4 août 2018

Le Coin des Conjonctures du 24 août 2018

Des taux d’intérêt toujours bien bas

Malgré une légère remontée constatée ces dernières semaines, les taux d’intérêt à long terme des pays de l’OCDE restent à des niveaux anormalement bas. En effet, au regard des taux de croissance et d’inflation, ils devraient être supérieurs de 2 à 3 points à leur niveau actuel. En Europe, la croissance est d’environ 2 % tout comme l’inflation ; aux États-Unis, la croissance s’est élevée à plus de 4 % au 2e trimestre et l’inflation dépasse 2 %. Or, le taux d’intérêt de l’OAT (Obligation Assimilable du Trésor français) à 10 ans est entre 0,7 % et 0,8 % et celui du titre de l’État américain à 10 ans se situe entre 2,8 et 3 %.

Depuis plus d’un an, on s’attend à un relèvement des taux à long terme en particulier pour l’immobilier. Or, les taux sont stables voire baissent légèrement. Plusieurs facteurs pèsent sur les taux à long terme.

Les conditions de transmission de la hausse des prix au sein de l’économie joueraient un rôle non négligeable dans l’affaiblissement structurel des taux d’intérêt. La répercussion de l’augmentation des prix à la consommation sur les coûts salariaux est beaucoup plus faible que dans le passé. La flexibilisation des marchés du travail, la mondialisation et l’ubérisation de l’emploi en seraient la cause. Par ailleurs, le freinage des prix apparaît de plus en plus structurel. En raison des capacités de production des pays émergents, les biens industriels sont orientés à la baisse. Au niveau de la distribution, le développement du canal digital pèse également sur les prix. En outre, ce canal permet l’arrivée sur le marché de nouveaux acteurs, en particulier au sein du secteur des services qui était, par nature, inflationniste. Malgré le retour de la croissance, l’inflation sous-jacente (inflation hors biens soumis à d’importantes fluctuations comme l’énergie) reste proche de 1 %, bien en-deçà de son niveau d’avant crise (2 %). L’inflation à long terme reste assez insensible aux politiques monétaires mises en œuvre à long terme. Elle n’est pas déterminée par la croissance de l’offre de monnaie mais par le fonctionnement des marchés du travail.

La faiblesse des taux d’intérêt est également imputable à l’excès mondial d’épargne. Avec la tertiarisation de l’économie, l’investissement tend à diminuer. Au sein de l’OCDE, en 2017, il n’avait pas retrouvé son niveau d’avant crise. Les pays émergents, en premier lieu la Chine, dégagent d’importants excédents d’épargne. Le taux d’épargne des Chinois est deux fois plus élevé que celui des habitants de l’Union européenne.

Les taux d’intérêt apparaissent de plus en plus décorrélés de la croissance économique et de l’inflation. La courbe des taux est plus aplatie qu’auparavant. Cette situation s’explique par la politique des banques centrales qui ont sciemment pesé sur les taux longs.

Les facteurs structurels jouent donc contre une forte appréciation des taux longs. Le relèvement des taux directeurs par la FED qui devrait être suivi en 2019 par la BCE ne devrait pas réellement modifier la donne. La hausse des taux devrait être graduelle, toute chose étant égale par ailleurs

 

Aider ses proches, une affaire qui marche !

Selon l’enquête Budget de famille de l’INSEE, en 2011, la moitié des ménages ont, au cours des deux mois précédant l’enquête, apporté une aide financière à un autre ménage. L’aide moyenne apportée représente environ 4 % de la masse totale du revenu des ménages, soit 36 milliards d’euros. L’aide financière entre ménages est soit directe, sous la forme d’un transfert monétaire, soit indirecte, sous la forme d’une prise en charge de certaines dépenses. Près d’un ménage sur cinq a effectué ainsi un versement occasionnel d’argent, pour un montant moyen de 370 euros. Le versement régulier d’argent est moins fréquent. Il est pratiqué par 8 % des ménages.

