5 août 2017

Le coin de la conjoncture du 5 août 2017

Le New Deal fiscal d’Emmanuel Macron !

Emmanuel Macron s’est engagé non pas à révolutionner notre système fiscal mais à déplacer un certain nombre de curseurs. Quelles sont les conséquences possibles de cette politique tant pour les ménages que pour les entreprises ?

La baisse de la fiscalité du capital. 

Emmanuel Macron a promis d’abaisser, sur 5 ans, le taux de l’impôt sur les sociétés de 33,33 à 25 %. En 2018, le premier allégement portera sur 1 milliard d’euros.

L’impôt sur la fortune sur le patrimoine financier serait supprimé (gain de 3 milliards d’euros. L’introduction d’une taxation forfaitaire à 30% du revenu du capital pour les ménages entraînera un gain d’1,5 milliard d’euros pour les ménages. Le coût du capital pour les entreprises, coût qui est élevé en France devrait être ainsi réduit. Ces mesures permettront d’attirer des capitaux extérieurs et de réorienter une partie de l’épargne des ménages vers les entreprises. A terme, les prix de l’immobilier pourraient moins augmenter du fait de cette réallocation d’actifs. En outre, la pierre, en raison de l’évolution démographique, pourrait mécaniquement baisser en-dehors des villes ou quartiers obéissant à d’autres considérations. Le vieillissement de la population et l’augmentation des décès devraient conduire à une remise sur le marché d’un nombre croissant de logements. En outre, les nouveaux retraités ont tendance à émigrer vers les régions côtières. De ce fait, les prix de l’immobilier dans les grands centres urbains du Nord pourraient durablement diminuer.

L’afflux de capitaux est nécessaire à la France pour équilibrer sa balance des paiements et combler son déficit commercial structurel. Il favorisera la modernisation de notre économie ce qui améliorera sa croissance potentielle. Du fait de la forte taxation des revenus du patrimoine, les entreprises sont contraintes d’offrir des rendements importants. Cette pratique a pour conséquence un moindre investissement mais aussi une moindre augmentation des salaires.

 La relance de la demande

La suppression des cotisations sociales chômage et d’assurance-maladie, compensée par une majoration de la CSG, pourrait aboutir à accroître le pouvoir d’achat des actifs de 1,5 %. Cet accroissement suppose que la CSG soit déductible, faute de quoi lasuppression des cotisations sociales aura un effet minime pour ceux qui sont assujettis à l’impôt sur le revenu (un peu moins de la moitié des ménages).

Toujours dans un souci d’améliorer le pouvoir d’achat des titulaires de revenus modestes et moyens, le Gouvernement a confirmé la baisse de 9 milliards d’euros sur 3 ans de la taxe d’habitation.

Ces différentes dispositions devraient conduire à une augmentation de la consommation et porté la croissance. Néanmoins, compte tenu de l’incapacité de l’appareil productif à répondre instantanément à une augmentation de la demande, l’opération pourrait conduire à une dégradation du solde de la balance commerciale.

La réduction du coût du travail

La transformation du Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et pour l’Emploi (CICE) en réduction pérenne de charges sociales semble pour le moment abandonnée. En revanche, la promesse de suppression des charges pour les titulaires du SMIC devrait être tenue. La France se caractérise par un niveau élevé de ses charges et par un chômage important pour les actifs sans qualification. Depuis un quart de siècle, les pouvoirs publics mènent des politiques d’allègement de charges sociales ciblés sur les bas salaires. Si les résultats peuvent apparaître décevants, il n’en demeure pas moins qu’aucun gouvernement n’a souhaité modifier cette politique, quelle que soit la majorité en place.

La proposition d’Emmanuel Macron devrait se traduire par une hausse du nombre d’emplois pour les segments du marché du travail en sous-emploi (peu qualifiés). Elle accentuera l’effet chape de plomb sur les salaires et les qualifications. Cette politique n’incite pas les entreprises à monter en gamme et à améliorer le niveau de compétences de leurs salariés.

La politique d’Emmanuel Macron se veut équilibrée en combinant offre et demande. Aux mesures citées ci-dessus, il convient d’ajouter le plan d’investissement présenté le 2 août dernier qui portera sur 50 milliards d’euros. Le risque de ce savant dosage qui vise à éviter des tensions au sein de la population est de se transformer en pointillisme fiscal. Les curseurs sont déplacés mais avec beaucoup de précaution. La non refonte de la grille des cotisations sociales constitue une faiblesse d’autant plus que le transfert de certaines d’entre elles sur la CSG en offrait l’occasion.

