30 juin 2018

Le Coin des Tendances Economiques du 30 juin 2018

Etat providence, libéralisme, excès ou insuffisance ?

Avec la réouverture de la Chine au monde en 1978, avec la chute du Mur de Belin en 1989 et la fin de l’URSS en 1991, le capitalisme s’est diffusé à l’ensemble de la planète. Ce changement de dimension s’est accompagné d’une révolution technologique avec la digitalisation croissante des activités.

La mondialisation a changé en quelques années l’organisation des chaines de valeur. Elle a été rendue possible par la libéralisation du commerce international et par la multiplication de porte-conteneurs. Le numérique a permis une circulation en temps réel de l’information et de données au moment même où la mondialisation multipliait le nombre d’acteurs économiques.

Ce modèle de développement économique fait l’objet de critiques de plus en plus sévères. La montée du populisme aux États-Unis comme en Europe se nourrit tout à la fois du refus par une partie de la population de l’immigration et d’une contestation du libre-échange.

Pour les tenants du système économique actuel, ce rejet serait avant tout la conséquence d’un manque de connaissances économiques ou d’une crispation temporaire de la population devant faire face à une profonde mutation et cela après une crise centennale. Mais, en mettant à mal les nations, la construction européenne et les relations avec les États-Unis, la colère des peuples ne peut pas être balayée d’un trait de plume. La défiance de la population est protéiforme. Économique et sociale, elle avant tout nihiliste. Elle s’alimente de la peur des autres.

Le passage de l’assurance à l’assistance ou le changement de paradigme social

Depuis une trentaine d’années, le système d’État providence tel qu’il a été imaginé après la Seconde Guerre mondiale est à la peine. Il avait comme objectifs de couvrir les risques auxquels pouvait être confrontée la population et de lisser les effets des crises économiques éventuelles. Ce système a été jugé comme efficient durant toute la période des Trente Glorieuses. Dans les faits, la reconstruction et la diffusion du progrès technique en provenance des États-Unis ainsi que la restauration du libre-échange peuvent expliquer le regain de la croissance.

La succession des crises depuis 1973 a modifié en profondeur les systèmes de protection sociale. Construits, notamment en France, sur une base assurantielle, ils se sont orientés vers l’assistance au profit des plus démunis. La création du RMI en 1988, de la CMU en 1999 sont les symboles de cette évolution. L’assurance prend en compte les besoins, les attentes des assurés ainsi que leurs capacités contributives. L’assistance répond à une logique de solidarité. Elle vise à garantir un minima à tous ou à ceux se situant en-deçà d’un plafond de ressources.

Durant les 30 Glorieuses, les classes moyennes sont les principales bénéficiaires de l’État providence ; à partir des années 2000, elles sont avant tout amenées à le financer. Si auparavant, elles pouvaient être traitées à parité ou presque des classes les mieux dotés en revenus, elles sont, depuis, en concurrence avec les classes les plus modestes pour l’accès aux services. Cette situation alimente le sentiment de déclassement.

Face à la succession des crises, les gouvernements ont au nom des stabilisateurs keynésiens accru les dépenses publiques en accroissant le filet de la protection sociale. Avec la baisse des gains de productivité et par ricochet des recettes publiques, les États se sont endettés de plus en plus. La dette aux États-Unis dépasse 107 % du PIB, en France 97 %, en Italie, 135 % et en Grèce 175 %. Les pays occidentaux ont acheté de la croissance et de la paix sociale à crédit.

Renforcement de la concurrence individuelle, étiolement de la concurrence des entre les entreprises

La concurrence individuelle tend à s’accroître au sein de la population. La démocratisation de l’enseignement et sa massification ont accru le nombre de personnes ayant le baccalauréat et pouvant accéder à l’enseignement supérieur. Il en résulte une compétition plus âpre pour entrer dans les bonnes filières de formation d’autant plus que le nombre de places disponibles n’a pas augmenté en proportion avec celui des candidats. Cette concurrence s’exprime également dans le monde du travail. L’emploi augmente moins fortement que durant les années 60. Il connaît des à-coups à la baisse comme à la hausse. La population active est à son plus haut au sein des pays avancés du fait de la présence en son sein des larges générations du baby-boom. Cette situation concerne en premier lieu la France dont la dénatalité est moins importante que chez ses partenaires. La digitalisation et la mondialisation ont modifié les structures du système productif. Si la demande en emplois de service à faible qualification s’est accrue, elle s’accompagne d’une montée en puissance de la précarité (CDD en France, minijobs en Allemagne). Les emplois qui étaient ceux dévolus aux classes moyennes tendent à se raréfier avec l’aplatissement des chaines de commandement.

