6 octobre 2018

Le Coin de la Conjoncture du 6 octobre 2018

Une croissance de 1,6 % en France en 2018

Dans sa note de conjoncture du mois d’octobre, l’INSEE prévoit, en 2018, pour la France, une croissance de 1,6 % grâce à une accélération, au second semestre de l’activité. Après une quasi-stagnation au premier et deuxième trimestre, l’institut statistique reste optimiste en se fondant sur le maintien à un haut niveau des indicateurs qui mesurent le climat des affaires tant en France que dans l’ensemble des économies avancées. L’INSEE a été ainsi contrainte de revoir à la baisse sa précédente prévision de croissance qui était de 1,7 % en 2018. En début d’année, certains avaient même considéré qu’une croissance de 1,9 % à 2 % était envisageable. La hausse du prix du pétrole, les goulots d’étranglement au sein du système productif français et l’incapacité à gagner des parts de marché à l’exportation ont entravé la croissance française qui est à nouveau inférieure à la moyenne de la zone euro. La France paie la désindustrialisation de ces dernières années.

L’INSEE considère que l’activité de l’économie mondiale devrait se maintenir au second semestre avec néanmoins quelques inflexions. Aux États-Unis pourrait se ralentir avec une croissance de +0,7 % par trimestre. L’économie japonaise devrait également être moins fringante qu’au printemps. Au Royaume-Uni, l’activité serait pénalisée dans l’attente d’un éventuel accord pour le Brexit. Pour la Chine, l’INSEE ne croit pas une décélération brutale de la croissance. Si les exportations peuvent être affectées par une demande extérieure moins dynamique qu’en 2017, en raison des mesures américaines, l’investissement immobilier et la consommation des ménages resteront dynamiques.

La Turquie, le Brésil, la Russie et d’autres pays émergents seront confrontés à des problèmes financiers en raison de la dépréciation de leur monnaie provoquée par des sorties de capitaux. Le relèvement des taux d’intérêt pourrait entraîner un ralentissement de l’activité.

L’INSEE souligne que si actuellement les conséquences de la guerre commerciale que mènent les États-Unis sont faibles, l’accumulation de mesures protectionnistes pourraient peser à terme sur le commerce mondial et sur la croissance.

Une amélioration espérée pour la zone euro

Dans le prolongement du premier semestre 2018 marqué par le repli du climat des affaires, la croissance du PIB de la zone euro demeurerait plus modérée au second semestre (0,4 % par trimestre) qu’en 2017 (0,7 % par trimestre). Le PIB s’accroîtrait de 0,4 % à 0,5 % par trimestre en Allemagne et en Espagne, mais seulement de 0,1 % par trimestre en Italie. Cette situation ne devrait pas faciliter l’exécution du budget 2019 qui a été bâti sur des hypothèses économiques très optimistes.

L’INSEE prévoit une hausse de la consommation au cours des prochains mois, hausse qui s’est fait attendre durant tout le premier semestre. Cela suppose que les cours du pétrole se stabilisent voire baissent légèrement. L’analyse de l’INSEE s’appuie sur la confiance des ménages qui demeure à un haut niveau. En France, cette confiance tend néanmoins à s’effriter. La consommation serait favorisée par la baisse du chômage et par l’augmentation des salaires et cela malgré la hausse des prix.

Au second semestre 2018, l’investissement en construction ralentirait un peu en zone euro, le nombre de permis de construire n’augmentant plus depuis le début d’année. Dans un contexte de tensions croissantes sur l’appareil productif, l’investissement en équipement serait porté par les perspectives de demande et l’amélioration de la situation financière des entreprises. Les résultats des premiers du second semestres ne confirment pas pour le moment cette prévision.

Un rebond de la croissance en France grâce aux gains de pouvoir d’achat et à l’investissement des entreprises

Pour la France, l’INSEE estime que l’économie est bien orientée avec un haut niveau de confiance, une reprise confirmée de l’investissement, une réduction du chômage et une augmentation du pouvoir d’achat.

L’institut statistique note que le climat des affaires en France, à 106 en septembre, est au-dessus de sa moyenne de long terme (100). Il est néanmoins e retraite de 5 points par rapport à son niveau de décembre 2017, son sommet depuis 10 ans. Durant les derniers mois, le moral des entrepreneurs s’est stabilisé dans les principaux secteurs malgré la baisse observée en septembre dans l’industrie et le commerce de détail.

