13 juin 2020

Le Coin des Tendances

La Covid-19 et la transition énergétique

En 2009, les pays du G20 se sont engagés à supprimer progressivement les subventions aux combustibles fossiles. L’OCDE rappelle que les aides publiques aux énergies fossiles seraient plus efficaces si elles étaient affectées à la réalisation d’infrastructures en particulier pour les énergies renouvelables.

De nombreux États entendent profiter de la crise sanitaire pour accélérer la transition énergétique. Le Gouvernement français a ainsi lié l’octroi de certaines de ses aides à la réduction des émissions des gaz à effet de serre (Air France, par exemple). Dans le prolongement des accords de Paris et avant même la crise, selon l’OCDE et l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), le soutien public à la production et à la consommation d’énergies fossiles est en baisse. En 2019, ce soutien a représenté 478 milliards de dollars, en recul de -18 % par rapport à 2018. La baisse doit être relativisée en raison de la baisse des cours qui amène les États à réduire leurs aides. Par ailleurs, l’OCDE souligne qu’au sein de 44 États avancés et émergents, les aides publiques ont augmenté l’année dernière de +38 %.

Dans 42 États, les gouvernements maintiennent des subventions pour diminuer le prix de l’énergie pour les consommateurs finaux. La crise de la Covid-19 permet de réduire ses subventions en raison de l’effondrement du prix des énergies fossiles. Les services de l’OCDE estiment que les pouvoirs publics devraient s’engager à ne pas réinstituer les subventions quand les prix augmenteront à nouveau. Par ailleurs, ils recommandent d’engager des programmes ambitieux en faveur de la transition énergétique afin de soutenir l’emploi et de rattraper le retard accumulé ces dernières années en matière de décarbonisation des économies.

Les sommes économisées grâce à la baisse des prix pourraient être affectées à cette transition. Selon les prévisions de l’AIE, l’effondrement des prix des énergies fossiles et de leur consommation du fait de la Coronavirus devrait ramener les subventions à la consommation à 180 milliards de dollars en 2020, soit le niveau le plus bas depuis 2007, année des premières statistiques.

Espérance de vie, la France maintient ses positions

L’espérance de vie moyenne au sein de l’Union européenne est de 83,7 années. La France se situe au troisième rang pour l’espérance de vie à la naissance des femmes qui est de 85,5 années. Ces dernières sont devancées par les Italiennes (85,6 années) et les Espagnoles (86,3 années). Pour les hommes, la France ne se classe qu’au neuvième rang. L’espérance de vie masculine à la naissance est de 79,5 années, juste au-dessus de la moyenne européenne de 78,2 années et loin derrière l’Italie (81,2) et Chypre ainsi que la Suède (80,9).

En 2018, les femmes vivent entre 3 et 10 ans de plus que les hommes dans les pays de l’Union européenne. L’écart moyen est de 5,5 ans. Il est le plus faible aux Pays-Bas (3,1 années) et le plus important en Lituanie (9,8 années). La France se situe au-dessus de la moyenne européenne avec un écart de 6 ans.

Cercle de l’Épargne – données INSEE

En France, championne de l’espérance de vie des super-seniors

Pour l’espérance de vie à 60 ans, la France se classe au deuxième rang pour les femmes (27,6 années) et au quatrième rang pour les hommes (23,2 années). La moyenne européenne est respectivement de 25,8 et de 21,8 années. Pour les femmes, l’espérance de vie à 60 se place juste derrière l’Espagne (27,8 ans). Pour les hommes, la France se situe juste derrière la Suède (23,4 ans), l’Italie (23,3 ans) et l’Espagne (23,3 ans).

Cercle de l’Épargne – données INSEE

À 80 ans, la France est le pays de l’Union où l’espérance de vie est la plus élevée pour les femmes (11,1 années) et le deuxième derrière le Luxembourg pour les hommes (9,0 années).

Cercle de l’Épargne – données INSEE

Les écarts d’espérance de vie entre les différents pays sont liés à de multiples facteurs : systèmes de santé, politiques de prévention (sécurité routière, éducation nutritionnelle, prévention sexuelle, lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, etc.), mesures sanitaires ou bien encore les dépenses de santé par habitant.