Les aides des ménages prennent majoritairement la forme d’aides indirectes non monétaires mais leur montant exprimé est plus faible. 37 % des ménages ont dispensé ce type d’aides pour un montant moyen de 270 euros par donateur. Ces aides peuvent être la fourniture de biens alimentaires (22 % des cas), de vêtements (14 % des cas), de chaussures (14 %), etc. Elles peuvent également consister en un prêt gratuit d’un logement ou d’une partie d’un logement (14 %). Les transferts monétaires s’élèvent à 19,1 milliards d’euros dont 60 % sont versés de manière occasionnelle. Le solde prend la forme d’aides non monétaires.

Famille, je vous aime

Sur les 19,1 milliards d’euros de transferts monétaires, 90 % sont des transferts entre membres d’une même famille vivant séparément et les 10 % restants correspondent à des transferts entre ex-conjoints ou amis. L’entraide familiale concerne essentiellement des ménages aidant leurs enfants, petits-enfants ou beaux-enfants (13 milliards d’euros). Les ménages peuvent être également amenés à aider leurs parents ou leurs grands-parents (pour 2 milliards d’euros). Les ménages pour un montant équivalent appuient financièrement d’autres membres de leur famille ou de leur belle-famille.

Les jeunes générations (celles de moins de 40 ans) reçoivent les trois-quarts de ces aides monétaires entre ascendants et descendants en ligne directe. Elles proviennent d’abord de leurs parents âgés de 40 à 59 ans (6 milliards d’euros), puis de leurs parents ou grands-parents âgés de 60 ans ou plus (3 milliards d’euros). Les générations « pivot », aux âges intermédiaires (de 40 à 59 ans), donnent à leurs enfants  deux fois plus qu’elles ne reçoivent de leurs propres parents. Si près de la moitié des ménages ont, au cours des deux mois précédant l’enquête, apporté une aide monétaire à un enfant ou un petit-enfant, seulement 14 % en ont destiné une à un parent ou un grand-parent.

Le montant et l’occurrence des aides apportées par les ménages en 2011 varient fortement selon l’âge de la personne de référence. C’est autour de 50 ans que les ménages en versent le plus. Avant 45 ans, le montant total des aides qu’ils versent avoisine 130 euros en moyenne sur deux mois. La part des aides versées dans le revenu total après solde des aides versées et reçues diminue ainsi légèrement, de 2,2 % pour les 25-29 ans à 1,9 % pour les 40-44 ans. À cette période de la vie où les contraintes financières sont plus importantes (arrivée des enfants, achat immobilier, etc.), les dépenses sont essentiellement destinées aux membres du ménage. À partir de 45 ans, les ménages commencent à donner davantage à d’autres ménages et le montant des aides atteint son maximum à 50-54 ans : 340 euros en moyenne sur deux mois, soit 5 % du revenu des ménages de 50-54 ans sur la période. Le soutien financier aux enfants est le plus élevé l’année de leur départ du foyer parental. Dans ce cas, il s’élève, sur deux mois, à 1 070 euros (contre 280 euros pour les ménages de 50-54 ans dont aucun enfant n’a déménagé en cours d’année).

Les jeunes de moins de 25 ans, les principaux bénéficiaires

80 % des moins de 25 ans perçoivent des aides. Sans aide, les jeunes auraient un niveau de vie égal à 52 % de la moyenne de la population. Avec ces dernières, leur écart avec la moyenne n’est que d’un tiers. Les jeunes ménages reçoivent en moyenne 790 euros sur deux mois (ou 1 000 euros par bénéficiaire), ce qui représente 26 % de leur revenu total. Les dépenses prises en charge pour autrui concernent près d’un jeune ménage sur deux. Les parents sont amenés à financer le logement, certaines dépenses en biens et services de loisirs, de vêtements et en repas.

Jusqu’à 40 ans, les ménages sont gagnants en matière de redistribution. Passé 50 ans, l’effet est inverse : les ménages aident davantage qu’ils ne sont aidés et leur niveau de vie s’en trouve affecté d’autant.

