4 février 2017

Le Coin des tendances du 4 février 2017

La dure bataille du carbone ne sera pas une partie de plaisir

La poursuite de la forte croissance de la demande de mobilité signifie que, même dans le scénario le plus optimiste, les émissions de CO2 des transports en 2050 seront toujours à 2015, soit environ 7,5 giga tonnes, selon les projections publiées dans ITF Transport Outlook 2017. Ce scénario suppose déjà que les nouvelles technologies et les changements de comportement entraînent une réduction significative du CO2 émis par rapport à la distance totale parcourue.

Selon un récent rapport de l’OCDE (rapport ITF-Transport Outlook 2017), la demande mondiale de transport devrait doubler d’ici 2050 entrainant une augmentation des émissions de CO2 de 60 %. Certains espéraient une stabilisation des émissions de CO2. Une telle stabilisation semble actuellement hors de portée. La réduction de 40 % des émissions ne pourra être obtenu qu’en réalisant des efforts importants en matière de décarbonisation des transports. Les progrès technologiques sont censés fourbir 70 % des réductions possibles de CO2 à 2050, le reste venant d’une meilleure gestion de l’énergie (économies, changements des comportements).

Un facteur clé de la difficulté à réduire les émissions de CO2 à long terme est de modifier les tendances du commerce mondial. Au fur et à mesure que le commerce évolue vers les régions où les infrastructures ferroviaires et fluviales sont insuffisantes, les émissions de gaz à effet de serre provenant du fret routier vont presque doubler. Le transport de marchandises sur les itinéraires intra-asiatiques augmentera particulièrement de 250 % à 2050. Le développement économique de l’Afrique qui est évidemment souhaitable constitue un véritable défi en termes d’émissions de CO2. La nécessité de travailler en amont sur des processus de rationalisation des transports s’impose mais est très délicat à mettre en œuvre compte tenu des problèmes politiques et des volontés évidentes de rattrapage économique.

La concentration croissante de la population au sein des grandes agglomérations est également un sujet de préoccupation. L’utilisation de la voiture dans les villes devrait doubler d’ici 2050 du fait de la croissance des classes moyennes au sein des pays émergents. D’ici le milieu du siècle, plus de 3 milliards de personnes pourront être considérées comme membres de la classe moyenne. Le nombre de véhicules pourrait ainsi passerde un à plus de deux milliards d’ici une trentaine d’années.

Pour éviter une explosion des émissions de CO2 et de particules, des politiques drastiques de limitation de la circulation seront obligatoires, ce qui va à l’encontre de la soif de mobilité qui se fait jour dans de nombreux pays émergents. Le développement de parcs de voitures autonomes électriques constitue une impérieuse nécessité tant pour gérer des flux de plus en plus importants que pour limiter la pollution.

 Le secteur vert est-il l’avenir de l’économie ?

 Les professions dites vertes, c’est-à-dire celles qui ayant une finalité environnementale ou dont l’exercice est affecté par la pris en compte de préoccupations environnementales, emploient près de 4 millions de personnes selon une récente étude de la DARES.

Les professions directement liées à l’environnement emploient 144 000 personnes, représentent 0,5 % de l’emploi total. Elles sont liées à la production et distribution d’énergie et d’eau (45 %), à l’assainissement et traitement des déchets (35 %) et à la protection de la nature et de l’environnement (20 %). Les professions qualifiées de  verdissantes (celles dont l’activité a des incidences sur l’environnement) occupent 3 761 000 personnes et représentent 14,1 % de l’emploi total. Elles relèvent de domaines d’activité variés : bâtiment (39,5 %), transports (19,4 %), recherche (8,9 %), agriculture, sylviculture et entretien des espaces verts (6,0 %), etc.

Les professionnels exerçant une profession verte ou verdissante sont principalement des hommes et sont relativement jeunes. La majorité est non diplômée ou diplômée de niveau CAP-BEP, du fait notamment d’une part importante d’ouvriers.

En 2012, 60 % des personnes exerçant une profession verte travaillent dans un établissement dont l’activité principale est liée à l’environnement. Près de la moitié des professions vertes relèvent même d’une « éco-activité » : 32 % pour la protection de l’environnement ; 15 % sur la gestion des ressources naturelles ; et 2 % dans les activités transversales.

