6 octobre 2018

Le Coin des tendances du 6 octobre 2018

Face à la dépendance, des familles bien souvent désemparées 

La dépendance sera le grand sujet social des trente prochaines années. Sujet délicat car il touche à la fin de la vie. Sujet complexe car il concerne un grand nombre d’acteurs, assurance maladie, EHPAD, départements, État, familles, etc.

L’acuité de la question de la dépendance est liée au vieillissement de la population. Cette dernière résulte tout à la fois de l’arrivée à l’âge critique des générations du baby-boom et de l’allongement de l’espérance de vie. Le nombre des 75 ans ou plus devrait atteindre 13,5 % de la population en 2060, contre 9,3 % en 2020. Dans 17 ans, les plus de 75 ans seront 11 millions et les plus de 85 ans 5 millions.Face à la dépendance, les familles sont confrontées bien souvent au dilemme du maintien à domicile ou de l’hébergement dans un établissements spécialisé. Elles doivent prendre des décisions pouvant aller à l’encontre des souhaits des personnes dépendantes.

Une étude récente réalisée par le Crédoc à la demande du groupe Caisse des Dépôts, d’AG2R LA MONDIALE et de Terra Nova souligne que 40 % des familles qui seront bientôt concernées considèrent que le placement s’effectuera contre la volonté de la personne intéressée. Du fait de la complexité de la décision à prendre, des éventuelles oppositions en leur sein, les familles attendent fréquemment le dernier moment pour le transfert de la personne dépendante dans un établissement. Celui-ci intervient donc, en règle générale, dans de mauvaises conditions. Plus de 50 % des proches éprouvent un sentiment de culpabilité de ne pas avoir respecté le désir des personnes concernées (étude DREES).

Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ont une mauvaise image au sein de la population. Ces structures d’accueil apparaissent comme des lieux de fin de vie. Du fait du maintien aussi longtemps que possible des malades à domicile, les EHPAD accueillent des patients avec des pathologies lourdes, dissuadant les familles de leur confier des patients moins dépendants. 82 % des sorties d’EHPAD interviennent par décès. Ces derniers surviennent pour la moitié d’entre eux, dans les deux ans suivant l’entrée structure (DREES 2017). Les trois-quarts des EHPAD incluent en 2015 un volet de soins palliatifs dans leur projet d’établissement (contre 62 % en 2011). Le choix du placement en EHPAD est donc toujours un aveu d’impuissance pour les familles. Une entrée est perçue comme un soulagement mais aussi un échec. Selon le rapport 2018 Iborra – Fiat de mars 2018, 49 % des résidents d’EHPAD souffrent de troubles démentiels, pour beaucoup liés à Alzheimer et 35 % de « troubles chroniques du comportement ».

Le choix du placement en EHPAD est d’autant plus mal vécu que ces établissements sont confrontés à des problèmes d’encadrement. Les conditions de travail difficiles entraînent une rotation du personnel rapide ne permettant pas toujours un traitement attentionné des patients. Quand l’entrée en EHPAD s’est effectuée sans le consentement de la personne, c’est dans 83 % des cas lié à une dégradation de l’état de santé contre 78 % quand le choix s’est opéré en concertation. Pour 46 % d’entre eux, c’est l’incapacité à subvenir aux soins qui conduit au placement en hébergement.

Les familles peuvent compter sur l’Allocation Personnalisée d’Autonomie pour financer une partie des dépenses occasionnées par la dépendance. L’APA est, en effet, la principale allocation visant à répondre au problème financier de la dépendance. Cette allocation permet aux personnes âgées dépendantes de financer des dépenses engendrées par l’accompagnement dont elles ont besoin au quotidien : aide technique, aide professionnelle à domicile, soutien aux proches aidants. Elle est accordée sous condition de ressources et en fonction de l’état de santé du bénéficiaire. 3,8 % des personnes âgées de 60 ans ou plus perçoivent l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), soit 1,2 million de personnes. 59 % vivent à domicile et 41 % en établissement. Entre 2008 et 2013, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 11 %. 90 % des bénéficiaires ont plus de 75 ans. Trois-quarts des bénéficiaires de l’APA sont des femmes et la moitié a plus de 85 ans. Les prestations versées dans le cadre de l’APA s’élèvent à plus de 5,5 milliards d’euros. Elles représentent le cinquième des dépenses publiques allouées à la dépendance. La durée moyenne de perception de l’APA est de 3 ans et demi. Pour les hommes, cette durée est de 3 ans et de 4 ans pour les femmes. Les hommes commencent à percevoir l’APA plus tôt, à partir de 81 ans et demi en moyenne, contre 83 ans et demi pour les femmes. Les hommes sont, en moyenne, moins dépendants et plus souvent pris en charge uniquement à domicile. En revanche, les femmes sont plus souvent prises en charge uniquement en établissement et perçoivent davantage l’APA.