L’espérance de vie plus longue des femmes a pour conséquence qu’elles passent davantage d’années avec des incapacités ou des limitations physiques. En 2017, l’espérance de vie en bonne santé s’élevait, en France, à 64,9 années pour les femmes et à 62,5 années pour les hommes, contre respectivement 64,0 et 63,5 années au sein de l’Union européenne. L’écart entre femmes et hommes est donc bien moindre selon cet indicateur.

Un ralentissement marqué des gains d’espérance de vie

L’espérance de vie a fortement progressé depuis 1950. Elle continue encore à augmenter mais à un rythme moindre depuis une dizaine d’années tant pour les femmes que pour les hommes. En 2006, l’espérance de vie à la naissance dans l’Union était en moyenne de 82,0 ans pour les femmes et de 75,6 ans pour les hommes, contre pour rappel 83,7 et 78,2 ans en 2018. En douze ans, les femmes ont donc gagné 1,7 an (0,14 par an) et les hommes 2,6 ans d’espérance de vie (0,22 par an). En France, lors de ces douze dernières années, l’espérance de vie des femmes s’est accrue de 1,3 an et celle des hommes de 2,4 ans. Dans la quasi-totalité des pays européens, l’écart d’’espérance de vie entre les hommes et les femmes tend à se réduire. En France, il est passé de 7,1 à 6 ans de 2006 à 2018.

Depuis 2015, le ralentissement des gains d’espérance de vie est plus marqué. La succession de grippes saisonnières plus sévères explique en partie cette évolution. Le vieillissement de la population la rend plus sensible aux épidémies. Par ailleurs, les crises de 2008 et de 2011 ont pu, en Europe, freiner l’augmentation des dépenses de santé et ainsi peser sur l’espérance de vie surtout après 60 ans.

Des écarts importants entre les pays européens

De fortes disparités géographiques existent au sein de l’Union. Dans les pays de l’Est, l’espérance de vie a baissé après la chute de l’URSS, baisse plus marquée pour les hommes que pour les femmes. Ces pays ont enregistré un fort courant d’émigration, les jeunes et les diplômés sont partis. Ce processus a des effets par ricochet sur l’espérance de vie. En Estonie, l’espérance de vie des hommes était inférieure de 8,5 ans à celle des femmes en 1988, mais de 11,5 ans dix ans plus tard et encore de 10,6 ans en 2008. Une évolution identique est constatée en Bulgarie, en Hongrie, en Roumanie et en Lituanie. À l’exception de la Hongrie, l’écart reste plus important dans ces pays en 2018 qu’en 1988.

Démographie mondiale, révolutions en vue ?

Selon les dernières projections démographiques de l’ONU, contrairement à quelques idées reçues, la croissance démographique ralentit. De 1970 à 2020, le taux de croissance a été divisé par deux passant de 2,05 à 1,1 % par an. La population mondiale qui s’élève, en 2020, à 7,8 milliards de personnes devrait atteindre 8,5 milliards en 2030 et 9,7 milliards en 2050. Le taux de fécondité baisse régulièrement. Il est ainsi passé de 3,9 en 1965 à 2,4 actuellement. Il pourrait s’élever à 2,2 en 2050. Entre 1950 et 1955, en moyenne, une femme donnait naissance à 5 enfants. Aujourd’hui, ce nombre est de 2,5. Il pourrait passer en-dessous de 2 d’ici 2100. La baisse de la fécondité est constatée dans presque tous les pays. Elle s’explique par des facteurs d’ordre éducatif et économique. Par ailleurs, la diminution de la mortalité infantile conduit les familles à réduire le nombre d’enfants.

L’hégémonie urbaine

La ville, lieu d’échanges, espaces de mutualisation, de services, d’interaction, s’est imposée pour la vie humaine. Avec la diminution de la population agricole en lien avec l’amélioration des gains de productivité de l’agriculture, la croissance des villes ne s’est jamais démentie. L’épidémie de la Covid-19 peut-elle entraver ce processus ? Au regard des grandes épidémies passées, un ralentissement de l’urbanisation pourrait être constaté sans pour autant provoquer un renversement de cette tendance de fond.

