20 juillet 2019

Le Coin des tendances du 19 juillet 2019

La longue marche vers le régime universel de retraite

Notre système de retraite (régime de base) date de 1945 dans ses grandes lignes. Depuis la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses modifications sont certes intervenues mais les fondamentaux n’ont pas été remis en cause. Pour des raisons historiques, sociales et politiques, le système actuel est composé d’une série de régimes liés à des statuts professionnels, salariés, indépendants, agriculteurs, fonctionnaires, etc. Les régimes complémentaires se sont greffés progressivement aux régimes de base. Les prestations d’assistance ont été prises en charge de leur côté non seulement par l’État mais aussi par les régimes de protection sociale. Cette architecture devrait être totalement modifiée si les préconisations du Haut-Commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, présentées le 18 juillet dernier étaient retenues. Depuis 1993, c’était la voie de la convergence qui avait été privilégiée. Les durées de cotisation, les dispositifs de décote, l’âge légal avaient été plus ou moins bien alignés au sein des différents régimes. Le maintien de spécificités était de plus en plus mal perçu par l’opinion publique au point qu’elle juge le système de retraite français injuste et inéquitable (71 % des Français selon un sondage Cercle de l’Épargne/Amphitéa de 2018). La promesse du Président de la république, Emmanuel Macron, de créer un régime universel selon le principe « un euro cotisé donne les mêmes droits pour tous », a reçu un accueil très favorable. En revanche, les Français sont opposés à tout report de l’âge de départ à la retraite. Une large majorité est favorable à son maintien à 62 ans voire à son retour à 60 ans (sondage 2019 Cercle de l’Épargne/Amphitéa). Le 18 juillet 2019, Jean-Paul Delevoye a tracé les grandes orientations de la réforme sans entrer dans le détail. Il a annoncé une négociation avec les partenaires sociaux afin de résoudre les nombreux points de blocage potentiels touchant en particulier l’âge de départ à la retraite et le sort des bénéficiaires des régimes spéciaux.

Le régime universel parachève le travail des pères fondateurs de la Sécurité sociale

Le programme du Conseil National de la Résistance publié le 15 mars 1944 avait fixé comme objectif l’instauration « d’un plan complet de Sécurité Sociale visant à assurer à tous les citoyens les moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, la gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ». Il indiquait également qu’« une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours » devait être instituée. Ces engagements ont été repris dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, préambule qui est également celui de notre actuelle constitution. Ce dernier souligne que la Nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité les moyens convenables d’existence ».

En 1945, la France a fait le choix exclusif de la retraite par répartition. Ce choix n’était pas, loin de là, irrationnel. Le nombre de retraités était faible, la crise des années trente et de la Seconde Guerre Mondiale avait mis à mal l’ensemble de la sphère financière. Après les sombres heures de l’occupation, pour renouer les fils sociaux distendus, il y avait une volonté commune d’instituer un régime reposant sur la solidarité et notamment sur la solidarité intergénérationnelle. Les responsables publics de l’époque voulaient assurer une retraite digne aux anciens combattants de la Première Guerre Mondiale et éviter toute dérive populiste sur un sujet sensible.

Au nom de l’unité du pays retrouvé, les instigateurs de la Sécurité Sociale rêvaient d’un grand régime unique couvrant toutes les professions et toutes les branches de la protection sociale. La loi du 22 mai 1946 pose le principe de l’assujettissement obligatoire et clôt, après plus d’un siècle de tergiversation, le débat du caractère facultatif ou non de la couverture retraite. La loi du 13 septembre 1946 ordonne que toute la population soit affiliée à l’assurance-vieillesse à compter du 1er janvier 1947. Certes, ce principe resta un vœu pieux. La loi fut même abrogée en 1947. Les non-salariés ont refusé de rentrer dans le régime général. Ils ne voulaient pas que leurs cotisations alimentent la caisse des salariés pour des raisons économiques et politiques. Ils craignaient que leurs cotisations ne profitassent avant tout aux salariés. Ils considéraient alors ne pas avoir besoin d’une couverture retraite pouvant compter sur la vente de leur fonds de commerce. Les grandes entreprises des secteurs du transport et de l’énergie qui s’étaient dotées de leur propre régime d’assurance vieillesse ne sont pas entrées dans le régime général car ce dernier était moins généreux que le leur. C’est ainsi que sont nés les régimes spéciaux à la SNCF, à la RATP, aux Charbonnages de France ou à EDF.

