10 août 2019

Le Coin des Tendances du 10 août 2019

Le renouveau confirmé des indépendants

Selon l’INSEE, en 2016 3,1 millions d’actifs en emploi en France hors Mayotte sont des indépendants. Selon la forme juridique et l’activité de leur entreprise, ces indépendants peuvent être des entrepreneurs individuels « classiques », des professions libérales, des gérants ou dirigeants de société, ou exercer sous le régime fiscal des micro-entrepreneurs. Si la plupart des indépendants sont non-salariés, certains dirigeants ou gérants de société exercent néanmoins sous le statut d’assimilés salariés.

Les auto-entrepreneurs à l’origine du rebond

Le nombre des indépendants avait fortement diminué de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’au milieu des années 2000 avec la montée en puissance du salariat. Un renversement est intervenu depuis une quinzaine d’années. Si les effectifs d’agriculteurs, de commerçants continuent de baisser (boulangerie, boucherie, charcuterie, poissonnerie notamment). La croissance récente de l’emploi indépendant non salarié repose sur le développement du tertiaire, sous l’effet de l’extension des services et des professions de santé. Elle s’explique avant tout par les mutations que connait le monde du travail avec l’émergence des plateformes de services sur Internet. Le processus « d’ubérisation de l’emploi » concerne de nombreux secteurs (chauffeurs, livreurs, travaux domestiques, enseignement, etc.). La création du statut d’autoentrepreneur a contribué au renouveau du statut d’indépendant. Depuis sa création en janvier 2009, l’auto-entrepreneuriat, remplacé fin 2014 par le micro-entrepreneuriat, s’est continûment développé. Fin 2016, 860 000 micro-entrepreneurs sont économiquement actifs en France. Ce phénomène n’est pas spécifique à la France. Nos partenaires ont également adopté des législations visant à faciliter la création d’activités indépendantes. Dans certaines professions, le micro-entrepreneuriat a supplanté les formes traditionnelles d’emploi indépendant en l’espace de quelques années. Les métiers de l’enseignement, des arts, du spectacle, de services spécialisés dédiés aux entreprises (design, photographie, traduction, etc.) ou aux particuliers (réparateurs de biens personnels et domestiques, thérapeutes, etc.) s’exercent majoritairement en ayant recours au statut de micro-entrepreneur. En 2016, 63 % des indépendants non-salariés de ces activités exercent en tant que micro-entrepreneurs. Ces derniers sont également très présents dans la construction (115 000 en 2016, soit 31 % des indépendants non-salariés) et la vente au détail sur les marchés ou à distance (81 000, soit 68 %).

Le régime micro-entrepreneur reste marginal au sein d’activités pour lesquelles une qualification professionnelle ou l’existence d’un capital s’impose : pharmacies, activités juridiques et comptables, transports routiers de fret, santé. Certaines de ces activités, pour lesquelles les formes d’emploi indépendantes restent essentiellement classiques, connaissent néanmoins une forte dynamique d’emploi. Soutenues par des besoins liés à la croissance démographique et au vieillissement de la population, les professions de sages-femmes, infirmiers et professionnels de la rééducation progressent nettement et représentent 180 000 emplois indépendants en 2016. Enfin, le régime du micro-entrepreneur est exclu des activités agricoles pour lesquelles existe le régime du micro-bénéfice agricole depuis 2016.

Les revenus des indépendants sont très inégaux

De fortes disparités en matière de pluriactivité et de revenus d’activité existent parmi les indépendants non-salariés. Les micro-entrepreneurs et les professions libérales, qui regroupent respectivement 31 % et 27 % des indépendants non-salariés non agricoles en 2016, se distinguent des autres catégories (entrepreneurs individuels et gérants majoritaires de société, hors professions libérales).

La pluriactivité concerne 29 % des micro-entrepreneurs en 2016, et elle est légèrement plus marquée pour les professions libérales (13 %) que pour le reste des non-salariés non agricoles (7 %)

Les conditions de cumul d’activités salariée et non salariée sont très différentes selon le régime social de l’indépendant. Pour les micro-entrepreneurs pluriactifs, l’activité salariée est souvent celle qui leur permet de subvenir à leurs besoins, les revenus générés par l’activité non salariée étant très faibles. Le micro-entrepreneuriat rapporte peu, 75 % des personnes régies par ce régime percevant moins de 680 euros mensuels. L’activité exercée en tant que micro-entrepreneur est souvent éloignée de leur activité salariée : six fois sur dix, elle relève d’un secteur différent. Les micro-entrepreneurs qui ne sont pas pluriactifs (71 % d’entre eux) disposent parfois d’autres ressources, comme des indemnités de chômage ou une pension de retraite.