Le développement de l’État providence a renchéri le coût du travail limitant d’autant l’employabilité d’une partie de la population active. En effet, plus le coût du travail est élevé, plus la productivité des salariés doit être forte. Les crises et les réponses qui y ont été apportées sur le plan social alimentent la hausse des dépenses sociales qui en France atteignent plus du tiers du PIB.

La concurrence intérieure et extérieure rend la compétition entre actifs plus dure et pèse sur l’évolution des rémunérations. Cette compétition est d’autant plus forte que depuis quarante ans, la mondialisation a accru la compétition entre les entreprises mais aussi entre les Etats.

En vertu de la théorie des avantages comparatifs, le commerce international est censé générer un surcroît de richesses pour tous. Dans un environnement à faibles gains de productivité et de rentes, ce jeu à somme positive est plus incertain surtout si la compétition est faussée. La mondialisation a changé les grilles de coûts avec l’arrivée sur le marché industriel de pays à faibles salaires. Les pays avancés n’ont pas pu conserver une avance technologique les mettant à l’abri de la concurrence des émergents. La mondialisation s’accompagne d’un phénomène de concentration économique qui modifie les rapports de force (entre les entreprises et les États, d’une part ; entre les entreprises avec les salariés, les sous-traitants, les distributeurs, d’autre part).

La concentration économique ou la fin d’une certaine vision libérale de l’économie

Ce phénomène ne date pas de la mondialisation des années 90. Pour préserver leurs revenus, les entreprises tentent d’accroître leurs parts de marchés. La concurrence internationale et le coût croissant des investissements poussent à la concentration. Entre l’impératif financier (celui des actionnaires) et l’impératif économique (investissements, concurrence internationale), il est difficile de faire la part des choses dans ce processus de concentration.

Plusieurs secteurs majeurs sont dominés par des leaders mondiaux. Il en est ainsi pour la sidérurgie, l’informatique, le secteur de l’information et de la communication digitale mais aussi pour l’automobile, etc.

En France, les gouvernements ont favorisé l’émergence de champions nationaux afin qu’ils puissent être compétitifs à l’échelle internationale. L’industrie sidérurgique a connu une réduction du nombre de ses entreprises. Usinor et Sacilor qui regroupaient une kyrielle d’entreprises ont fusionné avant d’être intégrées au sein du groupe indien Mittal. L’automobile s’est organisée autour de deux groupes, PSA et Renault. Ces vingt dernières années, l’industrie du médicament a connu une forte concentration tant à l’intérieur du territoire qu’à l’extérieur. Les regroupements s’effectuent, en effet, de plus en plus à l’échelle internationale comme le prouve la fusion d’Alstom et de Siemens ou la participation du constructeur chinois Donfeng au capital de PSA.  Le secteur des services n’échappe pas à la règle. Dans le secteur aérien, Air Inter, UTA et bien d’autres ont disparu au profit d’Air France qui a, par ailleurs, repris KLM. La grande distribution est en France très concentrée avec quatre centrales d’achats qui réalisent 92 % du chiffre d’affaires du secteur (Carrefour/Système U/Cora 34,2 % de parts de marché selon Kantar WorldPane, Auchan et Casino arrivent en seconde position avec 21,8 %, Leclerc en troisième avec 21 % et enfin le groupement des Mousquetaires, qui ne représenterait plus « que » 14,7 % à lui seul).

Au niveau des technologies de l’information et des communications, le marché appartient à quelques entreprises avec très fréquemment une forte domination du leader. Les premiers prennent le marché, laissant aux suivant des parts résiduelles.

Un marché d’oligopoles favorise la progression des bénéfices et la constitution de rentes de situation. Le coût d’accès aux marchés freine l’arrivée de concurrents.

Des profits trop élevés conduisent souvent à une efficience moyenne des investissements des entreprises. En effet, l’argent abondant n’incite pas à sélectionner les meilleurs projets et peut générer un gaspillage ou une dispersion.