La construction d’un nouveau paysage des retraites

En décidant d’instituer un régime universel par point, le Gouvernement décide de donc de redessiner l’ensemble du paysage de la retraite, un paysage vieux de 70 ans. Cette réforme concerne le premier poste de dépenses sociales du pays, 325 milliards d’euros en 2017. Jean-Paul Delevoye a précisé que l’intégration complète des 42 régimes de base et des complémentaires qui y sont associés pourrait s’étaler sur 15 ou 20 ans. Il a même pris la précaution d’indiquer que le nouveau système ne pourrait concerner que les nouveaux entrants dans la vie active. Cette hypothèse pourrait servir de base de négociation pour les représentants des régimes spéciaux.

Un régime universel par points pour tous

Le système actuel de retraite est constitué de 42 régimes de base et d’une centaine de régimes complémentaires obéissant à des règles différentes rendant les comparaisons difficiles, ce qui laisse place à une forte suspicion d’inégalités entre les assurés. Le futur régime universel reposera sur un système par points et devrait intégrer les régimes des salariés, les régimes spéciaux, les différents régimes de la fonction publique, les régimes des indépendants ainsi que celui des agriculteurs.

Des régimes resteront dérogatoires du fait de la spécificité des activités qu’ils recouvrent. Devraient figurer dans cette liste, ceux des marins, des militaires, des auteurs et artistes.

Comme pour les régimes complémentaires AGIRC/ARRCO, les points seront accumulés durant toute la carrière professionnelle. Le dispositif du calcul de la pension de base prenant en compte les 25 meilleures années est ainsi abandonné. Chaque salarié sera doté d’un compte personnel retraite qui retracera le nombre de points accumulés au fil de sa carrière. Des points seront accordés au cours d’une période de maladie ou de maternité ou de chômage.

L’entrée en vigueur progressive du régime universel

L’entrée en vigueur est prévue à partir de 2025 et concernerait les générations 1963 et postérieures. Sur ce point, le Haut-Commissaire laisse le débat ouvert. La phase de transition pourrait durer entre 15 et 20 ans.

Dans les régimes de base dits alignés, les assurés doivent disposer d’un nombre de trimestres suffisant pour obtenir une retraite à taux plein, 168 pour ceux partant actuellement à la retraite. La pension est par ailleurs calculée sur les vingt-cinq meilleures années. Dans le nouveau système, ces deux principes disparaissent. Néanmoins, la notion d’annuités sera conservée pour l’obtention du minimum de retraite contributif (1 000 euros).

Les retraités et les actifs se trouvant à moins de cinq ans de la retraite en 2025 ne sont donc pas concernés.

Les droits dans l’ancien système garantis

À partir du 1er janvier 2025, les assurés qui ont déjà commencé leur vie active avant cette date auront cotisé dans deux systèmes différents. De ce fait, leur future pension sera constituée de deux blocs. Une photographie de leur situation au regard de la retraite au 31 décembre 2024 sera réalisée et donnera lieu à un versement au sein de leur compte retraite d’un nombre de points. Pour les régimes à points qui basculeront dans le régime universel, un transfert de points sera réalisé sur le modèle de ce qui a été fait le 1er janvier 2019 avec la fusion de l’AGIRC et de l’ARRCO.

Les mécanismes de transition seront par ailleurs « adaptés » à chaque régime et achevés « environ quinze ans » après l’entrée en vigueur du nouveau système.

L’âge légal de départ à la retraite reste fixé à 62 ans mais un âge d’équilibre à 64 ans est institué

L’âge légal de départ restera fixé à 62 ans, mais cela deviendra un âge minimum de départ. Un âge « d’équilibre » à 64 ans sera instauré. Les assurés partant avant 64 ans pourraient subir une décote pouvant atteindre 10 %. Pour les départs au-delà de ce seuil, une surcote pourra être appliquée, pouvant atteindre également 10 %. L’âge de la retraite à taux plein de 67 ans est supprimé. L’âge pivot de 64 ans pourra faire l’objet de révision en fonction de l’évolution de l’espérance de vie. Actuellement, l’âge moyen d’entrée sur le marché du travail est de 22 ans. L’âge pivot correspond donc à une durée de cotisation de 42 ans. Pour certains métiers, des départs anticipés seraient maintenus. Ils ne seraient plus liés à l’existence de régimes spéciaux mais à la pénibilité de certaines professions (exemples : les marins et les pompiers).