Les professions de la production et distribution d’énergie et d’eau regroupent des ingénieurs, des cadres, des techniciens, des agents de maîtrise et des ouvriers qualifiés. Les niveaux de diplôme de ces professionnels sont de fait très variés : 27 % ont un CAP ou un BEP, 28 % un baccalauréat, 21 % un baccalauréat + 2 ans et 15 % un diplôme supérieur. Un peu plus d’un sur cinq est une femme. Les professions de l’assainissement et du traitement des déchets rassemblent les ouvriers qualifiés et non qualifiés de l’assainissement et du traitement des déchets, ainsi que les conducteurs de véhicule de ramassage des ordures ménagères. Ces professions, quasi-exclusivement masculines (93 %), sont majoritairement exercées par des personnes de plus de 40 ans (58 %) et peu diplômées (42 % ont au plus le brevet des collèges, 39 % un CAP ou un BEP). Les professions de la protection de la nature et de l’environnement regroupent les techniciens, ingénieurs et cadres de l’environnement, ainsi que les agents techniques forestiers. Ce sont les plus qualifiées des professions vertes, avec 38 % de diplômés du supérieur et 24 % ayant un baccalauréat + 2 ans. Ces professions sont aussi les plus féminisées, avec 28 % de femmes en moyenne, et les plus jeunes : 59 % des professionnels ont moins de 40 ans. Quel que soit le type de profession verte, les professionnels ont majoritairement un contrat ou un emploi à durée indéterminée : c’est le cas pour 93 % des professionnels de la production et distribution d’énergie et d’eau, 87 % des professionnels de la protection de la nature et 85 % des professionnels de l’assainissement et du traitement des déchets. Le temps partiel est rare, il concerne 8 % des professionnels des professions vertes en moyenne.

 Serions-nous devenus des malades imaginaires ?

Une part croissante de l’électorat doute des bienfaits de l’Europe et de la mondialisation. Est-ce que ce jugement peut s’expliquer par la situation économique ? Est-ce que la France est victime de l’Europe et de l’économie mondiale ? Pas si sûr !

Dans bien des domaines, la France ne se situe pas dans les premiers de la classe européenne mais pas non plus dans les derniers. La France est en règle générale dans la moyenne. Par ailleurs, malgré la crise, la pauvreté et les inégalités contrairement au ressenti d’une grande partie de la population n’ont pas augmenté.

Un déficit et une dette comme symboles de la priorité accordée au social

Le déficit public (3,5 % du PIB) et la dette publique (97 % du PIB)  restent à des niveaux élevés mais ils sont la traduction d’un haut niveau de protection sociale. La France consacre plus du tiers de son PIB aux dépenses sociales, soit un record en Europe. Les pays d’Europe du Nord et de l’Est obtiennent de meilleurs résultats que la France en matière de finances publiques. Parmi les autres mauvais élèves figurent la Grèce, l’Espagne, le Portugal, l’Italie mais aussi le Royaume-Uni.

Un PIB par habitant qui ne progresse plus mais qui résiste

Le PIB en volume par habitant a retrouvé son niveau de 2008. De son côté  le revenu disponible réel par habitant est légèrement supérieur au niveau de 2008 malgré l’augmentation des prélèvements pesant sur les ménages qui sont passés de 32 à 34,5 % de 2008 à 2016. La France se situe à la 11e place au sein de l’Union européenne pour le PIB par habitant. Ce rang est en retrait par rapport à celle occupée au début des années 90 mais il est stable depuis une dizaine d’années. A la différence d’autres pays de l’Union européenne qui connaissent une diminution de leur population, la France doit obtenir un taux de croissance plus élevé pour maintenir son PIB par habitant. La France est une des pays de l’Union qui connaît, en effet, un des taux de progression de sa population le plus important.

Les salariés ont été protégés

La crise de 2008/2009 a été essentiellement supportée par les entreprises. Les salaires ont, en effet, continué à augmenter à la différence de ce qui a été constaté chez plusieurs de nos partenaires. Le partage des revenus entre salariés et entreprises s’est effectué au détriment des secondes.

Un faible taux d’inégalité

Depuis vingt ans, il n’y a pas eu en France de progression des inégalités comme en témoigne l’évolution de l’indice de Gini ou celle du taux de pauvreté. L’indice (ou coefficient) de Gini est un indicateur synthétique d’inégalités de salaires (de revenus, de niveaux de vie…). Il varie entre 0 et 1. Il est égal à 0 dans une situation d’égalité parfaite où tous les salaires, les revenus, les niveaux de vie… seraient égaux. A l’autre extrême, il est égal à 1 dans une situation la plus inégalitaire possible, celle où tous les salaires (les revenus, les niveaux de vie…) sauf un seraient nuls. Entre 0 et 1, l’inégalité est d’autant plus forte que l’indice de Gini est élevé. Une baisse de l’indice de Gini observée entre deux dates indique une diminution globale des inégalités. A l’inverse, une élévation de l’indice reflète une augmentation globale des inégalités.

Indices de Gini

 

  Avant redistribution sociale Après redistribution sociale
1998 0,48 0,28
2008 0,48 0,29
2009 0,49 0,29
2010 0,51 0,30
2011 0,51 0,31
2012 0,52 0,31
2013 0,50 0,29
2014 0,50 0,29

Source : OCDE

Le taux de pauvreté correspond à la proportion d’individus (ou de ménages) dont le niveau de vie est inférieur pour une année donnée à un seuil, dénommé seuil de pauvreté (exprimé en euros). Le seuil de pauvreté est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l’ensemble de la population. Le seuil le plus souvent utilisé est celui de  60 % du niveau de vie médian. Le seuil de 50 % est également utilisé.

