21 février 2015

Que faut-il attendre de l’euro et du pétrole ?

L’économie européenne bénéficie d’une série de chocs positifs qui cumulés devraient contribuer à accroître dans les prochains mois la croissance.

L’euro, un effet réel ou psychologique  ?

En moins d’un an, l’euro a perdu près de 20 % de sa valeur face au dollar et plus de 10 % en termes nominaux effectifs. Selon les modèles économétriques, cette dépréciation devrait provoquer un surcroit de croissance de 0,2 à 0,3 point de PIB sur 12 mois.

La dépréciation de la monnaie européenne améliore la compétitivité des produits et services des Etats membres exportés au-delà des frontières de la zone euro. Elle renchérit le coût des importations. Cet effet est, aujourd’hui, minimisé par la décrue des cours des matières premières et de l’énergie. Pour les pays qui importent beaucoup de produits intermédiaires comme l’Allemagne, il peut y avoir un surcoût non négligeable. C’est pour cette raison que ce pays est plutôt favorable à un euro fort. En outre, l’Allemagne qui est « price-maker » est moins intéressée que ses partenaires à jouer les prix à la baisse. En revanche, son commerce extérieur est désormais réalisé à 60 % en dehors de la zone euro ce qui n’est pas le cas d’un pays comme la France. De ce fait, l’Allemagne pourrait être le premier gagnant de la dépréciation de la monnaie comme semble le prouver les résultats des derniers mois.

Plusieurs modèles économétriques soulignent que les effets de change sont neutres sur longue période. Par le jeu des échanges commerciaux et des augmentations des salaires, il y a neutralisation de la dépréciation. Certes, avec un fort taux de chômage, les augmentations salariales sont plus que limitées. Il ne faut pas oublier que les exportations sont plus sensibles aux évolutions de la demande qu’à celles des taux de change.

La baisse du cours de l’euro va-t-elle se poursuivre ?

Le taux de change dépend tout à la fois des résultats du commerce extérieur et des fondamentaux économiques (croissance, emploi, inflation…) ainsi bien évidemment de la politique monétaire de la Banque centrale. Pa ailleurs, les investisseurs arbitrent en fonction des résultats économiques et des politiques des autres pays, en particulier, le Royaume-Uni et les États-Unis, principaux partenaires commerciaux de la zone euro. Ces derniers enregistrent une croissance plus élevée et leur banque centrale étudie la possibilité de relever leurs taux directeurs. De ce fait, tout concourt à la baisse du cours de l’euro. En cas de conflit ouvert avec la Grèce, la chute pourrait même être plus rapide. Nul doute que nul n’a envie d’engager une bataille monétaire où les perdants seraient nombreux.

Combien rapportera le choc pétrolier ?

En 1986, le contre-choc pétrolier avait relancé la croissance occidentale qui buta au mois d’octobre 1987 sur un krach dont l’ampleur et la soudaineté avaient étonné. Ce krach, fruit des débuts de la déréglementation et du début de la robotisation des opérations financières marque une rupture dans l’évolution économique de l’après seconde guerre mondiale. Il sera néanmoins vite oublié avec la chute du Mur de Berlin deux ans plus tard et l’arrivée sur la scène économique mondiale de la Chine. Dès 1987, l’Arabie Saoudite avait repris les reines des prix du baril. Près de trente ans plus tard, la répétition de ce scénario est-elle possible ? Il est certain que le contexte favorise une grande volatilité des cours des actions et des prix des matières premières. L’abondance des liquidités alimente les coups d’accordéon. Néanmoins, pour quelques mois encore, le prix du pétrole devrait se maintenir autour de 60 dollars. La baisse de 40 % du prix du baril devrait générer un surcroît de croissance de 0,4 à 0,8 point. Du fait de la forte sensibilité de l’économie américaine au pétrole, l’impact de la baisse se situerait dans le haut de la fourchette tout comme au Japon. Pour l’Europe, l’avantage devrait se situer entre 0,4 et 0,6 point. La consommation de pétrole représentait l’équivalent de 4,3 % du PIB outre Atlantique en 2013 contre  3,8 % du PIB au Japon et moins de 3 % du PIB en zone euro. En outre, pour l’Europe et le Japon, une partie de la baisse du cours du pétrole est effacée par la dépréciation de l’euro et du yen contre le dollar. La chute en termes réels du prix du baril est donc à relativiser une fois corrigée des variations monétaires.

La baisse des prix de l’énergie améliore le pouvoir d’achat des consommateurs et en particulier celui des Américains. De ce fait, ces derniers devraient être tentés d’acheter plus de biens importés en provenance d’Europe rendus moins chers par la dépréciation de l’euro. La forte croissance de l’économie américaine pourrait en outre déboucher sur des goulets d’étranglement favorisant les importations à la réserve près qu’il faut que les entreprises européennes puissent répondre à la demande.

En revanche, la baisse du cours du baril freine les investissements dans le secteur pétrolier qui avaient dopé la croissance ces dernières années et dont avaient profité certaines entreprises européennes.