15 octobre 2016

Le Coin des tendances (15 octobre)

Les salons à papa, c’est fini ?

 Le salon de l’auto, rebaptisé Mondial de l’automobile vit il ses dernières heures ? Dans les années 60, il était l’évènement de la rentrée. Il se tenait tous les ans et non, comme aujourd’hui, une fois tous les deux ans (depuis 1976). Il attirait professionnels et particuliers qui y allaient pour découvrir les nouveaux modèles mais aussi pour acheter leur véhicule. Au temps du digital, d’Internet, ces salons ont-ils encore un sens ?

Le premier salon de l’automobile s’est tenu en 1898, dans le Jardin des Tuileries à l’initiative de l’Automobile Club de France. Pour participer à ce salon, il y avait une condition : les voitures exposées aient pu parcourir sans panne la distance Paris-Versailles- Paris. 232 modèles furent alors exposés et reçurent la visite de plus de 140 000 personnes.

En 1901, c’est le Grand Palais qui accueille pour la première fois le salon de l’automobile. Des vélos, des bateaux et des aérostats sont également exposés et ce n’est qu’en 1962, pour des raisons de place, que le salon migre vers le Parc des expositions de la porte de Versailles. C’est enfin en 1988, que le « Salon de l’automobile » est rebaptisé « Mondial de l’Automobile » traduisant le fait que l’industrie de l’automobile s’est mondialisée. Depuis sa création, le salon a décuplé le nombre de visiteurs dont le nombre dépasse 1,4 million.

Même s’il demeure le principal salon automobile mondial avec ceux de Detroit, Genève, Francfort, Shanghai ou Tokyo, des interrogations se font jour sur sa pérennité. L’édition 2016 est marquée par l’absence de plusieurs grandes marques comme Aston Martin, Bentley, Bugatti, Cadillac, Chevrolet, Ford Lamborghini, McLaren ou Rolls Royce. Certes, il s’agit de marques de luxe qui ne réalisaient pas une part importante de leur chiffre d’affaires sur le salon. Mais, cela symbolise que le Mondial n’est plus le lieu incontournable pour vendre des voitures.

Le monde de l’automobile connaît une véritable mutation à vitesse accélérée. Jusque dans les années 80, le lancement d’un nouveau modèle constituait un évènement d’autant plus salué qu’il était relativement rare. Un modèle avait vocation à occuper le terrain durant des années voire des décennies comme ce fut le cas pour la 2CV, la 4L, la Coccinelle de Volkswagen ou la mini de BMC (British Motor Compagnie).

La présentation au sein d’un salon de renommée internationale faisait partie de l’exercice obligée à une époque où les moyens de communications et de promotion étaient rares. En outre, le salon attirait curieux et acheteurs. Aller au salon, c’était alors participé à une messe, celle des Trente Glorieuses, celle de la consommation. Le salon était aussi celui des Français accédant aux classes moyennes qui pouvaient tout à la fois toucher les modèles qu’ils aspiraient et contempler les voitures de luxe.

Depuis trente ans, le durée de vite des modèles se raccourcit. La voiture s’adapte au monde de la mode, des collections, des innovations qui n’en sont pas toujours. Les restylages sont de plus en plus fréquents. Par ailleurs, avec l’utilisation d’une même plateforme, un constructeur peut bâtir un grand nombre de modèles qui aux yeux du profane seront différents. De nombreuses pièces sont communes à plusieurs types de voitures. La constitution de grands groupes comme Volkswagen, Renault-Nissan, Toyota permet multiplier les modèles tout en réduisant les frais.

Du fait de la présence d’un grand nombre de groupes automobiles, les salons ne permettent plus de faire le buzz comme autrefois. Aujourd’hui, sur un même lieu des marques issues d’Asie, d’Amérique et d’Europe se côtoient. Il est, dans ces conditions, difficile d’être visible.

L’autre menace à laquelle est confrontée le Mondial de l’Automobile, c’est la concurrence des salons consacrés aux nouvelles technologies. Le véritable salon de l’automobile ne se tient peut-être déjà plus à Paris mais à Las Vegas avec le Consummer Electronic Show. La frontière entre le digital et l’automobile est de plus en plus ténue. L’informatique, la connectique, la gestion de l’énergie prennent le pas sur la mécanique. La voiture c’était, avant, un châssis, une carrosserie, un moteur et quatre roues. Désormais, c’est un ordinateur relié à Internet et à des satellites, entouré de quatre roues. Tesla, Apple, Google sont devenus des acteurs incontournables de l’industrie automobile. Les voitures électriques et celles sans conducteur dépendent avant tout de leurs systèmes d’exploitation.

Si ces dernières années, les firmes informatiques ont semblé prendre le pas sur les vieux constructeurs, elles n’ont pas encore les moyens de les placer sur les étagères des dinosaures. La conception, la fabrication et la vente d’une voiture qui est un bien physique complexe ne peuvent pas être assimilées à celles d’un logiciel ou même d’un téléphone portable qui est un objet très standardisé, léger et vendu de manière identique tout autour de la planète. En outre, l’achat d’une voiture obéit encore à des facteurs très subjectifs d’esthétisme, de positionnement social, etc. Même si pour certains, il y a une banalisation de l’automobile et pour d’autres, en raison de nuisances qu’elle provoque, un rejet, elle demeure encore pour un grand nombre d’acheteur un sujet de passion, d’émotion. Pour s’en convaincre, il suffit de constater les évolutions des ventes de certains modèles. Renault a connu plusieurs années noires dans les années 2000 du fait de carrosseries aux formes contestées. Ce fut le cas de la Vel Satis ou de la Laguna. En revanche, le redécollage, depuis trois ans, repose avant tout sur le renouveau du style. Le succès de la Clio, de la Captur, des nouvelles Megane et Espace en sont les meilleures preuves.

