15 septembre 2018

Le Coin des Tendances du 15 septembre 2018

Le digital impose sa loi dans l’innovation

Dans les secteurs marchands non agricoles, plus de la moitié des sociétés de 10 salariés et plus (51 %) ont, selon l’INSEE, engagé des dépenses consacrées à l’innovation entre 2014 et 2016. Cette part est en hausse de trois points par rapport à la période 2012-2014. Ces dépenses rassemblent celles liées aux procédés technologiques améliorant significativement des produits (biens et services), celles liées aux procédés de production ainsi que celles concernant l’amélioration des modes d’organisation et le marketing.

Sans surprise, les entreprises innovent plus fréquemment en organisation ou marketing (42 %) qu’en produits ou procédés (33 %). Il est néanmoins difficile de distinguer les différents types de dépenses en innovation. La production de nouveaux produits amène fréquemment des changements dans l’organisation et dans le marketing (promotion, distribution, nouveau marché). Ainsi, 88 % des sociétés innovantes en produits réalisent au moins un autre type d’innovation sur la période 2014-2016,

Les innovations en organisation concernent 34 % des sociétés et les innovations en marketing 27 %. Viennent ensuite les innovations directement liées à la production : les innovations de procédés (24 %), puis les innovations de produits (20 %).

Si la part des sociétés innovantes reste la plus élevée parmi les sociétés de 250 salariés ou plus (76 %), elle est en légère diminution (– 2 points). Cette baisse est imputable à la réduction des marges des entreprises et à l’environnement international qui a provoqué une stagnation du commerce international et une forte décrue de la croissance. Les grandes sociétés innovent un peu moins souvent qu’auparavant en produits : -2 points par rapport à la période 2012-2014. En revanche, pour les sociétés de 10 à 49 salariés, le taux d’innovation augmente de 3 points pour s’établir à 48 %. Les petites sociétés innovent plus souvent en procédés, en organisation et en marketing que pendant la période précédente. Le phénomène des startup peut expliquer cette évolution. Par ailleurs, les grands groupes tendent à réduire leur exposition aux risques et confient à des petites structures le soin d’innover.

Recul de l’innovation dans l’industrie mais progression dans le numérique

Entre 2012 et 2016, la propension à innover augmente dans tous les secteurs d’activité, à l’exception de l’industrie. Les dépenses en innovation augmentent de 9 points pour les activités de services administratifs et de soutien principalement pour celles liées aux systèmes de sécurité. L’organisation de l’Euro 2016 en France, les attentats de 2015 et 2016 ont conduit le secteur à restructurer ses activités de support. Dans les activités spécialisées, scientifiques et techniques, la part des sociétés innovantes augmente également (+7 points). Ce secteur est très impliqué dans la transition numérique (dématérialisation, télétransmission, paiement sans contact, etc.). 73 % des sociétés du secteur de l’information et de la télécommunication ont innové entre 2014 et 2016, soit une hausse de 2 points par rapport à la période 2012-2014).

Dans les activités financières et d’assurance, la part des sociétés technologiquement innovantes augmente de 6 points. La transition numérique, les nouvelles technologies (généralisation du paiement sans contact, développement d’applications web et mobile…) et les exigences en matière de sécurité (données, transactions, lutte contre les fraudes) ont également poussé ce secteur à plus d’innovations.

Pour les activités immobilières, la part des sociétés technologiquement innovantes progresse de 11 points. Le développement d’application mobiles et de solutions digitales explique cette forte croissance.

De plus en plus de nouveaux produits

 Selon l’INSEE, parmi les sociétés innovantes en produits entre 2014 et 2016, 68 % ont introduit au moins un produit nouveau sur un de leurs marchés, soit 26 % des sociétés innovantes. Ce taux est en hausse de 6 points par rapport à la période 2012-2014.

Ces produits nouveaux pour le marché représentent en moyenne 21 % du chiffre d’affaires des sociétés concernées. Les entreprises innovantes sont les plus intégrées au commerce mondial. Ainsi, les sociétés innovantes en produits dans les secteurs de l’industrie ou de l’information-communication sont près de 25 % à introduire un nouveau produit sur le marché mondial.

Les groupes plus innovants que les sociétés indépendantes mais l’écart se réduit

 Les sociétés appartenant à un groupe sont plus innovantes que les sociétés indépendantes : 57 % contre 47 %. Cet écart concerne autant la part des sociétés technologiquement innovantes que la part des sociétés innovant en matière d’organisation ou de marketing (9 points d’écart).

Parmi les sociétés indépendantes, la part des sociétés innovantes augmente plus vite (+ 4 points), réduisant ainsi l’écart à 10 points avec les sociétés appartenant à un groupe (versus 13 points sur la période 2012-2014).

