27 août 2016

Le Coin des Tendances du 27 août 2016 – âge de départ à la retraite, environnement

Et si le recul de l’âge de départ à la retraite était contre-productif ?

 Le vieillissement est un phénomène protéiforme Si la progression du nombre de retraités est un des phénomènes les plus souvent mis en avant, il faut également prendre en compte le fait que l’âge moyen des actifs augmente. Ce dernier point n’est pas sans conséquence sur l’évolution de la productivité et donc de la croissance. Il peut également avoir des effets sociaux non négligeables. Une déformation de la pyramide des actifs vers le haut freine l’ascension sociale des plus jeunes et génère des frustrations. Tous les pays ont adopté des mesures afin de reculer l’âge de départ à la retraite afin d’assurer la pérennité de leurs régimes d’assurance-vieillesse. Mais par ricochet, ces mesures pourraient freiner la croissance du fait d’une baisse de la productivité et d’une augmentation des coûts sociaux (augmentation des dépenses de prévoyance, de chômage).

 Au sein de l’Union européenne, la part des 55-64 ans passera de 15 à 20 %, durant les vingt prochaines années. Les Etats-Unis en raison d’une natalité et d’une immigration plus élevées ne connaîtront pas un vieillissement d’une telle ampleur. La proportion des 55-64 ans ne devrait pas y dépasser les 17 %.

 Il est communément admis que le vieillissement de la population conduit à une baisse de la productivité. D’un côté, les actifs les plus âgés ont plus d’expérience et de connaissances mais leur santé est plus précaire quand l’obsolescence de leurs compétences réduit leur productivité. Avec le passage de la retraite à 62 ans, les compagnies d’assurance ont constaté que les dépenses liées à la prévoyance se sont accrues.

 La plupart des études s’accordent sur l’idée que la productivité croît d’abord avec l’âge, culminant entre les 40 et 50 ans avant de décliner. Bien évidemment, cette courbe varie selon les professions. Une étude du FMI couvrant la période 1950 – 2014 au sein des pays de la zone euro, souligne qu’une hausse de cinq points de la part des travailleurs de 55 à 64 ans va de pair avec une diminution d’environ 3 % de la productivité du travail. Les variations de productivité du travail — autrement dit de la production par travailleur — peuvent se décomposer en deux catégories : variations du montant de capital physique et humain utilisé et « Productivité Totale des Facteurs » (PTF). La PTF mesure l’efficacité avec laquelle l’économie transforme les intrants en extrants. Sur le long terme, la PTF est le principal moteur de la croissance économique. Le FMI constate que la PTF est principal canal par lequel le vieillissement de la main-d’œuvre agit sur la productivité du travail. Du fait de sa plus forte natalité, la France sera moins touchée par la perte de productivité que les pays d’Europe centrale ou l’Allemagne.

 Le FMI note que les pays d’Europe du Sud qui sont déjà confrontés à d’importants problèmes économiques seront les plus touchés par le vieillissement. Cela concerne en particulier la Grèce, l’Espagne, le Portugal et l’Italie. Ces pays ont déjà un endettement élevé et peu de marges de manœuvre budgétaires. Pour s’en sortir économiquement, ces pays ont besoin d’une hausse de productivité rapide.

 Pour contrecarrer l’impact du vieillissement, le FMI souligne que les Etats concernés doivent jouer sur plusieurs curseurs. Le plus efficace est la recherche développement suivie par la réforme de la fiscalité afin d’encourager l’activité économique (baisse de l’IS, baisse du coût de l’emploi), par la simplification du droit du travail et par la modernisation du système de santé (meilleure prise en charge de la pénibilité, prévention). L’adaptation du travail constitue également une priorité. Le défi est de maintenir un état de motivation chez les salariés les plus âgés tout en prenant en compte leurs spécificités. La volonté de réussite s’exprime différemment à 55 ans qu’à 25 ou 35 ans.

 La bataille de la décarbonisation de la croissance, un pont trop loin ?

L’année sera, comme l’été, chaude

 Le mois de juillet 2016 a été le plus chaud jamais constaté. Il est fort probable que l’été et l’année 2016 battent de nouveaux records en matière de température. Le rapport annuel sur l’état du climat («State of the Climate») réalisé par 450 scientifiques et publié au début du mois d’août souligne que la tendance en matière climatique et au niveau des émissions de CO² reste mauvaise.