L’INSEE considère que la contreperformance de la France au deuxième trimestre est imputable en partie aux grèves dans les transports qui ont pesé sur la consommation des ménages et gêné la production intérieure. L’arrêt pour maintenance de raffineries ainsi que la faible consommation d’énergie ont également modéré la production. Le retour à la normale devrait créer un rebond favorable au cours du troisième trimestre.  La production manufacturière renouerait ainsi avec la croissance au second semestre après la baisse observée au premier. Par ailleurs, la consommation des ménages devrait bénéficier de l’augmentation du pouvoir d’achat. Il est à noter qu’au cours du deuxième trimestre, les ménages ont affecté quasi totalement à l’épargne. Les achats importants de voitures en juillet et en août par anticipation du changement de procédure d’homologation des véhicules neufs (WLTP) devraient également contribuer à la hausse de la croissance. Selon l’INSEE, le PIB français progresserait de 0,5 % au troisième trimestre puis de 0,4 % à l’automne. La croissance annuelle pourrait alors atteindre 1,6 % après 2,3 % en 2017.

  • Une nette décrue des créations d’emploi 

En 2017, la France avait enregistré la création nette de 342 000. Pour 2018, le résultat serait moins florissant avec simplement 129 000 créations en lien avec le ralentissement de l’activité. L’emploi dans les services devrait conserver un rythme de croissance moins dynamique qu’en 2017 quand l’industrie continuerait de réduire ses effectifs d’ici la fin de l’année.

De son côté l’emploi non marchand a baissé avec la diminution du nombre de bénéficiaires de contrats aidés au premier semestre. Au second semestre, cette diminution serait atténuée par la montée en charge graduelle du nouveau dispositif de contrats aidés « Parcours emploi compétences ». Malgré ce tassement des créations d’emploi, le taux de chômage repasserait en-dessous de la barre des 9 % à 8,9 %.

  • Une inflation de retour en-dessous des 2 %

L’inflation a atteint +2,3 % en juillet et en août 2018 alors qu’elle n’était que de +0,9 % un an plus tôt. Cette accélération des prix à la consommation provient principalement du renchérissement des prix de l’énergie, du relèvement des prix du tabac et de l’inflation alimentaire. En revanche, durant la même période, l’inflation sous-jacente ne s’est accrue que d’un demi-point Avec la stabilisation du prix du pétrole, l’inflation devrait refluer en dessous de 2 % avant la fin de l’année. L’inflation sous-jacente resterait proche de 1 %.

  • Une hausse du pouvoir d’achat espérée

Après avoir progressé de 1,7 % en 2017, les salaires nominaux par tête dans le secteur marchand non agricole augmenteraient de 2 %.  Compte tenu de l’inflation, la progression des salaires par tête dans le secteur marchand en termes réels s’établirait à +0,4 % en 2018 comme en 2017. 

L’accélération des salaires compensant le freinage de l’emploi, la masse salariale demeurerait dynamique (+3,0 % en 2018 après +3,1 % en 2017).

Le revenu disponible brut des ménages progresserait de 2,9 % en 2018. Du fait de la hausse des prix, le pouvoir d’achat n’augmenterait que de +1,3 % en 2018, après +1,4 % en 2017. Les gains seraient concentrés sur le derniers trimestres avec la suppression du reliquat de cotisations d’assurance chômage pour les salariés et de la réduction de la taxe d’habitation pour les ménages concernés.

  • Une progression limitée de la consommation et une hausse de l’épargne

Les ménages ont préféré épargner au deuxième trimestre. Le taux d’épargne des ménages est passé de 13,7 à 14,2 % du revenu disponible brut du premier au deuxième trimestre. Cette progression est imputable à l’épargne financière qui a atteint 4,2 % au deuxième trimestre contre 3,7 % au premier. En revanche, la consommation s’est contractée toujours au deuxième trimestre de 0,1 point au cours du deuxième trimestre. L’INSEE considère qu’un rattrapage devrait intervenir avant la fin de l’année du fait du retour à la normale dans les transports et de la bonne tenue des immatriculations d’automobiles neuves. La consommation devrait rebondir de +0,7 % au troisième trimestre et enregistrer un gain de 0,5 point au dernier trimestre. Le taux d’épargne serait donc toujours orienté à la hausse. Il pourrait s’élever à 15,2 % du revenu disponible brut en fin d’année. En moyenne annuelle, il resterait quasiment au même niveau en 2018 (14,3 %) qu’en 2017 (14,2 %). 

