Le Coin des Tendances du 21 janvier 2017
Les différentes dimensions du revenu universel
Le revenu universel a été un des est au cœur du débat public. Son instauration est proposée non seulement par Benoît Hamon mais aussi par Gaspard Koenig qui dirige un centre de réflexion libérale, « Génération Libre » et qui fut un conseiller de Christine Lagarde quand cette dernière était Ministre de l’Économie. Il est également proposé par les écologistes et notamment par Yannick Jadot.
Qu’est-ce que le revenu universel également appelé revenu de base, revenu d’existence ou allocation universelle ? Le revenu universel dans sa version initiale consiste à verser à toutes les personnes majeures quel que soit leur niveau de ressources un revenu d’un montant identique sur une base individuelle et de manière inconditionnelle.
À partir de cette définition, différentes variantes de revenus universels ont été imaginées. Pour certains, le revenu universel a vocation à remplacer les minima-sociaux et plusieurs prestations sociales comme l’aide au logement ; pour d’autres, il s’agit d’un complément permettant d’assurer à tout un chacun un niveau digne de subsistance. Le versement du revenu universel peut être général ou limité à un public ciblé. Si les libéraux mettent en avant l’idée de responsabilisation des bénéficiaires, d’autres considèrent que ce revenu permet de tirer les conséquences d’une société où le travail se fera de plus en plus rare du fait de la digitalisation ou de la mondialisation. C’est un peu la suite du concept de partage du travail appliqué aux revenus. Le revenu universel est censé avoir une autre vertu, celle de ne pas dissuader le retour au travail. En étant versé de manière générale, la reprise d’un travail n’entraîne pas sa suppression.
Les objectifs du revenu universel
La France est aujourd’hui le pays d’Europe et de l’OCDE qui consacre la part la plus importante de sa création de richesses à la protection sociale, 690 milliards d’euros soit plus du tiers du PIB. Malgré cet effort important, 14 % de la population française vit en-dessous du seuil de pauvreté, soit 8,8 millions de personnes. Le nombre de personnes considérées comme pauvres a augmenté de 6 % depuis 2007. Le taux de pauvreté est de 17,7 % pour les moins de 18 ans. Il atteint 21 % chez les 18-24 ans pour descendre jusqu’à 6,6 % chez les 65-74 ans. À tout âge, le taux de pauvreté est en France nettement inférieur à celui constaté en moyenne au sein des 15 pays les plus riches de l’Union européenne.
4,1 millions de personnes résidents en France sont attributaires d’au moins une prestation relevant du minimum social. En intégrant les personnes à charges, ce nombre atteint 7,1 millions. De 2007 à 2014, les bénéficiaires de minimas sociaux ont augmenté de 27 %. La France compte 9 minimas sociaux (revenu de solidarité active, revenu de solidarité outre-mer, allocation de solidarité spécifique, allocation transitoire de solidarité, allocation temporaire d’attente, allocation veuvage, allocation supplémentaire invalidité, allocation adulte handicapé et allocation de solidarité pour les personnes âgées. In fine, une personne célibataire âgée de 25 à 65 ans peut toucher un revenu minimum de 785 euros. Une personne de plus de 65 ans peut recevoir 1 100 euros (minimum vieillesse et allocations logement).
A ces minimas, il faut ajouter certaines prestations et services comme les allocations familiales, la gratuité de l’éducation, l’assurance-maladie, la CMU et la CMUC. Il faut également prendre en compte certaines prestations sociales sous conditions de ressources, la prime d’activité, allocations de rentrée scolaire ou les aides logement. Enfin, au niveau des communes et des départements, des prestations sont également proposées pour les personnes à bas revenus : gratuité des transports, gratuité des équipements sportifs et culturels, aide sociale à l’enfance, etc.
Les tenants du revenu universel mettent en avant le caractère complexe de ces allocations et prestations qui obligent leurs bénéficiaires à remplir des dossiers. Ils considèrent que de nombreuses personnes n’y ont pas accès à défaut d’avoir connaissance de leurs droits ou en raison de la complexité des dossiers à constituer. 35 % des bénéficiaires du RSA ne le recevraient pas (Dominco et Pucci – 2012).