Les ménages les plus modestes reçoivent le plus d’aides de leur entourage. Parmi les ménages du premier décile de niveau de vie, 51 % ont reçu une aide en 2011 ; 35 % en don d’argent et 38 % par prise en charge de dépenses (les deux types d’aides pouvant être cumulés). Ils perçoivent également en moyenne des montants plus important. Les 10 % des ménages les plus pauvres reçoivent en moyenne 440 euros sur deux mois, soit plus du double du montant d’aides reçu en moyenne sur tous les ménages. Parmi les 10 % des ménages les plus pauvres, les étudiants ou apprentis ont perçu en moyenne 1 210 euros sur deux mois, soit 2,7 fois plus que la moyenne des 10 % des ménages les plus pauvres. L’aide bénéficie en second lieu aux jeunes ménages entrant sur le marché du travail (occupant un emploi ou au chômage). Si, avant 30 ans, et en particulier avant 25 ans, la famille constitue le principal soutien lors de la prise d’autonomie, passé cet âge, le dispositif assurantiel public de la protection sociale prend peu à peu le relais de l’entraide familiale.

L’entraide familiale joue un rôle important au cours de la période d’installation des jeunes ménages, mais elle intervient également dans les situations de monoparentalité (rupture conjugale, décès du conjoint, etc.). Ainsi, les familles monoparentales, dont le niveau de vie moyen est bien moins élevé, sont plus souvent aidées que les autres types de ménages. En 2011, 43 % de ces familles perçoivent une aide financière : 24 % par transfert monétaire (pour un montant de 1 010 euros sur deux mois par famille aidée) et 32 % par prise en charge de dépenses (pour un montant de 300 euros sur deux mois par famille aidée). Les familles monoparentales bénéficient également plus souvent de versements rendus obligatoires sur décision judiciaire (principalement des pensions alimentaires). Selon l’enquête de l’INSEE, près d’une famille monoparentale sur six en bénéficie, pour un montant annuel moyen de 4 000 euros en 2011, soit 14 % de leurs ressources. Malgré ces transferts (aides financières et versements obligatoires), le niveau de vie des familles monoparentales reste plus faible que celui des autres ménages.

Moins de transferts interfamiliaux dans les DOM

Les ménages résidant dans les DOM versent moins d’aides que les métropolitains. En 2011, 35 % d’entre eux ont aidé financièrement un autre ménage au cours des deux mois qui ont précédé l’enquête, par transfert monétaire ou par prise en charge de dépenses (contre 50 % en métropole). Ce moindre effort ne signifie pas que les ménages d’outre-mer sont moins généreux. En effet, la cohabitation de plusieurs générations au sein d’un même ménage plus fréquente dans les DOM, réduit par définition les transferts au sein des familles. La proportion de ménages dans lesquels au moins un parent de la personne de référence, ou de son conjoint le cas échéant, habite le même logement représente 2 % des ménages métropolitains contre 5 % des ménages dans les DOM. De plus, les enfants outremarins vivent plus longtemps chez leurs parents. 18 % des ménages sont composés d’au moins un enfant âgé de 20 ans ou plus contre 9 % en métropole (respectivement 10 % et 4 % avec un enfant de 25 ans ou plus). Le nombre de personnes par ménage est plus élevé dans les DOM qu’en métropole. Par ailleurs, une sur-représentation de ménages jeunes (à La Réunion, en Guyane et plus encore à Mayotte), un taux de chômage plus élevé, une proportion plus importante de familles monoparentales et un niveau de vie plus faible constituent autant de facteurs pouvant expliquer une proportion plus faible de ménages donateurs. En revanche, le montant moyen des aides versées est assez proche de celui de la métropole : 200 euros sur deux mois en moyenne en 2011 dans les DOM ; il varie de 150 euros pour les Mahorais à 230 euros pour les Guyanais, contre 210 euros pour les Métropolitains. Comme en métropole, la solidarité s’exprime principalement au sein des familles (90 % des aides en espèces) et davantage des ascendants vers les descendants : 69 % des aides versées en espèces sont destinées aux enfants ou petits-enfants et 15 % s’adressent aux parents ou aux grands-parents, soit légèrement plus qu’en métropole (11 %).

Le montant total des aides versées par les habitants des DOM s’élève à 870 millions d’euros, soit deux fois plus que le montant total des aides reçues. Les habitants des DOM étant nombreux à partir vivre en métropole, en particulier lorsqu’ils sont étudiants ou jeunes actifs, il est fort probable qu’une grande partie des aides versées par les ménages résidant dans les DOM soit destinée à des Domiens vivant en métropole.