La mondialisation a abouti à l’apparition de deux types de firmes dont les modes d’action ne diffèrent guère. La première forme correspond aux entreprises multinationales occidentales qui tendent à s’affranchir des contraintes imposées par les États nations. L’autre comprend les entreprises nationales des États émergents. Les grandes entreprises interviennent comme des structures étatiques. Si cette caractéristique était constatée dès les années 50 pour les firmes multinationales américaines, elle tend à se généraliser.

Les Etats nations tenus en échec face aux nouveaux seigneurs de l’économie mondiale ?

Les États des pays avancés éprouvent les pires difficultés à imposer leurs vues aux entreprises multinationales comme vient de le prouver le fabricant de moto Harley Davidson qui a annoncé son intention de produire à l’extérieur des États-Unis afin d’échapper à la majoration des droits de douane imposée par les Européens en représailles à la taxation de l’acier et de l’aluminium par les Etats-Unis. Les Etats membres de l’Union européenne peinent à imposer les entreprises Internet pour leurs activités réalisées sur leur sol. En période de chômage et de concurrence internationale, les collectivités publiques éprouvent des difficultés à s’opposer à Amazon sur le plan fiscal quand, dans le même temps, cette entreprise négocie l’implantation de centres logistiques.

La victoire de Microsoft face aux autorités américaines et européennes au début des années 2000 marque une rupture dans la structuration du capitalisme moderne. En effet, Microsoft a alors résisté aux accusations de positions dominantes et donc à un éventuel démantèlement.

Microsoft a mis un terme à l’application des lois anti-trust qui dataient de la loi Sherman du 2 juillet 1890 aux États-Unis. Cette loi prévoit de nombreuses mesures concernant le commerce national et international. C’est en vertu de cette loi que Donald Trump majore les droits de douane au nom de la protection du marché intérieur et de la sécurité du pays. Cette loi condamne également « toute personne qui monopolise, tente de monopoliser ou s’associe à d’autres pour monopoliser une partie du commerce entre les États ou avec les nations étrangères ». Cette loi centrée sur le commerce ne freine pas le processus de concentration qui intervient à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Elle a été complétée par le Clayton Antitrust Act du 15 octobre 1914. Les compagnies ferroviaires, sidérurgiques et pétrolières mais aussi agro-alimentaires furent visées par des procédures anti-trust. En 1911, sous la présidence de William Taft, la Standard Oil est dissoute, tout comme l’American Tobacco. Dans les années 80, l’American Telegraph and Telephone (ATT) qui comptait 1 million de salariés et plus de 3 millions d’actionnaires a été démantelée en plusieurs compagnies après soixante ans de procédures.

Le droit européen comporte des dispositions visant à protéger la libre concurrence. En France, il n’existe pas de loi anti-trust en tant que telle, mais seulement l’obligation pour les entreprises de soumettre un projet de fusion ou de prise de contrôle à autorisation administrative préalable dès lors que cette fusion est susceptible de conduire à une position dominante (plus de 30 % du marché national d’un produit donné). Les pouvoirs publics éprouvent de plus en plus de difficultés à s’attaquer à leurs propres entreprises qui sont en compétition avec des entreprises étrangères.

Le digital, le big data et l’intelligence artificielle sont des catalyseurs de la concentration économique. Au-delà du mur de l’investissement technologique, les entreprises en tête de ligne sur leur marché disposent d’un avantage stratégique déterminant par l’accumulation de données. Faute de données, faute d’être identifiés, les concurrents sont voués à la marginalisation. En ayant de plus en plus de données, les leaders améliorent plus rapidement leurs algorithmes.

Ce nouveau type de marché qui exclut les seconds pose un réel problème de concurrence. Il ne garantit en rien une bonne allocation des richesses. Les lois anti-trust devraient prendre en compte l’évolution du capitalisme. L’accès aux algorithmes et aux données devrait pouvoir être imposé.