Les dépenses pour les activités d’innovation, 7 % du chiffre d’affaires

 L’ensemble des dépenses en faveur de l’innovation représente près de 7 % du chiffre d’affaires des sociétés technologiquement innovantes, soit près de deux points de plus qu’en 2014. La moitié de ces dépenses est consacrée aux dépenses de R&D.

Pour le secteur de l’information-communication, le poids des dépenses en faveur de l’innovation est plus important et atteint 15 % du chiffre d’affaires dont 80 % pour la R&D). Cette proportion est de 10 % pour les activités spécialisées, scientifiques et techniques.

Plus du tiers des entreprises reçoivent un soutien public

 36 % des entreprises ayant conduit des actions innovantes ont reçu un soutien financier public entre 2014 et 2016. 17 % ont bénéficié du crédit d’impôt recherche ou d’une exonération fiscale ou sociale, 8 % seulement d’une subvention ou d’un prêt et 11 % obtiennent les deux.

Les soutiens financiers publics accordés aux entreprises proviennent essentiellement des organismes nationaux (14 % des sociétés en bénéficient) et des collectivités territoriales (9 %). 5 % des sociétés perçoivent des soutiens financiers en provenance de l’Union européenne.

Les aides publiques restent concentrées sur les entreprises de plus de 250 salariés. La moitié d’entre elles reçoivent des concours publics contre 32 % pour celles ayant de 10 à 49 salariés.

La part des sociétés en bénéficiant est plus importante dans l’information-communication, l’industrie et les activités spécialisées, scientifiques et techniques (respectivement 61 %, 55 % et 45 %). Le crédit d’impôt recherche et les exonérations fiscales ou sociales représentent la majorité des financements dans ces trois secteurs ainsi que dans les activités financières et d’assurance. La construction et les activités immobilières ou de soutien reçoivent majoritairement des subventions.

 L’absence de demande comme principal motif de ne pas innover

L’innovation dépend de la taille de l’entreprise, de son secteur d’activité et de ses capacités de financement. Entre 2014 et 2016, la moitié des sociétés marchandes non agricoles de 10 salariés ou plus n’ont pas innové. Un quart d’entre-elles déclarent n’avoir pas eu le besoin ou l’opportunité de mener des opérations d’innovation, 14 % ont été freinées par le manque de moyens financiers et 10 % n’ont pas réalisé d’innovation faute de personnel qualifié.

La France est le pays de l’Union européenne dont la part de sa richesse nationale (34 % du PIB) consacrée aux prestations sociales et à la lutte contre la pauvreté est la plus élevée. Ces prestations donnent lieu à un débat sur leur efficience s’est engagé après les propos de cet été du Président de la république. Permettent-elles de réduire la pauvreté et surtout donnent-elles les moyens aux bénéficiaires d’améliorer durablement leur situation ?

En 2015, l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du Ministère du Travail, 40 % des personnes en France métropolitaine ont un niveau de vie annuel inférieur à 18 145 euros, soit 1 512 euros par mois, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux de l’Insee. Parmi ces personnes modestes, un peu plus d’un tiers sont pauvres monétairement, leur niveau de vie étant inférieur à 60 % du niveau de vie médian, soit 1 015 euros par mois en 2015.

Les personnes modestes sont en moyenne plus jeunes et vivent davantage dans une famille monoparentale ou nombreuse (au moins trois enfants) ou seules. En 2015, 43 % des personnes modestes ont moins de 30 ans contre 31 % pour le reste de la population, 30 % ont moins de 20 ans contre 21 % pour le reste de la population. Parmi les personnes modestes, la part des jeunes est d’autant plus élevée que les revenus sont faibles.

Plus d’un tiers des personnes modestes (35 %) vivent dans une famille monoparentale ou dans une famille nombreuse, contre 14 % pour le reste de la population. Cette surreprésentation augmente avec la pauvreté : 44 % des personnes pauvres vivent dans une famille monoparentale ou nombreuse, contre 30 % des personnes modestes non pauvres. Les personnes seules sont également surreprésentées parmi les personnes modestes. 19 % des personnes modestes sont seules, contre 14 % parmi le reste de la population.

Les chômeurs et les inactifs non retraités âgés de 18 ans ou plus sont aussi plus présents parmi les personnes modestes (23 %) que parmi le reste de la population. Par ailleurs, les personnes en situation de handicap sont également surreprésentées parmi les personnes modestes (19 % contre 14 % pour le reste de la population).

En revanche, les retraites et surtout les personnes en emploi sont moins présentes parmi les personnes modestes (respectivement 19 % et 29 %) que dans le reste de la population (24 % et 48 %).

Les habitants des grands pôles urbains sont moins concernés par la pauvreté que les personnes vivant en milieu rural. Seulement 16 % des ménages modestes vivent au sein des grandes agglomérations contre une moyenne nationale de 23 %.