Un taux de cotisation à 28,12 % sauf pour les indépendants

Deux cotisations retraite sont prévues. Une cotisation plafonnée de 25,31 % qui permet l’acquisition de points. Elle s’appliquera à toute la rémunération dans la limite de trois fois le plafond de la Sécurité sociale, soit environ 120 000 euros. Une cotisation de 2,81 % s’appliquera à l’ensemble de la rémunération et servira à financer les dépenses dites de solidarité. Ces deux de cotisation seront partagées entre employeurs (60 %) et salariés (40 %). Ces cotisations seront identiques quel que soit l’employeur privé ou public. L’ensemble des primes des fonctionnaires seront désormais prises en compte pour le calcul de la retraite (aujourd’hui, seule une petite part l’est dans le cadre du régime Additionnelle de la Fonction Publique). Compte-tenu de la baisse de rémunération des fonctionnaires que provoquera l’assujettissement des primes à cotisations, le Haut-commissaire à la réforme des retraites a admis qu’une période transitoire devra être instituée durant laquelle l’État pourra s’acquitter des dites cotisations.

Le taux de cotisation sera cependant différent pour les indépendants qui cotiseront à hauteur de 28,12 % sur les 40 000 premiers euros gagnés puis à hauteur de 12,94 % sur 80 000 euros suivants. Au-delà de 120 000 euros, les indépendants devront s’acquitter de la cotisation de solidarité de 2,81 %. Dans les faits, cela représente une hausse par rapport à leur régime actuel. Celle-ci sera compensée par une baisse de la CSG. 

Comment seront financés les avantages spécifiques des régimes spéciaux ?

La Cour des Comptes a précisé dans un rapport rendu public au mois de juillet que pour les régimes spéciaux, le nouveau régime universel n’a pas à supporter les avantages spécifiques (départ anticipé, billets et électricité à tarif réduit, etc.) dont bénéficient leurs ayant-droit. Jean-Paul Delevoye admet que des financements spécifiques devront être prévus en cas de maintien de spécificités.

La valeur des points et le montant des pensions

En l’état actuel, Jean-Paul Delevoye a rendu public le rendement du point du futur régime. Celui-ci serait de 5,5 %. 10 euros de cotisation permettront d’acquérir un point, qui sera revalorisé tout au long de la carrière en fonction de l’évolution des salaires. Pour 100 euros cotisés pendant sa carrière, un retraité percevra 5,5 euros par an pendant toute sa retraite, s’il a travaillé jusqu’à 64 ans, ce qui représente le taux de rendement du régime à taux plein.

Les points accumulés seront indexés sur le revenu moyen par tête quand les pensions le seront sur le taux d’inflation. Malgré tout, Jean-Paul Delevoye a indiqué que les points pourraient demeurer indexés sur l’inflation. En ce qui concerne les pensions, leur actualisation pourra prendre le cas échéant en compte l’évolution des salaires.

Un régime unique de réversion

Les règles de réversion diffèrent en fonction des régimes. Plus de 13 cas cohabitent en la matière. Les pensions de réversion peuvent être attribuées sous condition ou pas de ressources ainsi qu’à des âges et des taux différents. De même, en fonction de l’évolution maritale, elles peuvent éventuellement être, selon les cas, suspendues ou supprimées.

L’idée retenue par Jean-Paul Delevoye serait de garantir aux veufs 70 % des pensions constatées du couple avant le décès du conjoint. La réversion sera financée par l’impôt et sera identifiée dans un Fonds de solidarité vieillesse universel.

Les majorations pour enfants

Une majoration des points de 5 % sera attribuée dès le premier enfant et pour chaque enfant. Ces points, par défaut attribués à la mère, pourront être partagés entre les parents. Aujourd’hui, seules les familles de plus de trois enfants bénéficient d’une majoration de 10 %.

Les mesures de solidarité

Les périodes de congé maternité, de congés maladie, d’invalidité et de chômage indemnisés donneront lieu à des attributions de points.

Les assurés bénéficient dans le système actuel de dispositifs garantissant des minimas de pension : minimum contributif pour le régime général et garantie de pension pour la fonction publique. Dans le nouveau système, des filets de sécurité seront également institués pour les assurés à faibles revenus mais ayant un nombre suffisant d’années de cotisation. Conformément aux engagements pris, ce minimum sera fixé à 1 000 euros, soit 85 %.