Le dangereux écartèlement des Etats

Les États nation sont de plus en plus écartelés entre l’exigence de venir en aide à une partie de la population fragilisée par la mondialisation et la digitalisation et l’impérieuse nécessité de la compétitivité. La mondialisation doublée de la concentration des entreprises ne s’est pas accompagnée d’une refonte de la gouvernance ou de la régulation économique mondiale qui date essentiellement de l’après Seconde guerre mondiale. Les échecs ou les impuissances de la gouvernance mondiale aboutissent à une remise en cause du multilatéralisme aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie mais également au sein des pays d’Europe de l’Est. La résurgence des tentations protectionnistes et du nationalisme économique constitue une réelle menace pour la croissance et la stabilité du monde. Dans le passé, le capitalisme a su se régénérer pour surmonter le défi du communisme et de la crise de 1929. Le fordisme et le keynésianisme ont permis d’atténuer les chocs économiques et de permettre le développement d’une classe moyenne. En cette fin de deuxième décennie du XXIe siècle, des réponses, des solutions doivent être apportées pour restaurer la légitimité du capitalisme et des démocraties et pour relever les défis économiques et environnementaux.

 

Plus de logements et de meilleure qualité !

La France manquerait d’au moins 500 000 logements. Par ailleurs, le prix de l’immobilier, qui a par exemple doublé en moins de 20 ans sur Paris, empêcherait de nombreux Français de se loger dans des conditions décentes et à proximité de leur lieu de travail. Les dépenses liées à l’habitation ont progressé ces dernières années au point de représenter plus de 30 % du budget des ménages de moins de 35 ans. Au-delà de ce sombre constat, plusieurs éléments positifs méritent d’être soulignés. Premièrement, le nombre de logements tend à s’accroître plus vite que la population et leur confort est en net progrès.

La forte croissance du parc de logements augmente

 Selon l’INSEE, au 1ᵉʳ janvier 2015, la France (hors Mayotte) comptait 35,2 millions de logements. Entre 2010 et 2015, le parc augmente au rythme moyen de 1,1 % par an, soit 2,2 fois plus rapidement que la population. En cinq ans, la France a gagné chaque année 374 000 logements. La progression s’est accélérée par rapport aux périodes précédentes (+290 000 unités par an de 1990 à 1999 et +364 000 unités par an de 1999 à 2010).

29 millions de résidences principales

Parmi les 35,2 millions de logements, 20 millions sont des résidences principales, soit huit logements sur dix. De 2010 à 2015, l’importance des résidences principales dans l’ensemble du parc diminue de 0,9 point. De fait depuis 2010, la progression des résidences principales est inférieure à celles des autres catégories de logement.

Depuis 2010, les résidences principales ne sont à l’origine que des deux tiers de la croissance du parc, contre 86 % entre 1990 et 1999 et encore 92 % entre 1999 et 2010. L’augmentation du nombre de résidences secondaires ou occasionnelles et des logements vacants contribue ainsi bien plus qu’avant aux évolutions du parc de logements.

La progression du nombre de logements s’explique par l’augmentation de la population, et par des modifications d’ordre sociologique. La France gagne chaque année plus de 250 000 habitants, ce qui induit un besoin de logements. Entre 2010 et 2015, chaque année, 139 600 logements supplémentaires ont été nécessaires en moyenne pour couvrir les besoins liés à la croissance de la population. Sur cette période, 37 % de l’augmentation du nombre de logements s’explique ainsi uniquement par le dynamisme démographique. Par ailleurs, la population tend à se concentrer sur quelques agglomérations, ce qui suppose également un effort de construction ou de réhabilitation en leur sein. L’allongement de l’espérance de vie contribue à accroître le besoin en logements.

Les changements de comportements de cohabitation avec la multiplication des divorces conduisent à une demande plus forte de logements. Dans le même temps, les mises en couples plus tardives, les ruptures d’union, l’augmentation du nombre de familles monoparentales, l’allongement de l’espérance de vie induisent mécaniquement une diminution de la taille des ménages. Il faut donc plus de logements pour héberger le même nombre de personnes. La baisse tendancielle de la taille des ménages s’est atténuée au tournant des années 2010. En 2015, on dénombre 2,23 personnes par logement, contre 2,27 en 2010 et 2,59 en 1990. La modification des comportements de cohabitation induit une hausse annuelle de 105 500 logements entre 2010 et 2015, soit 28 % de la variation du nombre de logements. Entre 1990 et 1999, la diminution de la taille des ménages expliquait 61 % de la croissance du parc de logements.

La progression du nombre de résidences secondaires ou occasionnelles contribue sensiblement à la croissance du parc

 En 2015, la France comptait 3,3 millions de résidences secondaires ou occasionnelles, soit 9,5 % des logements, proportion proche de celle de 2010.Le nombre de logements occupés une partie de l’année pour les week-ends, les loisirs ou les vacances (résidences secondaires) ou pour des raisons professionnelles (résidences occasionnelles) s’est accru, selon l’INSEE de 1,3 % par an entre 2010 et 2015.