Au niveau mondial, le taux d’urbanisation moyen est supérieur à 50 % et pourrait se rapprocher de 70 % d’ici 2050, sachant que dans les pays avancés il dépasse déjà 75 %. Les grandes métropoles s’autonomisent des États dont elles dépendent. Des agglomérations comme New Dehli (43 millions), Tokyo (36 millions) ou Shanghai (34 millions) ont des populations supérieures à un grand nombre d’États. Une trentaine de villes comptent plus de 10 millions d’habitants. Elles seront plus de 40 en 2030. La ville de Lagos au Nigeria qui aujourd’hui compte 30 millions d’habitants en aura 50 millions en 2050 et atteindra peut-être entre 85 et 100 millions à la fin du siècle. Elle aura alors plus d’habitants que la France.

Les grandes villes comportent une part croissante de population temporaire (touristes, étudiants et actifs en déplacement). Les résidents temporaires représentent 15 à 20 % de la population des grandes cités. Avec le confinement lié à la Covid-19, elles se sont vidées en quelques jours du quart de leur population. Le départ des résidents temporaires s’est accompagné de celui des résidents qui avaient une résidence secondaire ou qui avaient de la famille en-dehors. Ces métropoles qui magnétisent sont très fragiles du fait de la très forte densité de la population. Elles dépendent des réseaux de transport et d’information. Cette vulnérabilité a pu être observée avec la crise de la Covid-19 qui a mis sous tension les services hospitaliers, crise qui a fait suite à celles des « gilets jaunes » et des retraites. La majorité des grandes cités se situent en bord de mer. Avec l’affaissement des sols et la montée des eaux, elles devront engager des dépenses d’infrastructures très importantes. Le réchauffement climatique constitue également un défi de première envergure. Les températures sont de 2 à 5 degrés supérieurs au cœur de ces cités qu’à l’extérieur.

Y-a-t-il trop d’hommes ?

Dans certains pays, le ratio hommes/femmes est très déséquilibré. Si à la naissance, il y a 105 garçons pour 100 filles, ce ratio atteint fréquemment 110 dans de nombreux pays émergents ou en développement. En Chine, il était de 116 pour 100. Dans certaines régions, il atteint jusqu’à 140 pour cent, en particulier en Inde. La préférence des familles pour les garçons et les mauvais traitements supportés par les femmes expliquent en partie cet écart. Par ailleurs, l’émigration concerne essentiellement les hommes, ce qui génère des déséquilibres démographiques. Ainsi, en Arabie saoudite, la population est masculine à 58 %. Au sein des États d’Europe de l’Est, les femmes sont majoritaires à 54 %, les jeunes hommes ayant tendance à émigrer vers l’Europe de l’Ouest.

Une profonde mutation au niveau des puissances démographiques sur fond de vieillissement de la population

Dix pays seront responsables de la plus grande partie de l’accroissement démographique de ces trente prochaines années. A l’exception des États-Unis, ces pays sont tous des pays émergents ou en développement. L’Inde, le Nigéria, le Pakistan et la République Démocratique du Congo seront les quatre pays connaissant la plus forte progression de la population.

Le vieillissement rapide de la population mondiale

La France qui a été précurseur en la matière de vieillissement a mis 114 ans pour connaître un doublement de sa population de plus de 60 ans quand il en faudra 28 pour l’Inde, 25 pour la Chine et 17 pour le Vietnam. Ce vieillissement est la conséquence de gains très importants de l’espérance de vie et de la diminution du taux de fécondité. A l’échelle mondiale, l’espérance de vie a ainsi atteint 72,6 années en 2020 et pourrait dépasser 77 ans en 2050. L’âge médian, qui partage l’humanité en deux ensembles de même poids augmente en raison de ce vieillissement. Il est passé de 1965 à 2020 de 22 à 30,9 ans. Par ailleurs, la proportion des plus de 65 ans représente 9 % de la population mondiale. Elle devrait être de 11 % en 2030 et de 16 % en 2050.

Deux continents sont en première ligne pour le vieillissement, l’Asie et l’Europe

L’Asie est entrée processus rapide du vieillissement en raison de très faibles taux de fécondité. En Chine, il se situe entre 1,4 et 1,7. La population active aurait atteint son sommet et commencerait à diminuer. Au Japon, la population devrait diminuer de 46 millions d’ici 2065. Ce pays perd près de 500 000 habitants par an. En Corée du Sud, le taux de fécondité n’est plus que de 0,98. À Séoul il atteint même 0,76.

