Le programme présidentiel d’Emmanuel Macron
Le programme économique et social de Macron
Emmanuel Macron a présenté jeudi 2 mars dernier son programme présidentiel qui s’articule autour de « six chantiers » : éducation et culture, société du travail, modernisation de l’économie, sécurité, renouveau démocratique et international.
Au niveau du cadrage budgétaire, le candidat s’inscrit dans le prolongement de l’action conduite par François Hollande. Il prévoit une réduction progressive des déficits publics à 1,0 % en 2022, une réduction de trois points de la part des dépenses publiques dans le PIB en cinq ans et se donne pour objectif de ramener le taux de chômage à 7% en fin de quinquennat. Pour financer son programme présidentiel et respecter le cadrage budgétaire ci-dessus, il s’est engagé à réaliser 60 milliards d’euros d’économies qui n’ont pas été, pour le moment, détaillé. Il a néanmoins indiqué qu’il réduirait le nombre de fonctionnaires de 120 000. Ses réductions de poste ne concerneraient ni l’éducation, ni la sécurité.
Cet article détaille plus précisément les propositions d’Emmanuel Macron qui concernent l’économie et la protection sociale.
Les mesures concernant l’emploi
L’allègement du coût du travail
Les cotisations sociales employeurs seraient réduites de 6 points en remplacement du CICE, et jusqu’à 10 points au niveau du SMIC. L’équipe du candidat a chiffré que cette mesure pourrait générer une économie de 1 800 euros par an et par salarié payé au SMIC et 2 200 euros par an pour un salarié payé 3 000 euros bruts par mois.
« Une assurance-chômage universel »
Emmanuel Macron propose une réforme de l’assurance-chômage. Elle ne serait plus financée par des cotisations sociales mais par l’impôt. Elle ne serait plus liée au statut de salariés. Elle reposerait sur un droit universel ouvert à tous les actifs, salariés, commerçants, artisans, indépendants. Les salariés qui démissionnent pourraient y avoir accès sous certaines conditions. Ce droit ne serait utilisable qu’une fois tous les cinq ans. L’insuffisance des efforts de recherche d’emploi ou le refus d’offres raisonnables entraîneront la suspension des allocations.
Un bonus – malus pour les entreprises
Le programme d’Emmanuel Macron prévoit la création d’un bonus-malus sur l’assurance-chômage. Les employeurs qui entretiennent la précarité en recourant exagérément aux contrats courts paieront plus de charges, ceux qui créent des emplois stables en paieront moins.
Des aides pour l’embauche dans les quartiers difficiles
Le programme prévoit l’instauration d’incitations en faveur des entreprises qui embauchent en CDI dans 200 quartiers qualifiés de prioritaires. Elles bénéficieront d’une prime de 15 000 euros sur trois ans pour tout recrutement.
La formation, une priorité affichée
Après le plan « 500 000 formations pour les chômeurs » lancé par le Gouvernement de Manuel Valls, Emmanuel Macron s’engage à former un million de jeunes et un million de demandeurs d’emploi peu ou pas qualifiés. Le candidat à la présidentielle a également émis l’idée de modifier la gouvernance de la formation professionnelle qui est aujourd’hui paritaire.
Reconnaissance affirmée des accords d’entreprise
Si les principes fondamentaux (durée légale du temps de travail, égalité professionnelle, salaire minimum, etc.) relèveront du domaine de la loi, d’autres champs comme les horaires effectifs ou l’organisation du travail relèveront du domaine de la négociation au niveau des entreprises. Emmanuel Macron souhaite la multiplication des accords d’entreprise qui pourront être adoptés dans le cadre de la négociation entre partenaires sociaux ou par référendum d’entreprise.
L’égalité homme / femme
Le candidat souhaite que les noms des entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale entre les femmes et les hommes soient publiés.
L’amélioration du pouvoir d’achat des actifs
Emmanuel Macron entend augmenter le pouvoir d’achat des actifs en réduisant les cotisations sociales payées par les salariés. Cette mesure d’allègement des charges s’appliquera également aux indépendants et aux fonctionnaires. Il promet un gain de près de 500 euros nets par an pour un salaire de 2200 euros nets par mois. Les salariés rémunérés au SMIC bénéficieraient d’une prime d’activité de 100 euros nets de plus chaque mois. Il suggère, par ailleurs, de rétablir les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires.
