Le Coin des tendances du 13 juillet 2019
La dépendance, une question de société avant d’être une question financière
D’ici le milieu du siècle, le nombre de personnes dépendantes sera amené à doubler. Chaque année, plus de 225 000 nouveaux cas de dépendance sont comptabilisés. Face à cette augmentation, les pouvoirs publics privilégient la solution du maintien le plus longtemps possible au domicile. Cette option qui s’appuie sur la volonté supposée des intéressés répond avant tout à une approche budgétaire de court terme. Grâce à l’appui des aidants familiaux, en allégeant le coût de l’hébergement, les pouvoirs publics réduisent à première vue les coûts supportés par la collectivité. Ce choix de l’hébergement à domicile s’impose évidemment pour les cas les plus légers de dépendance. Il est, en revanche, inopérant pour les cas plus complexes, surtout quand il s’agit de personnes seules et vivant en milieu rural ainsi que dans des communes de banlieues mal desservies. Les scénarii de l’administration occultent consciemment le fait que dans les prochaines années le nombre des aidants familiaux sera amené à diminuer en raison même du vieillissement de la population et de l’éclatement des structures familiales. Actuellement, plus de 4 millions de personnes aident une personne dépendante de manière régulière. En y ajoutant l’aide occasionnelle, ce nombre atteint 8,3 millions. Selon certaines sources, ce chiffre atteindrait 11 millions (baromètre Fondation April). Plus de la moitié des personnes dépendantes à domicile sont aidées à titre principal par leur conjoint ou par un proche. Pour le laboratoire d’économie et de gestion des organisations de santé de l’Université de Paris Dauphine, les aidants familiaux permettent une économie de plus de 11 milliards d’euros. Avec la montée en puissance de la dépendance, d’ici 2030, plus d’un cinquième de la population serait amené à s’occuper d’une personne dépendante. Etant rappelé que les aidants familiaux sont eux-mêmes des personnes âgées.
La dépendance est consommatrice de soins au quotidien. Pour faire face, encore faut-il disposer d’un personnel suffisant et bien formé techniquement et moralement. Or, depuis plus de trente ans, afin de maîtriser les dépenses, il a été décidé de limiter les effectifs d’étudiants pour les professions médicales. La pénurie constatée aujourd’hui ne pourra que s’amplifier dans les prochaines années. En 2019, les personnes dépendantes éprouvent déjà des difficultés à être soignées en début et en fin de journée. En outre, bien souvent, la fréquence des passages est insuffisante pour garantir à un niveau de soins compatibles avec le maintien de l’état de santé des patients.
Comme tous les autres Français, les professionnels de santé ont des contraintes familiales qui limitent leurs disponibilités à ce moment-là (entrées et sorties des enfants à l’école par exemple). Les professionnels de santé aspirent à un rythme de vie équilibré mais qui aboutit à réduire l’offre de soins. Ils sont de plus en plus nombreux à opter pour le statut de salarié voire à choisir la médecine du travail, jugés moins chronophages que l’exercice en libéral ou en établissement de santé. La complexité et le coût croissants des déplacements en milieu urbain ou en milieu rural limitent également l’offre de soins. Il n’est pas rare que des infirmiers ou des kinésithérapeutes refusent de prodiguer des soins du fait de l’éloignement du domicile de la personne dépendante de leur lieu traditionnel d’exercice. Dans des banlieues difficiles, certains mettent également en avant le problème de la sécurité. En outre, à la différence du handicap par exemple, la gérontologie souffre d’un déficit d’image et d’attractivité que l’on retrouve dans le cursus de formation des médecins et, plus largement, dans les filières de formation médico-sociales.
L’accès difficile des soins peut avoir des conséquences importantes pour les personnes âgées. Le traitement de la douleur peut être négligé tout comme le respect des simples règles d’hygiène.
La qualité de vie des personnes dépendantes à domicile est un sujet clef. La présence ou non de professionnels de santé, de moyens de transports et de services de proximité, jouent un rôle majeur dans le maintien à domicile. En effet, 86 % des personnes âgées de plus de 80 ans vivent chez elles. Dans 40 % des cas, ce sont des femmes seules. Il faut souligner que seulement 20 % des personnes de plus de 80 ans vivent dans un logement avec un ascenseur. 35 % de cette catégorie de population n’ont pas accès dans leur agglomération à un cabinet ophtalmologique ou à un cabinet de cardiologie. Si en moyenne 31 % des plus de 60 ans sont à 30 minutes en voiture d’un établissement de santé, ce taux atteint plus de 50 % dans 18 départements dont ceux de l’Ariège, des Alpes-de-Haute-Provence ou du Cantal.
