13 octobre 2018

Le Coin des Epargnants du 13 octobre 2018

Le tableau financier de la semaine

 

  Résultats12 oct. 2018 Évolutionsur 5 jours Résultats31 déc. 2017
CAC 40 5 095,98 -4,91 % 5 312,56
Dow Jones 25 339,99 -4,19 % 24 754,06
Nasdaq 7 496,89 -3,79 % 6 959,96
Dax Allemand 11 523,81 -4,86 % 12 917,64
Footsie 6 995,91 -4,41 % 7 687,77
Euro Stoxx 50 3 194,41 -4,52 % 3 503,96
Nikkei 225 22 694,66 -4,58 % 22 764,94
Taux de l’OAT France à 10 ans (18 heures) 0,855 % -0,058 pt 0,778 %
Taux du Bund allemand à 10 ans (18 heures) 0,489 % -0,093 pt 0,426 %
Taux du Trésor US à 10 ans (18 heures) 3,152 % +0,106 pt 2,416 %
Cours de l’euro / dollar(18 heures) 1,1562 +0,36 % 1,1848
Cours de l’once d’or en dollars (18 heures) 1 219,177 +1,36 % 1 304,747
Cours du baril de pétrole Brent en dollars (18 heures) 80.077 -4,68 % 66,840

 

Octobre se rappelle au bon souvenir des marchés

Août et octobre sont des mois sans pitié pour les investisseurs. Les grandes crises boursières se concentrent sur ces deux mois. En octobre, le temps est au premier bilan et aux projections pour l’année à venir. C’est le temps des remises en cause ou le moment des peurs hivernales… Quel qui l’en soit, le CAC 40 a connu sa pire semaine depuis le mois de février avec un recul de 4,91 %. L’ensemble des autres grandes places ont connu de fortes baisses. Francfort a abandonné plus de 4,8 % et Londres près de 4,5 %. Les places américaines ont également fortement diminué, près de 5 % pour le Dow Jones et près de 4 % pour le Nasdaq.

Après avoir glorifié le retour de la croissance, les oracles tirent les signaux d’alerte. Dans ses prévisions automnales, le FMI estime que les menaces s’accumulent sur l’économie mondiale. Dans son dernier livre, « comment nous protéger des prochaines crises ? », Jacques Attali annonce que la survenue d’une nouvelle récession est probable à plus ou moins court terme.

Les pythies de la crise mettent en avant les effets délétères de la guerre commerciale sino-américaine et les conséquences de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis. Après avoir été abreuvés de crédits à taux bas, les acteurs économiques ont du mal à intégrer leur hausse qui est pourtant fort logique dans une économie mondiale enregistrant une croissance supérieure à 3,5 % et avec une inflation en hausse. Redonner de la valeur à l’argent est indispensable. Certes, il n’est pas inconséquent de réfléchir sur la pérennité de la croissance après la suppression du dopage monétaire. Mais il n’est pas rationnel de souligner les menaces de l’hyper-endettement favorisé par les taux bas tout en criant aux loups aux premiers jours de leur remontée. Pour le moment, la contagion des taux américains demeure faible en raison de la politique de rachat de la BCE et des politiques de crédit des banques. Ces dernières maintiennent des volants élevés de crédits à faibles taux tant pour des raisons concurrentielles que pour se plier aux consignes de la banque centrale. En revanche, sur les marchés, les entreprises souhaitant emprunter commencent à ressentir les effets de l’augmentation des taux.

La fin toute progressive des politiques monétaires non conventionnelles doit-elle s’accompagner d’une contraction sensible du cours des actions ? Depuis le début de l’année, contrairement aux prédictions et malgré les hausses des taux de la FED, le marché américain a été performant quand les indices européens sont en baisse. Les valeurs américaines ont profité de la forte croissance de l’économie dopée par la politique budgétaire et fiscale de Donald Trump. Des facteurs moins positifs concourent également à l’augmentation des cours comme la pratique de plus en plus importante des rachats d’actions par les grandes firmes. La hausse du dollar qui aurait également dû conduire à un ralentissement de l’appréciation des cours ne se fait que peu sentir. Ce processus de valorisation des cours pourrait être arrivé à son terme, le ralentissement de l’économie américaine étant attendu pour 2019 après plus de 9 ans d’expansion. La guerre commerciale créerait une prise de conscience de la survenue probable d’un retournement.

Face aux incertitudes pesant sur la croissance et après plusieurs semaines de hausse, le cours du pétrole a été en repli cette semaine en perdant plus de 4,5 %.

 

Réforme des retraites, attention chantier

 

Mercredi 10 octobre, dans le cadre d’un point d’étape avec les partenaires sociaux, le Haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a présenté une épure de la future réforme qui vise à instituer un système dit universel des retraites.

Un régime par répartition à points

Sans surprise, le futur système « universel » qui « remplacera les 42 régimes de retraite existants » sera « public et par répartition ». Comme aujourd’hui, les retraités toucheront des pensions financées sur les cotisations des actifs.

Le nouveau système concernera les régimes spéciaux, la fonction publique et les régimes dits alignés (régime général, régime agricole, indépendants, professions libérales). Néanmoins, les travailleurs indépendants dont le taux de cotisation actuel est plus faible que celui en vigueur pour le régime général, bénéficieront d’un régime de cotisations adapté afin de ne pas bouleverser les équilibres économiques de leur activité.

