25 juin 2016

Le Coin de la Conjoncture du 25 juin 2016

Quand le Gouverneur de la Banque de France est à la recherche d’un meilleur optimum pour la zone euro

Depuis sa création, des économistes, notamment américains, prédisent un sort funeste à l’euro qui est une création sui generis. Elle a le tort de ne pas être la monnaie d’un État constitué. La zone monétaire de l’euro serait surtout aux yeux de ses détracteurs loin d’être optimale. Selon les thèses des économistes Mundell (Prix Nobel d’Economie 1999), McKinnon et Kennen, une zone monétaire optimale se caractérise par l’absence de chocs asymétriques (chocs intervenant que dans une partie de la zone), par la mobilité des facteurs de production, des biens, des services et des capitaux et par la mise en place de mécanismes d’ajustement. Pour Kennen, les économies intégrant la zone monétaire se doivent d’être diversifiées afin de supporter le mieux possible d’éventuels chocs asymétriques. Pour l’économiste Johnson auteur de « Further essays in monetory theory », un budget fédéral est indispensable pour compenser la disparition de l’arme des changes. L’intégration budgétaire et fiscale permet de conduire des actions en faveur d’États ou de régions devant faire face à une crise. Enfin, les économies au sein d’une zone monétaire sont censées converger et non diverger.

Pour la petite histoire, le pape de la zone monétaire optimale a été un ardent défenseur de la monnaie unique européenne.

Une zone monétaire réussie suppose donc une forte intégration commerciale ce qui est le cas pour l’Europe. Elle est conditionnée par une libre circulation des biens, des services, des capitaux et des hommes.

Dès le départ, la zone euro n’était pas à 100 % optimale du fait de l’hétérogénéité des économies des États membres, des barrières linguistiques qui freinent les migrations et la réduction des poches de chômage, de l’absence de mécanismes permettant de réaliser des transferts financiers.

La convergence espérée à la création de la monnaie unique a vite tourné à l’illusion. Les États membres ont accru leur spécialisation, l’Allemagne et l’Europe du Nord ont dégagé des excédents industriels croissants quand le Sud s’est spécialisé dans la consommation et les services. Le Nord a accumulé les excédents quand le Sud a empilé les déficits. Tant que le Nord a prêté sans sourciller, le système a fonctionné. A partir du moment où la croissance a faibli dans le Sud et après la crise financière de 2008/2009, les flux financiers se sont taris entraînant avec eux la Grèce et quelques autre dans la tourmente.

Cette divergence ne serait pas un problème à condition de ne pas suivre les résultats des balances commerciales. En France, il y a des régions à dominante touristique et d’autres à dominante industrielle ou agricole…

L’absence de corde de rappel

La crise grecque a été un très bon révélateur des problèmes auxquels pouvaient être confrontée la zone euro. La Grèce, petit État de 11 millions d’habitants, est confrontée à un choc asymétrique se caractérisant par une insolvabilité liée à d’importants déficits des paiements courants et du budget. À la différence de ce qui peut se produire au sein d’un État unifié, il n’y a pas au sein de la zone euro de mécanismes reposant sur des transferts financiers permettant de combler les déficits. Entre deux régions françaises, nul ne regarde les balances commerciales ou les comptes courants. Les transferts sont, en France, nombreux entre les différentes régions. Le paiement des pensions de retraite, les indemnités chômage, l’investissement public, les dotations aux collectivités locales contribuent à équilibrer les comptes à l’intérieur du territoire français. En Europe, le budget ne joue pas le rôle d’amortisseur des chocs économiques et sociaux. Il représente 1 % du PIB et sert avant tout à financer la politique agricole commune et les actions en faveur du développement des nouveaux membres (FEDER).

