Le Coin des Tendances – énergie – Russie
Énergie, un marché sans boussole
Au cœur de la crise sanitaire, le prix du pétrole à terme était négatif en raison de la disparition des capacités de stockage. Depuis, la situation s’est complétement inversée avec le rebond de la croissance. Du trop-plein, nous sommes passées à l’ère des pénuries. Au milieu du mois d’octobre, le prix du pétrole a retrouvé des niveaux inconnus depuis près de sept ans. Le baril de Brent a franchi la barre des 85 dollars. En un an, le prix du pétrole a doublé ; depuis le 1er janvier 2021, il a progressé de plus de 60 %. En trois mois, le prix du panier de pétrole, de gaz et de charbon a progressé de 95 %. Les stocks de pétrole n’atteignent que 94 % de leur niveau habituel, les stockages de gaz européens 86 % et les charbons indien et chinois en dessous de 50 %. En Chine et en Inde, des pannes d’électricité ont freiné, ces dernières semaines, la production industrielle. Le rebond économique n’est pas seul en cause dans cette vive progression des prix de l’énergie. Le manque de vent en Europe, depuis le début de l’été a réduit la production d’énergie électrique d’origine éolienne. En Amérique latine, la faiblesse des pluies pénalise la production d’hydroélectricité. En Asie, les inondations ont entravé les livraisons de charbon. Face aux problèmes d’alimentation en pétrole et au gaz, différents pays sont contraints de recourir à leurs centrales au charbon, notamment le Royaume-Uni, pays hôte de la COP26 au mois de novembre. La hausse des cours est également la conséquence de leur faiblesse depuis sept ans. Celle-ci a freiné les investissements pour l’entretien des forages et pour la recherche de nouveaux gisements. En 2014, le baril du pétrole s’échangeait alors à plus de 100 dollars avant de tomber à 27 dollars au mois de janvier 2016, l’Arabie saoudite décidant alors de ne plus soutenir les cours en réduisant sa production. Même si un nouvel accord de régulation associant l’OPEP et la Russie avait été signé à la fin de l’année 2016, le prix du baril était resté jusqu’en 2021 inférieur à 70 dollars. La Russie est pénalisée par les embargos mis en œuvre à partir de 2014 après l’annexion de la Crimée qui l’empêchent de moderniser ses infrastructures de forage. Les entreprises pétrolières disposent de moyens de moins en moins importants pour accroître leur production. Or elles doivent offrir d’importants dividendes à leurs actionnaires, ces derniers étant incités à sortir de ce secteur au nom de la décarbonation des activités. Des Groupes comme Total Énergies privilégient désormais les énergies renouvelables. La pression des investisseurs et la peur des réglementations ont entraîné une chute de 40 % des investissements dans les combustibles fossiles depuis 2015. Ce sous-investissement entrave la production au moment même où la demande est en forte hausse, dopée par les plans de relance.
La géopolitique tendue du marché de l’énergie
La répartition inégale des sources d’énergie ou des matières premières nécessaires à leur production génèrent des tensions récurrentes. La Russie exploite ainsi la situation actuelle en rappelant qu’elle a la capacité de fournir l’Europe en gaz et en pétrole sous réserve d’un assouplissement des mesures d’embargo en vigueur depuis 2014. Elle possède, comme la Chine, des réserves abondantes de terres rares, indispensables pour le développement des énergies renouvelables. Sachant que leur rente risque de s’étioler dans les prochaines années, les pays producteurs de pétrole et de gaz ont tout intérêt à la valoriser au maximum durant la période où ils demeurent indispensables. Après avoir connu une année de faibles prix en 2020, les pays producteurs de l’OPEP ne se pressent pas pour remonter leur production au niveau de 2019 afin de pouvoir engranger des recettes liées à la hausse actuelle des cours. Une trop forte hausse du prix du baril pourrait néanmoins casser la croissance et mettre en péril leurs recettes. La barrière se situe autour de 100/120 dollars le baril. Une énergie chère a, par nature, des effets inflationnistes comme cela a été constaté en 1973, 1980 ou en 2007. Elle pèse sur la croissance. Les pays émergents et en développement ne disposant pas de pétrole et de gaz sont les plus touchés par la hausse des cours.