Par ailleurs, certaines populations ne peuvent pas accéder aux minimas sociaux ou de manière trop partielle. Les jeunes de 18 à 25 ans, les handicapés et un certain nombre de personnes âgées non propriétaires de leur résidence principale peuvent se retrouver en situation d’extrême pauvreté. Les familles monoparentales avec un ou plusieurs enfants à charge peuvent également être nettement en-dessous des seuils de pauvreté.
Le revenu universel consiste à tirer les conséquences de la fin du travail et de la transition vers une société post-salariale.
Pour certains experts économiques et également pour certains responsables politiques, le déficit d’emplois est censé être durable en raison de la robotisation et de la digitalisation. Une telle théorie avait déjà corps lors de l’apparition des machines à tisser, du développement du travail à la chaîne au début du 20ème siècle et de leur robotisation à partir des années 80. Avec le vieillissement de la population, le problème n’est pas l’excès de travailleurs mais bien leur nombre insuffisant. Malgré la crise, le taux d’emploi en France des plus de 15 ans est au même niveau depuis plus de trente ans. Le taux d’emploi des femmes et des seniors a progressé ces dernières années. En Allemagne, en République tchèque, au Royaume-Uni, le plein emploi est la règle. Néanmoins, pour les tenants de la fin du travail, il est important de déconnecter les revenus du travail. C’est la suite logique voire le parachèvement de la réduction du temps de travail.
Le revenu universel ne serait-il pas la reconnaissance d’une incapacité à insérer professionnellement une partie de la population ? Il pourrait accentuer la segmentation de la population.
Le revenu favoriserait l’augmentation des salaires des emplois non-qualifiés. Du fait de la concurrence qu’imposerait en termes de ressources, le revenu universel obligera les employeurs pour les emplois les moins bien payés et les plus pénibles à offrir de meilleures conditions. Néanmoins, le revenu universel pourrait accentuer la substitution du robot à l’homme afin d’éviter les surcoûts salariaux et pour limiter le poids des charges qui devraient augmenter pour en assurer le financement. Certains imaginent afin de contrecarrer cette tentation de taxer les robots, une vieille antienne.
Quel montant pour le revenu universel ?
Pour ne pas pénaliser les bénéficiaires des minimas sociaux, le revenu universel devrait être en France de 785 euros par mois. Accordé à titre individuel, en toute logique, il faudrait l’attribuer également aux enfants à un montant au moins égal à 40 % de la prestation des adultes soit 315 euros. Pour les plus de 65 ans et les handicapés, le revenu universel devrait être, selon l’OFCE, de 1100 euros toujours avec comme objectif de ne pas provoquer un manque à gagner par rapport à leur situation actuelle. Le coût brut serait dans ces conditions de 588 milliards d’euros. En supprimant les minimas sociaux, le quotient conjugal et le quotient familial, il est ainsi possible d’économiser 119 milliards d’euros aboutissant à un coût net de 480 milliards d’euros soit 22 points de PIB ou 35 points de CSG.
Pour le financement, certains évoquent la création monétaire (ce qui suppose de changer quelques règles…), la création de taxes écologiques, la suppression des dépenses fiscales, un alourdissement de la fiscalité du patrimoine.
Un assujettissement à l’impôt sur le revenu de ce revenu permettrait d’en recouvrer pour l’Etat une partie. Ce sont les classes supérieures mais aussi moyennes qui seraient les plus pénalisées en supportant une augmentation de leurs prélèvements et en supportant les nouvelles taxes nécessaires pour le financer.
Les gagnants de l’opération seraient les jeunes de 18 à 25 ans, les étudiants, les demandeurs d’emploi en fin de droits ainsi que les inactifs. Le simple fait de verser 500 euros aux étudiants coûterait 15 milliards d’euros. Les autres gagnants seraient les familles à revenus modestes ayant plusieurs enfants. En revanche, pour les retraités, une telle réforme serait neutre.