En cas de choc asymétrique, la solution qui a été mise en œuvre est d’assurer la solvabilité de l’État en instituant le Fonds Européen de Stabilité Financière et le Mécanisme Européen de Stabilité Financière. En revanche, le retour à l’équilibre est à la charge des États membres qui doivent alors respecter les plans décidés par les autorités européennes voire le FMI. Afin de réduire les déficits extérieurs, les États concernés doivent réduire leurs importations et donc leurs consommations. Afin d’améliorer leur compétitivité et rééquilibrer le budget, la maitrise des salaires, des prestations et l’augmentation des impôts sont incontournables.

La monnaie est donc commune mais en cas de crise, les charges sont individualisées. Avec la crise de 2008-2009, la mutualisation recule. Il est ainsi constaté une moindre mobilité des capitaux entre les pays de la zone euro. Il y a une renationalisation des financements avec un intervenant de nature fédérale qui est la Banque Centrale Européenne. Les excédents d’épargne de l’Allemagne et des Pays-Bas ne sont plus prêtés aux autres pays de la zone euro. L’épargne nationale de chacun des États et la Banque Centrale Européenne permettent d’assurer le financement des déficits des pays périphériques. Cela oblige, comme avant l’instauration de la monnaie commune, à réduire au maximum les déficits extérieurs.

L’autre conséquence de cette absence de mutualisation est la création d’un excès global d’épargne. Il en résulte un déficit de consommation et d’investissement pesant sur le niveau de la croissance potentielle. Du fait de l’aversion totale, les Allemands et les Néerlandais privilégient les obligations d’État au détriment de l’économie réelle.

 

La marche vers l’optimum

Par nature, il y aura d’autres crises asymétriques surtout avec des économies ayant des caractéristiques différentes. Un grand État comme la France, l’Italie, l’Espagne ou l’Allemagne pourrait être concerné. Pour le moment, les États membres préfèrent être face au mur pour trouver les solutions à mettre en œuvre pour éviter l’implosion. Une crise frappant qu’un ou un nombre réduit d’États dans la zone euro ne peut que générer de l’incompréhension et de la suspicion. Si ces États ont des problèmes, c’est que leur gouvernement a failli. Ils n’ont pas à faire supporter aux autres États membres les frais de leur incompétence. Sauf que dans une zone monétaire, la solidarité est de mise… Dans un discours prononcé le 8 juin dernier à l’Institut allemand pour la recherche économique à Berlin, le Gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galheau a indiqué que « même si l’Union monétaire est un succès, l’Union monétaire reste à construire ». Il a également toujours sur ce sujet cité Helmut Schmidt qui, en 2011, avait souligné que « nous n’avons pas réussi à définir des règles du jeu économiques pour l’Union monétaire. Aucune autorité responsable de la politique budgétaire et économique dotée de pouvoirs forts a été créée ».

Le Gouverneur de la Banque de France estime que l’Europe paie chère l’absence de coordination, entre 2 à 5 points de PIB et des millions d’emplois en moins depuis 2008. Il appelle de ses vœux la nomination d’un ministre des finances de la zone euro et la création d’une direction du Trésor européen. Il souhaite également que les députés européens membres de la zone euro puissent se réunir en section du Parlement afin d’adopter des textes spécifiques. La création d’une telle section viserait à améliorer le contrôle démocratique sur les affaires relevant de la zone euro. Certes, cette parcellisation irait à l’encontre du traité de Maastricht qui prévoyait aucune différence de traitement entre les États membres de l’Union selon le principe que la monnaie commune avait vocation de devenir celle de tous un jour ou l’autre.

Le Gouverneur de la Banque de France a émis également l’idée de la mise en œuvre d’une Union de financement et d’investissement. Cette union aurait comme objectif de faciliter le financement des acteurs privés en freinant la tendance de segmentation de la place financière européenne. Cette union devrait permettre une diversification accrue des modes de financement. En 2015, le financement des entreprises par émission d’actions est deux fois moins important en Europe qu’aux États-Unis, 52 % du PIB contre 121 %. Le financement par actions est l’instrument qui atténue les chocs asymétriques. Il est moins volatil que le financement par endettement et améliore la capacité de résistance des entreprises à des conditions défavorables. Ce mode de financement amortirait 40 % d’un choc économique spécifique à un État des États-Unis. Au sein de la zone, le partage des risques est insuffisant ce qui génère rapidement une montée aux extrêmes en cas de crise asymétrique.