Pour financer ces mesures, la CSG serait augmentée de 1,7 point. L’assiette de la CSG étant plus large que celle des cotisations sociales, cela aboutirait à alourdir les prélèvements sur les revenus de l’épargne qui ont été fortement accrus, par ailleurs, ces dix dernières années.
L’augmentation de la CSG
La suppression de la totalité des charges au niveau du SMIC, des cotisations s’assurance maladie et la suppression des cotisations chômage serait financée par une augmentation de 1,7 point de la CSG, augmentation qui ne concernerait ni les demandeurs d’emploi ni les retraités modestes.
Soutien à l’investissement et à l’économie
Un plan d’investissement de 50 milliards d’euros
Emmanuel Macron propose de lancer un grand Plan d’investissement de 50 milliards d’euros. Ce plan sur 5 ans devrait avoir comme objectifs : l’amélioration des qualifications de tous les citoyens, la transition écologique, la révolution numérique, la modernisation des services publics et la rénovation urbaine.
Un effort financier pour moderniser l’agriculture française
Dans le cadre du plan d’investissement, 5 milliards d’euros seraient consacrés à la modernisation des exploitations agricoles. Des mesures seraient prises afin de faciliter les négociations avec les industriels et les distributeurs afin de garantir un niveau convenable de prix.
Un Fonds pour l’industrie et l’innovation
Le candidat entend créer un Fonds pour l’industrie et l’innovation doté de 10 milliards d’euros issus des actions d’entreprises possédées de manière minoritaire par l’État.
Parmi les actions de ce fond figurera la lutte contre les perturbateurs endocriniens et les pesticides, responsable à ses yeux de l’augmentation des cancers des enfants depuis 20 ans.
L’amélioration des logements
Toujours dans le chapitre de l’investissement, il prévoir de rénover 1 million de logements mal isolés d’ici 2022, et en priorité ceux des propriétaires les plus modestes.
Le développement durable
Le candidat place au cœur de ses priorités la recherche sur la transition environnementale. A cette fin, il encouragera l’accueil des spécialistes étrangers. Il a également annoncé une série de mesures pour lutter contre la pollution atmosphérique.
Le digital
Le candidat entend créer une banque de données numériques. Les administrations chargées d’autoriser des activités (l’ouverture d’un hôtel, ou l’obtention d’une licence de chauffeur privé, etc.) devront mettre à disposition leurs données.
La fiscalité
La fiscalité des entreprises
Emmanuel Macron a annoncé qu’il baissera le taux de l’impôt sur les sociétés de 33,3 % à 25 %. Cette mesure s’inscrit dans le prolongement de celle annoncée den 2015 par François Hollande. Le candidat du mouvement « En marche ! » souhaite imposer les groupes de l’Internet sur leur chiffre d’affaires réalisé en France.
La lutte contre la fraude fiscale
Emmanuel Macron souhaite renforcer la lutte contre la fraude fiscale et aux prestations sociales.
La fiscalité du patrimoine
Emmanuel Macron prévoit de transformer l’SF en un « Impôt sur la Fortune Immobilière » sans pour autant accroître la fiscalité actuelle sur l’immobilier et les droits de succession.
La fiscalité de l’épargne financière : un prélèvement libératoire à 30 %
Le programme d’Emmanuel Macron prévoit l’instauration d’un prélèvement unique sur les revenus du capital, de l’ordre de 30 % qui remettrait en cause les régimes particuliers dont bénéficient notamment l’assurance-vie (taxation de 7,5 % après huit ans + 15,5 % de prélèvements sociaux). Actuellement, plus de 60 % des titulaires d’un contrat d’assurance-vie bénéficient de ce taux de 7,5 % et seraient donc pénalisés par la réforme d’Emmanuel Macron. Avant la présentation de son programme, il avait indiqué que les mesures concernant l’assurance-vie ne seraient pas rétroactives.