Contrairement à quelques idées reçues, le nombre de résidences secondaires croît plus que l’ensemble du parc de logements : +11 % entre 2010-2015 (41 600 unités) soit le triple de la période 1990-1999 (4 %, 10 200 unités).

Sur la période récente, le développement des résidences occupées une partie de l’année pour les loisirs, les vacances ou pour des raisons professionnelles concerne essentiellement sur les grands centres urbains. Les villes-centres et les banlieues des grands pôles urbains génèrent ainsi 70 % de la croissance du parc des résidences secondaires ou occasionnelles entre 2010 et 2015. Cette évolution n’est pas sans lien avec le succès des plateformes comme Airbnb.

De plus en plus de logements vacants

En 2015, 2,8 millions de logements sont vacants en France, soit 8,0 % du parc de logements. Cette part n’a cessé de progresser depuis la fin des années 1990 (6,9 % en 1999 et 7,2 % en 2010) mettant ainsi fin à une baisse continue au cours des années 1980 et 1990 (7,6 % en 1982 et 7,2 % en 1990). La contribution de la vacance de logements à la progression du parc est plus élevée que celle des résidences secondaires ou occasionnelles. Entre 2010 et 2015, le nombre de logements vacants progresse annuellement de près de 86 900 unités, expliquant ainsi 23 % du nombre de logements supplémentaires sur la période. Leur nombre progresse de 3,4 % par an en moyenne entre 2010 et 2015, soit un rythme de croissance 2,5 fois plus élevé qu’entre 1999 et 2010 et 6 fois plus élevé qu’entre 1990 et 1999.

Le nombre de logements vacants augmente dans tous les types d’espace. La vacance peut provenir d’une offre plus élevée que la demande, de logements en mauvais état, d’un parc inadapté au marché (taille, localisation, prix, etc.), ou de délais de relocation ou de vente. Ce peut être aussi la conséquence du départ en maison de retraite de personnes âgées, sans que le logement ne soit mis en vente ou en location. La réglementation et la fiscalité constituent deux autres facteurs de vacance importants.

Assez logiquement, le taux de vacance est plus faible, dans les centres villes des capitales régionales que dans les banlieues et qu’en milieu rural. La vacance concerne tous les départements et n’épargne pas les grandes aires urbaines des départements ultra-marins, où, à l’exception de celle de Saint-Pierre à La Réunion, le taux de vacance est prononcé et en nette progression : Basse-Terre (18,4 %), Fort-de-France (16,1 %), Le Robert (15,1 %), Pointe-à-Pitre-Les Abymes (14,3 %).

L’amélioration réelle du parc de logements

Les dépenses d’habitation ont fortement augmenté, ces dernières années, du fait de la concentration de la population au sein des grandes agglomérations et d’une pénurie de logements estimée à 500 000. Cette situation s’accompagne néanmoins d’une réelle amélioration du parc de logements. Ainsi, entre 1996 et 2013, la part des ménages vivant dans un logement ne bénéficiant pas de l’ensemble du confort sanitaire de base (eau courante, WC intérieurs, installation sanitaire avec une douche ou une baignoire) a nettement diminué, quel que soit leur niveau de vie.

Les ménages les plus modestes continuent à réduire leur écart avec les plus aisés. En 1996, 9,0 % des ménages à bas revenus vivaient dans un logement ne bénéficiant pas de l’ensemble du confort sanitaire de base, contre 1,8 % des ménages plus aisés. En 2013, ces ratios sont respectivement de 1,6 % et de 0,3 %. L’écart n’est plus que de 1,3 point.

Le développement du parc social de logements a permis aux personnes les plus modestes de gagner en qualité. En 2013, 97,5 % des locataires à revenu modeste du parc social ont accès à des logements tout confort contre 78,7 % des propriétaires.

Le problème de la surpopulation existe encore. Plus le niveau de revenu est faible, plus la probabilité de vivre dans un logement surpeuplé est forte. 20,3 % des ménages à bas revenus sont confrontés à cette situation. En 2013, 9,6 % des ménages modestes occupent un logement surpeuplé contre 4,1 % des ménages plus aisés.  Après une baisse générale du taux de surpeuplement de 1996 à 2006, celui des ménages à bas revenus a augmenté de 1,6 point entre 2006 et 2013.