 

Je ne haïs pas tous les jours ma famille

57 % des jeunes âgés de 18 à 24 ans résidaient, en France, en 2014, de façon permanente chez leurs parents. Ce taux est un des plus faibles de l’Union européenne. 25 % disposent de leur propre logement et 20 % sont en semi-cohabitation (partage entre le domicile familial et une autre forme d’hébergement). Les jeunes ayant un emploi sont plus nombreux à ne pas cohabiter (36 %). 32 % des étudiants pratiquent la semi-cohabitation. La cohabitation concerne les trois quarts des jeunes adultes au chômage ou inactifs sortis du système éducatif (soit 21 % des 18-24 ans).

Une très forte majorité des parents soutient financièrement les jeunes adultes. Plus des deux tiers d’entre eux (70 %) reçoivent une aide financière régulière de leurs parents, sous forme d’un versement monétaire ou d’une participation à leurs dépenses. Parmi les dépenses les plus fréquemment prises en charge figurent les frais de communication et de transport. 50 % de semi-cohabitants bénéficient d’une aide pour le paiement du loyer et une partie de l’alimentation.

Les étudiants coûtent le plus cher aux parents. 90 % bénéficient d’aides régulières, de 330 euros par mois en moyenne. Ces aides sont d’autant plus élevées qu’ils ne sont plus cohabitants (510 euros par mois en moyenne contre 160 euros pour les cohabitants).

Pour les jeunes sortis du système éducatif, qu’ils occupent un emploi ou non, le soutien financier des parents est plus rare (surtout pour les non-cohabitants) et moins élevé, en moyenne 110 euros par mois pour ceux qui travaillent et 130 euros pour les jeunes au chômage ou qui sont inactifs.

D’autres formes d’aides doivent être prises en compte pour évaluer le soutien des parents. Ainsi, 46 % des jeunes adultes sont affiliés à la complémentaire santé de leurs parents et 20 % assurent leur véhicule sur le contrat d’un de leurs parents.

Les aides régulières sont aussi très souvent complétées par des aides ponctuelles aux montants parfois élevés. Ainsi, 50 % des jeunes adultes inscrits dans un établissement d’enseignement bénéficient de l’aide parentale pour financer leurs frais d’inscription.

De manière plus ponctuelle, les jeunes profitent de la générosité de leurs parents. Ainsi, au cours de l’année 2014, 51 % des 18-24 ans ont été aidés pour l’achat de vêtements, 26 % pour l’achat d’équipements importants et 18 % pour financer un voyage à l’étranger. 84 % des titulaires du permis de conduire ont été aidés par leurs parents pour l’acquérir ; de même 64 % des jeunes qui possèdent une voiture l’ont acheté avec un appui des parents.

Les enfants de cadres sont plus aidés que les enfants d’ouvriers : non seulement ils sont proportionnellement plus nombreux à l’être, mais ils perçoivent des montants environ 2,5 fois supérieurs. Ainsi, 88 % des jeunes adultes dont le père est cadre ou profession libérale reçoivent un soutien financier (contre 61 % des enfants d’ouvriers). Ils perçoivent alors en moyenne 400 euros par mois contre 160 euros pour les enfants d’ouvriers. Ce constat persiste quelle que soit la situation d’activité du jeune. 96 % des enfants étudiants dont les parents sont cadres ou professions libérales reçoivent en moyenne de leurs parents 450 euros par mois. L’aide parentale concerne 83 % des enfants d’ouvriers en cours d’études, pour un montant moyen de 220 euros. Il en est de même pour les jeunes sortis du système éducatif : 65 % des enfants de cadres ou de professions libérales sont aidés par leurs parents à hauteur de 190 euros par mois contre 48 % des enfants d’ouvriers, pour un montant de 100 euros.