Les États européens ne peuvent toujours pas compter sur le gazoduc Nord Stream 2 (NS2) pour bénéficier du gaz russe à moindre coût. Ce gazoduc, un projet de plus de 11 milliards de dollars, doit acheminer le gaz russe de l’Arctique vers l’Allemagne. Les États-Unis ont longtemps fait pression sur leurs alliés européens pour en empêcher l’exploitation, estimant un risque de dépendance du vieux continent à la Russie. Joe Biden en arrivant à la Présidence des États-Unis a, dans un souci de réconciliation avec ses partenaires européens, décidé de lever les menaces de sanctions contre les entreprises travaillant pour NS2. Malgré tout, comme Donald Trump, Joe Biden est opposé à NS2, Le 23 mars dernier, le secrétaire d’État Anthony Blinken a indiqué lors de la réunion de l’Otan que « le président Biden a été très clair lorsqu’il a dit que ce projet de gazoduc est une mauvaise idée pour l’Europe et pour les États-Unis ». Depuis 18 mois, le chantier n’a pas repris. Il manque 80 kilomètres pour achever ce gazoduc de plus de 1 230 kilomètres qui doit fournir 55 milliards de mètres cube de gaz par an. Ce gazoduc appartient à l’entreprise Gazprom qui l’opère aux côtés de cinq sociétés européennes (Engie, Shell, Uniper, Wintershall, OMV).
Les équations complexes de la décarbonation
Les investissements en matière énergétique sont aujourd’hui essentiellement alloués aux sources renouvelables décarbonées. Or, en l’état actuel, ils sont insuffisants pour atteindre l’objectif de la neutralité carbone fixé pour 2050. La montée en puissance des énergies renouvelables doit être parallèle au déclin des énergies carbonées et accompagner une hausse de la demande globale de l’énergie, hausse qui proviendra essentiellement des pays émergents et en développement. Le réchauffement climatique se traduira, en outre, par des besoins croissants en période estivale du fait du recours à la climatisation. Le gaz émettant deux fois moins de gaz à effet de serre que le charbon, la demande devrait connaître une progression exponentielle. De nombreux pays devront convertir leur centrale électrique au charbon en centrales à gaz. Le déficit mondial de capacité de gaz naturel liquéfié pourrait passer de 2 % de la demande aujourd’hui à 14 % d’ici 2030, ce qui devrait se traduire par une augmentation rapide des prix. À l’exception des États-Unis, les démocraties se détournent de plus en plus de la production de combustibles fossiles. La France a interdit l’exploitation sur son sol du pétrole ou du gaz de schistes par fracturation. La production de pétrole et de gaz est de plus en plus concentrée sur les pays de l’OPEP et la Russie. Leur part de marché pourrait ainsi passer de 46 % aujourd’hui à 50 % ou plus d’ici 2030. La Russie est à l’origine de 41 % des importations de gaz de l’Europe et son effet de levier augmentera à mesure qu’elle ouvrira le gazoduc Nord Stream 2.
Un marché de plus en plus instable
Le marché de l’énergie est devenu plus instable ces dernières années avec la multiplication des acteurs. Pour leur alimentation, les entreprises et les particuliers dépendent de fournisseurs qui s’approvisionnent sur les marchés au comptant. Tant que ceux-ci étaient baissiers, ces fournisseurs « low cost » ou « digitaux » pouvaient offrir des tarifs attractifs à leurs clients. En revanche, la montée des prix génère un effet inverse. Les prix sont moins lissés que dans le passé quand les contrats couraient sur plusieurs d’années pour l’approvisionnement.
La déstabilisation du marché de l’énergie pourrait aboutir à un ralentissement de la transition énergétique. Les autorités chinoises qui ont promis de sortir du charbon commencent à revenir sur leur calendrier. Le Premier ministre chinois, Li Keqiang, a ainsi déclaré que la transition énergétique doit être « saine et bien rythmée », signifiant qu’il ne fallait pas faire preuve de précipitation. De plus en plus d’États constatent que la transition énergétique coûtera très chère et qu’elle pourrait provoquer des tensions sociales. L’abandon total du charbon comme source d’énergie aux États-Unis, en Allemagne ou en Chine pourrait être retardé.
Les impératifs des énergies renouvelables
Les énergies renouvelables, par leur caractère aléatoire, supposent des marges de sécurité importantes en termes de production. La construction de parc de batteries, de centrales au gaz utilisées en cas de défaillance de l’éolien ou du solaire et de centres de production d’hydrogène vert nécessite d’importants capitaux et du temps. Or, des pénuries d’énergie pourraient, d’ici là, se multiplier. Face à ce défi d’énergétique, des entreprises et des États parient sur l’essor du nucléaire ou sur le captage et le stockage du dioxyde de carbone. Emmanuel Macron, dans le cadre du Plan France 2030 a fait le pari du développement de la filière hydrogène. Il a rappelé son soutien à l’énergie nucléaire avec notamment la poursuite des recherches sur les microcentrales. La révolution énergétique en cours passe essentiellement par la production d’électricité propre. Or si le gaz et le pétrole donnent lieu à des échanges internationaux importants, ce n’est pas encore le cas pour l’électricité. 4 % de l’électricité mondiale donnerait lieu à des échanges internationaux. