12 septembre 2020

Le Coin des tendances

Niveau de vie, une évolution favorable aux revenus d’activité en 2018

En 2018, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux de l’INSEE, le niveau de vie annuel médian des personnes vivant dans un ménage de France métropolitaine était de 21 250 euros, soit 1 771 euros par mois. Ce montant partage la population en deux, la première moitié ayant un niveau de vie inférieur et la seconde un niveau de vie supérieur. L’amélioration du niveau de vie s’est accompagnée d’une progression du taux de pauvreté. Cette évolution contradictoire s’explique par le fait que les revenus d’activités et de patrimoine ont progressé plus rapidement que les prestations sociales. Cette situation est assez cohérente avec la volonté des pouvoirs publics de favoriser les revenus du travail (substitution de la CSG aux cotisations sociales) et du capital (instauration de l’IFI et du prélèvement forfaitaire unique)

1771 euros, le niveau de vie médian en France

En 2018, le niveau de vie médian correspond à un revenu disponible de 1 771 euros par mois pour une personne seule et de 3 719 euros par mois pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans. Ce niveau de vie médian a augmenté de 0,3 % en euros constants (après prise en compte de l’inflation). Ce niveau de vie poursuit sa progression depuis cinq ans (+ 0,4 % par an en moyenne depuis 2013)/ Il est supérieur à son niveau de 1 % à celui de 2008. Entre 1996 et 2008, il augmentait de 1,4 % par an.

Cercle de l’Epargne – données INSEE

Entre 2008 et 2013, la médiane du niveau de vie avant redistribution s’est stabilisée tandis que celle du niveau de vie après redistribution a diminué, les prélèvements ayant notamment augmenté. Entre 2013 et 2017, ces deux indicateurs progressent de nouveau, à la faveur de l’amélioration de la conjoncture du marché du travail.

En 2018, la hausse de la médiane du niveau de vie avant redistribution est plus marquée que celle de la médiane des niveaux de vie après redistribution (+ 1,3 % contre + 0,3 %) en raison de l’augmentation de la CSG en contrepartie de la baisse des cotisations sociales. Les niveaux de vie avant redistribution sont nets de cotisations sociales : leur évolution traduit ainsi la baisse de cotisations sociales, mais pas la hausse des taux de CSG, qui efface l’effet de cette baisse pour les salariés du public et l’atténue pour les autres personnes en emploi (encadré 1). En corrigeant l’augmentation du revenu avant redistribution de l’évolution liée à la CSG sur les revenus d’activité, la hausse du niveau de vie médian avant redistribution est proche de celle du niveau de vie après redistribution (+ 0,4 %). Par ailleurs, la baisse de la taxe d’habitation contribue à rehausser légèrement le niveau de vie des ménages du milieu de la distribution.

En 2018, le niveau de vie diminue pour les trois premiers déciles (de – 1,6 % en euros constants pour le premier décile à – 0,4 % pour le troisième) et augmente légèrement pour le reste de la distribution (jusqu’à + 0,6 % pour le neuvième décile). En 2018, 10 % des individus ont un niveau de vie inférieur à 11 210 euros. Le niveau de vie plafond des 10 % les plus modestes, ou premier décile de niveau de vie, a diminué de 2,9 % en dix ans. En 2018, la baisse du premier décile s’explique surtout par celle des allocations logement. Sans celle-ci, il ne diminuerait que de 0,3 %. La réforme de la prestation d’accueil du jeune enfant a également réduit le niveau de vie des plus modestes. En revanche, les revalorisations des minima sociaux (revenu de solidarité active, allocation aux adultes handicapés) contribuent à le rehausser.

En 2018, le niveau de vie plancher des 10 % les plus aisés augmente, de son côté, de 0,6 %, à 39 130 euros, dépassant de 0,7 % son niveau de 2008. Depuis dix ans, la progression du niveau de vie des plus aisés entamée au milieu des années 2000 a ralenti et se poursuit à un rythme proche de la médiane, à l’exception d’une nette baisse en 2012 et 2013. En 2018, la hausse du neuvième décile est légèrement supérieure à celle de la médiane tandis que celle du niveau de vie plancher des 5 % les plus aisés augmente plus nettement, de 1,2 %. La progression des revenus d’activité a été un peu plus importante dans le haut de la distribution. Les ménages les plus aisés ont également davantage bénéficié de l’augmentation des revenus du patrimoine, portée par une forte hausse des dividendes reçus par les ménages. Selon l’INSEE, la transformation de l’ISF en IFI n’aurait pas eu de réelle incidence sur le niveau de vie des 5 % les plus aisés.

