Le Coin du Coronavirus
Le tourisme dans tous ses états
Depuis les années 60, l’activité touristique est devenue un secteur majeur de l’économie mondiale. Cette activité a de nombreuses ramifications dans d’autres secteurs, transports, loisirs, financière, assurance, construction. Elle fait le bonheur et parfois le malheur de certains territoires. Ces dernières années, la sur-fréquentation touristiques et de ses conséquences sur l’environnement étaient un sujet de polémique. Avec la fermeture des frontières et les restrictions de circulation, la crise sanitaire a arrêté net un secteur qui, en Occident, allait débuter sa saison d’été.
En 2018, le chiffre d’affaires du tourisme à l’échelle mondiale était de 7 860 milliards d’euros, soit 10,4 % du produit intérieur brut (PIB) mondial. Selon l’Organisation Mondiale du Tourisme, en 2019, le nombre de touristes internationaux a été évalué à 1,5 milliard. Avec 89 millions de touristes, la France est le premier pays d’accueil. Ce chiffre est un peu faussé par le rôle de hub international de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle. Le chiffre d’affaires du tourisme en France représente 175 milliards d’euros, soit plus de 7 % du PIB. Le secteur emploie en direct 3,1 millions de personnes. Au total, en prenant l’ensemble des activités dépendant indirectement du tourisme (construction, loisirs, etc.), 13 millions d’emplois sont en jeu.
La crise du Covid-19 ampute la saison de deux mois et demi, sachant qu’elle aurait dû commencer à la mi-avril avec les vacances de Pâques. Les stations de montagne ont vu leur saison d’hiver amputée avec le confinement intervenu au milieu du mois de mars.
Le Premier Ministre a annoncé, le jeudi 14 mai, un plan de relance du secteur portant sur 18 milliards d’euros. Le fonds de solidarité sera accessible aux secteurs hôtellerie, restauration, tourisme jusqu’à à la fin de l’année 2020. L’aide pourra atteindre 10 000 euros au lieu de 5 000 euros pour les autres secteurs. Les dispositifs de prêts seront renforcés avec un plafond qui pourra atteindre le chiffre d’affaires des trois meilleurs mois de l’année précédente. L’accès au chômage partiel sera maintenu jusqu’en septembre contre juin pour les autres activités. Les banques se sont engagées à reporter les mensualités des entreprises sur douze mois et non plus six. Les cotisations salariales et patronales seront exonérées pendant toute la durée de la fermeture de leurs établissements. Le gouvernement accorde un crédit de 20 % sur les cotisations dues depuis le début de l’année, avant la crise du coronavirus. Dans le cadre du plan de relance, un engagement de 1,3 milliard d’euros est prévu. Il sera financé par la Caisse des dépôts et BPI France. Des prises de participations ou des prêts pourront être mis en œuvre pour aider les entreprises du tourisme en difficulté. Cette somme sera complétée par des investissements privés pour atteindre un total de 7 milliards d’euros. 62 000 des entreprises du secteur ont d’ores et déjà bénéficié de 6,2 milliards d’euros de prêts garantis par l’État. Par ailleurs, le Premier Ministre a annoncé que les activités touristiques pourraient être ouvertes en juillet et en août sous réserve que les conditions sanitaires le permettent. A priori, le secteur touristique devrait pouvoir compter sur les touristes français et sur ceux de l’Espace Schengen (23 pays de l’Union européenne plus la Suisse, l’Islande et le Lichtenstein). Pour soutenir la demande et inciter les Français à retourner dans les restaurants lorsqu’ils pourront rouvrir, le plafond journalier des tickets-restaurants sera doublé à 38 euros, et leur utilisation sera autorisée les weekends et jours fériés jusqu’à fin 2020.
Les décès liés au covid-19 : une question d’âge et de densité
Depuis le mois de mars, selon l’INSEE, la crise sanitaire liée à la propagation du Covid-19 a entraîné une augmentation du nombre de décès. Ainsi, entre le 2 mars et le 19 avril, la France dénombre 22 140 décès supplémentaires par rapport à la même période évaluée sur les cinq dernières années. Du 30 mars au 5 avril 2020 le pic de mortalité s’est établi à 6 730 décès hebdomadaires, soit une hausse de 56 %. À partir de cette date, une décrue est constatée : +5 390 décès hebdomadaires, soit +45 % du 6 au 12 avril, puis +3 020 décès hebdomadaires, soit +25 % du 13 au 19 avril.
Cercle de l’Epargne – données INSEE
En l’état actuel, il n’est pas possible d’imputer ce surcroît de décès au seul Covid-19. L’INSEE souligne que de multiples facteurs interagissent sur la mortalité. Ainsi, une baisse de la mortalité routière a été constatée. D’après le bilan provisoire de la Sécurité routière, 154 personnes sont mortes sur la route en mars, soit une centaine de personnes de moins qu’en moyenne au mois de mars lors de ces cinq dernières années. Pour la grippe saisonnière, les pics épidémiques ont été atteints entre janvier et février en 2020 comme pour les cinq hivers précédents. La grippe 2019-2020 n’a pas entraîné un surnombre de décès jusqu’à la fin de sa surveillance épidémique mi-mars (comme celle de 2015-2016). Le nombre de décès devrait se situer autour de 10 000 comme en 2018-2019 (8 100 décès au total contre respectivement 13 000 et 14 400 au cours des deux épisodes précédents). La plus dure grippe ces dix dernières années a été constatée en 2014-2015 avec 18 300 morts.