L’Allemagne qui dans les années 90 avait privilégié le maintien à domicile se heurte aujourd’hui à la problématique du personnel et des coûts. Si dans un premier temps, cette option est une source d’économies, par l’absence de gains d’échelle, elle apparaît vite comme budgétivore obligeant à une réorientation de la politique à travers la construction d’établissements spécialisés.
Le système de protection sociale est confronté au défi de la massification. L’arrivée en masse des générations du baby-boom à l’âge de la retraite et ensuite à l’âge de la dépendance se double de l’allongement de l’espérance de vie. Ces contraintes s’imposent à nous et changent la nature de notre système. Construit sur la base d’une large population active et d’une faible population retraitée, il doit faire face une inversion des fondations. La profession médicale doit opérer une véritable révolution. Formés à soigner, les praticiens sont amenés à accompagner des personnes dépendantes en fin de vie. La massification du système de soins peut déboucher de manière insidieuse et implicite à une sélection des patients selon des critères arbitraires, l’âge, l’état de santé, la fortune…
Depuis vingt ans, chaque Président de la République annonce une grande loi sur la dépendance. À chaque fois, le projet est enterré faute de volonté. La question du financement sert d’épouvantail. Or elle est loin d’être la seule ni, peut-être, la plus complexe à régler. Les personnes de plus de 60 ans sont aujourd’hui les principaux détenteurs du patrimoine des ménages. Plus de 77 % de plus de 80 ans sont propriétaires de leur résidence principale. Certes, il n’est pas facile de mobiliser un patrimoine immobilier quand la dépendance survient. Mais le recours à des solutions assurantielles pour financer la prise en charge sont imaginables soit en complément des revenus, soit en soudure, le temps de vendre le logement ou de le louer. Serait-il choquant que les retraités s’acquittent d’une cotisation dépendance obligatoire si en contrepartie une prise en charge de qualité était assurée ? Au-delà de la question financière, c’est en effet le niveau de services et le suivi des personnes dépendantes qu’il faut améliorer. D’ici 2040, la menace d’une société duale, d’un côté les actifs valides et de l’autres ceux qui seront invalides ou à la charge de la société, avec à la clef un fossé au milieu, est réelle. Afin que la solidarité puisse conserver toute sa place, elle doit être acceptée par tous et reposer sur une répartition équitable des charges.
L’agriculture, un secteur à fort potentiel
Selon un rapport annuel de l’Organisation pour la coopération économique et le développement (OCDE) et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la demande mondiale pour les produits agricoles devrait augmenter de 15 % lors de la prochaine décennie. Cette étude indique que la productivité agricole devrait progresser plus rapidement, permettant de maintenir les prix des produits agricoles relativement stables.
L’OCDE prévoit de meilleurs rendements et une plus grande intensité de la production grâce notamment aux innovations technologiques ce qui aboutira à une progression de l’offre malgré la stabilisation des superficies cultivées à l’échelle mondiale. Les émissions de gaz à effet de serre provenant directement de l’agriculture devraient augmenter de 0,5 % chaque année lors des 10 prochaines années, soit en dessous de la moyenne des 0,7 % enregistrée ces dix dernières années et inférieure aux prévisions concernant le taux de croissance de la production, une situation qui reflète par ailleurs une baisse de l’intensité du carbone.
L’OCDE souligne que l’agriculture doit faire face à plusieurs défis émergents. La propagation de maladies végétales et animales ainsi que la résistance aux antimicrobiens constituent une source d’inquiétudes pour un grand nombre d’États. L’encadrement réglementaire des produits phytosanitaires oblige les agriculteurs à revoir leurs techniques.
La multiplication des événements climatiques extrêmes impose une évolution des pratiques agricoles d’autant plus que la surexploitation de l’eau douce met en péril de nombreux équilibres naturels.
L’agriculture doit tout à la fois assurer la nourriture d’une population en augmentation mais aussi contribuer à son bien-être. La lutte contre l’obésité, contre l’alimentation trop sucrée, trop grasse, et contre les produits transformés n’est pas sans conséquence sur la production végétale et animale. La demande croissante de produits bio, l’augmentation de nombre de personnes refusant de manger peu ou pas de viande et le souhait d’accéder à des fruits et légumes cultivés à proximité constituent des tendances qui s’imposent depuis quelques années. Par ailleurs, au sein des pays émergents, une part croissante de la population dispose désormais de moyens suffisants pour acheter des biens alimentaires plus variés et proches de ceux à disposition des consommateurs occidentaux.
