collecte sur les plateformes de prêts est passée de 88,4 à 196,3 millions d’euros de 2014 à 2015.  Ce sont surtout des sociétés de commerce et de service de proximité qui ont eu recours à ce type de prêts. Le crowdfunding obligataire a concerné à 84 % le secteur immobilier. 50 millions d’euros sous forme d’obligations ont été émis, pour l’immobilier, en 2015 contre 25 millions en 2014.

En France, une des principales ressources de financement, demeure malgré la loi de modernisation de l’économie de 2009, les délais de paiement. Les dettes fournisseurs représentent, en France, 30 % du passif des entreprises contre 21 % en Belgique, 20 % en Espagne et 11 % en Allemagne. En période de crise, les délais de paiement s’allongent. Ce sont souvent les grandes entreprises et l’Etat qui imposent les délais les plus longs au détriment des PME. En Allemagne, c’est le principe de la réserve de propriété – en vertu duquel un acheteur devient propriétaire d’un bien qu’à partir du moment où il l’a totalement réglé – qui s’applique.

Dans une économie profondément marquée par l’aversion aux risques, le financement qu’il soit par crédit bancaire ou par le marché est de plus en plus contraint. Certains affirment que faute d’investissement, le crédit stagne quand d’autres prétendent l’inverse.

L’emploi de qualité fait un bon emploi

 Contrairement à quelques idées reçues, ce ne sont pas obligatoirement les pays qui ont le plus libéralisé leur marché du travail qui obtiennent les meilleurs résultats. Une étude récente de l’OCDE réalisée dans 45 pays prouve qu’un bon niveau de salaire et de sécurité de l’emploi ainsi que des conditions de travail décentes peuvent aller de pair avec un taux d’emploi élevé.

 L’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, le Danemark, la Finlande, la Suisse, la Norvège et le Luxembourg ont en commun d’avoir des conditions d’emploi supérieures tout en ayant des taux de chômage faibles. A l’inverse, la qualité de l’emploi est relativement faible en Espagne, en Estonie, en Grèce, en Hongrie, en Italie, en Pologne, au Portugal, en Slovaquie et en Turquie ce qui n’empêche pas un certain nombre de ces pays d’avoir un nombre élevé de demandeurs d’emploi.

 Dans les pays à faible protection de l’emploi, il est fréquent que le taux de chômage des jeunes soit élevé et que le taux d’activité des femmes soit faible. De même, ce sont des pays où les accidents et le stress au travail sont fréquents.

 Selon l’OCDE, la qualité des revenus d’activité a baissé dans les deux tiers des pays de l’OCDE. Les principales victimes sont les titulaires d’emplois peu rémunérés notamment en Grèce et au Royaume-Uni. La sécurité sur le marché du travail s’est également détériorée dans la plupart des pays membres, en particulier en Espagne et en Grèce. La qualité de l’environnement de travail a évolué différemment selon les pays membres. L’Allemagne, par exemple, a vu non seulement son taux d’emploi augmenter, mais aussi la qualité de l’emploi s’améliorer sur les trois dimensions. À contrario, la Grèce a enregistré à la fois une forte hausse du chômage et une baisse de la qualité des salaires et de la sécurité sur le marché du travail (alors que le niveau de tension au travail est resté assez stable). Au Royaume-Uni, où le taux d’emploi est pratiquement revenu à son niveau d’avant la crise, la qualité des salaires a diminué sur la période, tandis que la sécurité de l’emploi n’a reculé que légèrement ; enfin, les conditions de travail n’ont pas évolué.

 Dans d’autres pays de l’OCDE, les effets de la crise ont été bien plus mitigés. Au Portugal, par exemple, la qualité des revenus d’activité a stagné et la sécurité sur le marché du travail a considérablement diminué, tandis que l’environnement de travail s’est amélioré pour ceux qui avaient toujours un emploi. En Suède, en revanche, la qualité des revenus s’est améliorée, mais la sécurité de l’emploi et les conditions de travail se sont dégradées.