16 juin 2018

Le Coin des Tendances du 16 juin 2018

Les Italiens devant les Français pour la transmission du patrimoine

En 2014, 45 % des ménages français déclaraient avoir bénéficié au moins une fois durant leur vie d’une transmission de patrimoine, qu’elle prenne la forme d’une donation ou d’un héritage. Cette proportion est nettement supérieure à celle constatée en Allemagne (27 %), en Italie (32 %) ou en Espagne (33 %). Le patrimoine reçu représente 20 % du stock de patrimoine brut (hors endettement) en France et en Allemagne contre 25 % en Espagne et 40 % en Italie. Dans ce dernier pays, le montant des transmissions est important, plus de 150 000 euros en moyenne soit plus qu’en France ou en Allemagne. 87 % des transmissions proviennent des parents en France contre 73 % en Allemagne. Dans ce dernier pays, 14 % des personnes ont reçu des biens de leurs grands-parents et 17 % en provenance d’autres membres de leur famille contre respectivement 11 et 10 % en France.

Le transfert moyen des transmissions est en France de 135 000 euros contre 186 300 en Allemagne et 294 000 en Italie. Le transfert médian est de 41 00 euros en France contre 71 000 en Allemagne.

Les personnes de référence au sein des ménages ayant bénéficié d’une transmission durant leur vie sont âgées en moyenne de 59 ans en Italie, de 38 ans en Espagne, de 57 ans en France et de 54 ans en Allemagne. Dans les pays d’Europe du Sud, les donations sont peu pratiquées, ce qui conduit à un âge plus élevé. La date d’arrivée des premiers héritages est soumise à un double effet contradictoire. Elle intervient plus tard dans la vie en raison de l’allongement de l’espérance de vie des parents mais elle peut également être avancée du fait de l’arrivée plus tardive des enfants.

Le niveau qualification de la personne de référence au sein du ménage est plus élevé pour ceux ayant bénéficié d’une donation par rapport à ceux qui n’ont reçu qu’un héritage ou ceux n’ayant eu ni l’un, ni l’autre. Cette situation s’explique par le fait que les détenteurs d’un diplôme d’enseignement supérieur appartiennent traditionnellement à des familles plus aisées et qui se préoccupent de la dévolution de leur patrimoine.

Toujours en Italie, l’immobilier est au cœur des transmissions. 86 % de celles-ci comportent, en effet, un bien immobilier contre 62 % en Espagne, 54 % en Allemagne et 37 % en France. Cette situation reflète le fait que le nombre de propriétaires de leur résidence principale en France est inférieur à celui des autres grands pays européens. Le taux de détenteurs de leur résidence principale est de 83 % en Espagne, de 68 % en Italie contre 58 % en France. En Allemagne, la transmission de la résidence familiale est fiscalement bien traitée tout comme en Italie. En Espagne, un abattement pouvant atteindre 95 % de la valeur des biens immobiliers s’applique. La fiscalité joue à l’encontre de l’immobilier et favorise les donations en argent.

En France, le revenu disponible annuel moyen des ménages donataires est supérieur de 9000 euros à celui des ménages héritiers et de plus de 12 500 euros à celui des ménages sans transmission. Cet écart est fort logiquement constaté dans tous les pays. Il s’explique en partie par le fait que les donations peuvent concerner des biens professionnels. Par ailleurs, ce sont les ménages les plus aisés qui recourent à ce type de transmission.

 

La musique chante-t-elle toujours juste ?

La fête de la musique fêtera ses 36 ans le 21 juin prochain. L’idée de célébrer la musique le 21 juin, pour le solstice d’été ne date pas de 1982 mais de 1976. Elle a été imaginée par un musicien américain Joel Cohen qui travaillait alors pour France Musique. Il avait proposé de dédier les deux solstices d’hiver et d’été à la musique. Ce projet a vu le jour le 21 juin 1976 dans l’Ouest parisien et à Toulouse. En 1982, le ministre de la culture Jack Lang a repris l’initiative de Joel Cohen à son compte en décidant de faire du 21 juin, la fête nationale de la musique. Depuis, cette fête s’est internationalisée. Plus de 120 pays ont décidé de célébrer ce jour-là la musique. Plus de 340 villes organisent des évènements. Selon l’INSEE, la Fête de la Musique est connue par 97 % des Français dont un sur dix y a contribué que ce soit en tant que musicien ou chanteur, soit en tant que spectateur (au moins une fois depuis plus de 25 ans pour 79 %).

Le nombre de pratiquants réguliers de musique s’élèvent à plus de 2 millions (non compris les 10 millions d’élèves qui suivent les cours de musique à l’école). La fête de la musique a contribué au renouveau de la scène en France même si, depuis quelques années, les festivals éprouvent de plus en plus de difficultés financières. Une professionnalisation est en cours avec le développement de sociétés internationales en charge de l’organisation et de la gestion des concerts (entreprise Live Nation par exemple).

