5 août 2017

Le Coin des tendances du 5 août 2017

L’heure de gloire de la carte de paiement est-elle terminée ?

En 2016, selon le rapport annuel de l’Observatoire des Moyens de Paiement, 22,6 milliards de transactions scripturales ont été réalisées, en France, par les particuliers et les entreprises pour un montant total de 27 161 milliards d’euros. Ce qui représente une progression de 5 % du nombre de transactions et de 3 % des montants échangés par rapport à 2015.

Le paiement par carte est le mode de paiement privilégié des Français. Les cartes sont utilisées dans près de la moitié des transactions scripturales en volume (49 %) pour un montant total de  499  milliards  d’euros en 2016. Par ailleurs, 1 491 millions d’opérations de retrait par carte ont été dénombrés pour un montant total de 129 milliards d’euros. La France figure parmi les pays européens qui utilisent le plus la carte de paiement pour les transactions. Seul le Royaume-Uni fait mieux (60 % des transactions contre 50 % pour la France). L’Allemagne est loin derrière (19 %).

Le prélèvement arrive au deuxième rang des instruments de paiement scripturaux les plus utilisés en nombre (18 %) et en montant (6 %). Ces transactions sont avant tout nationales, les prélèvements SEPA transfrontaliers représentant moins de 1 % de l’ensemble des flux émis.

Le virement reste l’instrument de prédilection pour les paiements de montant élevé (paiements des salaires et pensions, paiements interentreprises, etc.). Il représente 88 % du montant total des transactions scripturales. En nombre d’opérations, il se situe en troisième position (17 %), juste après le prélèvement et loin derrière la carte. 77 % des virements sont réalisés au niveau national contre 18 % à destination de l’espace SEPA (Europe) et 4 % en dehors.

Le chèque continue de décliner lentement. En 2016, en nombre d’opérations et en valeur, la baisse a atteint 8 %. 2,1 milliards de chèques ont ainsi été émis en 2016 pour un montant global de 1 077 milliards d’euros, soit une part dans les paiements scripturaux de 9,5 % en volume et 4 % en valeur.

Les lettres de change relevé et les billets à ordre, qui représentent moins de 1 % des transactions scripturales tant en volume qu’en valeur, connaissent un repli continu qui se confirme en 2016, tant en montant (-9 %) qu’en nombre d’opérations (-3 %).

L’utilisation de la monnaie électronique reste marginale, en France, avec  38  millions de transactions pour une valeur totale de 591 millions d’euros.

En 2016, la fraude aux transactions scripturales représente un montant global d’environ 800 millions d’euros pour 4,8 millions de transactions frauduleuses. La carte de paiement concentre la moitié de la fraude en montant, soit près de 400 millions d’euros en cumulant les transactions de paiement et de retrait, et représente la quasi-totalité (97 %) du nombre de transactions frauduleuses. Néanmoins, le montant de fraude global sur les cartes émises en France diminue en 2016 pour la première fois après plusieurs années de progression. Le  taux de fraude a ainsi diminué, après plusieurs années de stagnation, pour s’élever à 0,064 %, soit environ un euro de fraude pour 1 600 euros de transactions. Ce taux moyen recouvre toutefois des situations contrastées, avec notamment une fraude très réduite sur les paiements au point de vente (0,008 % soit un euro de fraude pour 12 500 euros de transactions) mais plus significative sur les paiements à distance (0,199 %, soit un euro de fraude pour 500 euros de paiements).

Le chèque est le second moyen de paiement le plus fraudé en France en 2016, avec un montant de fraude qui s’élève à près de 272 millions d’euros, et ce alors qu’il n’est que le quatrième moyen de paiement en termes d’usage. Son taux de fraude s’établit à 0,025 %, soit un niveau légèrement inférieur à celui des transactions par carte et l’équivalent d’un euro de fraude pour 4 000 euros de paiement.

Le montant annuel de la fraude au virement est significativement inférieur à celui de la carte et du chèque, et s’établit à 86 millions d’euros en 2016. Compte tenu des montants élevés échangés par ce moyen de paiement, son taux de fraude est le plus faible parmi les moyens de paiement scripturaux, à 0,0004 % soit l’équivalent d’un euro de fraude pour 275 000 euros de paiement.

Le développement du paiement sans contact

Si le porte-monnaie électronique a été un échec (carte dédiée aux petits achats), le paiement sans contact associé à la carte de paiement traditionnel semble rencontrer son public. Au mois de mai 2016, 61 % des cartes étaient dotées de cette faculté et sur ce seul mois, 46 millions de transactions sans contact avaient été enregistrées pour un montant total de près de 500 millions d’euros. Plus de 500 000 commerçants acceptent ce mode de paiement qui est limité à 20 euros mais qui devrait passer à 30 euros au cours de l’automne 2017.

La fin de la monnaie fiduciaire ?