 

Les minimas sociaux bénéficient aux 20 % des résidents les plus modestes

 

En 2015, 80 % de la masse totale des minima sociaux et 75 % de la masse des allocations logement sont distribués aux 20 % des personnes les plus modestes. La CMU-C et le RSA ciblent majoritairement les personnes à faibles revenus. En revanche, la Prime Pour l’Emploi (PPE) a un public, par nature, plus large. En 2015, 8 % de la masse totale de la prime pour l’emploi sont versés aux 10 % de la population ayant les revenus initiaux par unité de consommation les plus faibles (premier décile), alors que 54 % sont distribués aux ménages qui se situent dans les trois déciles suivants.

 

Si les plafonds d’attribution des allocations familiales sont situés au-dessus des minimas sociaux, ces prestations sont de plus en plus versées aux ménages à faible niveau de vie en raison de la surreprésentation des familles avec enfants, notamment des familles nombreuses et des familles monoparentales. 56 % des prestations familiales sont allouées aux 30 % de la population ayant les niveaux de vie les plus faibles avant redistribution.

 

Les prestations sociales représentent 40 % des revenus des Français les plus modestes

 

Les prestations sociales non contributives et la prime pour l’emploi représentent 41 % du revenu disponible des ménages modestes. Ce taux est de 48 % pour les Français dont le revenu disponible figure dans le 1er décile et 24 % pour ceux du 2e décile.

 

Les prestations familiales représentent ainsi 40 % du montant de l’ensemble des prestations sociales versées (y compris la PPE) devant les minima sociaux et les allocations logement qui comptent respectivement pour 28 % et 26 % du total.

 

En 2015, la proportion de personnes situées sous le seuil de pauvreté, qui correspond au taux de pauvreté, est ainsi réduite de 8,1 points, une fois l’ensemble des prestations sociales non contributives, la PPE et la fiscalité directe prises en compte.

 

En définitive, en 2015, 14,2 % de la population métropolitaine vit sous le seuil de pauvreté, soit 8,9 millions de personnes. L’intensité de la pauvreté (l’écart entre le seuil de pauvreté et le niveau de vie médian des personnes pauvres, exprimé en proportion du seuil de pauvreté) diminue de 18,5 points sous l’effet de la redistribution, pour atteindre 19,6 %. Ce sont les prestations familiales (-2,4 points), les aides au logement (-2,1 points) et les minima sociaux (-2,0 points) qui réduisent le plus le taux de pauvreté. Les effets du RSA activité et de la prime pour l’emploi sur le taux de pauvreté et son intensité en 2015 restent en revanche limités (entre -0,1 et -0,7 point).

 

Les prestations sociales réduisent les inégalités de niveau de vie entre les plus aisés et les plus pauvres

 

En 2015, en France métropolitaine, le rapport entre le neuvième décile de niveau de vie (plancher des 10 % les plus riches) et le premier décile (plafond des 10 % les plus pauvres) est de 6,1 avant redistribution. La redistribution permet de réduire ce ratio de 2,7 points pour atteindre 3,57, comme en 2014 et 2013. Cela signifie qu’après redistribution, le plancher du niveau de vie des 10 % les plus aisés est 3,5 fois supérieur au plafond de niveau de vie des 10 % les plus pauvres.

 

Un deuxième indicateur d’inégalités de niveau de vie entre les plus pauvres et les plus aisés est le rapport établi entre la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % les plus aisés et celle détenue par les 20 % les plus modestes. Ce rapport diminue de 4,1 points avec la redistribution pour atteindre 4,4, comme en 2014. Cela signifie qu’après redistribution, la masse des niveaux de vie des 20 % les plus aisés est 4,4 fois plus élevée que celle des 20 % les plus pauvres, alors qu’elle était 8,4 fois supérieure avant redistribution.

Les statistiques sont moins flatteuses concernant l’évolution des bénéficiaires des prestations sociales et en particulier des minimas sociaux. Selon une étude de l’OCDE (2018), les personnes du quintile inférieur de revenu (les 20 % des personnes ayant les revenus les plus faibles) ont peu de chance de s’élever en termes de revenus. 64% des personnes de ce groupe n’évolueront pas durant leur carrière. L’ascension sociale dépend avant tout du niveau d’éducation. La France reste un des pays où le déterminisme scolaire est le plus élevé. Les enfants des familles modestes ont une probabilité faible (17 %) de poursuivre des études supérieures.

 

Ces chiffres sont à mettre en perspective avec la présentation par le Président de la République, cette semaine, d’un plan « anti-pauvreté » de 8 milliards d’euros sur 4 ans, incluant notamment la refonte des aides sociales pour donner jour à un revenu universel d’activité. Refonte qui s’inspire des conclusions du rapport Sirugue de 2016 « Repenser les minima sociaux : vers une couverture socle commune » devrait intégrer au moins le RSA, les APL et la prime d’activité. Une loi est annoncée pour 2020, vraisemblablement précédée d’une période d’expérimentation par des Départements volontaires, comme ce fut le cas en 2007-2008 pour le RSA.