  • Stagnation de l’investissement des ménages

Après une année 2017 exceptionnelle, l’investissement des ménages se situe sur un pallier. La hausse des prix de l’immobilier freine les acquéreurs. Par ailleurs, les ménages sont confrontés à une pénurie d’offres, ce qui les amène à différer leur projet. De ce fait, l’investissement des ménages serait quasi stable d’ici la fin 2018 (0,0 % au troisième trimestre puis –0,1 % au quatrième). Sur l’année 2018, l’investissement des ménages n’augmenterait que de 1,6 %, après +5,6 % en 2017. 

  • L’investissement des entreprises toujours dynamique

L’investissement des entreprises en services reste particulièrement bien orienté tandis que l’investissement en produits manufacturés a retrouvé une croissance solide au deuxième trimestre après un repli ponctuel durant l’hiver. La progression de l’investissement s’explique par des taux d’utilisation des capacités élevés, la stabilisation de situation financière des entreprises et par des taux d’intérêt faibles. Selon l’INSEE, d’ici la fin de l’année, l’investissement des entreprises progresserait de 0,9 % par trimestre, conduisant à une croissance de 3,6 % en 2018, après +4,4 % en 2017. 

  • L’espoir en une amélioration du commerce extérieur

Au premier semestre 2018, les exportations françaises ont stagné (+0,1 % au printemps après -0,4 %), après un dernier trimestre 2017 en vive progression. À partir du troisième trimestre, les livraisons aéronautiques rattraperaient leur retard pris en début d’année et les exportations se redresseraient nettement (+0,8 % puis +1,8 %). Les importations, qui ont augmenté au deuxième trimestre (+0,7 %), tirées par les achats de produits manufacturés, croîtraient plus modérément au troisième trimestre (+0,5 %) avant d’accélérer à nouveau en fin d’année (+1,6 %).

Au total en 2018, les exportations croîtraient un peu moins vite (+3,3 %) que la demande mondiale adressée à la France (+4,1 %) et qu’en 2017 (+5,3 %). Après avoir été négative au premier semestre 2018, la contribution du commerce extérieur à la croissance française serait légèrement positive au second semestre (+0,1 puis 0,0 point de PIB au dernier trimestre).

 

L’économie américaine est-elle menacée de surchauffe ? 

L’économie américaine en est à sa neuvième année de croissance, ce qui constitue presque un record. Compte tenu de la force de la récession intervenue en 2008 et 2009, le rattrapage de croissance a été plus lent à se dessiner que lors des précédentes crises. Néanmoins, la durée de ce cycle de croissance contredit les experts économiques qui parient depuis plusieurs années sur un ralentissement de l’activité. La politique menée par Donald Trump, depuis son arrivée à la Maison Blanche, vise à conforter la croissance à travers des mesures de soutien budgétaires et fiscaux. En revanche, la politique de relèvement par la banque centrale américaine de ses taux directeurs tend à ralentir le rythme d’expansion de l’économie américaine.

Depuis 2016, l’augmentation du PIB est supérieure à la croissance potentielle, calculée en prenant en compte l’évolution de la productivité par tête de ces cinq dernières années et l’évolution de la population active. Un pays peut dépasser sa croissance potentielle du fait de stimuli intérieurs (relance budgétaire par exemple) ou extérieur (baisse des prix du pétrole pour les pays consommateurs). De même, elle peut être inférieure en cas de mise en œuvre de politiques de rigueur ou en cas de hausse du prix des matières premières ou énergétiques.

La croissance potentielle d’un pays peut être augmentée en jouant sur la productivité ou sur la population active. Avec un taux de chômage de 3,9 %, les États-Unis disposent de peu de marges de manœuvre pour accroître le nombre de personnes ayant un emploi. Certes, le taux de participation reste nettement inférieur à son niveau de 2008, 62,8 % contre 65 % mais du fait du vieillissement de la population, la capacité à mobiliser une partie de la population devient de plus en plus difficile. Certes, les États-Unis restent une terre d’immigration. 17 % de la population active américaine est étrangère. Donald Trump entend limiter l’arrivée de travailleurs immigrés, ce qui pourrait jouer à l’encontre de la croissance américaine.