Un établissement public paritaire pour gérer le nouveau système

Le Gouvernement devrait créer la Caisse nationale de retraite universelle sous la forme d’un établissement public. Son conseil d’administration sera paritaire et pourrait comporter treize représentants des assurés et treize représentants des employeurs et des indépendants. Il aura à se prononcer sur le pilotage du système dans le cadre de la trajectoire définie par le Parlement et l’exécutif. Une assemblée générale rassemblera l’ensemble des assurés et des employeurs afin de donner « un avis », notamment sur le pilotage du système, tandis qu’un « conseil citoyen » fera, chaque année, des propositions au conseil d’administration et au Gouvernement.

Entre 2020 et 2025, la Caisse nationale met en œuvre le schéma de transformation qui aboutit à intègre la CNAV, l’AGIRC/ARRCO, la CNAVPL et l’IRCANTEC. Elle procède par délégation de gestion pour la gestion locale. En 2030, la fusion sera achevée avec la création d’établissements locaux. Les URSSAF sont censées être en charge de la future collecte des cotisations sociales.

L’équilibre du régime, l’adoption d’une règle d’or

Le Haut-Commissaire à la réforme des retraites a indiqué qu’au moment du grand basculement, en 2025, le régime devrait être à l’équilibre, ce qui suppose que des mesures d’ordre paramétrique soit adoptées d’ici là. Afin de ne pas polluer la négociation sur le régime universel, le Gouvernement a décidé de ne pas en introduire dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 mais cela ne serait que partie remise.

Une règle d’or d’équilibre sera instituée pour garantir la pérennité de la trajectoire financière du système. Cette règle prévoira que le solde cumulé soit positif ou nul par période de cinq années avec un horizon de long terme.

Les dépenses de solidarité représenteront 25 % des dépenses totales du nouveau régime et devraient rester dans cette limite.

La création d’un fonds de réserve universel

En 1999, Lionel Jospin avait créé le Fonds de Réserve des Retraites censé épauler le système de répartition durant la période d’arrivée des baby-boomers à l’âge de la retraite. Entre temps, ce fonds de réserve a été affecté au remboursement de la dette sociale accumulée depuis une vingtaine d’années.

Jean-Paul Delevoye propose, de son côté, la création d’un Fonds de réserve de retraite universelle doté d’une partie des réserves constituées par les actuels régimes de retraite. Ce fond aurait pour objectif d’assurer la pérennité financière du futur régime. Le Régime additionnel de la fonction publique qui fonctionne comme un fonds de pension pourrait être mis à contribution. Les réserves qui ne seront pas nécessaires à la couverture des engagements transférés au système universel pourront être utilisées à la discrétion des caisses qui les détiennent. Elles pourront financer des droits supplémentaires, prendre en charge une partie des cotisations, abonder un régime supplémentaire ou financer des œuvres sociales.

Les régimes de retraite par répartition disposent de 137 milliards d’euros de réserves qui font l’objet d’un débat concernant leur éventuelle dévolution avec la mise en œuvre du futur régime universel de retraite. À ces réserves, il faut ajouter celles du Fonds de réserve des retraites (36,4 milliards d’euros) et celle des régimes par capitalisation obligatoires (RAFP : 22,4 milliards d’euros ; CAVP : 5,8 milliards d’euros).

Réserves des régimes par répartition En milliards d’euros En mois de prestations
CNAVPL 1,7 14
CNBF 0,6 49
Total régimes de base 2,4  
BDF 5,7 145
CNRACL 2,2 1
CRPCEN 0,5 7
Sous total régimes intégrés 8,4
AGIRC/ARRCO 70,8 11
IRCANTEC 8,5 35
MSA complémentaire 0,1 1
RCI 17,4 108
CNAVPL complémentaire 24,3 66
CNBF complémentaire 1,3 69
CRPNPAC 3,8 76
Sous total régimes complémentaires 126,1
Total réserves 136,9
Réserves FRR 36,4
Capitalisation obligatoire  
Capitalisation RAFP 22,4
Capitalisation CAVP 5,8

Source : Cor – Cercle de l’Épargne

L’adoption de la réforme après les municipales

Le calendrier d’adoption de la réforme apparaît complexe. En effet, Jean-Paul Delevoye a prévu un nouveau cycle de négociations avec les partenaires sociaux. Un texte devrait être présenté au mois de novembre en Conseil des Ministres avec une discussion au Parlement plus probablement après les municipales de mars 2020.