Sans surprise, le surpeuplement est un phénomène essentiellement urbain. Entre 2006 et 2013, la part de ménages à bas revenus vivant dans les communes rurales a fortement diminué au bénéfice des unités urbaines de plus de 100 000 habitants, et plus particulièrement de celle de Paris.

En 2013, 29,3 % des ménages à bas revenus déclarent vivre dans un logement dont certains murs présentent des signes d’humidité, contre 17,1 % parmi les ménages plus aisés. Cet écart diminue légèrement, de 1,1 point, depuis 2001. Le constat est un peu différent pour les problèmes d’infiltrations d’eau ou d’inondations qui, au cours du temps, concernent une part stable des ménages. Pour ces problèmes, les écarts entre catégories de ménages augmentent un peu. En 2013, 18,9 % des ménages à bas revenus déclarent avoir eu, au cours des douze derniers mois, des infiltrations d’eau ou des inondations, soit 4,4 points de plus que les ménages plus aisés. Cet écart était de 3,5 points en 2001.

Les inégalités vis-à-vis du bruit dans le logement venant de l’extérieur ont augmenté. La part des ménages plus aisés déclarant entendre assez souvent du bruit ou très fréquemment (de jour ou de nuit, fenêtres fermées) a diminué. Les ménages à bas revenus citent plus souvent leurs voisins comme étant les premiers responsables du bruit, de jour comme de nuit, alors que les ménages plus aisés évoquent plus souvent la circulation (voiture, train, avion, etc.).

En 2013, 7,7 % des ménages à bas revenus trouvent l’air de leur quartier de mauvaise qualité, contre 4,8 % des ménages modestes et 4,4 % des ménages plus aisés. L’opinion sur la qualité de l’air s’améliore quel que soit le niveau de vie, mais cette amélioration est un peu plus marquée pour les ménages plus aisés. Entre 2001 et 2013, la part des ménages ayant une mauvaise opinion sur la qualité de l’air de leur quartier baisse ainsi de 4,1 points pour les ménages à bas revenus et de 5,1 points pour les ménages plus aisés.

La différenciation selon le niveau de vie des ménages est relativement faible sur la question de la sécurité. En 2013, 8,9 % des ménages à bas revenus déclarent qu’au moins un de ses membres a été victime ou témoin d’un vol ou d’une agression dans son quartier au cours des douze derniers mois, contre 7,4 % des ménages plus aisés. Depuis 2001, cette part a un peu plus diminué pour les ménages les plus aisés (-4,1 points) que pour les ménages à bas revenus (-3,1 points). Le message est en partie différent quand on recueille l’opinion des ménages sur la sécurité de leur quartier. Les ménages à bas revenus sont sur ce point plus sévères que les autres. En 2013, 8,1 % des ménages à bas revenus ont une mauvaise opinion sur la sécurité de leur quartier, contre 4,2 % des ménages modestes et 3,6 % des ménages plus ais

Les ménages à bas revenus ont également davantage tendance que le reste de la population à ne pas se plaire dans leur quartier ou village. En 2013, 11,0 % ne s’y plaisent pas, contre 6,3 % pour les ménages modestes et 4,6 % pour les plus aisés.

Les ménages à bas revenus, comme l’ensemble de la population, se plaignent moins de leur quartier ou de leur village quand ils vivent dans des zones moins peuplées : en 2013, 13,4 % des ménages à bas revenus vivant dans des unités urbaines de plus de 100 000 habitants (y compris celle de Paris) déclarent ne pas se plaire dans leur quartier, contre 4,1 % de ceux vivant en commune rurale.

 

L’auto-entrepreneuriat a révolutionné la création d’entreprise 

La quasi-totalité des pays occidentaux ont institué des formules juridiques permettant d’assouplir l’exercice du travail qu’il soit ou non salarié. Les frontières entre ces deux formes d’activité se sont fortement atténuées. Ainsi, en France, la création du statut de l’auto-entrepreneur, en 2009 par le Ministre en charge des PME, Hervé Novelli, a modifié le rapport des Français à la création d’entreprise et a également dressé un pont entre le monde des non-salariés et des salariés.

