27 avril 2019

Le Coin des tendances du 27 avril 2019

Quand les mauvaises habitudes alimentaires commencent dès la prime enfance

Le Gouvernement a décidé de consacrer 6 millions d’euros en 2019 afin que les écoles des quartiers défavorisés puissent servir des petits déjeuners aux élèves. 100 000 élèves pourraient rapidement bénéficier de cette mesure. En 2020, avec sa généralisation à tout le territoire, elle devrait coûter 12 millions d’euros.

Le développement d’un service de petits déjeuners à l’école est lié au fait qu’un quart des élèves de 3 à 11 ans (source Crédoc) arrivent à l’école sans avoir mangé. Il en résulterait un manque d’énergie et d’attention et donc un déficit d’apprentissage pour les élèves concernés. L’absence de petit déjeuner familial serait liée à un manque de temps de la part des parents pour le préparer, par le fait qu’à la maison il n’y aurait pas les produits alimentaires adéquat, et par faute de moyens.

Le petit déjeuner à l’école figure dans le plan pauvreté annoncé en septembre dernier par le Président de la République. Ce dernier est doté de 8,5 milliards d’euros et prévoit également la cantine à une euro et le Revenu universel d’activité (RUA) qui fusionnera le plus grand nombre possible de prestations.

L’État et les collectivités territoriales se substituent ainsi aux parents pour l’alimentation des enfants. De plus l’État providence se mue en « État nounou » pour reprendre la formule de l’écrivain Matthieu Laine (ouvrage de 2006 – La grande nurserie). L’État providence n’en finit pas de se trouver de nouveaux espaces d’action au risque de déresponsabiliser un peu plus les ménages. Certes, en matière d’alimentation, les dernières études prouvent un accroissement inquiétant des déséquilibres. Ainsi, selon une étude du Crédoc du mois d’avril 2019, entre 2010 et 2016, la part des enfants âgés de 3 à 5 ans qui ne couvrent pas leurs besoins en calcium est passée de 4 % à 20 %. Chez les enfants de 6 à 10 ans, elle est passée de 33 % à 45 %. Ce recul sans précédent, en période de paix est lié à une moindre consommation non seulement de produits laitiers mais aussi de fruits et de légumes.

Les enfants mangent de plus en plus tôt aux côtés de leurs parents avec de ce fait un alignement de leur régime sur celui de ces derniers. Il n’échappe pas ainsi aux produits transformés et aux boissons sucrées. Dès trois ans et surtout à partir de six ans, les enfants mangent en quantité excessive des sandwichs, des pizzas,  des pommes de terre (dont les frites), des viennoiseries et des sauces (dont le ketchup). La consommation de pain lors du petit déjeuner est en forte baisse tout comme celle des yaourts et des compotes de fruits.

En dix ans, le régime alimentaire des enfants âgés de 3 à 5 ans et de 6 à 10 ans s’est appauvri. Une prise de conscience est intervenue pour tenter de limiter la consommation de sucres et de viandes. La charcuterie est en net repli depuis plusieurs années. Mais dans le même temps, les enfants mangent de moins en moins de poissons, de fruits et de légumes. Les parents privilégient une alimentation plus riche en féculents (pâtes et riz) et en volaille. Le Ministère des Solidarités et de la Santé s’inquiète, par ailleurs, de la très forte progression de la consommation de boissons sucrées et cela dès 3 ans.

Dans son étude, le Crédoc a distingué quatre catégories d’enfants en fonction de leur consommation alimentaire : les petits mangeurs, les habitués du tout prêt, les palais sucrés et les amateurs de variété.

Selon le Crédoc, 39 % des enfants sont des « petits mangeurs ». Les filles sont particulièrement représentées dans cette catégorie. Elles sont 55 % contre 49 % dans l’ensemble des 6-10 ans. Ces petits mangeurs vivent plus souvent dans des familles de couple avec enfants (90 % contre 82 %). En revanche, les familles monoparentales sont peu présentes dans cette classe d’enfants. Ceux-ci consomment moins de tous les produits alimentaires, exception faite des boissons chaudes et des vien­noiseries. Par conséquent, leur alimentation totale est inférieure en masse (1 368 g/j contre 1 621 g en moyenne à cet âge) et en énergie (1 311 kcal/j, contre 1 562 kcal/j). La diversité alimentaire est inférieure à la moyenne. C’est la classe d’enfants dont les apports en calcium sont les plus faibles (639 mg/j contre 764 mg/j en moyenne). 62 % d’entre eux ont des apports inférieurs aux besoins moyens en calcium (contre 45 % en moyenne).