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Depuis plus de vingt ans, l’idée d’une création d’un régime universel ou unique de retraite est régulièrement avancée. Elle avait été mentionnée dans la loi de 2010 sur les retraites qui a porté l’âge légal de 60 à 62 ans. Elle n’avait jamais été clairement formulée jusqu’à maintenant. Les préconisations de Jean-Paul Delevoye ont le mérite de fixer un cadre et un chemin de fer pour réaliser cette transformation systémique. En tant que tel, le régime universel ne règle pas la problématique financière des retraites. Ce point est intimement lié au montant de l’effort de la Nation pour les retraités. Depuis plusieurs années, il est admis que la part de la création de richesse annuelle destinée aux pensions ne doit pas dépasser 14 %. Compte tenu de l’évolution de la population de plus de 65 ans qui devrait atteindre 25 millions d’ici 2070, dans un contexte de faible croissance, le taux de remplacement ne pourra que baisser dans les prochaines années. Cette évolution est indépendante du mode de calcul des pensions. Le système par points avec unification des régimes permettra un pilotage plus facile, plus transparent, plus équitable. Quoi qu’il en soit, l’idée que les futurs retraités puissent bénéficier de suppléments de retraite s’imposera de plus en plus. L’articulation entre la réforme des retraites et le Plan d’Épargne Retraite telle que définie par la loi PACTE n’est pas évidente. À force de vouloir distinguer répartition et capitalisation, le législateur ne favorise pas la convergence de ces deux modes de financement complémentaires et non opposés des retraites.

La télévision, c’est fini ?

Une génération de diffusion d’Internet est en train de modifier en profondeur les habitudes de consommation. La vidéo a supplanté la radio et la presse écrite. La mobilité fait disparaître les postes de télévision et les ordinateurs fixes. Si autrefois, les familles se réunissaient autour du poste de télévision pour regarder un film ou le journal télévisé, ce n’est plus le cas aujourd’hui. La consommation des médias est plus individualiste.

Plus des quatre cinquièmes des ménages français sont, aujourd’hui, connectés à Internet et 90 % disposent d’un téléphone portable. Pour accéder aux services et données en ligne, les Français recourent majoritairement à leurs smartphones ou à leur ordinateur portable. En trente ans, les habitudes de consommation de vidéos et d’information ont fortement évolué. Le déclin des supports vidéo traditionnels (cassettes et DVD) s’est accompagné d’un essor des chaînes payantes (62 % des ménages sont concernés), puis des services en ligne payants (18 % des personnes disent en regarder).

En 2017, 82 % des ménages métropolitains disposaient d’un ordinateur (fixe, portable, tablette), contre moins d’un sur deux (45 %) en 2004. Après une croissance rapide de l’équipement en ordinateurs fixes (13 % des ménages en 1995 contre 45 % en 2006), les ménages ont opté pour des produits nomades. Le taux d’équipement en ordinateur portable a été multiplié par six en onze ans pour atteindre 62 % en 2017. Les tablettes tactiles, qui n’étaient presque pas diffusées en 2011 (seuls 2 % des ménages en possédaient), concernent quatre ménages sur dix en 2017. Le parc d’ordinateurs fixes tend à reculer. Au moment du renouvellement du matériel, les ménages choisissent les ordinateurs portables ou les tablettes. Le taux d’équipement est passé de 47 % en 2011 à 37 % en 2017.

En 2017, 96 % des ménages ont au moins une télévision. Cette part est quasiment stable depuis les années 1990, avec un point haut en 2009 et 2010 où 98 % des ménages étaient équipés. De plus en plus de ménages payent des abonnements à des chaînes de télévision. Leur taux d’équipement a presque doublé au cours des dix dernières années (de 33 % en 2007 à 62 % en 2017, ce qui reflète l’apparition de nombreuses chaînes de télévision via la TNT, le câble ou le satellite). 29 % des individus âgés de 16 ans ou plus regardent la télévision sur Internet en 2018, 40 % regardent des vidéos en ligne et 18 % regardent des films ou émissions à la demande à partir de services commerciaux (Netflix, OCS, etc.). Les jeunes s’équipent moins que leurs aînés en télévision. Si entre 2004 et 2014, leur taux d’équipement oscillait autour de 94 %, il baisse depuis 2015 et a atteint 90 % en 2017. Par ailleurs, l’équipement des ménages en lecteur DVD ou magnétoscope décroît fortement : son taux est passé de 85 % en 2007 à 66 % en 2017.