En 2014, plus de la moitié des créations d’entreprises ont pris la forme d’immatriculation en tant qu’autoentrepreneurs (283 000 sur les 551 000 immatriculations d’entreprises enregistrées). Les enquêtes de l’INSEE soulignent la forte porosité entre le salariat et l’auto-entrepreneuriat.

La création d’entreprise, vecteur d’insertion dans le monde du travail

De plus en plus de jeunes s’immatriculent en tant qu’autoentrepreneur. La création d’entreprise peut intervenir durant la période de formation afin soit d’accroître les revenus, soitde mettre en pratique les enseignements reçus, les deux objectifs pouvant bien évidemment se cumuler. Après l’obtention d’un diplôme ou à la fin du cycle de formation, la création d’entreprise constitue un moyen de plus en plus usité pour s’insérer dans le monde professionnel. Près de 10 % des diplômés franchissent ainsi le cap. Les créateurs d’entreprises montent leur projet fréquemment seuls (6 % des cas) et investissent de faibles montants (dans 72 % des cas moins de 1 000 euros). Les activités de conseil représentent près de 30 % des créations.

Pour 55 % des créateurs, la principale motivation est de se créer un emploi permettant de générer des revenus. Les demandeurs d’emploi représentent 27 % des créateurs dont un tiers de longue durée. Sept sur dix créent une entreprise pour créer leur propre emploi et six sur dix soulignent leur désir d’indépendance ou de créer leur propre entreprise. Ils privilégient la création d’entreprises classiques : 33 % de sociétés et 28 % d’entreprises individuelles. Le statut de l’auto-entrepreneuriat est, pour le demandeur d’emploi, une solution temporaire en attendant soit un emploi salarié, soit la création d’une entreprise classique. 77 % recourent à l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprises (ACCRE) et 19% à l’aide à la reprise ou à la création d’entreprises (ARCE). Les moyens engagés sont plus élevés que pour les créateurs en activité de complément. 30 % investissent entre 4 000 et 16 000 euros, et 21 % plus de 16 000 euros. La majorité d’entre eux (62 %) exercent leur métier principal dans lequel ils sont généralement très expérimentés. La plupart n’ont pas de diplôme du supérieur : 27 % ont un CAP ou BEP, 22 % un baccalauréat et 16 % n’ont pas de diplôme qualifiant.

La création d’entreprise pour améliorer les revenus d’activité

L’auto-entreprenariat permet pour les salariés d’améliorer leurs revenus et de préparer le cas échéant une reconversion. Ainsi 19 % des créateurs d’entreprise sont des salariés en activité. Ils optent avant tout pour le statut de l’auto-entrepreneur. Les deux-tiers avouent qu’ils n’auraient pas créé d’entreprise sans ce régime. Les trois-quarts n’abandonnent pas leur activité salariée. Pour 50 % des salariés faisant ce choix, le premier objectif est d’augmenter leurs revenus.

Le cumul emploi / retraite passe de plus en plus par la création d’entreprise

Les retraités qui représentent 4 % des créateurs privilégient également le régime de l’auto-entrepreneur. Ce statut leur permet de compléter leurs revenus tout en conservant une forte liberté. C’est une des formules les plus utilisées pour le cumul emploi / retraite surtout pour les cadres supérieurs. 45 % des retraités affirment avoir créé une entreprise afin d’améliorer leurs pensions et 42 % pour conserver une activité intellectuelle.

Les créateurs experts

En 2014, 21 % des créateurs d’entreprise disposent d’un profil d’experts que ce soit au titre de leurs diplômes ou de leur parcours professionnel. La moitié d’entre eux a déjà créé une entreprise. Avant la création, la majorité étaient indépendants ou chefs d’entreprises. Leur nouvelle entreprise correspond le plus souvent à leur métier principal (64 %) et leur permet de créer leur propre emploi (59 %). Leur âge médian est relativement élevé, 44 ans contre 37 ans pour l’ensemble des créateurs. La société est la forme juridique privilégiée par 78 % de ces créateurs. Les moyens mobilisés au démarrage sont élevés : 42 % investissent plus de 16 000 euros et 26 % entre 4 000 et 16 000 euros. Ce profil-type semble associé à de plus fortes perspectives de croissance et d’emploi : 25 % de ces créateurs comptent embaucher à l’avenir (trois fois plus que dans les autres profils).