Une légère remontée des inégalités

Les principaux indicateurs d’inégalités de niveau de vie sont en nette hausse entre 2017 et 2018. Ils dépassent leur niveau de 2008, mais restent inférieurs au point haut de 2011. L’indice de Gini est de 0,298 en 2018, après 0,289 en 2017. En 2018, les 20 % de personnes les plus aisées perçoivent 39 % de la masse totale des niveaux de vie et les 20 % les plus modestes, 9 %.

Le rapport interdécile D9/D1, rapport entre le niveau de vie plancher des 10 % les plus aisés et le niveau de vie plafond des 10 % les moins aisés, est de 3,5 (+ 0,07 point sur un an). Les inégalités de niveau de vie ont fortement augmenté après la crise économique de 2008, qui a touché en premier lieu les ménages les plus modestes. Après un repli en 2012 et 2013 dû à la baisse plus tardive des plus hauts niveaux de vie, elles se sont stabilisées jusqu’en 2017.

Le taux de pauvreté augmente de 0,7 point en 2018, à 14,8 %

Le seuil de pauvreté monétaire est fixé par convention à 60 % du niveau de vie médian. En 2018, 9,3 millions de personnes vivent en dessous de ce seuil, soit 400 000 personnes de plus qu’en 2017. Le seuil de 60 % augmente légèrement en s’élevant à : 1 063 euros par mois en 2018 contre 1 060 euros par mois en 2017.

Le taux de pauvreté monétaire, c’est-à-dire la part de personnes pauvres dans la population, est de 14,8 % en 2018 en augmentation de 0,7 point par rapport à 2017. Cette hausse intervient après une période de stabilisation entre 2014 et 2017.

Le niveau de vie médian des personnes pauvres progresse comme celui de l’ensemble de la population en 2018 (+ 0,4 %) : la moitié des personnes pauvres ont un niveau de vie inférieur à 855 euros par mois. Il est ainsi inférieur de 19,6 % au seuil de pauvreté .

9,3 millions de personnes vivent en-dessous du seuil de pauvreté en 2018 contre 8,7 millions en 2014 soit une hausse de 6,5 % quand la population française a augmenté de 1%.

Le taux de pauvreté des retraités en hausse en 2018 tout en étant inférieur à la moyenne nationale

Le taux de pauvreté des retraités est de 8,7 % contre 14,8 % pour l’ensemble de la population mais il est en hausse de 1,1 point entre 2017 et 2018, alors qu’elle était relativement stable depuis 2014. Le niveau de vie médian des retraités diminue de 1,9 % en euros constants en 2018, en raison de la non-revalorisation des pensions servies par le régime général et par la hausse du taux de CSG prélevé.

Cercle de l’Epargne -données INSEE

Le taux de pauvreté des chômeurs est de 37,8 % quatre fois supérieur à celui des personnes en emploi (8,4 %).

Le taux de pauvreté des enfants de moins de 18 ans augmente de 0,9 point pour atteindre 21,0 % en 2018. Pour les membres d’une famille monoparentale, le taux de pauvreté est de 35,3 % en 2018, contre 33,6 % en 2017). Celui des personnes vivant dans un ménage composé d’un couple avec un ou deux enfants s’accroît bien plus faiblement (9,3 % après 8,9 % en 2017),

Les écrans et la santé morale ne font pas ménage

Le Ministère des Solidarités et de la Santé a publié une enquête sur la santé morale des élèves de 3e ayant entre 12 et 14 ans (La santé mentale des adolescents de 3e en 2017 enquête nationale de santé scolaire par Valérie Carrasco et Nathalie Guignon).  Selon cette étude, 44 % des élèves ont été considérés en très bonne santé morale, 43 % une situation correcte. 13 % ont une santé mentale jugée plutôt mauvaise,  8 % dégradée pour et 5 % en très mauvaise santé morale.

Les catégories d’élèves en bonne santé mentale se distinguent par une surreprésentation des garçons. La dégradation de la santé morale est corrélée à l’usage important des écrans. Les élèves déclarant un état dégradé passent fréquemment plus de six heures par jour devant des écrans. La différence est moins importante concernant le sport mais cependant la part des élèves qui déclarent pratiquer un sport diminue de 10 points entre ceux déclarant n’avoir aucun problème et ceux qui ont une très mauvaise santé morale. La prise régulière d’un petit-déjeuner est de moins en moins fréquente du premier au dernier groupe, de 73 % d’élèves qui prennent tous les jours un petit-déjeuner dans le premier groupe à 39 % dans le dernier. Sans surprise, la présence d’obésité s’accompagne un état moral dégradé. . Les consommations de substances psychoactives (alcool, cannabis et tabac) sont toutes associées à une moins bonne santé mentale. Les indicateurs de potentielles difficultés scolaires, relationnelles ou de violences subies se dégradent également entre les premières et les dernières classes, là encore aussi bien quand il s’agit de phénomènes relativement fréquents. Si seulement 10 % des élèves en bonne santé morale déclarent avoir séché un cours dans l’année, ce taux dépasse 35 % pour ceux ayant une santé morale dégradée. 13 % des premiers font l’objet de moqueries en classe contre 58 % des derniers. Plus du quart des élèves en souffrance morale ont subi des actes violents dans les douze derniers mois