L’Europe connaît également un phénomène de dépeuplement mais qui n’est pas homogène. Ainsi, deux pays proches comme la Lituanie et la Suède évoluent démographiquement de manière opposée. Le premier ne renouvelle pas sa population quand le second se démarque par un taux de fécondité relativement élevé et par une immigration importante. L’Europe du Sud connaît des taux de fécondité très bas, 1,29 au Portugal, 1,30 en Grèce, 1,33 en Italie ainsi qu’en Espagne. Dans les Länder de l’Est de l’Allemagne ainsi que dans les anciennes démocraties populaires, le taux de fécondité s’est effondré après la chute de l’URSS. Cette partie de l’Europe enregistre un dépeuplement inédit. En 30 ans, la population y a diminué de près de 20 %. Un mouvement d’émigration a vidé ces territoires ; seules la Tchéquie, la Slovénie et la Hongrie échappent à cette désertification. La population roumaine est passée de 23 à 19 millions depuis la chute de Ceausescu en 1989 à aujourd’hui. Depuis 1989, la Bulgarie a perdu plus de deux millions d’habitants. D’ici 2050, ce pays pourrait encore perdre entre 1 à 2 millions d’habitants. Selon l’ONU, la Moldavie devrait, de son côté, voir fondre sa population de moitié d’ici 2100.

L’Afrique, le dernier continent à s’engager dans la transition démographique

Jusqu’au début du XXe siècle, le continent africain était sous-peuplé avec moins de 100 millions d’habitants, notamment en raison, de la traite. Depuis le milieu du siècle dernier, ce continent connaît une croissance démographique exponentielle. Le taux de fécondité, même s’il est en baisse, demeure élevé, soit 4,4 pour la période 2015/2020. Il était de 6,6 entre 1975 et 1980. L’âge médian est de 19,7 années. L’augmentation de la population est essentiellement due aux États d’Afrique subsaharienne où 62 % des habitants ont moins de 25 ans. Le nombre d’habitants en Afrique devrait passer de 1,3 à 2,5 milliards en 2050. En 2100, ce chiffre pourrait se situer autour de 4 milliards. À la fin du siècle, l’État le plus peuplé de la planète ne sera plus la Chine ou l’Inde mais le Nigéria. Cette forte augmentation de la population conduit, pour le moment, à son appauvrissement du fait d’une croissance économique qui reste trop faible. Au niveau mondial, 70 % des habitants les plus pauvres vivent en Afrique. Ce taux pourrait être de 90 % en 2030.

Un nouvel ordre géopolitique sur fond démographique

De tout temps, la puissance des États est intimement liée à leur poids démographique. La France a dominé l’Europe continentale du XVIIe jusqu’au début du XIXe siècle du fait de sa supériorité démographique. L’Allemagne, avec son unification, ainsi que la Russie l’ont supplanté à partir de 1871. La montée en puissance des États-Unis est tout autant technologique que démographique. L’émergence de la Chine ne peut pas être déconnectée de son poids démographique. Dans l’histoire, de petits pays ont pu s’imposer sans pour autant être dotés d’une population nombreuse. La Suisse, le Luxembourg ou la Suède sont des exemples particuliers ; par ailleurs, ces États ne prétendent pas à jouer le rôle de grandes puissances. Au-delà du nombre absolu d’habitants, la puissance d’un État dépend avant tout de la taille de sa population active et en particulier de la proportion de 25/40 ans. Les pics de croissance sont constatés quand cette proportion est au plus haut. D’ici 30 ans, l’Inde sera la première puissance démographique avec 1,6 milliard d’habitants. Elle devancera alors nettement la Chine (1,4 milliard) qui sera confrontée à une forte augmentation de ses personnes âgées. Le Nigéria s’imposera avec plus de 400 millions d’habitants comme la troisième puissance démographique. Les États-Unis seront alors la seule puissance occidentale parmi les dix pays les plus peuplés. En 2100, la population de ce pays devrait s’élever à 400 millions sous réserve de conserver une immigration assez élevée. Compte tenu de son avance technologique, cette vitalité démographique permettrait de maintenir ses positions économiques même si un recul relatif est à attendre. Les États d’Europe, la Russie mais aussi le Japon auront décroché. La Russie qui compte aujourd’hui 145 millions d’habitants devrait poursuivre son déclin. En 2100, sa population pourrait ne s’élever qu’à 126 millions. Cette diminution posera avec encore plus d’acuité le problème du contrôle des territoires en Asie qui sont convoités notamment par les Chinois.