 

Les promotions ne font pas tout

Les consommateurs sont de plus en plus assaillis de promotions commerciales. L’arrivée d’Internet comme canal de distribution n’a fait qu’accentuer cette tendance. Les enseignes multiplient les opérations commerciales afin de liquider leurs stocks. En effet, les collections durent de moins en moins longtemps, l’obsolescence intervenant au bout de 6 à 8 semaines. Auparavant, deux grandes collections étaient proposées aux clients. En début d’année, le CREDOC a étudié les comportements des ménages face aux promotions. Selon cet organisme, la part des promotions dans le secteur des produits de grande consommation est passée de 14 % en 2000 à 20 % en 2016. La France reste nettement en-deçà de la moyenne européenne (28 %). Ce résultat est à relativiser par le fait que les promotions absorbent plus de 50 % des achats des ménages au Royaume-Uni. L’Italie comme l’Allemagne sont plus adeptes des promotions que la France (respectivement 28 et 21 % des achats).

Les ménages sont sensibles aux promotions durant les crises. Ainsi, plusieurs études ont souligné qu’en 2008/2009 et entre 2011 et 2013, les consommateurs français étaient plus attentifs aux campagnes commerciales. Par ailleurs, les sites de ventes de biens d’occasion ont enregistré durant ces périodes de fortes croissances. Dans un contexte de reprise économique, les consommateurs sont moins sensibles aux prix et sont plus nombreux à se déclarer prêts à payer plus cher pour des caractéristiques de qualité.

La multiplication des promotions tout au long de l’année, qui s’ajoutent aux soldes provoque une saturation chez les consommateurs. Les soldes de janvier 2016 ont été boudés par les Français. Seulement 47 % des enquêtés déclarent les avoir pratiqués. Pour analyser ce résultat, il faut certes tenir compte des conditions climatiques et des craintes générées fin 2015 par les attentats. Parmi les personnes ayant recouru aux soldes de janvier 2016, près d’un tiers (31 %) l’ont fait sur internet. Cette proportion monte à 42 % chez les 25-34 ans. À l’opposé, seulement 11 % des 55-64 ans ont fait les soldes sur internet.

En 2016, selon le CREDOC, 67 % des consommateurs recouraient à des promotions « souvent » ou « de temps en temps » contre plus de 74 % en 2005. Cette proportion est inférieure à celle constatée en 2013 (71 %).

Les consommateurs français considèrent de plus en plus que les promotions constituent de fausses bonnes affaires. En 2016, 72 % des consommateurs se déclarent incités par un prix compétitif contre 84 % en 2012. Depuis plusieurs années, les soldes rencontrent un moindre succès, les consommateurs achetant de plus en plus sur Internet. Les sites proposant des prix cassés durant toute l’année, comme « ventes privées » ont banalisé les promotions. Par ailleurs, les Français souhaitent passer de moins en moins de temps dans les centres commerciaux. Il y a une soif de temps libre non commercial. Toujours selon le CREDOC, 34 % des Français en 2016 contre 27 % à 30 % les années précédentes privilégient le temps libre à l’argent. Le choix « plus de temps libre » atteint son niveau le plus haut depuis la crise, tandis que le choix « plus d’argent » (60 %) redescend presque à son niveau d’avant-crise (59 %).

Les consommateurs déclarant souvent recourir aux offres promotionnelles sont avant tout des personnes de 45-54 ans (40 %, contre 33 % en moyenne), des femmes (35 %), des couples avec enfants (38 %), des individus moyennement diplômés (37 % des titulaires du seul baccalauréat), vivant en zone rurale (47 %) ou dans un bourg (36 %), appartenant aux classes moyennes (37 % ont des revenus mensuels de 1 800 euros à 2 700 euros). Le fait que les classes moyennes aient davantage recours aux promotions que des classes de revenus plus modestes s’explique par la possibilité plus élevée qu’elles ont de posséder une carte de fidélité, d’avoir un accès à Internet et de disposer d’un pouvoir d’achat suffisant.

La multiplication des promotions est la preuve d’une concurrence accrue entre les enseignes mais aussi le symptôme d’un changement de paradigme. Les ventes en ligne représentent 8 % des dépenses de consommation. Au regard des pratiques de nos principaux partenaires, ce taux devrait atteindre 10 à 12 % d’ici à 2020. Les grands centres commerciaux seront dans les prochaines années touchés par l’évolution des pratiques commerciales. Le vieillissement, la réduction de la place dévolue aux voitures, les aspirations des consommateurs conduiront à une remise en cause de ces centres. Aux Etats-Unis, ils se transforment en parc de loisirs intégrant animations, cinémas, restaurants, etc. Les clients se muent en visiteurs qui n’achètent plus des biens mais du service. Ils viennent repérer mais ne s’encombrent plus de courses. C’est le royaume du showroom. Cette mutation n’est possible que pour les grands centres commerciaux à proximité de grandes voies de circulation.