En 2017, 95 % des 16-29 ans possèdent un ordinateur contre 80 % des 60-74 ans. Tous les moins de 30 ans possèdent un téléphone portable (99,7 %), contre 74 % des 60-74 ans. Cependant, bien que tardive, la diffusion de ces produits (téléphone portable, ordinateur, accès à Internet) parmi les personnes âgées de 60 ans ou plus est très rapide. Ainsi, 83 % des personnes âgées de 60 à 74 ans et 43 % de celles âgées de 75 ans ou plus ont un accès à Internet en 2017 contre respectivement 14 % et 3 % en 2004. Le taux d’équipement en téléphone portable a quant à lui triplé pour les personnes âgées de 75 ans ou plus entre 2004 et 2017, passant de 25 % en 2004 à 74 % en 2017. En revanche, pour les foyers plus jeunes, la diffusion de l’ordinateur, du téléphone portable et de la connexion à Internet a logiquement ralenti ces dernières années, puisque leur taux d’équipement est saturé.

84 % des ménages ont accès, en 2017 à Internet, contre 31 % en 2004 d’après une enquête de l’INSEE. Le taux d’accès au réseau fixe est de 82 % en milieu rural, de 85 % au sein des agglomérations de plus de 200 000 habitants et de 90 % en région parisienne.

La différence est plus marquée pour la connexion haut débit par réseau fixe ou mobile. Si, parmi les ménages ayant accès à Internet, 81 % ont une connexion haut débit par réseau fixe et 40 % une connexion haut débit par réseau mobile, le haut débit est moins fréquent dans les communes rurales et les unités urbaines de moins de 50 000 habitants, qu’il s’agisse d’un accès par réseau fixe (autour de 75 %, contre plus de 86 % dans les unités urbaines de plus de 200 000 habitants et dans l’agglomération parisienne) ou mobile (36 % dans les communes rurales, contre 46 % dans l’agglomération de Paris).

Si l’ordinateur se démocratise, le niveau de vie continue de déterminer le taux d’équipement : en 2017, ce dernier atteint 71 % au sein des 20 % des ménages les plus modestes (premier quintile de niveau de vie) mais 91 % au sein des 20 % les plus aisés (cinquième quintile). L’écart s’est toutefois réduit en 13 ans, puisqu’en 2004, les ménages les plus aisés étaient plus de deux fois plus souvent équipés que les plus modestes (62 % contre 27 %).

L’accès à Internet dépend également du niveau de vie : 73 % des ménages du premier quintile de niveau de vie sont équipés contre 93 % des ménages du dernier quintile. Ces inégalités d’accès à l’équipement numérique selon le niveau de vie sont similaires à celles observées pour d’autres biens durables tels que le lecteur DVD, le lave-vaisselle et la voiture.

L’équipement des ménages en téléphone portable (de type smartphone ou non) continue de progresser. 93 % des ménages en sont équipés en 2017, contre 49 % en 2001, c’est-à-dire qu’au moins un membre du ménage a un téléphone portable. Il dépasse maintenant le taux d’équipement des ménages en téléphone fixe. Ce dernier est en recul depuis 6 ans. Il est passé de 91 % en 2013 à 85 % en 2017.

79 % de la population dispose à la fois d’un téléphone portable et d’un fixe. La quasi-totalité est joignable par téléphone (fixe ou portable) en 2018 (plus de 99 %).

En 2018, 23 % des ménages du premier quintile de niveau de vie n’ont pas de numéro fixe, contre 9 % des ménages du cinquième quintile. Parmi les ménages équipés d’un téléphone fixe, un peu plus de la moitié des personnes ne décrochent que lorsqu’elles connaissent le numéro appelant et 13 % ne répondent jamais. Les moins enclines à décrocher leur téléphone sont les titulaires d’un diplôme inférieur au Bac ou qui n’ont pas de diplôme, celles qui habitent dans des communes rurales ou dans des unités urbaines de moins de 50 000 habitants. Les possesseurs de téléphone portable filtrent encore davantage les appels (64 %). Les femmes filtrent plus que les hommes (67 % contre 61 %). Comme pour le téléphone fixe, les moins diplômés filtrent davantage (69 % des personnes sans diplôme filtrent contre 60 % des Bac+3 ou plus). Cet accroissement du filtrage a lieu en parallèle d’un changement d’usage du téléphone mobile, de moins en moins utilisé pour véhiculer de la voix au profit de données multimédias.