L’autopartage au service de la transition énergétique

Avec la saturation automobile au sein des grandes métropoles et afin de lutter contre le réchauffement climatique, l’autopartage est apparu, depuis une petite dizaine d’années, comme une solution. Si les premières initiatives d’autopartage remontent aux années 1970, ce dernier prend son essor à partir des années 2000. L’autopartage permet une rationalisation du parc automobile avec une diminution du taux d’équipement des ménages et une utilisation plus importante des véhicules partagés. L’autopartage prend plusieurs formes. Les véhicules peuvent être partagés au sein d’une entreprise, ils peuvent être mis à disposition de particuliers par des entreprises ou être partagés entre particuliers. La location traditionnelle réalisée par des loueurs comme Hertz ou Europcar est une forme d’autopartage.

Initialement, le choix de l’électrique pour l’autopartage était une conséquence des chocs pétroliers qui avait renchéri le prix du pétrole. Plusieurs initiatives publiques avaient vu le jour sans réel succès dans les années 70 et au début des années 80. La vision écologique de l’autopartage avec propulsion électrique est portée pour la première fois par la ville de La Rochelle qui, à partir de 1993, met à disposition de ses habitants des voitures. 22 villes avaient l’intention avec le concours du groupe PSA de suivre l’exemple de La Rochelle. Elles y ont renoncé devant les coûts élevés de l’expérience.

Après la prise de conscience des conséquences des émissions des gaz à effet de serre et avec le développement des outils numériques qui simplifient la gestion des flottes de véhicules, l’autopartage prend un nouvel essor à partir de 2008. Ainsi, la municipalité de Paris met en place Autolib’ à partir de 2011. Une structure intercommunale a été créée, le syndicat mixte Autolib’, regroupant 19 villes dont Paris. Pour le choix des véhicules et leur gestion, cette structure a retenu le Groupe Bolloré qui a développé la Bluecar. L’objectif était alors d’avoir 200 000 abonnés en quatre ans afin d’équilibrer les coûts. 4 000 voitures ont été acquises et mises en partage. Le 21 juin 2018, en raison de l’accumulation des pertes, le syndicat Autolib’ a voté la résiliation anticipée du contrat. Des initiatives privées ont pris le relais. Les constructeurs automobiles, les loueurs traditionnels et les start-ups reprennent alors le flambeau en proposant des services d’autopartage dans les grandes villes. Ainsi à Paris, trois opérateurs proposent un service de location sans station et sans réservation. Le retour du véhicule est libre. Quatre opérateurs proposent, par ailleurs, un service d’autopartage en boucle avec des emplacements réservés.

Au sein de la métropole lyonnaise, un service d’autopartage a été institué en 2013. Plus de 300 véhicules sont à disposition des habitants de l’agglomération, répartis au sein de plus de 100 stations. D’autres grandes métropoles ont également mis en œuvre des services d’autopartage comme à Nantes. Des plateformes digitales permettent sur tout le territoire d’accéder à des voitures possédées par des particuliers sur le même modèle que la location de logement. Dans ce cas, la composante électrique disparaît.

Cet été, une expérience d’un nouveau type sera menée à Ajaccio. Le loueur traditionnel Hertz a noué un partenariat avec le construction chinois Aiways et proposera à la location 500 U5, un SUV électrique. L’objectif du constructeur chinois est de faire connaitre son modèle électrique qui dispose d’une autonomie de 250 à 400 kilomètres. Il a choisi la Corse en raison des distances faibles réalisés par les vacanciers durant l’été et d’un relief escarpé permettant une recharge en descente et lors des freinages. En revanche, l’île dispose de peu de bornes électriques, une centaine, essentiellement en bord de mer.