La fiscalité locale et l’étatisation de la taxe d’habitation
Emmanuel Macron souhaite supprimer le paiement de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages. L’Etat compenserait le manque à gagner pour les collectivités locales par une dotation. Même si le candidat affirme vouloir garantir l’autonomie fiscale, cette étatisation d’un des plus importants impôts directs locaux aboutira à ce que les collectivités locales soient financées à plus de 50 % par le contribuable national. Au niveau de l’organisation territoriale, Emmanuel Macron propose la suppression d’au moins un quart des départements (au profit des grandes métropoles).
Pour une augmentation de la fiscalité environnementale
La fiscalité verte devrait, selon le candidat, rapporter 12,5 milliards d’euros de plus d’ici 2022. Le candidat est favorable à une hausse de la taxe carbone qui atteindrait 100 euros la tonne contre 30 aujourd’hui. Il souhaite également l’alignement de la fiscalité du gazole sur celle de l’essence. Il entend aussi favoriser la conversion du parc automobile avec la réduction du nombre des vieux véhicules diesel. En cinq ans, les taxes sur les carburants pourraient augmenter jusqu’à 9 centimes par litre. Pour le gazole, la hausse serait de plus de 20 centimes.
La protection sociale
Pour l’instauration d’un régime unique de retraite
Emmanuel Macron reprend à son compte l’idée de la création d’un régime unique de retraite qui absorberait les différents régimes de base et les régimes complémentaires. Même si sa proposition n’est pas détaillée, il penche en faveur d’un système en compte notionnel sur le modèle suédois. Le montant de la pension serait alors calculé en prenant en compte l’espérance de vie à la retraite. Il préconise la mise en place d’un « système universel avec des règles communes de calcul des pensions ». L’instauration de ce nouveau régime serait réalisée en dix ans. Le fait de changer d’activité ou de secteur serait sans effet sur les droits à la retraite. Emmanuel Macron a fixé comme un principe, « pour chaque euro cotisé, le même droit à pension pour tous ». En revanche, il a affirmé qu’il ne toucherait pas à l’âge de départ à la retraite, ni au niveau des pensions. Sur le premier point, cela le distingue de François Fillon qui entend reporter l’âge de la retraite à 65 ans quand Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont pour le retour de l’âge à la retraite à 60 ans.
La suppression du Régime Sociale des Indépendants
Le régime Social des Indépendants sera supprimé. Les plafonds pour pouvoir bénéficier du régime fiscal de la micro-entreprise seront doublés. Les artisans et les commerçants pourront opter, selon leurs besoins, pour le régime fiscal de la micro-entreprise.
L’augmentation de certaines prestations sociales
Emmanuel Macron propose une augmentation du minimum vieillesse de 100 euros par mois. Il souhaite créer un versement social unique. Toutes les allocations sociales (APL, RSA, etc.) seraient versées le même jour du mois, un trimestre maximum après la constatation des revenus (contre jusqu’à 2 ans aujourd’hui).
Les mesures concernant la santé
Emmanuel Macron a réaffirmé son intention d’instituer une prise en charge à 100 % des lunettes et des prothèses auditives et dentaires d’ici 2022, en lien avec les mutuelles et l’ensemble des professionnels de santé. Il n’a pas précisé comment ce surcroît de dépenses sera financé. Il a prévu de consacrer 5 milliards d’euros de son Plan d’investissement à la santé, notamment à la transformation de la médecine de ville et des hôpitaux. Il veut la création d’un service sanitaire constitué de 40 000 étudiants en santé qui consacreront 3 mois à des actions de prévention dans les écoles et les entreprises. Le nombre de maisons de santé sera doublé afin de lutter contre les déserts médicaux.
L’Outre-mer
Emmanuel Macron a réaffirmé son souhait de développer la continuité territoriale au profit de l’Outre-mer. D’ici la fin du quinquennat, il s’engage à ce que les ultra-marins puissent accéder à au moins 200 000 billets d’avion à prix aidé en particulier pour les étudiants et les entrepreneurs. Il prévoit la création, en Outre-mer, de l’Agence Française pour la biodiversité. Il autorisera les collectivités d’outre-mer à modifier la réglementation de droit commun pour l’adapter à leur situation particulière. Il convient de la signaler que cette possibilité est, en partie, déjà reconnue mais que les collectivités territoriales l’utilisent peu.