Au regard de l’évolution de la demande mondiale, l’OCDE estime que la consommation de céréales pour l’alimentation devrait augmenter de près de 150 millions de tonnes pendant la période concernée, soit une hausse de 13 % due en grande partie au riz et au blé. La demande pour les cultures vivrières devrait dépasser la croissance de la production animale dans les pays où le secteur de l’élevage est en train d’évoluer pour passer des systèmes de production traditionnels aux systèmes de production commercialisés, tandis que l’utilisation de denrées agricoles en tant que matières premières pour produire des biocarburants devrait surtout augmenter dans les pays en développement.
Le rapport indique également que la consommation de sucre et d’huiles végétales devrait augmenter, reflétant les tendances actuelles qui pointent vers une hausse de la consommation d’aliments plus préparés et transformés, notamment dans de nombreux pays à faible et à moyen revenu qui s’urbanisent rapidement.
Pour la viande, l’OCDE préconise une baisse sensible de la consommation de la viande rouge au sein des pays occidentaux afin de réduire la prévalence de certaines maladies. Un effort dans le même sens devrait être engagé contre la consommation d’huiles et de sucres. Le recours au sel devrait être également mieux contrôlé.
La progression rapide de la population en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud pourrait avoir comme conséquence que la situation alimentaire des pays concernés ne s’améliore pas dans les prochaines années. Malgré tout, l’organisation internationale considère que l’éradication de la sous-alimentation pourrait être atteinte en 2030, sachant qu’elle concerne actuellement 800 millions de personnes sur 7,5 milliards d’habitants.
L’OCDE s’inquiète de la montée du protectionnisme. Le commerce de produits agricoles constitue une nécessité afin de permettre aux États en forte croissance démographique de nourrir leur population. Par ailleurs, les échanges internationaux assurent des revenus importants aux pays exportateurs. Concernant le Traité commercial entre le Mercosur et l’Union européenne, il convient de souligner que les deux zones économiques sont assez complémentaires en particulier du fait qu’elles ne sont pas situées dans le même hémisphère. Au sujet du coût écologique des transports de produits agricoles de part et d’autre de l’Atlantique, il convient de souligner qu’à l’heure actuelle, les avions comme les navires à destination des pays d’Amérique latine repartent bien souvent à vide. L’OCDE estime que le commerce international des denrées agricoles et de celles liées à la pêche devrait augmenter de 1,3 pour cent par an, soit moins rapidement que lors des dix dernières années (moyenne de 3,3 pour cent). Les deux zones qui pourraient accroître leurs parts de marché à l’exportations sont l’Amérique latine et l’Europe. L’Amérique latine et les Caraïbes représentent 14 % de la production mondiale et 23 % des exportations mondiales de produits agricoles et de ceux liés à la pêche. En 2028, ces taux devraient atteindre 28 %. La région est confrontée à un double défi, la protection sociale des agriculteurs et la durabilité de l’agriculture.
Erasmus, un pari réussi
Le programme Erasmus d’échanges d’étudiants au sein de 33 pays européens (les 28 États membres de l’Union européenne ainsi que l’Islande, le Liechtenstein, la République de Macédoine, la Norvège et la Turquie) a concerné 800 000 étudiants en 2017, soit 10 % de plus qu’en 2016. L’Union a financé ce programme à hauteur de 2,6 milliards d’euros. En 30 ans d’existence, le programme Erasmus a permis à 9 millions d’étudiants et d’apprentis de se former, d’acquérir une expérience ou bien de faire du bénévolat à l’étranger.
Avec près de 44 000 étudiants, la France est le pays qui a le plus bénéficié de ce programme, devant l’Allemagne et l’Espagne. L’université de Strasbourg envoie le plus d’étudiants à l’étranger, suivie par celle de Lorraine. La proximité des frontières allemande et luxembourgeoise explique en partie cette prédominance des universités de l’Est. Erasmus rencontre également un grand succès en Allemagne (40 959 bénéficiaires) et en Espagne (40 079 bénéficiaires). L’Espagne est, par ailleurs, le pays qui accueille le plus d’étudiants. C’est d’ailleurs la destination préférée des Français, devant le Royaume Uni et l’Allemagne. En moyenne, le séjour à l’étranger dure 5,6 mois soit l’équivalent d’un semestre d’études : 6,5 mois pour la mobilité d’études et 3,6 mois pour la mobilité de stage.
L’Europe a d’ores et déjà prévu de reconduire le programme Erasmus pour la période de 2021-2027 et de le rendre plus ambitieux encore. L’objectif est de tripler le nombre de participants afin qu’il atteigne le chiffre de 12 millions au cours de ces 6 années, appuyé par un budget qui devrait être doublé pour s’élever à 5 milliards d’euros par an.