À la différence du système du régime général qui retient les 25 meilleures années ou celui des régimes spéciaux qui prend en compte le salaire des six derniers mois, l’ensemble de la carrière sera retenu dans le nouveau système. Les actifs acquerront des points durant toute leur vie professionnelle. Ces points accumulés seront convertis en pension au moment du départ à la retraite. Le plafond de cotisation devrait se situer autour de 3 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale. Les actifs cotiseront dans la limite de 120 000 euros bruts annuels de revenus d’activité, soit moins qu’actuellement. Pour les complémentaires, le plafond de cotisation est de 8 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale.

Des mécanismes de solidarité seront conservés

Les interruptions d’activité comme le chômage, l’invalidité, la maladie ou la maternité resteront compensées dans ce système par points qui accordera une bonification « pour chaque enfant, dès le premier enfant » et non plus à partir du troisième.

La réforme maintiendra les pensions de réversion pour les veuves et veufs et un minimum de pension pour les bas salaires et les carrières hachées. Aujourd’hui, cohabitent 16 régimes de réversion. Dans le cadre du futur régime universel, le Gouvernement, avec les partenaires sociaux, sera contraint de retenir de nouvelles règles. Est-ce que la réversion sera totalement mise sous condition de ressources et quel en sera le taux ? Nul ne le sait pour le moment.

La délicate question de l’âge de départ à la retraite

Si l’âge légal de départ à la retraite reste fixé à 62 ans, le Gouvernement a lancé l’idée d’un âge-pivot à 63 ans mais Jean-Paul Delevoye ne l’a pas reprise à son compte. Aujourd’hui, l’obtention de la retraite est conditionnée à un âge et à une durée de cotisation qui intervient également dans le calcul de la pension de base pour de nombreux régimes (régimes dits alignés). La levée de l’hypothèque de la durée de cotisation n’intervient qu’à 67 ans, âge de la retraite à taux plein.

Le passage au régime par points est supposé s’accompagner de la suppression de cette durée de cotisation. De ce fait, les assurés pourraient partir plus tôt que dans le système actuel, d’où l’introduction d’un dispositif dissuasif.

Avant 63 ans, la pension pourrait souffrir d’une décote comme cela existe pour les régimes de base actuels pour les assurés n’ayant pas la totalité des trimestres requis et qui partent avant 67 ans. De même, les pouvoirs publics pourraient s’inspirer du système qui entrera en vigueur pour les complémentaires le 1er janvier 2019. Ce système prévoit un abattement de 10 % de la pension durant trois ans dans la limite des 67 ans pour tous les assurés partant sans avoir 4 trimestres de plus au nombre requis pour obtenir la retraite à taux plein.

En revanche, le Gouvernement semble avoir abandonné l’idée d’instituer des comptes notionnels qui auraient permis de calculer le montant de la pension en fonction de l’espérance de vie de chaque génération. Ainsi, en vertu de ce système, une personne partant à la retraite à 62 ans toucherait une pension plus faible qu’une personne partant à 67 ans car son espérance de vie à la retraite serait plus longue.

La délicate question de l’alignement des taux de cotisation entre le privé et le public

Le Gouvernement souligne dans son rapport que le taux de cotisation dans le nouveau régime sera proche de 28 % pour les assurés et les employeurs qu’ils soient publics ou privés. Or, aujourd’hui, si pour les cotisations salariées, une convergence est en cours entre le public et le privé, les taux sont très différents au niveau des employeurs. Le taux fictif pour l’État (taux correspondant à la dotation d’équilibre pour le compte d’affectation des pensions civiles) est de 74 %. Le taux de cotisation employeur pour les pensions militaires est de 126 %. Le taux de cotisation pour les fonctions publiques territoriale et hospitalière est de 30 %. Une harmonisation du taux à 28 % sans soultes versées par les administrations publiques aboutirait à un transfert de charge sur le privé qui pourrait atteindre une vingtaine de milliards d’euros d’ici 2040. Les taux de cotisation élevés traduisent des ratio cotisants / retraités dégradés. Or, ceux-ci sont amenés à se dégrader nettement dans les prochaines années pour les fonctions publiques territoriale et hospitalière. Dans un système universel, la solidarité démographique jouera plus facilement que dans le système actuel (dispositif complexe des compensations).

La génération 63 ou 64 inaugurera le nouveau système

Comme prévu, la réforme ne concernera pas les actuels retraités, ni ceux qui partiront d’ici 2025. La réforme devrait s’appliquer à partir de la génération 1963 ou 1964. Le Gouvernement semble privilégier une bascule avec prise en compte des droits acquis dans l’ancien système. Ainsi, cohabiteront durant une quarantaine d’année les deux modes de calcul (voire plus si est prise en compte la délivrance des pensions). Le Gouvernement semble avoir écarté l’idée de calculer les pensions uniquement sur la base des points. Dans une telle bascule, il aurait été nécessaire d’attribuer des points en fonction des rémunérations passées ce qui supposait de reconstituer toutes les carrières. Il semblerait que cette reconstitution soit difficile à opérer dans la fonction publique. Un tel transfert aurait pu occasionner un nombre important de gagnants et de perdants.

Le chantier est loin d’être clos

 Ces quelques pistes n’épuisent pas, loin de là, le sujet de la réforme. Il reste à traiter la question de la gouvernance (système étatisé ou paritaire), l’intégration des régimes spéciaux et de la fonction publique, les compensations éventuelles pour les perdants, les règles d’indexation du point et l’articulation avec les régimes par capitalisation. La question des personnels des différentes caisses de retraite et la dévolution des réserves qu’elles ont pu constituer au fil des années demeurent également en suspens.