12 novembre 2016

Le Coin des tendances du 12 novembre 2016

Les jeunes face aux aides sociales

Cet article est la suite de celui paru dans la lettre N°204 du 5 novembre 2016 ayant pour titre « des jeunes, un peu perdus ».

Durant de très nombreuses années, la question de la pauvreté et de la couverture sociale des jeunes était taboue. Ainsi, s’il avait été prévu en 1988 que le RMI ne soit pas accessible aux personnes de moins de 25 ans, il apparaissait peu opportun sur un point de vue éthique et sociale que les jeunes qui sont à la charge de leurs parents soient avant même d’entrer dans la vie professionnelle épaulés par des systèmes d’assistance publique. En revanche, qu’ils soient étudiants ou sur le marché du travail, les jeunes accèdent depuis longtemps aux allocations logement et aux allocations familiales. Les premières constituent un soutien financier pour les étudiants.

Des niveaux d’information variables en fonction des aides

Selon le CREDOC, les jeunes connaissent les prestations sociales auxquelles ils peuvent accéder. 84  % des jeunes ont entendu parler des aides au logement, 82 % du RSA et 71 % de la CMUC. Les bourses sur critères sociaux qui concernent chaque année plus de 661 000 jeunes sont peu connues. La Garantie « Jeunes » ne concernant pour le moment que 45 000 personnes n’est connue que par 16 % des ceux qui pourraient la percevoir, les jeunes sans emploi disposant un fiable niveau de formation ou de diplômes. La Garantie « Jeunes » est destinée aux jeunes en situation de grande précarité qui ne sont ni étudiants, ni salariés et qui ne vivent pas chez leurs parents. Le dispositif vise à donner aux jeunes la chance d’une intégration sociale et professionnelle grâce à un parcours intensif de formation et d’accès à l’emploi.

Avez-vous entendu parler des prestations sociales suivantes ?

Le niveau de connaissance est fonction de l’ancienneté des dispositifs. Ainsi, les aides au logement existent depuis des décennies. Les parents ont pu en bénéficier dans leur jeunesse ou continuent à en bénéficier. La notoriété du RSA et de la CMUC provient du fait que ces deux dispositifs sont largement médiatisés et qu’ils concernent un grand nombre de personnes. La bonne connaissance des aides au logement est liée à leur forte diffusion (20 % des jeunes de 18 à 29 ans en sont allocataires) et au fait qu’elles sont incontournables pour permettre à de nombreux étudiants de se loger.

Près des trois-quarts des jeunes (73 %) se sont renseignés sur leurs droits au cours des 12 derniers mois. Pour ce faire, la première source mobilisée est internet, pour 61% des jeunes interrogés, loin devant l’entourage (28 %), puis les professionnels (13 %), les affiches ou plaquettes (11 %) ainsi que les médias traditionnels (11 %).

Les canaux d’information varient en fonction des profils. Les demandeurs d’emploi et les femmes ont davantage recours à internet (68 % et 67 %, contre 61 % en moyenne). Les bas revenus (36 %), les étudiants (34 %) et les hommes (32 %) mobilisent plus souvent leur entourage (contre 28 % des jeunes en moyenne).

Des problèmes d’accès aux aides

Plus encore que leurs aînés, un nombre non négligeable de jeunes, même s’ils ont connaissance des prestations, n’en profitent pas car ils ne réalisent pas les démarches nécessaires.

Selon une étude de la DREES, seuls 30% à 43 % des jeunes éligibles à l’aide au paiement d’une complémentaire santé, l’ACS y auraient réellement recours. L’ACS donne droit, durant un an, à une aide financière pour payer le contrat de complémentaire santé.

Les problèmes que rencontrent les jeunes pour bénéficier d’une prestation sociale sont assez classiques : au-delà du manque d’information sur les aides, c’est la méconnaissance des procédures qui aboutit à une non-perception des aides. Les jeunes se découragent plus facilement que la moyenne de la population face à la complexité des dossiers à monter. En outre, plus que leurs aînés, les jeunes, renoncent aux aides les jugeant sans intérêt par rapport à leur situation.

Dans le même temps, les jeunes jugent que leurs droits ne sont pas respectés. Près d’un cinquième des jeunes estiment qu’ils n’ont pas profité des aides auxquelles ils avaient le droit. En ajoutant ceux qui n’ont pas eu d’informations suffisantes sur les aides, le CREDOC estime que plus d’un jeune sur deux renonce à une ou plusieurs aides (56 %). Le non-recours est plus fréquemment signalé par les jeunes peu qualifiés sans emploi ni formation, les jeunes chômeurs et les inactifs non-étudiants. Les jeunes parents seraient plus de 26 % à renoncer des aides tout en les connaissant. 11 % des jeunes indiquent qu’ils refusent les aides par volonté de s’en sortir seul et par crainte des conséquences négatives (impôts, perte d’autres prestations sociales, image de soi).