Les comptes et mécomptes du revenu universel
En retenant un revenu universel compris entre 700 et 800 euros, le coût global pourrait atteindre de 550 à 630 milliards d’euros s’il était distribué à l’ensemble des Français (66 millions) soit de 25 à 28 % du PIB.
En contrepartie, certaines prestations pourraient être supprimées. Mais les suppressions ne compenseraient pas le surcoût. Pourraient être ainsi concernées les indemnités chômage (2 % du PIB), les aides à la famille et au logement (3,4 % du PIB), une partie des dépenses du Fonds de Solidarité Vieillesse (minimum vieillesse). En net, le coût du revenu universel pourrait varier de 17 à 23 % du PIB soit de 370 à 500 milliards d’euros.
Le revenu universel dans le débat de la primaire de la gauche
Benoît Hamon, candidat à la primaire de la gauche, a proposé la création d’un revenu universel qui serait réservé dans un premier temps aux jeunes 18 à 25 ans, quel que soit leur niveau de ressources. Il demande la mise en place d’une grande conférence citoyenne qui aura pour mission de fixer le périmètre du revenu universel (montant, financement, articulation avec les autres allocations sociales, calendrier de mise en œuvre). Il considère que le revenu universel pourrait être généralisé d’ici 2022 après l’organisation d’expérimentation. Son revenu universel ne le serait pas totalement. Il ne serait octroyé qu’aux personnes touchant moins de 2000 euros de revenus pas mois. Le coût de cette mesure serait de 19 à 40 milliards d’euros pour la version jeune et de 300 à 450 milliards d’euros après sa généralisation. Le revenu d’existence serait fixé à 750 euros et remplacerait les minima sociaux, les prestations familiales, les aides au logement (mais pas les aides compensatoires spécifiques, comme l’allocation handicapés). Benoît Hamon prévoit la création d’un nouvel impôt sur le patrimoine issu de la fusion entre la taxe foncière et l’ISF.
La vision libérale du revenu universel
Gaspard Koenig propose un revenu universel sans condition de 480 à 500 euros (270 euros entre 14 et 18 ans, 200 euros en dessous de 14 ans). Pour financer son revenu universel, Gaspard Koenig prévoit l’instauration d’une taxe de 23 à 25 % applicable au premier euro gagné, et qui se substituerait à l’impôt sur le revenu. Par ailleurs, il prévoit de supprimer ou de modifier les prestations sociales suivantes : le Revenu de solidarité active, l’Allocation de solidarité spécifique, le Revenu de solidarité (outremer), l’Allocation temporaire d’attente, la Prime transitoire de solidarité, l’Allocation veuvage, l’Allocation supplémentaire d’invalidité, Prime d’activité, l’Allocation de rentrée scolaire, les allocations familiales, le Complément familial, l’Allocation de solidarité aux personnes âgées, l’Allocation aux adultes handicapés, l’Allocation d’éducation de l’enfant handicapé, l’Allocation pour demandeur d’asile, les Prestations d’accueil du jeune enfant. Son objectif est de responsabiliser les bénéficiaires des minimas sociaux et d’éviter les effets de seuil.
Les exemples étrangers
Des expérimentations ont été menées dans certains États ou villes aux États-Unis (New Jersey, Pennsylvanie, Indiana, Caroline du Nord, Seattle et Denver). L’État fédéré américain de l’Alaska et la région administrative de Macao sont les exemples les plus aboutis de distribution d’un dividende généralisé à leur population. Ces dividendes proviennent de la rente issue de l’exploitation du pétrole en Alaska, des jeux de hasard à Macao. « L’Alaska permanent fund » qui a été créé en 1976 afin de générer des revenus destinés à être réinvestis dans l’économie et distribuer l’allocation annuelle (dividende). En juillet 2015, la valeur de ce fond atteignait 52,8 milliards de dollars, générant un revenu annuel net de 2,90 milliards de dollars. Sur cette somme, 1,33 milliard de dollars sont répartis entre 644 511 bénéficiaires qui ont ainsi chacun perçu une somme de 2 072 dollars, Cette somme est soumise à l’impôt fédéral. À Macao, depuis 2008, chaque allocataire a perçu entre 610 et 1020 euros par an.