L’Allemagne apparaît plus avancée que la France en matière d’autopartage. Dès les années 1980, plusieurs grandes villes avec l’appui des constructeurs locaux mettent à disposition des voitures. En 2019, l’autopartage comptait 2,5 millions de clients et plus de 23 000 voitures à partager dans près de 800 villes. Au mois de juin 2019, Volkswagen a lancé son service, « We Share » à Berlin en ne proposant que des voitures électriques dont plus de 1500 e-Golf. Le service « We Share » est présent dans plus de 12 pays européens. Daimler Mercedes et BMW possèdent deux entreprises d’autopartage Car2go (présent en France à Lyon et Paris) et Drive Now dont fait partie également le loueur Sixt.

L’autopartage en milieu urbain n’est certainement qu’une étape avant le développement de flottes de voitures sans conducteur connectées. Plusieurs expériences sont déjà menées en la matière que ce soit par Google, Apple ou Renault. Ce dernier avait présenté, en 2018, trois véhicules autonomes adaptés à la mobilité partagée, parmi lesquels EZ-GO, un taxi capable de transporter jusqu’à six passagers dans leurs déplacements urbains du quotidien. Sur le plateau de Saclay et à Rouen, des Renault ZOE autonomes et partagées assurent déjà des services de transport en commun.

Les collectivités locales dans l’attente du grand soir  

Après la crise des gilets jaunes en 2019 et le grand débat organisé par le gouvernement avec le concours des maires, la crise sanitaire de ces derniers mois a une nouvelle fois mis en évidence le rôle des collectivités locales sollicitées par l’État. A l’exemple des régions et des intercommunalités, elles entendent maintenant prendre une part active à la relance économique. Dans ce but, leurs représentants comptent sur le projet de loi 3D comme « Décentralisation, Différenciation, Déconcentration » annoncé par le gouvernement pour élargir leurs compétences et leurs moyens d’action.

Une question de confiance et de consensus

Avec la crise sanitaire, la défiance des Français à l’encontre de l’Etat a eu tendance à augmenter même si, dans le même temps, ils demandent plus de protection. S’ils jugent que le pouvoir central n’a pas répondu à leurs attentes, ils plébiscitent les élus locaux. Selon l’étude réalisée par le CEVIPOF et Opinion Way en avril dernier, 63 % des Français font d’abord confiance aux maires, quand ils ne sont que 35 % à faire confiance au gouvernement. La tendance est identique en matière économique. Selon une récente enquête Ifop-Fiducial, 71 % des sondés estiment que les collectivités locales sont les mieux placées pour faire face à la crise économique et à ses conséquences, contre 39% au gouvernement quand bien même que ce dernier dispose des moyens budgétaires supérieurs.  

Décentralisation, un moyen, pas une fin

La France se caractérise par une faible décentralisation des dépenses publiques. 20 % des dépenses publiques sont réalisées les administrations territoriales, contre 31 % en moyenne dans l’Union européenne, 44 % en Espagne, 41 % en Allemagne, 29 % en Italie et 24 % au Royaume-Uni. Les collectivités locales françaises sont, en revanche, un acteur majeur de l’investissement public (plus de 70 % des dépenses en la matière). Elles interviennent peu en matière de santé et d’éducation à la différence de leurs homologues européennes.

Si la taille des régions françaises redessinées en 2015 égale parfois celle de certains États voisins, leurs moyens d’action sont loin d’être comparables. Avec un budget de 8,3 milliards d’euros en 2019, la région Ile-de-France, la plus riche dans notre pays, se situe au niveau du canton de Genève (8,4 milliards d’euros). Son budget se situe loin derrière celui de la communauté d’Andalousie (36,5 milliards d’euros), celui du Land de Bavière (38,6 milliards d’euros) ou bien encore la région du Latium en Italie (27,1 milliards d’euros). L’écart est encore plus important avec les autres échelons de collectivités dans notre pays. Si la réforme territoriale a fait des régions les chefs de file du développement économique, leur part dans l’investissement des collectivités est de seulement 20 % derrière le bloc communal (communes et intercommunalités) qui en assurent 62 %. Leur marge de manœuvre sur le plan de l’économie reste donc pour l‘instant assez faible.  