L’essor de la pratique musicale a été réel en France depuis une quarantaine d’années grâce à la montée en puissance des classes moyennes disposant d’un pouvoir d’achat suffisant pour s’acheter des instruments de musique dont le prix a, par ailleurs, baissé. La diffusion accrue de la musique, la multiplication des spectacles ont également incité les Français à pratiquer d’un ou de plusieurs instruments. Si les conservatoires forment peu de jeunes, moins de 100 000 inscrits en 2017, la musique reste enseignée au sein des écoles primaires et secondaires. L’enseignement scolaire de la musique est, en France, ancien. Il date du 19e siècle. Il est même possible de remonter bien plus en avant dans le temps. Ainsi, en 789 Charlemagne imposa la pratique générale du chant grégorien, il s’agissait pour le futur empereur d’unifier l’Église autour du rite romain. Mais le rôle qu’assigne Charles au clergé. L’éducation musicale à l’école n’a pas été imaginée comme un outil pour favoriser l’émergence de talents, d’artistes. Elle s’inscrivait dans une démarche plus politique de lutte contre le patois et les langues régionales. Le 23 juin 1819, le baron Joseph Marie de Gérando demande à ce que les élèves effectuent des exercices de chant et de musique. En 1835, le rapport de Boulay de la Meurthe souligne l’utilité de l’éducation de la musique comme instrument d’uniformisation des pratiques linguistiques. Les chorales au sein des écoles se multiplient avec comme objectifs : le perfectionnement de la langue, l’amélioration des comportements et le travail physique sur le corps. Victor Duruy, Ministre de l’Education sous Napoléon III, entend placer au cœur de l’éducation des jeunes enfants l’enseignement de la musique. Après de nombreuses consultations, par arrêté du 30 janvier 1865, il impose un enseignement de 5 heures de chant par semaine dans les écoles normales et de 2 heures dans les lycées. Ces horaires ne seront pas respectés dans les faits. La pratique de la musique deviendra obligatoire au sein des écoles primaires avec la publication de la loi du 28 mars 1882. Ces obligations avaient comme limite la faiblesse du nombre de professeurs capables d’enseigner la musique. Afin de pallier ce problème, un certificat d’aptitude à l’enseignement du chant oral est institué en 1887. En 1908, une association des professeurs de musique dans les établissements publics d’enseignement est créée. En 1974, est créée une agrégation musicale qui complète le CAPES.

À partir des années 50, les enseignants peuvent diffuser de la musique en classe grâce à la diffusion des postes de radio ou des électrophones. L’enseignement se partage alors entre l’apprentissage du solfège, le chant et l’écoute accompagnée d’œuvre du répertoire classique. Les élèves d’établissements situés dans des villes d’une certaine importance, sont de plus en plus amenés à assister à des concerts. Dans les années 60/80, l’enseignement devient de plus en plus instrumental, la flûte à bec devient l’instrument symbole de l’enseignement de la musique au collège. Les années 80/2000 sont celles de la remise en cause de l’enseignement traditionnel. Les élèves bercés par les radios de la bande FM éprouvent de moins en moins d’appétence à l’égard du solfège et de la flûte à bec. La culture classique des familles recule rendant le travail des enseignants de plus en plus difficile. Les programmes mettent l’accent sur l’élève créateur. L’enseignement des musiques prend le pas sur celle de la musique dite classique. Les aspects historiques et de culture générale sont délaissés au profit d’un spontanéisme.

La diffusion et la pratique de la musique connaissent une évolution permanente. Les différents formats se sont succédé à grande vitesse, disque 78 tours, disque 33 et 45 tours, cassettes audio, CD, les fichiers audio et le streaming. L’écoute de la musique en famille ou entre amis a laissé la place à une écoute plus individuelle, la chaîne hifi laissant la place au walkman puis au smartphone. Dans les années 60 à 80, les radios avec les chaînes de télévision sont les principales prescriptrices en matière de musique. Elles retransmettent les concerts de musique classique et avec leur hit-parade orientent les achats des jeunes. Avec le numérique, elles ont perdu progressivement ce rôle. Aujourd’hui, les réseaux sociaux les ont remplacées, Facebook et YouTube (Deezer, Spotify) jouent un rôle clef dans la diffusion de la musique. Les années 2000 ont été marquées par la chute des achats de disques, par le téléchargement illégal. Le streaming permettant l’écoute en continu sur Internet progresse depuis quelques années. En 2015, 18 milliards d’écoutes en flux en 2015 ont été enregistrées en France, contre 9 milliards en 2013.

Autrefois, le marché de la musique comportait trois grandes catégories : la musique classique, la musique populaire française et la musique populaire internationale, pop rock essentiellement anglo-saxonne. Depuis vingt ans, le marché s’est segmenté en un grand nombre de sous-catégories plus ou moins étanches. La musique classique continue de décliner. Le rock et le pop sont avant tout écoutés par les plus de 40 ans, ce qui constitue une cible marketing de choix. Le rap, musique des banlieues, musique des minorités jeunes, peine à élargir sa diffusion.

Si le marché de la diffusion de la musique est toujours en convalescence, celui des spectacles se porte mieux. Les Français achètent de plus en plus de billets pour assister à des concerts.