Les parents des personnes dépendantes sont, selon l’étude précitée, souvent en situation de fragilité car également âgés voire également en mauvaise santé. L’épuisement physique et psychologique freine également la prise de décision. L’éloignement géographique peut jouer positivement ou négativement sur le placement en EHPAD, positivement par incapacité à gérer à distance la personne dépendante, négativement par méconnaissance de la situation. L’aspect financier peut également jouer tout comme les contraintes administratives. Les familles peuvent renoncer au placement par manque de moyens ou par crainte d’une récupération sur succession des aides touchées.

Par ignorance des aides, les familles à revenus modestes considèrent qu’il n’est pas possible financièrement de placer leurs proches en EHPAD. Ce taux est de 50 % pour l’ensemble de la population concernée. D’après la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie le coût mensuel médian des EHPAD était de 1 953 euros par mois en 2017 (pour une chambre seule en hébergement permanent et un niveau de dépendance GIR 5 ou 6) quand le niveau de vie mensuel médian d’une personne âgée de 80 ans et plus est de 1 615 euros en 2015. Cette comparaison ne prend pas en compte le montant du patrimoine détenu par les personnes concernées. Selon une étude de la DREES de 2016, le « reste à charge », une fois les aides au logement déduites, s’établit à 1 758 euros par mois. Pour trois résidents sur quatre ce reste à charge est supérieur à leurs revenus. 20 % des résidents bénéficient ensuite selon la DREES de l’aide sociale à l’hébergement (ASH). Tous les établissements ne sont pas éligibles à l’ASH.  Après prise en compte de l’ASH, la moitié des résidents ne pourraient pas financer le reste à charge lié à l’entrée en établissement. Le montant restant est alors à la charge des familles ou donne lieu à une mobilisation du patrimoine.  Les plus de 70 ans possèdent ainsi un patrimoine net moyen de 286 000 euros, et médian de 157 00 euros.

L’étude du Credoc souligne la nécessité de développer des lieux moins médicalisés pour favoriser une prise en charge afin de traiter les cas intermédiaires de dépendance moyenne. Ces structures intermédiaires sont relativement rares. Par ailleurs, la répartition des EHPAD sur le territoire demeure inégale. En moyenne, sur le territoire métropolitain pour 1 000 personnes âgées de 70 ans ou plus, il existe 81 places en EHPAD, EHPA ou résidences d’autonomie. Ce taux n’est que 35 pour 1 000 en Corse, 55 pour 1 000 à Paris mais de 132 pour 1 000 en Lozère. Il faut souligner qu’en Corse, le maintien à domicile est plus important en raison de la force des liens familiaux. Actuellement, ce sont les générations étroites des années 30 qui sont arrivées à l’âge potentiel de la dépendance. Or, d’ici une quinzaine d’années, ce sont des générations beaucoup plus larges qui seront concernées. Le manque de places en établissements spécialisés sera donc encore plus marqué. Cette pénurie s’accompagnera de celle du personnel soignant. Que ce soit sur le plan financier qu’humain, il y a un devoir pour les acteurs en charge de ce problème de programmer les investissements nécessaires pour éviter d’être confrontés à une situation critique dans les années 2030.

 

35,4 millions de logements en France

Selon l’INSEE, au premier janvier 2018, la France métropolitaine compte 35,4 millions de logements. Le nombre de logements s’accroît de 1,1 % par an en moyenne depuis trente ans. Aujourd’hui, sur 100 logements, 82 sont des résidences principales, 10 sont des résidences secondaires ou des logements occasionnels, et 8 sont des logements vacants.

Le nombre de résidences principales s’établit à 29,0 millions. Il a cru à un rythme un peu plus élevé que l’ensemble du parc depuis le début des années 1990 jusqu’au milieu des années 2000. Depuis, il suit une progression annuelle moyenne d’environ 0,8 %.

La part des résidences secondaires et logements occasionnels est légèrement moins élevée en 2018 qu’il y a trente ans, tandis que celle des logements vacants est un peu plus élevée. Cette dernière a d’abord diminué lentement, descendant jusqu’à 6 % en 2006, avant de remonter. Depuis 2006, le nombre de logements vacants s’accroît dans l’ensemble des unités urbaines, mais de façon plus soutenue dans celle de Paris. Cette hausse concerne à la fois les logements individuels et collectifs. Néanmoins, elle est un peu moins soutenue sur les dernières années.