Dans ce contexte, les représentants de l’Association des Maires de France (AMF), de l’Assemblée des départements de France (ADF) et des Régions de France plaident tous auprès du Président de la République pour un nouvel élan décentralisateur qui se traduirait par plus d’autonomie et de moyens, notamment pour le pilotage de l’apprentissage et du service public de l’emploi. Leurs représentants se fondent notamment sur deux études, l’une réalisée par BAK Basel Economics en 2009 pour l’Assemblée des Régions d’Europe, l’autre par l’OCDE en 2013, tendant à démontrer que la décentralisation favoriserait la croissance. Cette étude ne se vérifie qu’imparfaitement à la lecture des résultats économiques de ces vingt dernières années. Si l’Allemagne a connu une expansion plus soutenue que la France, l’Espagne et l’Italie, toutes deux fortement décentralisées, ne font guère mieux.

Différenciation, l’unité n’est pas l’uniformité

Plus qu’un élargissement des compétences et une augmentation des moyens, le sujet de l’adaptation des politiques publiques aux besoins locaux est avancé. Le  Gouvernement avait  envisagé d’insérer ce droit de la différenciation dans le projet de réforme institutionnelle. Faute de majorité au Congrès, il a été un temps abandonné avant de revenir sur le devant de la scène après la crise des gilets jaunes lors du grand débat organisé avec les élus locaux et la population. Ce droit à la différenciation n’est pas nouveau. Si d’un côté, la Constitution dispose que la République est « une et indivisible », la Ve République a su accepter, malgré tout, les régimes spécifiques : l’Alsace, les départements et régions d’Outre-Mer, la collectivité unique de Corse, le statut de Paris, Lyon et Marseille. L’histoire et la géographie ou le poids démographique  expliquent les différences de traitement.  

Sans attendre la loi 3D, le gouvernement est déjà passé des paroles aux actes comme en témoigne la loi du 2 août 2019 instituant la collectivité européenne d’Alsace dotée de compétences particulières comme la coopération transfrontalière, la promotion de l’attractivité de son territoire en France et à l’étranger, les aides aux entreprises (par délégation de la Région Grand Est), le tourisme et les langues régionales. La région Bretagne a signé avec l’État en février 2020 un contrat pour l’action publique préfigurant le droit à la différenciation (transition écologique et énergétique, aménagement du territoire, secteur maritime, économie agricole et agro­alimentaire, tourisme, culture, langues régionales).

L’objectif du projet de loi 3D est de généraliser le droit à la différenciation en permettant l’adaptation des compétences et des normes dans le respect des principes constitutionnels d’égalité, de subsidiarité et de non-tutelle d’une collectivité sur une autre. Il prévoit aussi l’assouplissement du droit à l’expérimentation jusqu’à présent peu utilisé en raison de règles complexes. S’il accorde des marges de liberté aux collectivités locales, l’Etat entend malgré tout guider leur action. Ainsi, le gouvernement a fixé trois domaines prioritaires pour le projet de loi 3D : la transition écologique, le transport et le logement. Les collectivités locales pourront déroger aux dispositions législatives ou réglementaires relatives à leurs compétences et exercer des compétences, en nombre limité, dont ne disposent pas les collectivités de la même catégorie.

L’Etat à la manœuvre

Preuve du mélange des genres, le Gouvernement a inséré dans son texte sur les collectivités locales des mesures concernant la déconcentration des services de l’Etat. Comme en 1982 et en 2010 ou en 2015, l’Etat profite de ce texte pour réformer l’organisation de ses services sur le territoire. Le balancier serait aujourd’hui favorable aux préfets qui ont été des acteurs clefs de la gestion de la crise sanitaire et du déconfinement au niveau de chaque département. Le projet de loi 3D ne traite pas la question de la superposition des strates institutionnelles. Ce non-choix en est un. Depuis les premières lois de décentralisation, l’échelon national a veillé à éviter la constitution de baronnies au niveau local. Depuis plus de 300 ans, de Louis XIV à Emmanuel Macron, la crainte d’un irrédentisme est prégnante au niveau de l’administration d’Etat. L’émiettement communal, la concurrence entre les collectivités locales, l’imbrication des compétences et des financements faisant de la France institutionnelle un mille-feuille ne sont en aucun cas le fruit d’un hasard.