24 octobre 2015

Le Coin des Tendances du 24 octobre 2015

L’industrie, c’est le début de la fin ?

La demande en biens industriels tend à stagner depuis la crise de 2008/2009. Plusieurs facteurs expliquent cette rupture. Les besoins en biens industriels diminuent relativement avec la montée des revenus. Par ailleurs, les besoins sont d’autant plus élevés que la population est jeune. L’élévation des revenus de la population des pays émergents et le vieillissement globale de la population mondiale pèsent sur la demande de biens industriels. L’époque est aux services, services à la personne, services de santé, tourisme, formation, éducation…. Certes, les besoins industriels de l’Afrique demeurent élevés mais ce sera le dernier continent à équiper. En outre, les nouveaux moyens de production numérique et les nouveaux modes de consommation changent le modèle. L’industrie devient de plus en plus une annexe des services.

Les pays émergents qui ont axé leur développement sur les échanges de biens industriels doivent modifier leur modèle. Ils doivent privilégier le marché intérieur et réduire leur dépendance aux exportations. Au niveau de la demande intérieure de ces pays, au-delà des problèmes de soutenabilité environnementale, les besoins en biens industriels restent élevés. Ainsi, à titre d’exemple, le nombre de voitures pour 1000 habitants était, en 2014, de 94 en Chine, de 795 aux Etats-Unis, de 604 au sein de l’Union européenne et de 626 au Japon. En 2000, il y avait seulement 12 voitures pour 1000 habitants quand ce ratio était de 785 aux Etats-Unis et de 473 pour l’Union européenne.

Néanmoins, le passage d’une production destinée aux consommateurs des pays avancés à une consommation au profit des habitants des pays émergents n’est pas simple. En effet, les pouvoirs d’achat ne sont pas les mêmes tout comme les besoins même si l’harmonisation des standards de consommation est très rapide. Les réseaux de distribution sont à réaliser tout comme les services après-vente.

Cette mutation est lente et coûteuse. Elle devrait aboutir, dans les prochaines années à de moindres créations d’emplois dans les pays émergents que dans le passé. Les services devraient en partie compenser cette baisse. Les recettes d’exportation devraient normalement diminuer. Pour éviter une rupture trop brutale avec le modèle passé, la Chine s’emploie à organiser un grand marché économique en Asie et à conquérir des parts de marché en Afrique.

 

Numérique, la France a peut-être perdu une bataille mais pas la guerre

Le Conseil d’Analyse Economique a rendu public une étude très détaillée sur les faiblesses et les forces de la France en matière de numérique.

Le CAE souligne que la France accuse du retard dans l’économie numérique par rapport aux autres pays de l’OCDE. Les secteurs des « TIC » ne représentaient que 4,33 % du PIB en France, contre une moyenne  au sein de l’OCDE de 5,5 %.

Ce n’est pas le taux d’équipement des ménages qui posent le problème mais avant tout les questions de personnel et de financement. 83 % des ménages ont accès à Internet contre une moyenne de 81 % au sien de l’Union européenne. 68 % des Français utilisent Internet quotidiennement contre 65 % dans l’Union européenne,  près de 40 % des Français possèdent un smartphone  et même 75 % des 18-24 ans

Les entreprises apparaissent en revanche en retard par rapport à leurs homologies étrangères. C’est lié certainement au poids plus important des TPE en France.

En 2014, seulement 63,6 % des entreprises françaises disposaient d’un site Web, contre 76,2 % en moyenne dans l’OCDE. Seulement 17,1 % des entreprises françaises utilisaient les réseaux sociaux pour leurs relations clients, contre 25,2 % dans l’Union européenne.

La France doit faire face à un déficit de spécialistes des nouvelles technologies malgré ses atouts dans le domaine de la formation des mathématiques et ses écoles d’ingénieur. Les « spécialistes TIC » ne représentent que 2,8 % de l’emploi, contre 3,5 % en Allemagne, 4,1 % aux États-Unis et 6,1 % en Finlande.

Selon des enquêtes internationales, les connaissances et les compétences des actifs pour le numérique et pour la mise en œuvre des changements organisationnels qui lui sont liés sont inférieures à la moyenne des grands pays de l’OCDE.

La France souffre d’un problème récurrent de financement. Il manque de fonds d’investissement de grande taille capables de prendre des risques importants sur des durées longues, ainsi que des « business angels ».

Par rapport aux États-Unis, la France est handicapée par l’absence de fonds de pension ou de fonds de dotation au sein des grandes universités qui abondent massivement les fonds de capital-risque américains. L’immobilier a capté une grande part de l’épargne des Français. Au niveau de l’épargne financière, ce sont les produits de taux qui ont la côte. En outre, autre grande différence avec les Etats-Unis, les startups françaises ne peuvent guère compter sur le financement par voie d’acquisition.

La diffusion des techniques numériques au sein des entreprises traditionnelles française suppose d’importants changements organisationnels. Or, les entreprises sont en France plus rigides, plus hiérarchiques, plus administrées que leurs homologues américaines.

Néanmoins, il faut souligner que la faiblesse relative du capital-risque est en partie compensée par des dispositifs de soutien aux entreprises en amorçage. Par ailleurs, les créateurs d’entreprise abusent de certaines dispositions du droit du travail. Ainsi, les jeunes startupers recourent à la rupture conventionnelle, mise en place en 2008. Elle permet aux salariés de quitter leur employeur pour créer leur propre entreprise tout en étant indemnisés par Pôle emploi. Le statut de jeune entreprise innovante (JEI), qui offre des avantages fiscaux et sociaux aux entreprises de moins de huit ans dont la R&D représente au moins 15 % des charges totales, est utilisé par la moitié des entreprises numériques. Le crédit d’impôt recherche (CIR) bénéficie à 75 % d’entre elles.