2 septembre 2017

Le Coin des tendances du 2 septembre 2017

De plus en plus de Français seuls, une révolution silencieuse

Conséquence du changement des modes de vie et du vieillissement, la France se compose de plus en plus de ménages constitués d’une seule personne. Cette évolution n’est pas sans conséquences sur la consommation de biens et de services ainsi que sur l’immobilier. Moins d’enfants, plus de personnes âgées isolées, cela modifie la demande en services de proximité. Par ailleurs, la consommation s’effectuera de plus en plus dans des commerces de centre-ville ou par Internet fragilisant les grands centres commerciaux de banlieue. En effet, une personne seule et, de surcroît, âgée n’a aucun avantage à perdre son temps au sein d’une grande surface. Le besoin de disposer d’une voiture s’amoindrit avec la réduction du nombre d’enfants.

Fin 2013, la France comptait, selon l’INSEE, 28,5 millions de ménages. Un ménage se définit par l’ensemble des occupants d’une résidence principale, qu’ils aient ou non des liens de parenté. Une personne est comptée à son domicile personnel ou familial, même si elle passe plus de temps dans un autre logement pour raisons scolaires ou professionnelles. Les sans-abri, les résidents des communautés et les personnes vivant dans des habitations mobiles sont  « hors ménage » (1,5 million de personnes sont ainsi considérées hors ménage). Il s’agit des résidents vivant en internat, en foyers de jeunes travailleurs, en maison de retraite, en prison, les hommes et les femmes du voyage (forains) ainsi que les sans domicile fixe.

Les trois « France » 

Depuis 1999, le nombre des ménages a augmenté de 4,2 millions, soit une hausse de 17 %. La population correspondante a augmenté moins vite : + 9 %. Les ménages sont donc de taille plus restreinte avec en moyenne 2,2 personnes contre 2,4 en 1990. Les ménages se divisent désormais en tiers. Ceux qui sont composés d’une seule personne et qui sont désormais les plus nombreux (35 %), sont suivis par les ménages de deux personnes (33 %) puis les ménages ayant trois personnes ou plus (32 %).

 

Une vieille histoire

La baisse du nombre de personnes par ménage a commencé au milieu du XIXe siècle avec le déclin de la natalité. L’amélioration des conditions de vie et l’urbanisation ont conduit les familles à réduire le nombre d’enfants. Si en 1851, ce nombre était de 4, il est passé à 3 au cours du XXe siècle. Il s’est stabilisé durant le baby-boom à 3,1 avant de se remettre à baisser pour atteindre 2,2.

Depuis les années 1980, l’augmentation du nombre de ménages repose presque uniquement sur ceux d’une ou de deux personnes (de 1999 à 2013, ils se sont accrus respectivement de 2,4 millions et de 1,8 million). Le nombre de ménages de trois et quatre personnes  a augmenté légèrement (+ 0,1 million chacun). En revanche, les ménages d’au moins cinq personnes ont baissé de 200 000. Ces derniers représentaient un ménage sur cinq dans les années 1960 et un sur dix en 1990 ; ils en représentaient un sur seize en 2013. Les ménages d’au moins cinq personnes étaient, dans les années 1960, aussi fréquents que ceux d’une seule personne.

Au cours de ces cinquante dernières années, l’évolution de la taille des ménage est liée à la diminution du nombre de mariages, à la multiplication des divorces, aux entrées professionnelles plus tardives, au travail féminin qui retarde et étale l’arrivée des enfants et à la décohabitation des générations. Depuis les années 90, le vieillissement joue un rôle important dans la montée du nombre de ménages ne comportant qu’une seule personne. En effet, en raison de l’écart d’espérance de vie entre les hommes et les femmes, ces dernières passent fréquemment les dernières années de leur vie seules. En 2013, 38 % des personnes âgées de 75 ans ou plus résidaient seules. Au total, en 2013, 10 millions de personnes vivaient seules dont 57 % de femmes.

Le poids des personnes seules au sein de la population est passé de 10 à 15 % de 1990 à 2013. La prépondérance féminine parmi les personnes seules s’atténue progressivement : parmi elles, on compte 135 femmes pour 100 hommes en 2013. On en comptait 148 pour 100 hommes en 1999 et 168 en 1990.

Hommes/femmes, des parcours de vie différents

Jusqu’à 23 ans, les femmes logent plus souvent seules que les hommes, car elles quittent plus tôt le foyer parental. À l’inverse, les hommes résident plus souvent seuls que les femmes entre 24 et 46 ans car ils restent plus longtemps chez leurs parents et  se mettent en couple plus tardivement. Par ailleurs, en cas de séparation, les femmes ont majoritairement la garde des enfants. Dans ce cas de figure, le père est alors comptabilisé comme vivant seul. En 2013, la part des femmes résidant seules est la plus faible autour de 40 ans (8 %). À cet âge, 72 % des femmes vivent en couple et 16 % se trouvent à la tête d’une famille monoparentale. De leur côté, 16 % des hommes vivent seuls à 40 ans, 72 % vivent en couple et 3 % sont pères de famille monoparentale.

