Le Coin de la Conjoncture du 21 juillet 2018
L’Afrique et la croissance
L’Afrique se place en 2e position pour la croissance (4,6 % en rythme annuel entre 2000 et 2017) derrière l’Asie (+7,2 %).
Dans un rapport conjoint intitulé « Dynamiques du développement en Afrique 2018 : Croissance, emploi et inégalités », la Commission de l’Union africaine et le Centre de développement de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) présentent leur premier bilan de la situation du continent africain depuis l’adoption de « l’Agenda 2063 » en 2013.
Selon leurs auteurs, l’Afrique bénéficie de la bonne tenue des cours des matières premières, des progrès réalisés par les États africains dans la conduite des politiques macroéconomiques et des stratégies de diversification des économies nationales. L’arrivée d’investisseurs étrangers (principalement chinois et indiens) sur le continent permet d’accroître l’investissement dans les infrastructures nationales. De nombreux partenariats avec ces investisseurs ont été réalisés ces dernières années. Entre 2000 et 2016, les échanges commerciaux avec l’Inde, la Chine et les autres pays émergents sont ainsi passés de 276 milliards de dollars à 806 milliards de dollars.
La croissance africaine demeure cependant insuffisante pour entraîner un véritable enrichissement de la population en raison de sa forte augmentation. En effet, cette dernière devrait doubler d’ici 2060 et atteindre plus de 2,3 milliards d’habitants. Les inégalités géographiques et sociales sont importantes. L’Afrique de l’Est enregistre une croissance annuelle de plus de 4 % par ans depuis 1990 grâce à une économie plus diversifiée. En revanche, certains pays d’Afrique du Nord et d’Afrique australe doivent faire face à un chômage structurel élevé. Dans le même temps, six des dix pays qui composent l’Afrique australe sont les plus inégalitaires du monde en termes de revenus. Plusieurs pays d’Afrique demeurent confrontés à des conflits militaires ou doivent faire face à des attentats menés par des groupes terroristes (Etats de la bande sahélienne).
282 millions de personnes occuperaient des emplois précaires sur le continent africain. A horizon 2022, l’OCDE souligne que 66 % des emplois resteraient vulnérables. Si la croissance constatée depuis le début du siècle a permis de faire reculer la grande pauvreté, 395 millions de personnes – soit 35 % de la population totale sur le continent – étaient encore touchées par ce fléau en 2013.
Pour améliorer le sort de la population, le taux de croissance ne devrait pas être de 4% mais de 7 %. Or, ce taux reste hors d’atteinte pour la quasi-totalité des Etats.
L’OCDE insiste sur la nécessité de renforcer la productivité du travail, de développer l’agro-industrie, la construction, le cuir, l’industrie manufacturière légère ou les services logistiques.
Dessine-moi le monde de 2060 !
Ralentissement et convergence des économies à long terme
Les économistes de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) viennent de publier un rapport dans lequel ils présentent les scénarios économiques de l’organisation internationale à l’horizon 2060. Ils tablent sur une croissance mondiale en retrait qui se situerait entre 1 ½ et 2 % en 2060 contre 3,5 % aujourd’hui. Ce recul tiendrait principalement à la décélération de la croissance des grandes économies émergentes constituées du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de l’Indonésie, de la Chine et de l’Afrique du sud (BRIICS). Du fait d’un alignement des comportements et des besoins des populations locales sur la situation qui prévaut dans les pays riches, la croissance moyenne annuelle de ces pays qui avoisinait les 6% tomberait à tout juste un peu plus de 2% à l’horizon 2060. Dans le même temps, la croissance des pays membres de l’OCDE serait en léger recul passant de 2,1 % en 2006 à 1,9 % en 2060. Une baisse qui serait, selon les auteurs du rapport, imputable à la baisse de la consommation privée qui ferait écho au vieillissement de la population.
Entraînée par la Chine, l’Inde mais aussi l’Indonésie, l’Asie deviendrait ainsi le centre de gravité de l’économie mondiale. De fait, selon la projection centrale retenue par l’OCDE, la Chine et l’Inde réaliseraient chacune entre 20 % et 25 % du PIB mondial d’ici 2060, contre un peu plus de 40 % pour les pays de l’OCDE.
Des dépenses sociales en hausse qui grèvent l’économie mondiale
En lien avec le vieillissement de la population mondiale, les pouvoirs publics devront faire preuve d’ingéniosité pour trouver de nouvelles recettes fiscales financer en premier lieu les progressions des dépenses de santé et de retraite. Selon l’OCDE, les besoins de financement s’élèveraient à 6 ½ points de PIB afin de ne pas faire supporter ce surcoût par le recours à la dette publique.
Niveau de vie : le lent rattrapage des pays émergents
Dans l’hypothèse de référence retenue par l’OCDE, et en l’absence de toute réforme majeure, le PIB par habitant devrait, en moyenne, progresser de l’ordre de 1,5 % à 2% par an au cours des quarante prochaines années. Malgré une hausse plus significative au sein des pays émergents, le rapport estime néanmoins que « Le PIB par habitant des BRIICS restera inférieur à la moitié de celui des États-Unis en 2060 ».
Préconisations et points d’alerte de l’OCDE
Au-delà du scénario central décrit précédemment, l’OCDE a réalisé d’autres hypothèses plus ou moins favorables à partir desquelles elle présente une série de recommandations en direction des États membres.
Considérant que les BRIICS disposent de marge de progression, ceux-ci pourraient connaître une croissance plus soutenue au cours des quarante prochaines années. Ainsi, en cas de rattrapage des niveaux moyens de l’OCDE à l’horizon 2060 en matière de gouvernance et du niveau d’instruction, le niveau de vie des populations locales pourrait être fortement majoré par rapport à l’hypothèse centrale (de l’ordre de 30 à 50 % de plus).
L’OCDE indique par ailleurs que des réformes audacieuses de la réglementation des marchés de produits à horizon 2030 permettraient d’accroître de plus de 8 % le niveau de vie moyen de la population mondiale. Les gains pourraient même atteindre jusqu’ à 20 % pour les pays les plus en retard dans ce domaine à l’instar de la Belgique, la France, l’Espagne et l’Italie, précise l’étude. Dans le même ordre d’idée, l’OCDE milite pour une plus grande harmonisation des règles applicables au social et au marché du travail. Un alignement sur les pratiques menées dans les pays les mieux classés dans ce domaine permettrait d’accroître le taux d’emploi global de 6,5 % d’ici 2040.
Guerre commerciale : quel coût pour l’économie mondiale ?
Faisant écho à la politique commerciale menée par le Président des États-Unis, l’OCDE alerte les États sur les risques encourus en cas de guerre commerciale. La montée du protectionnisme pénaliserait fortement le PIB par habitant. Pour illustrer ce propos , les économistes de l’OCDE ont mesuré l’impact d’un retour à la situation des années 1990 en matière de droits de douane. D’après leurs projections, cette mesure engendrerait une chute du PIB par habitant de 14 % dans le monde, pouvant atteindre 25 % pour les pays les plus touchés.