Ils habitent plutôt en région parisienne (30 % contre 21 % pour l’ensemble des 6-10 ans), et sont plus souvent issus de familles monoparentales (25 % contre 18 %). Ils sont égale­ment plus sédentaires car ils passent plus de temps devant les écrans (61 % contre 49 %) et sont plus souvent en surpoids (24 % contre 17 %). La diversité de leur alimentation est la plus faible. Ils consomment plus de sandwichs (+55 %), de pizzas-quiches (+45 %) et de plats composés (+30 %) que la moyenne. Les « habitués du tout prêt » ont des apports en calcium supérieurs à la moyenne (898 mg/j contre 764 mg/j) et sont les plus nombreux à couvrir ce besoin (74 % y parviennent contre 56 % en moyenne) grâce à leur forte consommation de lait et de céréales au petit déjeuner.

Ces enfants appartiennent souvent à des ménages dont les parents sont ouvriers (41 % contre 29 %). Ils sont, plutôt sédentaires (64 % contre 49 %) et ont ten­dance à être davantage en surpoids ou obèses (34 % contre 23 %). La diversité de leur alimentation est significativement supérieure à celles des « petits mangeurs » et des « habitués du tout prêt ». En revanche, ils mangent de nombreux produits non recommandés pour un bon équilibre alimentaire (biscuits salés, pâtisseries, boissons sucrées). 45 % n’atteignent pas les besoins en calcium.

Les amateurs de variété (22 %)

Les enfants de cette catégorie sont plus actifs qu’en moyenne. Ils sont davantage issus de catégories socioprofessionnelles supérieures (28 % contre 18 % dans l’ensemble des 6-10 ans). Ils habitent plus souvent le sud de la France. Le nombre d’obèses y est inférieur à la moyenne. La diversité de leur alimentation est plus élevée. Pour autant, la densité calorique de leur alimentation est plus faible (0,89 contre 0,98) car ils choisissent moins souvent les aliments les plus riches. Les « amateurs de variété » couvrent plu­tôt bien leurs besoins en calcium (seuls 31 % n’y parviennent pas) avec des apports calciques à hauteur de 837 mg/j (contre 764 mg/j dans l’ensemble des enfants de 6-10 ans). Ils mangent plus de fromage, produit qui est le plus impor­tant contributeur aux apports en calcium, et consomment aussi une bonne diversité de produits laitiers.

Le digital à l’ère de la maturité

Avec la sortie des générations des années 1950 du monde du travail, ce dernier est de plus en plus composé d’actifs ayant un lien précoce avec les ordinateurs et les communications modernes. Le déploiement des télécopieurs est intervenu au milieu des années 1980, celui des téléphones portables au milieu des années 1990 quand Internet a pris son essor au début des années 2000. Par ailleurs, arrivent aux responsabilités, des hommes et des femmes qui sont qualifiés de « digital nativ », c’est-à-dire qui ont connu depuis le début de leur vie professionnelle les outils numériques. En parallèle à ce changement de composition de la population active intervient une accélération de la diffusion des techniques digitales et une augmentation des capacités de transmission avec l’arrivée de la 5G qui facilite l’Internet des objets.

Ces modifications devraient conduire à un usage plus intensif des solutions numériques avec des utilisateurs plus matures, plus décomplexés et peut-être plus attentifs au « non-envahissement ».

L’omniprésence d’Internet devrait entraîner sa banalisation. Même si l’interconnexion des voitures, des maisons, des objets et également du corps humain prendra du temps, elle semble être incontournable. Le problème viendra de la cohabitation de systèmes ultra-connectés avec des systèmes qui ne le seront pas. Cette cohabitation sera complexe à gérer en particulier en ce qui concerne la circulation routière. De même, au niveau de la gestion des réseaux d’énergie, il faudra prendre en compte les coûts d’adaptation de ceux qui existent actuellement.