Le renoncement élevé aux soins pour raisons financières

Les Enquêtes Santé et Protection Sociale de l’Irdes de 2012 soulignent que 25,7 % de la population métropolitaine âgée de 18 à 64 ans ayant renoncé à au moins un soin pour des raisons financières au cours des douze derniers mois. Le taux étant plus élevé chez les 18-39 ans (27,2%) que chez les 65 ans et plus (21,8%). Une étude de la DREES de 2013 souligne que du quart au tiers de la population française renonçait à des soins pour des raisons financières. Les jeunes seraient les premiers concernés par ce problème d’accès aux soins. Ce constat est confirmé par une récente enquête menée par le CREDOC.

Le taux de non-couverture par une complémentaire santé est élevé chez les 18-29 ans est de 10 %.Le reste à charge représente en moyenne 39% de la dépense totale annuelle pour les 16-29 ans (soit 239 €) et 31 % pour l’ensemble des assurés (soit 414 €). Sans surprise, les soins dentaires et d’optique arrivent en haut du classement en matière de renoncement de la part des jeunes. Près d’un quart ont renoncé à au moins une consultation chez un dentiste (27%), un quart a refusé de suivre des soins dentaires et 24 % à acheter une paire de lunettes.

 

Le commerce de détail trace sa voie entre plusieurs écueils

Le monde du commerce est en pleine mutation avec la montée en puissance du canal de distribution par Internet et le retour en force de certains points de vente en centre-ville. Néanmoins, dans leur ensemble, à l’exception des cœurs des très grandes agglomérations, le commerce de détail souffre et perd des emplois. Cette photographie doit être relativisée au vu de certaines évolutions qui se font jour ces dernières années.

Le commerce, un secteur économique de premier plan

En 2014, le commerce rassemble 802 000 entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires (CA) de 1 393 milliards d’euros et dégagent une valeur ajoutée (VA) de 204 milliards d’euros. Elles emploient plus de 2,6 millions de salariés en équivalent temps plein (ETP). Leur poids dans l’ensemble des entreprises des secteurs principalement marchands non financiers et non agricoles est sensiblement le même en matière de nombre d’entreprises (22 %), de valeur ajoutée (21 %) que de salariés en équivalent temps plein (22 %). En 2014, le taux de marge commerciale est de 23 % pour l’ensemble du commerce. Proche de la moyenne dans le commerce de gros (21 %), il varie de 14 % dans le commerce automobile à 29 % dans le commerce de détail. L’emploi salarié des établissements commerciaux augmente de 0,9 % entre fin 2014 et fin 2015, après un léger repli en 2014 (– 0,3 %). Il progresse dans le commerce de détail (+ 1,6 % en 2015), après une stagnation en 2014, et il se redresse dans le commerce automobile (+ 0,8 %), après plusieurs années de baisse (– 1,3 % en 2014 et – 2,0 % en 2013.

Les effets du vieillissement de la population sur le commerce

Le vieillissement de la population conduit à des changements d’habitude. Les ménages ne comportant plus d’enfants réalisent des courses moins importantes mais plus souvent. Il est à noter que la multiplication des divorces provoque des effets similaires. Par ailleurs, les consommateurs seniors recourent moins fréquemment que les jeunes actifs à la voiture pour effectuer leurs courses. Ils privilégient les achats à proximité de leur résidence principale. En cas d’achats volumineux, ils utilisent les services de livraison. Cette évolution est très marquée au sein des grandes agglomérations et en particulier à Paris où moins d’un habitant sur deux possède une voiture. En revanche, dans les villes de taille intermédiaire de moins de 100 000 habitants, les ménages privilégient les achats dans des centres commerciaux se situant en périphérie. Le commerce de détail est également en position de force dans les villes ayant un intérêt touristique marqué.

Les magasins de niche et le luxe

Malgré l’augmentation des achats sur Internet, le commerce de détail demeure le principal canal de vente pour tout ce qui concerne l’équipement de la personne (habillement, chaussure, bijouterie, maroquinerie, parfumerie).

Dans les grandes métropoles, la grande distribution en ayant recours fréquemment à la franchise a investi les centres villes. Carrefour, Auchan et Casino ont développé des réseaux de commerces de proximité (Carrefour Market, Franprix, Monoprix) ouverts sept jours sur sept et avec une large amplitude horaire. Le cœur des grandes agglomérations souvent synonyme de consommateurs à fort pouvoir d’achat est attractif pour des magasins se positionnant sur des créneaux de niche comme Mark and Spencer (cette marque a décidé désormais que de ne vendre en France que des produits alimentaires et de fermer ses magasins de prêts à porter. Les ménages n’appréciant guère d’acheter leurs vêtements entre une salade et un paquet de pattes ont plébiscité les grandes chaînes spécialisées comme H&M, Zarra ou Uniqlo qui ont investi en centre-ville.