Selon l’INSEE, en matière de pratique, 23 % des Français déclarent savoir jouer d’un instrument de musique. Cette proportion est en léger déclin sur vingt ans (27 % en 1997). Parmi eux, seulement la moitié a pratiqué cet instrument durant les 12 derniers mois (source : enquête Pratiques culturelles des Français ministère de la Culture et de la Communication). 8 % des Français ont une pratique musicale dans un cadre collectif, et 5 % appartiennent à des formations musicales diverses (tous styles confondus). De plus, 5 % ont composé de la musique sur ordinateur, ce qui porte la totalité des musiciens amateurs à 18 % de la population française, un pourcentage plus faible que chez nos voisins européens.

En 2017, le marché global des instruments de musique s’élève à 1 554 000 unités vendues, dont 1 144 000 instruments neufs et 410 000 d’occasion. Le marché des instruments neufs est estimé à 475 millions d’euros. Les cordes pincées et les claviers-accordéons représentent environ un tiers chacun, les instruments à vent 15 %, les cordes frottées 8 % et les batteries-percussions 7 %.

Le marché annuel des accessoires s’élève à 1 978 000 unités, soit un marché estimé entre 100 et 150 M€ HT.

Les achats sont, pour moins de la moitié, réalisés dans un magasin revendeur, Internet assurant désormais un quart du marché et les fabricants (luthiers, facteurs de pianos, etc.).

Les achats d’occasion entre particuliers sont très fréquents. Les familles revendent les instruments des enfants qui abandonnent leur pratique. Ils représentent 12 % des achats pour les claviers-accordéons et les cordes pincées et même 17 % pour les batteries-percussions. Pour les accessoires, les acheteurs se tournent principalement vers les revendeurs, quelle que soit la famille d’instruments.

Le marché de la location représente 353 000 actes par an, soit 22 % du marché. Pour les claviers-accordéons et les cordes pincées, la durée de location est majoritairement de moins de 3 mois, laissant supposer que les loueurs passent ensuite à l’achat d’un instrument ou abandonnent la pratique musicale.

Le secteur de l’entretien et de la réparation des instruments est important. Toutes familles confondues, le nombre d’actes d’entretien est estimé à 448 000 et le nombre d’actes de réparation à 231 000 au cours des cinq dernières années. Les claviers-accordéons font l’objet du plus grand nombre d’interventions ; à l’inverse, elles sont peu nombreuses pour les batteries-percussions. En 2015, 1 037 entreprises sont présentes sur le secteur des instruments de musique. Elles emploient 1 555 salariés. Le secteur de la fabrication d’instruments de musique est surtout caractérisé par la prédominance des petites structures. 88 % de ces entreprises n’ont pas de salarié mais ne réalisent que 10 % du chiffre d’affaires du secteur, à l’opposé, les trois leaders du marché réalisent près de 70 % du chiffre d’affaires des entreprises fabricantes. Les fabricants d’instruments à vent réalisent la plus grande part du chiffre d’affaires (43 %).

Le taux de valeur ajoutée, de l’ordre 50 % du chiffre d’affaires, est pratiquement le double de celui de l’ensemble de l’industrie manufacturière, traduisant une forte intégration verticale du processus de fabrication. Sur la période 2009-2015, la baisse des effectifs salariés a entraîné, conjointement à une hausse de la valeur ajoutée, une progression plus rapide de la productivité apparente du travail des entreprises fabricantes que dans l’industrie manufacturière. Elle a progressé de 4,8 % en moyenne par an pour les fabricants d’instruments employant dix salariés ou plus contre 2,5 % dans l’industrie manufacturière.

La balance commerciale de la France pour les instruments de musique est déficitaire malgré un taux d’exportation élevé des entreprises leaders. Les exportations françaises (notamment vers les États-Unis, le Japon et l’Italie) sont en croissance régulière et sont essentiellement réalisées par quelques entreprises positionnées sur le haut de gamme et bénéficiant de la notoriété de leur marque sur les marchés internationaux. Le taux d’exportation des entreprises de dix salariés et plus a progressé en passant de 60 % à près de 70 % depuis 2014. Toutefois le marché français est largement alimenté par les importations (notamment d’Allemagne et de Chine).

La filière de la facture instrumentale française dispose de nombreux atouts, notamment liés à sa grande maîtrise technique et son positionnement haut de gamme, ainsi qu’à un dispositif de formation de grande qualité. Le secteur n’est pas encore suffisamment concentré. Le secteur de l’entretien réparation n’est pas assez étayé et ne permet pas de répondre à la demande. Les fabricants devraient miser plus fortement sur Internet et sur les contrats de location. Ils devraient également être plus actifs sur le marché de l’occasion en offrant une garantie automatique sur des prestations de maintenance. Une politique plus agressive en développement des innovations en lien avec le digital permettrait d’affirmer leur présence sur le marché musicale d’aujourd’hui et de demain. Ils devraient nouer des partenariats avec les structures en charge de l’enseignement de la musique ainsi que celles organisant des concerts afin de mieux promouvoir leur savoir-faire.