Point de conjoncture de la rentrée
La croissance de l’économie mondiale est-elle solide ?
La croissance de l’économie mondiale en 2017 devrait être supérieure à 3 % grâce à la reprise confirmée au sein de l’Union européenne et la forme retrouvée des pays émergents. Certes, la croissance est loin d’avoir retrouvé son rythme d’avant crise (plus de 4 %) mais elle se maintient sur la crête des 3 % depuis deux ans. Une légère accélération pourrait intervenir dans les prochains mois. Avec la fin de la récession au Brésil et en Russie, tous les grands pays ont renoué avec la croissance. L’activité mondiale bénéficie d’un contexte favorable reposant sur une série de facteurs exceptionnels.
A l’échelle mondiale, dix ans après le début de la crise financière, la politique monétaire reste très accommodante. Les taux d’intérêt demeurent à des niveaux anormalement bas au regard des taux de croissance constatés. Les politiques des banques centrales contribuent au maintien de taux faibles auxquelles se surajoute l’aversion des investisseurs aux risques. Ces derniers recherchent les produits jugés les plus sûrs, les obligations des Etats bien notés ce qui entraîne une baisse de leur taux de rendement.
Ces taux bas favorisent le crédit au risque d’entraîner des déséquilibres et des bulles spéculatives dans certains pays. Même en Europe, après de longues années de recul ou de stagnation, l’investissement repart que ce soit de la part des entreprises ou des ménages.
La croissance est également alimentée par le maintien d’une politique budgétaire expansionniste. Le déficit public mondial reste proche de 3 % du PIB quand l’endettement public mondial s’élève à plus de 80 % du PIB.
Le niveau de profitabilité des entreprises s’est redressé depuis 2009 même s’il reste nettement en-deçà de celui d’avant crise. En 2017, il s’élève à l’échelle mondiale à 15,5 % du PIB contre 17 % il y a dix ans. L’investissement des entreprises est reparti à la hausse en passant de 24 à 24,5 % du PIB de 2015 à 2017. Il y a dix ans, ce ratio dépassait 25 % du PIB. Depuis le milieu de 2016, les capitaux sont revenus vers les pays émergents favorisant l’enclenchement d’un cercle vertueux fondé sur la réappréciation du taux de change, la baisse de l’inflation, la diminution des taux d’intérêt et la hausse de l’investissement.
Le pétrole s’est stabilisé à un cours assez consensuel. Sa chute au début de l’année 2016 à 27 dollars le baril s’était avérée contreproductive pour les pays producteurs et pour le secteur pétrolier. Depuis le milieu de l’année dernière, son cours évolue autour de 50 dollars. Ce taux est faible compte tenu de la reprise de l’activité mondiale qui conduit à une demande de plus en plus forte. La montée en puissance des pétroles alternatifs qui sont de moins en moins coûteux à produire rend possible cette stabilisation des cours. Cette situation favorise les pays européens, le Japon et les pays émergents non producteurs. Compte tenu de l’importance des stocks de pétrole au sein de l’OCDE (plus de 4,7 milliards de baril en 2017, soit son plus haut niveau depuis 15 ans), une brusque remontée des cours n’est pas envisagée à court terme.
Les agents économiques ont retrouvé le moral. C’est le cas en particulier en Europe qui est, il ne faut pas l’oublier, la principale zone commerciale mondiale. L’Europe a, par ailleurs, accumulé un retard de croissance ces dix dernières années qui pourrait donner lieu à une compensation d’ici à 2022. Le retard concerne, en premier lieu, la digitalisation de l’économie.
La croissance de l’économie mondiale bénéficie également de l’expansion retrouvée de plusieurs Etats africains ainsi que de la bonne tenue de l’activité en Inde. L’atterrissage de la Chine apparaît pour le moment très maîtrisé même si des inquiétudes se font jour en raison de la montée de l’endettement.
La reprise du commerce international après plusieurs années de stagnation voire de recul symbolise le renouveau de l’économie mondiale. Même si les déséquilibres restent importants (excédents chinois et allemands face aux déficits américains, britanniques ou français), quelques progrès ont été constatés pour leur éventuelle résorption. L’augmentation de la demande intérieure en Chine et en Allemagne constitue un point positif.
Cette restauration de la croissance est-elle pérenne ? La reprise de l’investissement permet de le croire. L’existence de plusieurs pôles de croissance est un signe encourageant. Néanmoins, plusieurs menaces doivent être prises en compte.
Au niveau géopolitique, la crise américano-nord-coréenne semble être contenue et largement théâtralisée. En ce qui concerne le Moyen-Orient, si sur le terrain, Daech est affaibli, ses capacités à téléguider des attentats sur le sol de ses ennemis semblent encore fortes. Cette situation pénalise le secteur touristique et les transports.
Si l’arrivée de Donald Trump avait été saluée par les marchés, le Président des Etats-Unis inquiète de plus en plus en raison de ses déclarations fracassantes et de la succession de démissions au sein de ses conseillers. Des doutes de plus en plus sérieux apparaissent sur sa capacité à réformer le pays. Par ailleurs, en raison de ses prises de positions au niveau du commerce mondial, certains craignent un ralentissement de ce dernier.
Le maintien d’un niveau élevé d’endettement en Occident comme au sein de nombreux pays émergents constitue une menace réelle. Il impose un pilotage fin des politiques monétaires par les grandes banques centrales. L’arrêt des rachats par la BCE annoncé pour la fin de l’année alimente depuis plusieurs semaines un mouvement d’appréciation de l’euro qui pourrait nuire à la croissance européenne.
L’incapacité des banques centrales à restaurer un minimum d’inflation fait toujours peser une menace de déflation au-dessus de l’économie mondiale. L’enclenchement d’une spirale déflationniste entraînerait une chute de la croissance.
L’économie demeure très sujette au prix du pétrole. Ce dernier est de plus en plus difficile à prévoir. En effet, la montée en puissance des pétroles alternatifs a modifié la donne. La réduction de leurs coûts d’extraction a surpris le marché. Il n’en demeure pas moins que la demande continue à augmenter rapidement et que les investissements dans la prospection restent faibles. D’ici 2020, une remontée rapide des cours n’est pas à exclure.
D’ici la fin de l’année, la croissance de l’économie mondiale devrait évoluer sur le même rythme que celui du premier semestre. Un léger ralentissement n’est pas impossible. Les Etats-Unis pourraient connaître une activité moins soutenue car ils sont en situation de plein emploi depuis près d’un an. Les incertitudes sur la politique économique des pouvoirs publics pourraient peser sur la croissance. Le courant optimiste qui traverse le monde occidental depuis plusieurs mois pourrait s’atténuer. Le retour aux fondamentaux pourrait jouer négativement sur la croissance. En Europe, après les élections allemandes du 24 septembre prochain, les négociations sur le Brexit entreront dans le vif du sujet. Elles pourraient générer des tensions au sein de l’Union et provoquer des anticipations négatives.