Les filles en détresse psychique plus souvent que les garçons. Les jeunes femmes ont un score global de détresse psychique plus élevé que celui des garçons, 6,5 contre 4,4. Un tiers des filles ont un score correspondant à une détresse psychique élevée contre un cinquième des garçons et 12 % un score révélateur d’une détresse psychique. Les difficultés de sommeil importantes se retrouvent également nettement plus souvent chez les filles. Près d’un quart d’entre elles a un score d’au moins 6 sur une valeur maximale de 12 alors que ce n’est le cas que de 10 % des garçons. 14 % des garçons ne rencontrant jamais aucune des difficultés de sommeil citées, contre seulement 6 % des filles. Cet indicateur du sommeil révèle un manque important de sommeil chez les jeunes. L’utilisation importante des écrans est pointée du doigt tout comme un coucher de plus en plus tardif. Si dans les années 1980, les jeunes de 3e se couchaient en moyenne vers 20 H 30, celui intervient désormais à 21 H 30 durant la semaine de classe. 27 % des filles avouent pratiquer au moins une fois, la scarification quand ce taux est de 20 % chez les garçons. .Seulement 32 % des filles n’ont jamais éprouvé des difficultés avec l’alimentation, contre 45 % des garçons.

Si les enfants issus de familles monoparentales sont surreprésentés parmi ceux ayant un état de santé morale dégradé à très dégradé, ceux dont les parents sont cadres le sont également. La pression des parents sur les résultats scolaires jouerait négativement sur l’état de santé et concernerait en premier les enfants de cadres qui communiquerait leur crainte de déclassement.

Crèches ou gardes privées pour les bébés ?

Le nombre de places en établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE), financés par les caisses d’allocations familiales (CAF) via la prestation de service unique (PSU), a augmenté régulièrement en France. Ainsi, le nombre de places pour 100 enfants de moins de 3 ans est passé de 13,7 à 16,9 entre 2007 et 2015. Entre 2000 et 2016, 150 000 places supplémentaires ont été créées dans les établissements d’accueil du jeune enfant (dans le cadre de plans nationaux destinés à augmenter la capacité d’accueil portant le nombre total de places à près de 400 000.

Cette hausse de la capacité d’accueil n’a pas significativement modifié la situation des mères de jeunes enfants sur le marché du travail. Au mieux, 8 000 mères de jeunes enfants auraient ainsi conservé ou retrouvé une activité professionnelle alors qu’elles auraient interrompu leur carrière dans la situation qui prévalait en 2000.

Le recours aux crèches n’a pas d’incidence réelle sur l’emploi mais vient en substitution aux gardes privées. Les familles qui en bénéficient auraient de toute façon fait garder leurs enfants. De ce fait, l’augmentation des places disponibles en crèches n’a pas de conséquences sur le montant des revenus professionnels des parents, en revanche, elle améliore leur pouvoir d’achat.

En 2015, le coût de fonctionnement moyen d’une place en crèche s’élevait à 15 000 euros. Les familles en prennent en charge 18 %, le reste étant financé par les institutions publiques (en particulier, la branche « famille » de la Sécurité sociale et les communes). Ces coûts doivent être comparés avec ceux des assistantes maternelles et gardes à domicile sous forme de prestations ou de réductions d’impôt. Cette prise en charge correspond à environ 60 % de celle d’une place crèche pour les services d’assistantes maternelles et à 120 % pour la garde à domicile. Derrière cette problématique de coûts, les familles doivent bien souvent jouer avec les disponibilités des différents systèmes de gardes d’enfants. Même si les communes voire les entreprises ont adapté les horaires des crèches, de nombreux parents sont contraints de recourir à des gardes privées compte tenu de leurs contraintes professionnelles. Dans les grandes agglomérations, l’éloignement du lieu de travail di domicile peut conduire au recours à une garde d’enfants.

Les gouvernements et les responsables locaux ont ces vingt dernières années donné la priorité aux crèches publiques ou privées sous contrat. Cette politique n’a pas eu les conséquences souhaitées sur le taux d’emploi en particulier des femmes. Elle a entraîné des effets de reports. Son coût assez élevé pour les finances publiques constitue un frein non négligeable à la poursuite du programme de créations de places. Par ailleurs, en périphérie des grandes agglomérations et en milieu rural, le développement des crèches demeure faible en raison de la faible densité d’enfants en âges d’y aller. La recherche d’une complémentarité entre les différents systèmes est aujourd’hui préconisée au nom d’une recherche d’une plus grande efficience.