En Inde, à partir de 2012 et pendant environ dix-huit mois, il a été institué une allocation universelle au profit des habitants de plusieurs villages de l’État de Madhya Pradesh. 200 roupies étaient versées à chaque adulte et 100 roupies à chaque enfant. Au total, 6 000 personnes ont pu bénéficier de ce programme. Les résultats de l’expérimentation ont fait l’objet d’une exploitation statistique sous l’égide de la Fondation des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF).
L’Iran est passé en 2010 d’un système de subvention à l’achat des produits de première nécessité (pain, lait, huile, sucre, farine…) à une allocation unique versée en espèces bénéficiant à plus de 95 % de la population.
En Europe, depuis le 1er janvier 2017, une expérimentation est en cours en Finlande concernant 2000 individus âgés de 25 à 58 ans en recherche d’emploi. Un revenu de base inconditionnel de 560 euros par mois, non soumis à l’impôt, leur est versé pendant la période d’expérimentation, même si les bénéficiaires reprennent un travail rémunéré. Le coût total de cette expérimentation serait de 7 millions d’euros sur deux ans. La généralisation de l’expérience en cours coûterait 15 milliards d’euros par an (à comparer à un budget de l’État finlandais de 60 milliards d’euros et un PIB de 210 milliards d’euros.
Aux Pays-Bas, dans plusieurs communes (Utrecht, Groningen, Tilburg et Wageningen) des réflexions sont engagées sur un revenu conditionnel non dégressif et des expérimentations sont envisagées (source : Rapport du Sénat 2016) À Utrecht, le projet d’expérimentation, dénommé « Weten wat work » (« Savoir ce qui fonctionne »), se présente d’abord comme un moyen de dépasser les limites actuelles de la loi dite de « participation », qui conditionne le versement de certaines allocations à des démarches administratives ainsi qu’à des recherches de formations ou d’emplois. Dans cette ville de 340 000 habitants, 9 800 personnes perçoivent le revenu minimum d’insertion prévu par la loi (900 euros par mois à caractère dégressif en fonction des autres revenus du bénéficiaire), que la commune verse pour le compte de l’État tout en menant des actions d’insertion. C’est sur un échantillon d’environ 500 personnes tirées au sort parmi les bénéficiaires de cette allocation, mais avec leur accord, que les autorités municipales entendent tester pendant deux ans plusieurs variantes de revenu sur quatre groupes d’une centaine d’individus.
Le revenu universel pose donc plusieurs problèmes, celui du financement et celui du rôle du travail ainsi que la notion d’assistance au sein de la société. Les tenants et les opposants de ce revenu universel peuvent à loisir fonder leur argumentation en ayant recours au préambule de notre actuelle constitution. Ainsi, l’article 5 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946 intégré au texte fondamental de 1958 souligne « chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances » quand l’article 11 de ce même préambule indique que la nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ».
Le travail au noir dévoilé
La Délégation Nationale de Lutte contre la Fraude et la Direction Générale de l’Emploi ont mené une enquête, avec l’appui du CREDOC, pour apprécier l’importance, en France, du travail non déclaré en particulier dans le secteur des services à la personne. Afin d’obtenir des résultats les plus fiables possibles, les deux services administratifs ont eu recours à un questionnaire garantissant l’anonymat et la confidentialité des réponses. Par ailleurs, ils ont décidé d’interroger toutes les catégories de la population afin d’avoir une vision à 360 degrés de la fraude.
3,9 % de la population interrogée reconnaît avoir travaillé de manière dissimulée en 2015 et 8,6 % des personnes interrogées admettent avoir travaillé sans être déclaré entre 2012 et 2015. 20 % des utilisateurs de services à la personne auraient recours à des emplois non déclarés en 2015. Également 20 % des répondants ayant eu recours au travail d’une personne à domicile au cours du mois précédent l’enquête reconnaît ne pas avoir déclaré toutes les heures effectuées. 27 % des travailleurs non déclarés exercent dans les services à la personne.