Parmi les seniors, les femmes vivent souvent seules. 48 % d’entre-elles ayant plus de 75 ans sont dans ce cas contre 21 % des hommes. Elles sont davantage confrontées au veuvage que les hommes, car elles sont ordinairement plus jeunes que leurs conjoints et ont une mortalité plus faible aux mêmes âges ; par ailleurs, elles se remettent moins souvent en couple après une rupture d’union. Néanmoins, il est à noter que les femmes d’au moins 85 ans et les hommes d’au moins 93 ans résident à la fois plus souvent en couple et plus souvent seuls qu’en 1999. En effet, les seniors, surtout les femmes, perdent moins souvent leurs conjoints du fait de l’allongement de la durée de vie. Grâce au développement des services de proximité, les seniors restent plus longtemps à leur domicile aujourd’hui que dans les années 80. La cohabitation des générations est, en revanche, moins fréquente que dans le passé.

Des ménages sans enfant plus nombreux

Le nombre de ménages comportant deux entités a fortement progressé. Cette évolution est imputable à l’allongement de la durée de vie et à la structure de la population française. L’avancée en âge des générations du baby-boom (âgées de 38 à 66 ans en 2013) a entraîné une forte hausse du nombre de couples dont les enfants ont quitté le foyer parental.

Les ménages de deux personnes représentent 18,7 millions d’habitants, soit 1,8 million de plus qu’en 1999 (+ 24 %) et 2,9 millions de plus qu’en 1990. 78 % de ces ménages sont constitués d’un couple (marié ou non) et 16 % d’une famille monoparentale (un adulte et son enfant). Les 6 % restants regroupent deux personnes sans relation conjugale ou filiale : colocataires, deux sœurs.

Des familles à taille réduite

En 2013, 28 % des ménages comprennent une famille avec au moins un enfant mineur. Ce taux était de 31 % des ménages en 1999, et de 35 % en 1990. En 2013, 80 % des ménages de trois personnes ou plus sont constitués d’un couple vivant avec des enfants, 11 % le sont dans le cadre d’une famille monoparentale et 9 % regroupent d’autres configurations (une famille monoparentale et les grands-parents, deux couples, plusieurs amis, etc.).

En 2013, 14,2 millions d’enfants mineurs cohabitent avec au moins un de leurs parents dans 8,0 millions de familles. Ce nombre d’enfants a baissé entre 1990 et 1999, passant de 14,1 à 13,7 millions. Il s’est accru ensuite avec la reprise de la fécondité dans les années 2000. Cette reprise a également contribué à l’augmentation du nombre de familles avec enfants mineurs, qui était de 7,6 millions en 1990 et 1999.

Le nombre moyen d’enfants par famille comprenant au moins un enfant mineur au domicile a diminué entre 1990 et 2013, passant de 2,06 à 1,93. Cette baisse résulte de la moindre fréquence des familles nombreuses : la part des familles de trois enfants dont un au moins est mineur est passée de 26 % en 1990 à 22 % en 2013. Au contraire, le nombre de familles avec un ou deux enfants dont au moins un mineur s’est accru : + 630 000 entre 1990 et 2013. En 2013, 36 % ont un seul enfant au domicile et 42 % en ont deux.

L’impact des séparations

La composition des familles avec au moins un enfant mineur a évolué. En 2013, 6,2 millions sont constituées autour d’un couple ; elles étaient 6,3 millions dans ce cas en 1999 et 6,7 millions en 1990. Cette diminution est due essentiellement à la hausse des séparations. Le nombre de familles monoparentales s’élevait à 1,8 million en 2013, contre 1 million en 1990 (soit + 87 % en 23 ans). La part des familles monoparentales est ainsi passée de 12 % en 1990 à 17 % en 1999 pour atteindre 22 % en 2013.

 

Manger 5 fruits et légumes, un pont trop loin ?

Depuis le 1er mars 2007, de nombreuses campagnes publiques ont été engagées afin d’inciter les Français à consommer au moins 5 fruits et légumes par jour. Cette recommandation fait intégralement partie du Programme national nutrition santé (PNNS). Elle s’est imposée afin d’améliorer la situation sanitaire de la population. Cette consommation réduirait les risques de prévalence de certaines maladies ou pathologies (maladies cardiovasculaires, certains cancers, diabète et le cholestérol)

Est-ce que les campagnes répétées ont eu un impact sur les comportements et quelles sont les catégories de la population qui ont été les plus réceptives ? Cette recommandation bute-t-elle sur des contraintes de revenus ou est-ce l’évolution des modes de vie qui les rend inapplicables ?