Les grands magasins comme « le Bon Marché », « Les Galeries Lafayette » ou « Le Printemps » considérés un temps « has been » sont devenus à nouveau « fashion » en montant en gamme. Ils sont redevenus des lieux attractifs pour les touristes.

 Le défi du dernier kilomètre (en gras ?)

Le développement des achats par Internet suppose la multiplication des services de livraison qui se doivent d’être rapides et efficaces ce qui suppose d’avoir des réseaux de distribution sur tout le territoire. De même, le « drive in » n’a d’intérêt que s’il se situe au plus près des habitants qui n’ont guère envie de perdre en transport le temps gagné à ne pas déambuler dans les rayons.

Le commerce de centre-ville, une évolution contrastée

En 2014, les pôles commerçants de centre-ville regroupent un tiers des magasins et un quart de l’emploi salarié du commerce dans les aires urbaines de plus de 20 000 habitants. Si au cours des 10 dernières années, l’emploi dans les commerces de centre-ville est resté globalement stable, il progresse dans les grandes métropoles régionales. Il diminue dans les aires urbaines plus petites, notamment dans celles de taille moyenne.

Le commerce de centre-ville et le niveau de vie des habitants

Si au cœur des grandes agglomérations, le pouvoir d’achat est supérieur à la moyenne nationale, il en est tout autrement dans les villes de taille plus faible et ne disposant pas d’activités touristiques. Néanmoins, les centres villes qui concentrent un grand nombre de services et d’équipements attirent des non-résidents d’équipements. Leur zone d’influence dépasse ainsi leur immédiat voisinage : trois quarts des tribunaux, près de la moitié des cinémas, deux salles de théâtre sur cinq ou un tiers des médecins spécialistes sont situés en centre-ville. En revanche, les équipements nécessitant beaucoup d’espace comme les hôpitaux, ou plus usuels comme les établissements scolaires ou les bureaux de poste, y sont de moins en moins concentrés. Les difficultés de transports pour se rendre dans les centres villes pèsent sur les flux de consommateurs.

De ce fait, il n’est pas surprenant que dans une majorité de centres villes, l’emploi salarié du commerce ait diminué sur dix ans. En moyenne, l’emploi salarié dans les commerces de centre-ville progresse dans les aires urbaines de plus de 500 000 habitants hors Paris (+ 5 %), tandis qu’il diminue dans les aires urbaines plus petites, la baisse la plus forte concernant les aires urbaines de taille moyenne (de 50 000 à 199 000 habitants). Sur la même période, le commerce est en moyenne beaucoup plus dynamique hors des centres villes, tant en termes de nombre de magasins que d’emploi salarié (respectivement + 12 % et + 14 %). En conséquence, la part des salariés du commerce qui travaillent en centre-ville recule de plus 4 points de pourcentage dans la moitié des villes.

Un emploi en baisse

Malgré ces fortes disparités selon les agglomérations, le nombre de magasins et l’emploi salarié diminuent légèrement dans les pôles commerçants de centre-ville (– 1 %). Il est à noter que l’’emploi du commerce alimentaire y progresse légèrement

Les grandes surfaces alimentaires ne représentent que 4 % des magasins alimentaires en centre-ville mais occupent cependant 32 % de leurs effectifs salariés. Entre 2004 et 2014, la progression modérée du nombre de salariés des commerces alimentaires en centre-ville (4 %) masque deux mouvements contraires. La baisse de l’emploi est importante en centre-ville dans les boucheries-charcuteries, les boulangeries-pâtisseries, les primeurs et les poissonneries. Mais elle est plus que compensée par la croissance du nombre de salariés dans les commerces de boissons, de confiserie-chocolaterie, ainsi que les grandes et petites surfaces alimentaires, en lien notamment avec le développement des magasins de produits biologiques.

Entre 2004 et 2014, au sein du commerce non alimentaire, l’emploi dans les commerces de TIC progresse en centre-ville, en raison du développement des magasins de télécommunications qui compense le repli des commerces de matériels audio et vidéo. Les commerces d’optique, de parfumerie et d’articles médicaux ont créé de nombreux emplois mais de plus en plus en périphérie ou en centre commercial.

Les pertes d’emplois sont très importantes, pour les magasins vendant des disques, des livres et de la presse. Aussi bien comme support que canal de distribution, le numérique semble condamner cette activité à moyen terme. L’emploi se contracte fortement pour les magasins de sport et les commerces d’équipement de la maison (électroménager, meubles, bricolage, fleurs, etc.) implantés au cœur des villes, au profit du reste des aires urbaines. Les zones commerciales des banlieues offrent en effet de plus grandes surfaces d’exposition, plus propices à ce type d’achats. La restauration se développe fortement, en centre-ville comme en dehors positive, dans les autres espaces des aires urbaines. La part des salariés des débits de boissons travaillant en centre-ville progresse sur la période.