Le smartphone devrait être la porte d’entrée dans le monde digital que ce soit pour gérer sa maison, sa vie quotidienne (transports, banques, courses, etc.) ou sa santé. Les données et les logiciels seront de plus en plus logés dans les clouds, ce qui posera des problèmes de sécurité. La forte dépendance à Internet et aux données constituera une menace systémique majeure en cas de panne ou de prise de contrôle des réseaux par des personnes ou des organisations malintentionnées. La multiplication des processus d’automatisation sera une source de gains de productivité. Internet permet de comprendre de plus en plus les situations en temps réel, de proposer des solutions et d’agir en se passant du contrôle de l’utilisateur. Les solutions digitales intègrent dans leurs algorithmes les émotions humaines (à travers les rictus des visages par exemple) et peuvent adapter les réponses à apporter à un problème.

Le paradigme numérique repose sur le principe que le consommateur est un producteur. Il produit en effet des données qui sont recyclées. Il peut être aussi un acteur direct. Ainsi, les propriétaires de voitures électriques pourraient à terme mettre à disposition les batteries en cas de pic de production avant de restituer l’énergie ainsi accumulée en fonction de la demande. Les échanges de services devraient être de plus en plus automatiques et s’effectuer en dehors de tout contrôle.

Les entreprises devraient évoluer en se transformant en plateformes connectées d’échanges de biens et de services ainsi que de compétences. Elles resteront un point de rencontre autour d’objectifs définis par leurs statuts. Elles demeureront des lieux d’agrégations des savoirs, des expériences et des lieux de coordination. Compte tenu de l’évolution des profils des actifs, la subordination devra revêtir des formes plus coopératives. La conciliation des valeurs autorité, innovation, liberté et rentabilité sera au cœur des réussite entrepreneuriales des temps digitaux.

L’ère du digital mature s’accompagnera peut-être d’une remise en cause des géants des réseaux sociaux. Il est possible que Facebook soit contraint de se réinventer du fait de la montée en puissance de réseaux plus spécialisés, plus conversationnels ou à plus fort contenu. Les réseaux communautaires locaux, plus ancrés dans le réel, devraient aussi largement se développer. Après une époque d’exposition publique, le retour d’une plus grande discrétion est possible. Cette tendance pourrait accentuer la montée du communautarisme.

Les médias traditionnels (télévision, radio, presse écrite) devraient continuer à décliner. Du fait de la convergence des différents supports, smartphone, tablette, télévision et ordinateur, l’avenir de ces médias est à la synthèse. La grille des programmes devrait disparaître pour laisser la place à des portails permettant d’accéder à du contenu. Chacun d’entre nous est devenu un producteur de journaux télévisés en choisissant les reportages, les films, les contenus. La vidéo supplante actuellement l’écrit au point que certains s’interrogent sur la disparition de celui-ci du moins dans la forme que nous lui connaissons depuis la large diffusion des livres et de la presse. Ce changement de moyen de communication n’est pas sans incidence sur la construction des individus et sur la diffusion des messages.

Le canal de vente par Internet devrait poursuivre sa montée en puissance. Plus de 10 % de la consommation des ménages passe déjà par ce canal. Ce ratio devrait rapidement atteindre 20 %. Il en résulte une réorganisation complète des autres moyens de distribution. Le commerce de détail est confronté à un deuxième choc après celui qu’il a subi lors de l’émergence des grandes surfaces. Ces dernières sont également confrontées à une remise en cause de leur modèle. Leur essor correspond à la montée en puissance de la société de consommation portée par les larges générations du baby-boom. Le vieillissement de la population, le rétrécissement de la taille des familles, la métropolisation du territoire, le coût croissant du transport, la préférence donnée aux loisirs et un certain désenchantement face à la consommation rendent le passage dans les grandes surfaces moins obligé que par le passé. Le recours à Internet est considéré comme un gain de temps et l’élimination d’une tâche jugée fastidieuse.

Le temps « deux » de l’ère digital a certainement déjà commencé. Le temps de la découverte et de l’usage anarchique cède la place à celui d’une intensification sur fond de banalisation.