Avec le développement des nouveaux moyens de paiement, certains imaginent la fin rapide des pièces et des billets. Plusieurs pays d’Europe du Nord se sont déjà engagés dans des processus de réduction de la monnaie fiduciaire. Cette tendance ne concerne pas la France, pour le moment. Même si le nombre de distributeurs tend à diminuer, les Français continuent à utiliser les billets pour s’acquitter des dépenses du quotidien. En 2016, le nombre de billets mis en circulation en France a augmenté de 7 % et de  6 % en valeur. Les billets et les pièces sont les seuls moyens de paiement ayant un pouvoir libératoire instantané. Ils ne dépendent pas d’un système technique, d’une transmission informatique, etc.

La limitation de l’argent liquide repose sur des considérations économiques. La production, la manipulation,  la circulation, le transport sécurisé des espèces génèrent un coût significatif qu’une étude de la banque centrale du Danemark en 2011 évaluait entre 0,29 % et 0,72 % du PIB. Par ailleurs, les pièces et surtout les billets ont de tout temps fait l’objet de fraudes. Mais parmi les moyens de paiement, ils n’en ont pas l’exclusivité. La monnaie fiduciaire peut faire l’objet de contrefaçons, de moyens de paiement pour les activités illégales (terrorisme, corruption, grande criminalité). Elle est également utilisée dans le cadre de l’évasion fiscale. Mais les mafias en tout genre s’adaptent en recourant à des monnaies parallèles sur le darkweb.

La suppression progressive des coupures de 500 euros est liée au fait qu’une grande partie était utilisée soit comme instrument de réserve, soit comme moyen de paiement par des organisations criminelles. Sur 1 126 milliards d’euros de billets de 500 euros émis au 31 décembre 2016, seulement 269 milliards d’euros étaient en circulation.

La Suède, le pays qui éradique le cash

La Suède a toujours été un pays en pointe en matière d’activités bancaires. Les premiers billets de banque et la première banque centrale sont apparus dans ce pays au XVIIe siècle. Le premier billet de banque introduit en Europe, a été délivré par la Stockholms Banco en 1666. La Suède a été un des premiers États à appliquer les taux négatifs et se veut être précurseur de la «cashless society». Les Suédois ne paient plus avec des pièces et des billets, ils «swishent», du nom de l’application de paiement lancée par leurs banques avec leurs homologues danoises. De nombreux commerces et établissements publics refusent désormais la monnaie fiduciaire. C’est une remise en cause du principe de « l’acceptation obligatoire des espèces». En Suède, le volume d’espèces décroît et ne représente plus que 2,1 % du PIB – contre 10,3 % en zone euro et 7,7 % aux États-Unis (source : Capgimini).

Le retrait de l’argent liquide risque de générer un nouveau facteur d’exclusion pour les populations les plus pauvres et les plus âgées. Le deuxième risque porte sur la capacité des pouvoirs publics et des sociétés gérant les nouveaux moyens de paiement de tout connaitre de leurs citoyens et de leurs clients.

 

La Banque de France, la banque des billets et des pièces

Une des missions essentielles de la Banque de France est d’assurer la mise à disposition des banques sur tout le territoire des billets et des pièces. Elle assure la liquidité fiduciaire. Pour réaliser cette mission, la Banque de France dispose d’un réseau de 53 caisses. Les distributeurs de billets ne pourraient pas être alimentés sans le travail réalisé en amont par la Banque de France.

En 2016, les véhicules de la Banque de France ont parcouru un total cumulé de 620  276 kilomètres pour assurer le transport des valeurs. Les transporteurs de fonds prélèvent aux guichets de la Banque de France les billets et pièces pour le compte des établissements de crédit et autres clients institutionnels, qui mettent ensuite la monnaie fiduciaire à disposition du public. Dans les départements et régions d’outre-mer ainsi que dans les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint‑Barthélemy et Saint-Martin, l’IEDOM assure la mise en circulation et l’entretien des billets et des pièces pour le compte de la Banque de France.

Les Français aiment les petites coupures

En 2016, les coupures de 10 euros et 20 euros représentent près de trois quarts des billets prélevés aux guichets des deux instituts d’émission français tandis que, au niveau de l’Eurosystème, la répartition entre les coupures de transaction est plus homogène avec une légère prédominance du 50 euros. Le Français retire peu mais souvent. Le nombre élevé des distributeurs et la crainte de perdre son argent liquide expliquent cette caractéristique. La valeur moyenne des billets prélevés en France s’élève à 24,5 euros. Les coupures dites « de thésaurisation » (100 euros, 200 euros et 500 euros) sont peu utilisées en France et ne représentent que 1,8 % des prélèvements en volume.

En 2016, les retraits de pièces en France sont en forte baisse (-13,4 % en volume et -9,5 % en valeur) et s’élèvent à 1,6 milliard de pièces pour une valeur de 690,3 millions d’euros. Au niveau de l’Eurosystème, les volumes de pièces prélevées déclinent également après une période de légère croissance (-5,1 % en volume et -7,1 % en valeur) pour s’établir à 19,0 milliards de pièces soit 6,6 milliards d’euros. Contrairement aux billets, la structure des prélèvements de pièces en France est proche de celle observée au niveau de l’Eurosystème. Les pièces de faible valeur faciale (1, 2 et 5 centimes) représentent ainsi plus de 45 % des pièces prélevées en France et plus d’une pièce sur deux au sein de la zone euro.