L’investissement est l’autre facteur clef de la croissance. Bien qu’il n’ait retrouvé son niveau d’avant crise, l’investissement demeure, pour le moment, dynamique outre-Atlantique. Si les perspectives de croissance venaient à s’assombrir, son déclin serait sans nul doute rapide, ce qui accélérait le ralentissement de l’économie.

Le taux de croissance de l’économie américaine a été de 2,2 % en 2017. Il pourrait atteindre 3 % cette année. L’administration américaine croit en la possibilité de la maintenir à 3 % et voire plus jusqu’en 2024. Donald Trump avait même promis un taux de croissance de 4 % durant sa campagne présidentielle. Pour obtenir un tel résultat et donc un dépassement sur longue période de la croissance potentielle, un dopage économique sera nécessaire. La politique budgétaire devrait être encore plus expansionniste sachant que le déficit public dépasse, déjà en 2018, 4 % du PIB. Face à la progression de la dette publique qui s’élève à plus de 106 % du PIB contre 68 % en 2008, le Congrès pourrait s’opposer à cette politique. L’administration américaine devrait continuer à faire pression sur la banque centrale afin qu’elle ralentisse son programme de hausse des taux. En 2019, quatre hausses de taux sont programmées, avec un relèvement qui pourrait atteindre plus d’un point. En septembre, Donald Trump avait ouvertement critiqué la hausse décidée par la FED.

Nonobstant ses positions dans le domaine du commerce extérieur, Donald Trump risque de mettre très en rapidement l’économie américaine en état de surchauffe avec à la clef une accélération des prix. Seules une augmentation du taux de participation au marché de l’emploi, une relance de l’immigration ou une hausse de la productivité pourrait éviter un emballement de l’économie américaine avec à terme un risque de crise. La productivité par tête tend sur moyenne période à décliner aux États-Unis comme au sein des pays avancés, en raison notamment du développement d’emplois à faible qualification dans le secteur tertiaire. La productivité par tête augmente de moins de 2 % depuis 2010 quand avant crise elle se situait entre 2 et 4 %.

La surchauffe de l’économie américaine devrait conduire à une aggravation du déficit de la balance des paiements courants qui atteint déjà plus de 2 % du PIB. Le déficit joue actuellement en faveur des États-Unis, La possibilité de se libérer de la dette extérieure par le dollar, la monnaie internationale des échanges et de réserve, explique cette spécificité américaine que dans le passé le Royaume-Uni avait également connu. Au regard des expériences passées, l’instauration de droits de douanes à vertu protectionniste n’a en rien permis le rééquilibrage du commerce extérieur mais a pesé sur la consommation du fait de l’augmentation des prix des produits importés. Donald Trump rêve d’atteindre un taux de croissance de plus de 3 % mais en entravant le commerce extérieur il risque de peser l’activité tout en générant de l’inflation.

 

Allemagne, des excédents structurels bien installés

Selon l’institut allemand IFO, l’excédent courant allemand pourrait s’élever à 264 milliards de dollars en 2018 soit 7,8 % du PIB, ce qui correspond au niveau déjà atteint en 2017 (7,9 % du PIB). Cet excédent repose essentiellement sur celui de la balance commerciale. En 2017, la balance commerciale a dégagé un solde positif de 8 % du PIB. L’excédent de la balance des revenus a été de 2,1 % du PIB quand la balance des services a été déficitaire a été de 0,6 % du PIB. Enfin, la balance des transferts internationaux a été déficitaire de 1,7 % du PIB.

L’Allemagne dispose de l’excédent le plus élevé au monde, ce qui suppose à contrario que ses partenaires accumulent des déficits à son encontre importants. Ces pays sont situés principalement en dehors de la zone euro. En effet, depuis 2009, l’excédent vis-à-vis des autres pays de la zone euro s’est nettement contracté.

Les déséquilibres des comptes courants peuvent avoir d’importants effets macroéconomiques. Dans un système monétaire unifié, des déficits génèrent un endettement qui, si les ressources sont bien affectées, permet d’améliorer la productivité et donc à terme les exportations. Or, au sein de la zone euro, ce phénomène autorégulateur n’a pas joué. Un processus de spécialisation s’est mis en place. Les pays à déficits courants ont emprunté mais les flux de capitaux ont nourri la consommation et ont accéléré la désindustrialisation au profit de l’Allemagne.