Le parc de logements collectifs augmente plus que l’habitat individuel. Les dispositions législatives favorisant la densification de la construction expliquent cette évolution. Néanmoins l’habitat individuel reste majoritaire en représentant 56 % des logements : il est majoritaire parmi les résidences principales comme parmi les résidences secondaires et les logements occasionnels. Mais, depuis 2013, les logements achevés dans l’année sont en effet plus nombreux dans le collectif que dans l’individuel, alors que leurs niveaux étaient proches les années précédentes et que c’était l’inverse jusqu’en 2008. 

Progression du nombre de logements au sein des aires urbaines sauf à Paris

 En 2018, 16 % des résidences principales se situent dans l’unité urbaine de Paris et 21 % dans une commune rurale. Ces proportions ont légèrement diminué en trente ans au profit des unités urbaines autres que Paris.

Des résidences secondaires de plus en plus en milieu urbain

Les résidences secondaires ou logements occasionnels se situent à 80 % dans une commune rurale ou dans une petite unité urbaine (moins de 100 000 habitants). 41 % se situent en milieu rural. Toutefois, le poids du rural diminue. Il atteignait 50 % en 1988. En revanche, les petites unités urbaines accueillent un nombre croissant de résidences secondaires (39 % en 2018 contre 33 % en 1987). Cette progression est imputable à l’urbanisation et à l’achat de nombreuses résidences secondaires sur le littoral, par nature, plus urbanisé que l’arrière-pays. Par ailleurs, en raison du vieillissement de la population et par commodité (accès rapide par transport), les acquéreurs de maisons secondaires privilégient de plus en plus les centres urbains et délaissent la campagne.

Des logements vacants essentiellement en milieu rural

60 % des logements vacants se situent dans une commune rurale ou dans une petite unité urbaine. La concentration de la population au sein des grandes agglomérations explique cette situation. En milieu rural, il est de plus en plus difficile de vendre sa maison ou de trouver des locataires.

58 % des ménages sont propriétaires de leur résidence principale

En 2018, 58 % des ménages sont propriétaires de leur résidence principale. Cette part n’a cessé de croître depuis les années 1980 jusqu’en 2010, mais depuis, elle est restée stable. L’augmentation des prix de l’immobilier ces vingt dernières années constituent un handicap à l’augmentation du nombre de propriétaires. La baisse des taux d’intérêt ne compense que partiellement l’augmentation des prix surtout en région parisienne. Par ailleurs, la crise qui s’est accompagnée d’une plus grande insécurité en matière d’emploi et de salaire peut expliquer la stagnation de la proportion de propriétaires constatée depuis 2010.

Parmi les propriétaires, environ un tiers sont accédants, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas fini de rembourser leur emprunt pour l’achat du logement. La part d’accédants à la propriété a fortement augmenté dans les années 1980 avant de baisser jusqu’au milieu des années 2000. Elle est stable depuis. La part des propriétaires sans charge de remboursement croît en partie sous l’effet du vieillissement de la population. En trente ans, elle est passée de 28 % à 38 % des ménages.

La proportion de locataires se maintient depuis les années 90 aux alentours de 40 %.  Dans le parc locatif, les parts respectives des bailleurs publics et privés atteignent, en 2018, respectivement 17 % et 23 % des résidences principales.

 En vingt ans, la proportion de ménages logés gratuitement a diminué fortement passant de 6,5 à 2,4 %. Les tensions sur le marché immobilier et la concentration en milieu urbain des ménages expliquent cette évolution. Les logements mis à disposition gratuitement se trouvent majoritairement en milieu rural. Ces mises à disposition gratuites interviennent essentiellement au sein des familles.

Le nombre de logements s’accroît fortement dans les DOM

Du fait d’une croissance démographique assez vive ces dernières années et d’une évolution sociologique dans l’organisation des familles, le parc total des logements augmente plus rapidement dans les départements d’outre-mer (DOM) hors Mayotte, qu’en métropole : + 2,5 % par an, en moyenne, entre le début des années 1980 et la fin des années 1990, puis aux alentours de + 2,2 % par an jusqu’en 2018.

Dans les DOM, les résidences principales sont très dominantes. En 2018, 82 % des logements sont des résidences principales, 5 % des résidences secondaires ou occasionnelles et 13 % des logements vacants. Le nombre de résidences principales s’accroît un peu moins vite que l’ensemble du parc depuis 2008. L’habitat individuel représente plus des deux tiers de l’ensemble des logements ultramarins. Il reste majoritaire quel que soit le type de logement, même si sa part baisse lentement depuis trente ans.