Lecture : en 2016, un quart des professionnels libéraux perçoivent un revenu mensuel d’activité non salarié inférieur à 2 000 euros (1er quartile), la moitié d’entre eux un revenu inférieur à 3 800 euros (médiane) et un quart d’entre eux un revenu supérieur à 6 700 euros (3e quartile). Source : INSEE

Les indépendants surreprésentés dans le Sud

Les régions méridionales et les départements d’outre-mer présentent des caractéristiques propices à l’exercice du travail indépendant du fait de leur structure sectorielle. Les services domestiques en lien avec le tourisme occupent une place importante. (hôtellerie, restauration et commerce). En Occitanie, où les indépendants représentent 15 % des actifs en emploi (12 % en moyenne nationale), le poids important de l’agriculture et un chômage élevé concourent à cet effet. En Corse, plusieurs facteurs jouent en faveur de l’emploi indépendant : l’absence d’industrie, le poids du tourisme et de la construction, la proportion importante de seniors. Dans cette région, la proportion d’indépendants y atteint 18 %.

Les indépendants pèsent peu en revanche dans l’emploi des régions septentrionales. Ce résultat renvoie notamment à leurs spécificités économiques. Dans les Hauts-de-France, les indépendants représentent 9 % des actifs en emploi. Comparativement à d’autres régions, l’économie accorde en effet peu de place au tourisme, à l’agriculture et aux services. Les diplômés du supérieur, davantage enclins à se lancer dans l’entrepreneuriat, y sont également moins nombreux qu’ailleurs. En Île-de-France, les indépendants représentent 10 % des actifs en emploi, mais dans un environnement économique différent de celui des Hauts-de-France : beaucoup de grandes structures, un accès immédiat à de grands pôles d’activités, et un taux de chômage plus faible.

Les indépendants agricoles sont encore très présents dans certains territoires

Le profil des indépendants varie fortement selon l’orientation économique des territoires. Les agriculteurs sont encore majoritaires dans le Cantal, en particulier dans les zones d’emploi de Saint-Flour, où ils représentent 59 % des indépendants, et de Mauriac (52 %). La Creuse, la Lozère, l’Aveyron, la Mayenne, la Sarthe, le centre de la Bretagne et le sud de la Normandie sont également des zones de forte concentration d’exploitants agricoles. L’agriculture viticole pèse moins dans l’emploi indépendant que l’agriculture d’élevage ou de culture. Son poids est conséquent dans de petits vignobles de la Marne, de Charente ou de Charente-Maritime, mais beaucoup moins dans les territoires des vignobles bordelais, bourguignons, ligériens et alsaciens, qui sont plus vastes et davantage orientés vers les services.

Le tourisme est une source d’emplois indépendants

Le tourisme génère des emplois indépendants dans l’hébergement et la restauration le commerce, mais aussi dans l’enseignement de disciplines sportives ou de loisirs et les transports. Les territoires de montagne et les littoraux de métropole, de Corse et des départements d’outre-mer sont les plus concernés. En Savoie (Tarentaise, Maurienne), Haute-Savoie (Mont-Blanc, vallée de l’Arve, Chablais) et dans les Hautes-Alpes (Briançon, Gap), la proportion d’indépendants exerçant une activité d’enseignement peut atteindre jusqu’à 16 %. Dans les zones d’emploi les plus touristiques de Corse, de Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, le poids de l’hébergement et de la restauration dans l’emploi indépendant varie de 10 % à 15 %, pour une moyenne nationale de 6 %. En métropole, les côtes bretonnes, normandes, atlantiques et méditerranéennes ainsi que les zones d’emploi de Céret et de Prades (Pyrénées Orientales) et de Sarlat-la-Canéda (Dordogne) sont d’autres territoires touristiques où l’emploi indépendant est important.

