Le coin de la conjoncture du 12 septembre 2015
La croissance est-elle menacée par l’inversion des flux de capitaux ?
Durant les années 2000, les investisseurs occidentaux ont choisi de placer un volume croissant de capitaux dans les pays émergents ce qui a conduit à l’accélération de la mondialisation et la croissance de l’économie mondiale. Ce choix était fondé du fait que la rentabilité du capital était plus forte au sein des pays émergents qu’au sein des pays occidentaux moyennant une prise de risques plus élevée.
Les pays émergents se sont ainsi constitués du fait des arrivées de capitaux et en raison d’abondants excédents commerciaux d’importantes réserves de changes qui ont été mobilisées pour freiner l’appréciation de leur monnaie. A cette fin, ils ont acquis des volumes importants de titres sans risque des pays occidentaux. Le circuit était relativement simple ; les pays dits avancés investissaient à risque et contribuaient à la croissance des émergents ; ces derniers finançaient les déficits publics des premiers.
Ce processus s’est déréglé à partir de 2012. Les pays émergents doivent faire face à un ralentissement de leur croissance avec en parallèle bien souvent une réduction de leurs excédents commerciaux. Pour lutter contre une dépréciation excessive de leur monnaie, ils recourent à leurs réserves de change pour la soutenir. Par ailleurs, du fait d’une rentabilité moindre, les investisseurs ne privilégient plus les pays émergents. En outre, à la recherche de meilleurs rendements et surtout de placements plus sûrs, les investisseurs locaux préfèrent placer leur argent sur des valeurs occidentales. Il en résulte une modification profonde des flux de capitaux qui joue contre la croissance de l’économie mondiale. En effet, la recherche de placements sans risque est devenue une préférence généralisée. Les pays émergents ne contribuent plus à la liquidité de l’économie mondiale, mission qui est de plus en plus remplie par les banques centrales occidentales.
La Chine a peut-être déjà touché le fond
Les statistiques économiques chinoises ne sont pas sans ombre. De plus en plus d’experts considèrent que le recul de la croissance a été beaucoup plus violent que ce que les pouvoirs publics ont bien voulu faire croire. Cette diminution serait surtout intervenue il y a de nombreux mois. Aujourd’hui, nous serions plutôt sur une correction statistique.
Dans les faits, la Chine aurait connu une phase de croissance très parallèle à celle des pays occidentaux. La grande dépression de 2008 / 2009 aurait été suivie d’une reprise rapide et forte. Le taux de croissance aurait atteint plus de 12 % en 2012 avant de diminuer à nouveau rapidement pour atteindre moins de 8 % en 2015. Tous les indicateurs prouvent que le ralentissement est marqué dès 2013. Les exportations, le crédit, l’investissement en construction sont en berne depuis trois ans.
Cet atterrissage brutal est tout à la fois l’expression de la stagnation du commerce international, de l’augmentation des coûts de production chinois et la réorientation de l’économie vers les services et la consommation. Pour certains, la Chine aurait déjà atteint un plancher et pourrait connaître un léger rebond dans les prochains mois tout en sachant que le taux de croissance a peu de chance de renouer avec les taux passés.
La Martinique, victime de la décroissance démographique
La Martinique est confrontée à un processus de diminution de sa population. En effet, après une période de forte croissance démographique des années 60 à 90, l’ile surnommé l’Ile aux Fleurs doit faire face à une érosion de sa population depuis 2006. Ainsi, le nombre d’habitants est passé de 292 000 à 397 000 de 1961 à 2006. En 2014, la Martinique ne comptait plus que 381 326 habitants. De 2006 à 2013, la population s’est contractée de 0,4 % quand elle a augmenté de 0,5 % sur la même période en France métropolitaine. Si le solde naturel reste positif, + 0,6 % soit plus que la moyenne française, + 0,4 %, en revanche, le solde migratoire est négatif, -1 % contre +0,1 % pour la métropole. Depuis 1974, le solde migratoire a toujours été négatif pour la Martinique. Il a varié de 0 entre 1982 et 1990 à -1 % de 1974 à 1992 puis depuis 2006. Ce solde migratoire est lié au départ des jeunes durant leurs études supérieures ainsi que ceux des jeunes actifs qui partent chercher un emploi en métropole. Cette émigration du travail concerne en premier lieu les hommes. La Martinique compte 54 % de femmes soit 2 points de plus que la moyenne nationale.
Le monde économique retient sa respiration
A l’occasion de sa réunion du 16-17 septembre, la FED présentera les nouvelles projections économiques. Ce grand rendez-vous trimestriel est souvent l’occasion pour les responsables de la politique monétaire d’annoncer des changements de politique.
Avant l’été, la probabilité d’une hausse en septembre était forte. A fin août, ces anticipations avaient pour dire disparu et la probabilité d’une telle décision n’est plus que de 16 %.
Le changement de pied est lié à l’effondrement de la bourse de Shanghai, ainsi qu’à la dévaluation annoncée par les autorités chinoises. Ces évènements ont provoqué de fortes variations des actions, des rendements obligataires et des taux de change.
Sur une base intra-journalière, le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans a atteint de 2,29 % le 5 août et est retombé à 1,90 % le 24 août. Quant à la parité euro-dollar, le point bas a été de 1,08 le 5 août à un point haut de 1,17 le 24 août.
Depuis le début de mois de septembre, le retour au calme semble être de rigueur. Les bons du Trésor américain sont revenus aux niveaux de début août, et le dollar est désormais marginalement moins cher face à l’euro.
Au niveau de l’inflation, les prix continuent d’évoluer très en-deçà l’objectif de la FED fixé à 2 % à moyen terme. L’inflation a été de 0,3 % en glissement annuel en juillet. La nouvelle baisse des prix de l’énergie devrait encore peser sur l’inflation dans les prochains mois.
Les Etats-Unis seraient toujours sur un, rythme de croissance inférieur à sa tendance de long terme ce qui pourrait inciter les autorités monétaires de différer le relèvement des taux.
De même, le taux de chômage de 5,1 % en août ne serait plus un bon indicateur. Il faudrait prendre en plus du taux de chômage, les indicateurs suivants comme les emplois à temps partiel contraints, le taux de chômage à long terme (27 semaines et plus) les taux de recrutement et de démission, la progression du salaire horaire des travailleurs non-cadres affecté à la production et le taux d’activité des personnes de 25 à 54 ans. En agglomérant ces données, la situation est moins favorable qu’il n’y paraît. Ainsi, le marché du travail ne connaîtrait aucune amélioration depuis le début de l’année.
Dans ces conditions, la FED devrait reporter à la fin de l’année sa décision de relèvement des taux. Néanmoins, pour se redonner des marges de manœuvre et pour prouver son indépendance et mettre un terme avec une longue attente, elle pourrait surprendre et opter pour le mouvement.