Et si l’Ecosse devient indépendante…
L’Ecosse représente 32 % du territoire du Royaume-Uni et compte 5,3 millions d’habitants (8,3 % de la population du Royaume-Uni). Le poids démographique de l’Ecosse est semblable à celui de l’Irlande ou de la Norvège. Le PIB est de 235 milliards de dollars soit 7,8 % du PIB britannique. Le PIB par tête de l’Ecosse (20.000 livres en 2012) est également proche de celui de l’ensemble du Royaume-Uni.
Un sondage a donné la victoire aux tenants de l’indépendance faisant prendre conscience aux Européens que la scission pouvait intervenir le 18 septembre prochain. La victoire du « oui » serait un évènement non seulement pour le Royaume-Uni mais aussi pour l’ensemble de l’Europe.
Le choc serait politique et économique.
Au niveau politique, le Premier Ministre du Royaume-Uni, David Cameron, serait fortement affaibli. Il serait considéré comme responsable de l’éclatement du Royaume-Uni et pourrait être en difficulté pour les élections législatives prévues en 2015. Néanmoins, l’Ecosse étant, en règle générale, pourvoyeuse de députés travaillistes, la position des conservateurs sortirait renforcer de la scission. Quel que soit le résultat, il y aura des conséquences politiques au sein du Royaume-Uni. Même si l’Ecosse reste dans le Royaume-Uni, des transferts de compétences seront, en effet, organisés afin de prendre en compte le poids électoral des indépendantistes. Il est ainsi prévu d’accentuer les transferts des ressources fiscales.
Au niveau européen, l’indépendance de l’Ecosse inciterait d’autres régions ou territoires à réclamer leur indépendance. Pourraient être concernés la Catalogne, le Pays Basque, la Flandre, la Lombardie, la Corse…
La sortie de l’Ecosse du Royaume-Uni marquerait une rupture au sein de l’Europe occidentale qui s’est construite autour de quelques grandes nations depuis plus de deux cents ans. L’Ecosse avait officiellement été rattachée à l’Angleterre en 1707. Cette sortie potentielle intervient au moment où les Etats nations traversent une période difficile en raison de l’envolée des dettes publiques. La faiblesse des Etats centralisés incite les mouvements indépendantistes à réclamer une plus large autonomie voire l’indépendance. L’intérêt à rester dans la nation centralisée s’amoindrit d’autant que dans des économies en réseau, les forces d’attraction des capitales s’estompent. En outre, l’existence de l’Union européenne, avec son marché unique et ses éventuelles politiques de soutien, réduit le coût de l’indépendance.
La sortie de l’Ecosse affaiblirait, sans nul doute, le Royaume-Uni. La Livre Sterling qui profite de la bonne santé de l’économie britannique serait affaiblie. Par ailleurs, la City pourrait être impactée par cette scission. Au niveau économique, l’indépendance de l’Ecosse constituerait donc une petite révolution. Les Anglais et les Ecossais devraient se mettre d’accord sur la dévolution de la dette publique, sur les réserves de change, sur les revenus tirés du pétrole…
La question de la monnaie a été au cœur des débats. Pour faire pression sur les électeurs, l’Angleterre a indiqué que l’Ecosse indépendante ne pourrait pas conserver la Livre Sterling. Or, l’Ecosse, par nature, commerce, avant tout, avec le reste du Royaume-Uni. Les exportations à destination du reste du Royaume-Uni représentaient plus de 65% des exportations écossaises en 2013. A défaut de la Livre Sterling, l’Ecosse pourrait choisir l’euro comme monnaie. Pour le moment, les pays membres de la zone euro sont restés très prudents voire très réservés sur ce sujet pour éviter de s’immiscer dans ce dossier de politique intérieure. Par ailleurs, l’intégration de l’Ecosse dans la zone euro inciterait d’autres régions de plusieurs pays membres à demander l’application de la même solution.
La question des participations de l’Etat dans des entreprises écossaises devrait être également traitée. Ainsi, le Royaume-Uni possède 80 % du capital de la Royal Bank of Scotland. La direction de cette dernière a indiqué qu’elle pourrait rapatrier son siège à Londres en lieu et place d’Edimbourg. Il faut souligner que l’Ecosse joue un rôle important dans l’activité bancaire du Royaume-Uni. Une sortie de la zone sterling affaiblirait la situation des banques écossaises dont le bilan représente 12 fois le PIB.
Le déficit public de l’Ecosse pourrait se situer entre 8 et 14 % en fonction des règles de répartition des revenus du pétrole. Le nouvel Etat devrait faire face à des taux d’intérêt plus élevés pour financer sa dette.
Au niveau du Royaume-Uni, l’indépendance de l’Ecosse pourrait réduire la croissance de 0,6 à 0,9 % en 2014 et 2015. La forte croissance actuelle autour de 3 % la rendrait moins douloureuse pour les Anglais. Pour l’Ecosse, le taux de croissance pourrait être impacté de 1 à 2 points en fonction des décisions prises. La Livre Sterling qui a commencé à se déprécier par rapport au dollar pourrait perdre 10 à 15 % de sa valeur.