L’activité dissimulée constitue, dans la majorité des cas, un second emploi, le plus souvent à temps partiel. 53 % des travailleurs dissimulés sont des salariés ou exercent une activité pour leur propre compte, 21 % sont demandeurs d’emploi, 18,2 % sont étudiants et 7,8 % sont retraités ou personnes au foyer. Près de la moitié des travailleurs non déclarés exercent une activité dissimulée depuis plus de cinq ans.
Les secteurs les plus touchés sont la construction (21 %), l’hébergement et la restauration (20 %), ainsi que les arts et spectacles (9 %). Ces trois secteurs représentent la moitié du travail non déclaré. Ce classement est très différent de la réalité de l’emploi déclaré pour lequel ces trois secteurs ne couvrent que 14 % de la masse salariale du secteur privé (ACOSS, 2016).
La rémunération horaire pour le travail dissimulé est en moyenne de 10 € de l’heure, c’est-à-dire supérieure au SMIC horaire (au 1er janvier 2015, le SMIC horaire était de 7,53 euros net) et très proche du salaire horaire déclaré net donné par l’enquête (11 euros). La première des motivations avancées pour l’exercice d’une activité dissimulée est d’obtenir un complément de revenus. 43 % des fraudeurs expliquent également qu’ils n’ont pas eu le choix. Enfin, trois fois sur quatre, le travail non déclaré a été obtenu par le biais d’un proche ou d’une connaissance.
Bien que recueillies de manière très différente de l’enquête précitée, les données de l’étude DARES présentent des taux de fraude très proches : « 25 % des ménages utilisateurs auraient eu recours à des emplois non déclarés en 2011 ». La DARES avait noté un début de tendance à la baisse depuis 2005, de l’ordre de -3 points. L’enquête pilote s’étant déroulée en 2015, le taux plus faible de fraude de 20 % peut se lire comme le prolongement de la baisse déjà enregistrée entre 2005 et 2011. Autre fait concordant, 38 % des personnes ayant fraudé entre 2012 et 2015 indiquent l’avoir fait moins souvent que par le passé contre seulement 19 % affirmant le faire plus souvent. Ce recul de la fraude dans le secteur, conjugué au recul des heures déclarées, irait plutôt dans le sens d’un effet pro-cyclique du recours au travail dissimulé. Le volume d’heures dissimulées représente au total 15,6 % des heures rémunérées : 3 % ont été réalisées en complément d’heures déclarées, 12,6 % se rapportent à un travail entièrement dissimulé.
Sur l’ensemble des services à la personne, deux profils d’utilisateurs se distinguent : d’un côté, les retraités qui déclarent principalement du ménage, du jardinage et de l’aide à domicile ; de l’autre des personnes actives de plus de 40 ans ayant recours à la garde d’enfants, et dans une moindre mesure au ménage et au bricolage. La fraude est plutôt le fait des classes moyennes supérieures (31 % des fraudeurs), ce qui correspond au profil des utilisateurs de SAP.
La sous-déclaration concerne la garde d’enfants à domicile (42 %) davantage que l’aide à domicile (9 %) ou le ménage (13 %). Les raisons invoquées pour ne pas déclarer les activités de services à domicile sont assez rarement financières : seuls 15 % des personnes interrogées disent le faire pour éviter les prélèvements obligatoires, comparés aux 23 % invoquant la simplicité des démarches et surtout aux 31 % d’individus considérant rendre service à une connaissance. Selon France Stratégie, « l’emploi non déclaré est particulièrement élevé dans les SAP, qui renvoient traditionnellement à des activités effectuées dans la sphère personnelle, soit par les individus eux-mêmes pour leur propre consommation, soit par des proches dans le cadre de solidarités de proximité ».
L’emploi d’une personne à domicile sans la déclarer et l’exercice d’une activité dissimulée sont jugées moins risqués que de ne pas déclarer l’ensemble de ses revenus aux impôts ou de percevoir indûment des prestations sociales. La fraude la plus grave serait de percevoir des prestations sociales auxquelles on n’aurait pas droit.
Le travail au noir est donc relativement bien accepté par l’opinion sauf s’il s’accompagne d’une fraude sociale. Cette situation explique l’effet immédiat d’un durcissement du régime fiscal et social pour les emplois à domicile.