 

Jeux Olympiques, un bon pari économique ?

Après le renoncement de Los Angeles qui se réserve pour 2028, en septembre prochain, Paris devrait obtenir les Jeux Olympiques de 2024, soit 100 ans après ses premiers Jeux.

Les grands évènements sportifs sont des vitrines économiques, touristiques et politiques pour un pays. Mais, est-ce que cela peut être une bonne affaire économique ? Les contre-exemples ne manquent pas même s’il faut, en la matière, nuancer certains jugements hâtifs. Les retombées ne se mesurent pas dans l’année. Il faut souvent attendre une période plus longue pour analyser les effets post-jeux.

Pour avoir une vision correcte, il faut ajouter, aux coûts directs, les charges indirectes comme les dépenses de sécurité ou les effets d’éviction, les touristes durant les Jeux se font rares par crainte des attentats ou des difficultés de circulation. Il convient également de prendre en compte les dépenses d’entretien des installations des équipements sportifs qui continueront à grever les budgets publics longtemps après la fin des évènements sportifs. Le recours de plus en plus fréquent à des installations démontables limite cet inconvénient.

Le principal risque auquel sont confrontées les villes organisatrices est la dérive des budgets. Les Jeux de Séoul en 1988 qui devaient coûter 4 milliards de dollars ont finalement occasionné une dépense de plus de 8,3 milliards d’euros. La palme de la dérive est pour Pékin. Le montant des Jeux a atteint 32 milliards de dollars pour un budget initial de 2,6 milliards de dollars. Parmi les moins rigoureux figurent aussi Athènes et Londres avec un doublement des budgets. Atlanta, en 1996, a presque respecté l’enveloppe prévue dans le dossier de candidature (3,3 milliards de dollars contre 2,5 milliards). Les Jeux d’Hiver n’échappent pas également à l’inflation des budgets. Ainsi, ceux de Sotchi, en 2014, ont été les plus dispendieux de l’histoire, avec un budget total de 36 milliards d’euros.

Les Gouvernements et les Comités Olympiques nationaux ont tendance à sous-estimer les coûts et à multiplier les promesses afin de remporter les Jeux avec, de ce fait, une dérive quasi automatique des budgets. Depuis plusieurs années, le Comité International Olympique veille de plus en plus à étudier la faisabilité budgétaire des projets. Pour les jeux de 2024, le Comité français du sport international (CFSI) a fixé un chiffre de 6,2 milliards d’euros pour le budget prévisionnel.

Selon une étude du cabinet Sport+Markt, les Jeux olympiques auraient, depuis 1980,  rapporté plus qu’ils n’ont coûté. 220 millions de dollars de bénéfice pour Los Angeles et Séoul, 10 millions pour Atlanta, et même 145 millions pour Pékin. Le bénéfice le plus important a été atteint par Sydney, en 2000, avec 1,75 milliard de dollars.

Pour certains économistes, un pays organisant une compétition internationale comme une Coupe du Monde pourrait bénéficier d’un surcroit de croissance de 0,2 à 0,3 point de PIB l’année de l’évènement. En prenant en compte la réalisation des infrastructures et les retombées, l’impact pourrait atteindre 0,7 à 0,8 % du PIB. Selon une étude du cabinet Sport+Markt, les Jeux olympiques auraient, depuis 1980, rapporté plus qu’ils n’ont coûté. 220 millions de dollars de bénéfice pour Los Angeles et Séoul, 10 millions pour Atlanta, et même 145 millions pour Pékin. Le bénéfice le plus important a été atteint par Sydney, en 2000, avec 1,75 milliard de dollars

Selon une étude du CDES sur l’impact de l’Euro de football de 2016, les retombées ont été évaluées a minima à 1,3 milliard d’euros. Les dépenses de construction ou de modernisation des infrastructures pour l’Euro 2016 s’élèvent à 1,7 milliard d‘euros. 20 000 emplois ont été créés.

Le bilan économique des Jeux est très difficile à évaluer. Il y a un évident « effet construction » mais qui est éphémère à quoi s’ajoute donc un effet d’éviction pour les touristes l’année des Jeux. En revanche, les Jeux ont un évident effet « image » qui permet justement d’asseoir la notoriété d’une ville et d’un pays. Un évènement sportif à dimension internationale a un effet mobilisateur et fédérateur pour la population concernée. Ce fut le cas en France avec la Coupe du Monde de 1998 en France. Ce fut également le cas en Chine mais aussi à Londres.

Les Jeux contribuent à accélérer la réalisation d’investissements qui étaient de toute façon programmés. Les infrastructures routières et ferroviaires des Jeux olympiques d’hiver d’Albertville en 1992 étaient prévues mais, maintes fois reportées, pour des raisons budgétaires ou écologiques. Londres a également utilisé les Jeux Olympiques pour remodeler l’est de la ville. Ce réaménagement nécessaire était dans les cartons depuis de nombreuses années.