Le Mondial de l’Automobile qui jusqu’à maintenant privilégie l’effet masse à l’effet média et les rencontres de haut niveau doit certainement se repositionner afin que la France reste un des lieux clefs de l’industrie automobile. Il ne peut plus être un grand centre commercial où des centaines de milliers de visiteurs déambulent tant bien que mal pour approcher quelques secondes des voitures qu’ils ont vu par ailleurs. Il faut réinventer l’expérience en misant sur le rêve, en permettant aux participants d’être des acteurs en pouvant accéder facilement à des simulateurs leur donnant l’illusion de conduire les voitures. Le Mondial doit monter en gamme faute de quoi il s’étiolera. Il doit se réinventer comme tous les salons. Les visiteurs ne veulent plus être passifs et regarder dans la cohue des voitures aussi séduisantes soient elles.

 

Le marché du travail à deux vitesses, une réalité  

Le contrat à durée indéterminée (CDI) est de très loin le premier contrat de travail. En 2015, 85,5 % des salariés sont couverts par un tel contrat et cette proportion ne varie qu’à la marge depuis le début des années 2000. Néanmoins, ce chiffre ne doit pas masquer la segmentation croissante du marché du travail.

Aujourd’hui, la majorité des embauches se fait en contrats courts ; par ailleurs, la mobilité s’accroît au niveau des emplois et au niveau des statuts. Près d’un actif sur cinq change d’employeur ou connaît un épisode de chômage chaque année contre un sur huit il y a trente ans. En effet, du début des années 1980 jusqu’au début des années 2000, la part des actifs qui connaissent une transition professionnelle est passée de 12 % à 16 %. Le passage par la case chômage a fortement augmenté et bien plus vite que les transitions d’emploi à emploi. 1,2 million de personnes sont au chômage depuis plus d’un an. Le taux de chômage de longue durée a ainsi fortement progressé, passant de 2,5 % à 4,3 % de la population active entre 2008 et 2015

Cette montée du chômage durable s’est également accompagnée d’une progression du « halo autour du chômage ». En France métropolitaine, le nombre d’inactifs souhaitant travailler a en effet progressé de 230 000 depuis 2008, passant de 1,1 million à 1,4 million en 2015 (source Ministère des Affaires sociales). Il est à noter que ce phénomène est beaucoup moins prononcé qu’aux États-Unis où la baisse du taux de chômage sur ces dernières années est due pour partie au découragement de chômeurs qui ne cherchent plus d’emploi même si depuis quelques mois il y a en la matière une évolution positive.

Fin 2015, le taux d’emploi aux États-Unis n’a pas retrouvé son niveau d’avant la crise (69 % contre 71 % en 2008), quand le chômage est passé de 9,4 % à moins de 5 %. Que ce soit aux Etats-Unis mais aussi au sein des pays européens, il y a de plus en plus d’allers-retours entre emploi, chômage et non-activité.

Les transitions de l’emploi vers le chômage ont été près d’une fois et demie plus nombreuses entre 2008 et 2009 qu’avant la crise économique et financière. Elles se sont depuis installées à un niveau sensiblement supérieur à celui de la période d’avant-crise. Parmi les actifs connaissant une transition professionnelle d’une année sur l’autre, près de six sur dix sont concernés par un aller-retour entre emploi et chômage sur la période 2008-2014, contre un peu plus d’un sur deux sur la période 2003-2008.

Le fait marquant de ces dernières années est la montée en puissance des contrats de courte durée. De plus en plus d’actifs sont amenés à travailler à la mission, à la tâche. Ils sont également nombreux à avoir plusieurs employeurs en même temps. Il convient de souligner que la succession de CDD dans une même entreprise est fréquente. Ainsi, en 2012, quatre personnes sur dix embauchées connaissent une réembauche chez un ancien employeur alors que c’était le cas d’une personne sur quatre en 2000. Cette pratique est très courante dans le secteur des services (restauration, hôtellerie, services à la personne).

La segmentation du marché du travail se matérialise par la faible transformation des CDD en CDI. Si le taux de conversion des CDD en CDI au bout d’un an était d’un sur deux en 1982, il n’est plus sur la période 2008/2015 que d’un sur cinq. Le passage dans la sphère du CDI pour les salariés en intérim est encore plus faible, 18 % sur la période 2008-2014.

Cette segmentation du marché du travail concerne évidemment les non-diplômés et les jeunes générations. Les générations sorties du système éducatif sans diplôme entre 2004 et 2010 ne sont que 24 % à avoir en 2010 un emploi en CDI  contre 34 % en 2004; en revanche, la proportion de diplômés en master ayant un tel emploi est passée de 68 à 79 %. Il convient de souligner que les retours à l’emploi entraînent de plus en plus un déclassement. Le nouvel emploi est de plus en plus souvent à temps partiel. Il n’est pas rare qu’il soit demandé à l’actif de prendre le statut d’auto-entrepreneur.

 

La proportion des personnes inscrites à Pôle emploi et en activité réduite a presque doublé depuis le milieu des années 1990 pour atteindre plus du tiers des demandeurs d’emploi de catégories A, B ou C. Les personnes à temps partiel qui souhaiteraient travailler davantage sont  passées de 900 000 à 1,7 million de 1990 à 2003.