Entre 2007 et 2010, selon le Crédoc, la proportion d’adultes (18 ans et plus) respectant la recommandation des cinq portions de fruits et légumes par jour a progressé de quatre points, passant de 27 % à 31 %. Mais depuis la crise, un réel recul a été enregistré. En 2013 et en 2016, elle est retombée à 25 %. Pour les adultes, la part de très faibles consommateurs augmente dans toutes les catégories de diplômes mais cette progression est plus importante chez les plus diplômés. Cette évolution est liée à la progression du nombre de diplômés chez les jeunes et au fait que le mode de consommation acquis avant 18 ans se perpétue à l’âge adulte. Les actifs déjeunent de moins en moins à domicile. Le recours aux plats préparés est de plus en plus fréquent.

Les jeunes n’aiment plus les fruits et les légumes

 Chez les enfants (3 à 17 ans), seulement 6 % consomment plus de cinq portions de fruits et légumes par jour. La part de très petits consommateurs (moins de deux portions par jour) est passée de 32 % en 2010 à 45 % en 2016. La consommation  des enfants dépend du niveau de diplôme et de la catégorie sociale des parents. Ainsi, près de la moitié des enfants vivant dans des foyers où le responsable du ménage n’a aucun diplôme consomment moins de deux portions de fruits et légumes ; c’est le cas de seulement 23 % des enfants quand le responsable des achats a un niveau de diplôme supérieur ou égal au baccalauréat + 3 ans.

Pour les générations nées entre 1987 et 1996, le niveau de consommation de légumes à 25 ans était de 50 g par jour et celui de fruits de 45 g. Au même âge, il était, plus de deux fois, supérieur dans la génération née entre 1967 et 1976 avec 145 g de légumes et de 100 g de fruits. Les jeunes vivent essentiellement en milieu urbain. Ils déjeunent ou dinent moins à domicile que leurs aînés. Ils commandent plus de plat cuisinés par Internet. Ils fréquentent plus que la moyenne les établissements de restauration rapide. L’éloignement entre le domicile et le lieu de travail les incite également à manger plus souvent hors de leur domicile. De plus, l’augmentation des temps passés devant des écrans les pousse à l’achat de produits faciles à consommer tels que les pizzas, quiches, sandwiches, pâtes ou riz. Le temps des repas et celui de la préparation sont en forte baisse en raison de l’augmentation des taux d’activité féminine et du fait des modifications des comportements mentionnés ci-dessus.

Les fruits et les légumes sont de moins en moins consommés frais. Les ventes de produits préparés augmentent rapidement. Ainsi, la consommation de compotes augmente de 53 % entre 2013 et 2016 chez les adultes, passant de 8,1 g par jour à 12,4 g par jour. Par ailleurs, les fruits sont davantage consommés quand les légumes tendent à reculer.

Du nord au sud, des habitudes de consommation différentes

Au cours de ces dix dernières années, les inégalités territoriales se sont accrues. Dans la région « Hauts de France », la part de faibles consommateurs progresse de 21 points chez les enfants et de 30 points chez les adultes (la hausse nationale est de 11 points chez les enfants et de 9 points chez les adultes). En revanche, dans des régions à forte tradition maraîchères et fruitières, les proportions de petits consommateurs sont les plus faibles. Il convient de corréler ces résultats avec le poids des ménages modestes qui est plus élevé dans le Nord de la France que dans le Sud.

Les recommandations des autorités sanitaires butent sur les changements des comportements alimentaires. La diminution du temps consacré aux repas et à leur préparation modifie en profondeur le rapport aux aliments. Les consignes doivent désormais s’adresser autant aux professionnels de la restauration qu’aux usagers finaux. La diminution de la consommation des légumes s’explique par le fait qu’ils ne sont pas, pour un grand nombre d’entre eux, immédiatement consommables. Par ailleurs, au-delà des slogans publicitaires sur les 5 fruits et légumes, un effort pédagogique de longue haleine semble être indispensable pour maintenir une certaine diversité dans l’alimentation et pour lutter contre l’obésité. En France, 15 % de la population est considérée en situation d’obésité contre 8 % en 1997. Ce taux pourrait atteindre 21 % en 2030.

Proportion d’adultes en situation d’obésité en 2015

Pour l’ensemble de l’OCDE, le taux de personnes obèses était, en 2015, de 19,5%. Ce taux varie de moins de 6 % en Corée et au Japon à plus de 30 % en Hongrie, en Nouvelle-Zélande, au Mexique et aux États-Unis. Ces dernières années, l’obésité a augmenté au Canada, en France, au Mexique, en Suisse et aux États-Unis, alors qu’il s’est stabilisé en Angleterre, en Italie, en Corée et en Espagne. La montée du nombre de jeunes de 15 ans en surpoids est un sujet de préoccupation.