Davantage de professions de santé dans le Nord-Est et le Sud qu’ailleurs

Dans de nombreuses zones d’emploi du quart Nord-Est de la France, qu’elles soient grandes ou petites, la densité de praticiens est nettement plus élevée que la moyenne. À Lille, Nancy et Strasbourg, on compte de 260 à 350 médecins et dentistes pour     100 000 habitants, pour une moyenne nationale de 194. Il y en a autant à Montpellier, Nice, Bayonne, Sète, Porto-Vecchio, Marseille où les besoins sont accentués par le vieillissement et la croissance de la population. Ces zones d’emploi méridionales sont aussi celles où les densités d’infirmiers, de sages-femmes et de professionnels de la rééducation sont les plus élevées de France (plus de 400 praticiens pour 100 000 habitants, pour une moyenne nationale de 266).

Les maires, des pompiers du quotidien sous pression

Dans sept mois, plus de 47 millions d’électeurs seront alors appelés à élire leurs représentants municipaux. Les élections sont en effet, programmées les 15 et 22 mars 2020. Les Français sont attachés à leurs communes et à leur maire. Selon une récente étude, 60% des personnes interrogées ont déclaré souhaiter que leur maire se représente et poursuive sa tâche. La mort accidentelle, selon les premières conclusions de l’enquête, du maire de Signes alors qu’il s’opposait à un dépôt illégal de gravats dans la nature, démontre toutes les difficultés, voire les risques, auxquelles peuvent être confrontés les élus dans le cadre de leur mandat.

Le mandat de maire est, en effet, devenu l’un des plus exigeants. Les élus doivent être tout à la fois gérer une administration comme une entreprise et faire face à une multitude de sollicitations (prestations, éducation, emploi, urbanisme, etc.). Ils sont les élus de la proximité et de l’urgence. Ils doivent en permanence être à l’écoute et au service de leurs administrés. Ils sont aussi des intermédiaires vis-à-vis des administrations nationales, régionales ou départementales. En cas de problème, leur responsabilité civile voire pénale peut être engagée. Face à la lourdeur de la tâche, les démissions de maire se sont multipliées ces dernières années. Par ailleurs, ils sont également de plus en plus nombreux à déclarer ne pas vouloir se représenter.

Les maires sont amenés à devoir gérer de manière contrainte leur budget. Même si les dotations d’Etat atteignent en volume des sommets, elles ne progressent plus au même rythme que dans le passé. Dans le cadre de l’assainissement des comptes publics, les communes sont mises à contribution.

La montée en puissance de l’intercommunalité a abouti à dépouiller les communes de certaines de leurs compétences ce qui peut générer une certaine frustration pour les élus.  

Les maires des communes rurales doivent de plus en plus faire face à une évolution de la composition de leur électorat. Autrefois composé essentiellement d’agriculteurs, il comprend désormais de plus en plus de rurbains, des ménages issus des villes, des grandes agglomérations qui recherchent des logements à bas prix ou un mode de vie plus en phase avec leurs souhaits. Ces ménages exigent bien souvent des services qui n’existent pas dans les petites communes.

Face aux problèmes que rencontrent les élus locaux, le Gouvernement a présenté en conseil de ministre le 10 juillet dernier un projet de loi Engagement et Proximité qui vise à redonner plus de liberté aux maires et à clarifier et faciliter les conditions d’exercice de leur mandat. Le texte a pour objectif de conforter le maire au sein de son intercommunalité et à améliorer la gouvernance des établissements publics de coopération intercommunale, ainsi que de permettre des ajustements à la carte quand  des blocages apparaissent. Les maires devraient bénéficier de nouveaux pouvoirs pour accomplir leur mandat. Il s’agira de les doter d’outils leur permettant par exemple d’exercer leur pouvoir de police qu’ils remplissent au nom de l’Etat.

Le texte vise également à lever certains freins à l’engagement et au réengagement, pour encourager de nouvelles personnes à se présenter aux élections. L’objectif est d‘éviter d’être confronté en 2020 à des listes incomplètes, comme ce fut le cas en particulier dans les communes de petite taille en 2014. Les droits à la formation seront renforcés. L’Etat prendra en charge les frais de garde dans les communes rurales. Le congé pour faire campagne sera généralisé. Par ailleurs, le régime des indemnités pour les communes de moins de 3 500 habitants sera modifié.

Après plusieurs décennies placées sous le thème du renforcement de l’intercommunalité et du renforcement des agglomérations, le Gouvernement entend mettre l’accent sur la nécessité de maintenir sur le territoire un réseau fort de communes capables d’assurer pour leurs concitoyens les services de proximité.