 

Evolution du taux de pauvreté en France

 

  Seuil 50 % Seuil 60 %
1998 8,0 15,0
2008 5,7 12,5
2009 6,7 12,9
2010 7,3 13,3
2011 7,1 14,0
2012 6,9 14,1
2013 6,9 13,7
2014 6,7 13,3
2015 6,5 13,6

Source : Eurostat

 

Le niveau de vie des retraités conforté

Les retraités français disposent d’un des pouvoirs d’achat les plus élevés d’Europe. Ils bénéficient d’un niveau correct de pension complété par un fort taux de possession de leur résidence principale (plus de 75 %). Il en résulte que leur niveau de vie est supérieur de 7 % à celui de l’ensemble de la population.

La question lancinante de l’emploi

Les Français sont très sensibles à l’évolution du marché de l’emploi ; or celui est dual. Une grande partie des actifs se trouvent dans une situation protégée. Plus de 5,6 millions sont couverts par un des statuts de la fonction publique.

 

Plus de 75 % des actifs bénéficient d’un contrat à durée indéterminée soit plus de 80 % des salariés qui représentent 88,4 % de la population active en 2015 (source INSEE). 9,3 % de la population active est en CDD et 2,2 % en intérim.

Si les bénéficiaires de CDI sont assez protégés, ce n’est pas le cas des CDD qui éprouvent des difficultés à obtenir un contrat de travail stable. Les licenciements ne représentent que 9 % des cas d’inscription à Pôle emploi contre plus de 24 % des cas pour les fins de CDD et fins de mission d’intérim.

En 2016, 87 % des emplois proposés prenaient la forme d’un CDD et 13 % la forme d’un CDI. 17,5 % des CDD étaient de plus d’un mois quand 69,1 % étaient de moins d’un an. En 2002, les CDI représentaient 23 % des nouveaux emplois et les CDD 77 %.

Nature des contrats souscrits en %

 

  CDI CDD CDD de moins d’un mois CDD de plus d’un mois
2002 23,38 76,62 26,14 50,48
2016 13,43 86,57 17,40 69,17

 

20 % des titulaires d’u CDD ont obtenu entre 2008 et 2014 un CDI contre 24 % entre 2003 et 2008. Seuls 13 % des demandeurs d’emploi retrouvant un emploi ont signé un CDI entre 2008 et 2014 contre 17 % entre 2003 et 2008

 

Le chômage est monté jusqu’à 10,5 % en 2015 avant de redescendre à 9,6 %. Le chômage de longue durée a concerné jusqu’à 4,6 % de la population active. Ce chômage touche en priorité les non diplômés. 26 % de Français au niveau d’éducation le plus faible enregistrent un taux de chômage de 16 %. Néanmoins, la France se situe une nouvelle fois en la matière dans la moyenne de la zone euro.

Si le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans est élevé en France (26,2 % source Eurostat), il ne concerne qu’une toute partie de cette classe d’âge (environ 25 %). En effet, une part croissante des 18-25 ans poursuit des études et n’est donc pas sur le marché du travail. Ceux qui y sont ont la plupart du temps arrêté leurs études sans obtenir un diplôme. Le taux de chômage sanctionne de manière violente cette absence de qualifications. Celui des 15/24 ans monte à 40 % quand il est de 15 % pour ceux qui ont fréquenté un établissement d’enseignement supérieur. Entre 25 et 29 ans, les actifs sans qualification enregistre, en 2016, un taux de chômage de 30 % quand celui de ceux ayant poursuivi des études supérieures n’est que de 7,4 % (source Eurostat).

La France se caractérise par un nombre de diplômés de l’enseignement supérieur au-dessus de la moyenne européenne. Plus de 43 % des jeunes Français âgés de 30 à 34 ans sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur quand la moyenne européenne est de 36 %.

Même si sa balance commerciale est déficitaire, la France tire profit de son ouverture extérieure. Un cinquième des emplois dépendent de l’exportation. Par ailleurs, la France, pays de services, devrait être économiquement mieux positionnée dans les prochaines années. Si les années 90/2000 furent marquées par les échanges de biens d’équipement et de biens industriels, désormais, ce sont les services qui ont le vent en poupe. L’enrichissement des pays émergents et le vieillissement de la population conduisent à une montée en puissance des services.

La contestation de la mondialisation au sein de nombreux pays avancés est la conséquence d’une mutation intervenue ces vingt dernières années, qui a été rapide et qui a bouleversé un certain nombre de repères. La tentation du repli qui est une forme d’aversion au risque est liée à la perception que la mondialisation qui s’accompagne de la digitalisation n’est gagnante que pour les autres. Les autorités française ont certainement été parmi celles qui ont le plus opéré pour limiter les effets de la crise et de ses suites sans que cela ait une incidence sur le ressenti de la population.