 Les concentrations de trois des principaux gaz à effet de serre, dioxyde de carbone, méthane et protoxyde d’azote, ont « atteint de nouveaux sommets en 2015 », indique le rapport. Le niveau des eaux monte graduellement autour de la Terre, avec plus de 3,3 millimètres par an. Il a été de 70 millimètres plus haut que la moyenne enregistrée en 1993. La banquise s’est retirée de la partie ouest de l’Alaska. « La température à la surface des terres de l’Arctique a retrouvé les niveaux enregistrés en 2007 et 2011, soit des records depuis le début des relevés au début du XXe siècle, avec une augmentation de 2,8 degrés Celsius depuis cette époque », selon les scientifiques. Le recul des glaciers dans les massifs de type alpin s’est poursuivi pour la 36ème année de suite. Du fait du réchauffement climatique à l’œuvre sur la planète, la Russie est confrontée, en 2016, à des températures anormalement élevées – 35 degrés contre 17 habituellement cet été. En Sibérie une maladie dont la dernière épidémie datait de 1947, l’anthrax, appelée communément la «maladie du charbon, est réapparue en raison du dégel du permafrost. La région concernée par l’épidémie dont la superficie fait plus d’une fois la taille de la France, a été placée en quarantaine par les autorités.

 La difficile bataille du CO²

 Les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) couvertes par le protocole de Kyoto ont atteint près de 49 milliards de tonnes équivalent CO² en 2010 selon les dernières données du GIEC. Elles ont augmenté de 80 % entre 1970 et 2010, principalement en raison du doublement de la consommation d’énergie dans le monde sur cette période.

 La Conférence Mondiale sur le Climat dite COP21 qui s’est tenue à Paris au mois de décembre dernier a retenu des objectifs ambitieux en ce qui concerne la réduction des émissions de CO². L’accord s’est fixé comme objectif de stabiliser le réchauffement climatique dû aux activités humaines à la surface de la Terre « nettement en dessous » de 2°C d’ici à 2100 par rapport à la température de l’ère préindustrielle (période de référence 1861-1880) et de poursuivre les efforts pour limiter ce réchauffement à 1,5°C. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre devraient baisser de 40 % à 70 % d’ici à 2050 (par rapport au niveau de 2010) et il faudrait atteindre une économie quasiment neutre en carbone durant la deuxième partie du XXIe siècle pour limiter le réchauffement climatique à une hausse de température de 2°C à l’horizon 2100. Or, les émissions mondiales continuent actuellement d’augmenter de près de 2 % par an depuis 2000 du fait de la progression de la population et de la croissance de l’économie mondiale. Le respect des engagements pris en matière d’émission de CO² suppose une réduction considérable de l’usage des énergies fossiles et leur remplacement par les énergies renouvelables. En 2015, les énergies fossiles représentent encore 86 % de l’énergie consommée. La montée en puissance des énergies avec faibles émissions de C0² est très lente. Ainsi, de 2000 à 2013, la part du nucléaire et des énergies renouvelables dans l’énergie mondiale est passée de 13,3 % à 13,7 %, avec 6 600 Mds de dollars (de 2012) d’investissements cumulés.

 Le pari de la destruction créatrice n’est pas gagné

 En l’état actuel des techniques, le passage à une économie « décarbonée » est très coûteux tant en besoin de capital qu’en termes de croissance. Pour les pays en voie de développement, la tentation est de développer un parc de centrales électriques à énergies fossiles d’autant plus que leur prix est au plus bas. C’est pourquoi l’accord de la COP 21 prévoit des aides pour les pays les plus pauvres. Elles demeurent néanmoins insuffisantes pour dissuader le recours au charbon ou au lignite.

 Même dans les pays occidentaux, l’abandon des filières classiques de production d’énergie est difficile du fait des coûts que cela génère. Le développement d’énergies dites renouvelables mettra au rebus des équipements pas obligatoirement amortis, ce qui constitue un gaspillage de capital. Par ailleurs, les nouveaux équipements pourraient être plus coûteux et moins productifs. Il en résulte une moindre efficacité énergétique. Il faudra mobiliser une part plus importante de l’épargne mondiale. Pour atténuer les effets récessifs de la « décarbonisation » de l’économie, le prix non subventionné des nouvelles énergies devrait chuter assez rapidement. Les économies demeurent très sensibles à l’évolution des prix de l’énergie comme le prouve l’actuelle légère reprise européenne.

 Malgré ces inconvénients, le pétrole conserve d’importants atouts en matière énergétique. Aucune source d’énergie renouvelable n’offre les mêmes atouts. La substitution des énergies fossiles par les énergies renouvelables sera possible sous réserve que ces dernières soient facilement transportables, stockables et mobilisables. Une centrale électrique thermique au fioul ou gaz est très rapidement opérationnelle quel que soit le temps ou l’heure de la journée. La gestion décentralisée de l’énergie pourrait palier une partie des défauts des actuelles énergies renouvelables. C’est l’espoir des tenants d’une mise à mal du système vertical de production d’énergie électrique. Le développement d’un réseau électrique sur le modèle d’Internet avec des échanges entre tous les participants est imaginé par certains comme Jérémy Rifkin. Ce dernier considère que la création de réseaux décentralisés sera une importance source d’économies. Il juge que les systèmes de production verticaux génèrent d’importants gaspillages. Pour faire face aux besoins, les producteurs d’énergie électrique sont contraints de sur-dimensionner leurs installations et de les maintenir en état de veille permanent. Il en résulte une mauvaise allocation du capital ce qui freinerait d’autant la croissance.