L’Est et la région parisienne en premières lignes
En métropole, les régions Île-de-France et Grand Est présentent les excédents de décès les plus élevés (respectivement +96 % et +59 % du 2 mars au 19 avril), devant la Bourgogne-Franche-Comté (+28 %), les Hauts-de-France (+22 %) et Auvergne-Rhône-Alpes (+21 %). À l’inverse, la Nouvelle-Aquitaine ou la Guyane ne présente pas ou très peu d’excédent de décès en 2020 par rapport à la période de comparaison. Dans les DOM, Mayotte est le seul département concerné par un très fort excédent de décès en 2020 (+54 % sur l’ensemble de la période), mais sur des effectifs plus réduits.
Un surcroit de décès chez les deux sexes
Les deux sexes sont touchés de manière similaire par l’excédent de mortalité. Pour les hommes, 11 210 décès supplémentaires sont enregistrés par rapport à la période de comparaison. Pour les femmes, cet excédent est de 10 930 décès supplémentaires. Pour les hommes comme pour les femmes, l’écart de mortalité avec la période de comparaison est très net dès 65 ans. 21 900 personnes de plus sont décédées en 2020 parmi les 65 ans ou plus (11 200 hommes et 10 700 femmes). Plus de 84 % de ces décès supplémentaires concernent des personnes de 75 ans ou plus, et 62 % les seules personnes de 85 ans ou plus.
Cercle de l’Epargne – données INSEE
La surmortalité masculine souvent mentionnée dans la presse concerne les hommes de plus de 75 ans. Elle est, pour cette catégorie d’âge, de 35 % pour les hommes et de 28 % pour les femmes. Les différences d’état de santé général entre les sexes, et notamment la proportion plus élevée d’hommes présentant des facteurs de risque (surpoids par exemple), expliqueraient cet écart.
Six départements (le Haut-Rhin, la Seine-Saint-Denis, le Val-d’Oise, le Val-de-Marne, les Hauts-de-Seine et Paris) ont enregistré a minima un doublement des décès pour les hommes entre les deux périodes. Pour le Haut-Rhin, le nombre de décès a même triplé pour les hommes sur la tranche d’âge des 75-84 ans. Concernant les femmes, ces mêmes départements se démarquent, avec des excédents à peine plus faibles que pour les hommes : de +140 % pour le Haut-Rhin à +97 % pour le Val-de-Marne ou Paris.
Des lieux de décès et de domicile souvent différents en Île-de-France
Les personnes ne décèdent pas forcément dans leur département de résidence. En 2020, pour un tiers des départements, plus de 10 % des décès ont lieu hors du département de domicile. Pour deux départements, cet écart dépasse 20 % : la Seine-Saint-Denis et l’Eure. Dans ces derniers, plus d’un décès sur dix a lieu dans un département limitrophe, respectivement Paris et la Seine-Maritime. Certains départements accueillent des malades d’autres départements provoquant une hausse du nombre de décès sur leur territoire. Ce phénomène est constaté dans le Territoire de Belfort, où plus de 60 % des décédés en 2020 n’habitent pas ce département. Les hôpitaux de ce département accueillent des malades des départements voisins du Doubs et de la Haute-Saône confrontés à des problèmes de saturation des lits de réanimation. Dans une moindre mesure, cette situation vaut également pour Paris, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne où plus de 30 % des décès enregistrés le sont pour des personnes domiciliées hors du département. Paris présente la particularité d’accueillir des patients de nombreux départements de la Région parisienne voire au-delà.
Un lien entre densité de population et excédent des décès
Le taux de mortalité constaté entre le 2 mars et le 19 avril progresse avec la densité communale. Les communes les plus denses enregistrent le surcroît de mortalité le plus important (+49 % contre +26 % en France). À l’inverse, dans les territoires les moins denses, les décès en 2020 sont plutôt stables par rapport aux années précédentes.
Cercle de l’Epargne – données INSEE
De fortes différences sont constatées parmi les grandes villes à forte densité. Ainsi, parmi celles de plus de 100 000 habitants, Saint-Denis et Mulhouse enregistrent de forts excédents de décès sur la période (+172 % et +165 %), suivies par Strasbourg (+111 %) et Argenteuil (+109 %) puis Paris (+98 %) et Montreuil (+90 %). À l’autre extrémité, Clermont-Ferrand, Brest ou Caen ne connaissent pas d’excédent de mortalité. Pour des raisons liées à l’importance des premiers foyers de contagion, le nombre de décès n’est pas uniforme sur l’ensemble de la France. La façade Ouest a été préservée comme certains départements du Sud.
L’excédent de mortalité est plus faible dans les territoires les moins denses bien que la population y soit en moyenne plus âgée, et donc a priori plus fragile face au Covid-19. Les 75 ans ou plus représentent 8 % de la population dans les territoires denses, mais 11 % dans les territoires très peu denses.