Les pays du sud (Grèce mais aussi, Espagne, Portugal et Italie) ainsi que l’Irlande ont été contraint d’appliquer des politiques d’assainissement en jouant sur les coûts de production. La balance courante est devenue l’un des indicateurs retenus dans la procédure de la Commission européenne concernant les déséquilibres macroéconomiques. Les pays à déficits courants considèrent que la charge du rééquilibrage est mal partagée. Donald Trump juge également que les excédents allemands sont excessifs.

L’Allemagne s’est reconstruite économiquement, après la Seconde guerre mondiale, autour de ses grands groupes industriels, sidérurgiques, automobiles, chimiques. Le pays a joué pleinement une spécialisation fondée sur une valorisation de la production, rendue obligatoire par des coûts élevés et une appréciation de la monnaie. Cette dernière permettait de réduire le coût des biens intermédiaires et de l’énergie importés. Les exportateurs allemands à la différence de ceux de la France ou de l’Italie ont pu imposer leurs prix. Les produits allemands sont « price maker » car ils sont considérés comme des produits de référence.

Certes, l’Allemagne n’a pas toujours enregistré des excédents au niveau de sa balance des paiements courants. Dans les années qui ont suivi la réunification, le pays avait enregistré des déficits. Ainsi, en 2000, celui-ci avait atteint 1,8 % du PIB. Néanmoins rapidement, l’Allemagne a amélioré sa compétitivité notamment grâce aux dispositions prises sous le mandat de Gerhard Schröder. L’Agenda 2010, visant à stimuler la croissance économique, comportait toute une série de mesures visant à réformer le droit du travail et l’assurance chômage. La durée de l’indemnisation a été abaissée et varie en fonction de l’âge de 12 à 24 mois. Les partenaires sociaux ont accepté une politique de modération salariale. Ainsi, entre 2000 et 2010, le coût horaire de la main-d’œuvre allemande dans l’industrie manufacturière a baissé de 10 % par rapport à la France et à l’Italie et même de 22 % par rapport à l’Espagne. Depuis 2015, en revanche, les coûts salariaux sont à la hausse et sont supérieurs depuis 2017 à ceux de la France. Un salaire minimum a été mis en place.

Notre voisin a rapidement tiré profit de l’ouverture à l’Est de l’Union européenne. Les anciens pays du Pacte de Varsovie sont devenus des sous-traitants de l’industrie du travail. Les entreprises allemandes ont délocalisé une partie de leur production pour bénéficier des faibles coûts salariaux de leurs voisins tout en conservant les chaînes d’assemblages. Quand les entreprises françaises optèrent pour une délocalisation totale, elles choisirent en Allemagne une division internationale des tâches. Ce choix a permis aux firmes allemandes de mieux résister à la montée en puissance des pays émergents d’Asie dont la Chine.

Si l’Allemagne achète de nombreux biens intermédiaires importés, elle est beaucoup plus frugale pour les biens de consommation en raison d’une demande inférieure assez atone. Le vieillissement de la population avec comme corolaire, un fort taux d’épargne ne favorise pas la consommation. Son poids dans le PIB recule, s’établissant à 54,4 % en 2017, contre plus de 58 % avant 2005. Par ailleurs, l’investissement s’élève à 20 % du PIB, soit 1,5 point au-dessous de la moyenne de l’OCDE. L’investissement est de plus en plus freiné par la pénurie de main d’œuvre qualifiée. Les investisseurs lui préfèrent des pays d’Europe centrale et orientale comme la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, et la Slovaquie, qui offre plusieurs avantages : une main-d’œuvre bien formée, des salaires relativement bas et la proximité avec l’Allemagne.

La demande publique ne constitue pas un vecteur de croissance et d’importation. L’Allemagne a inscrit dans la constitution un dispositif de limitation de l’endettement public (Schuldenbremse) qui plafonne le déficit structurel de l’État fédéral à 0,35 % du PIB et interdit, à partir de 2020, les déficits structurels des Länder sauf en cas de catastrophe naturelle ou de récession sévère. Le solde financier des administrations publiques est ainsi passé de -4,2 % en 2010 à +1,2 % en 2017.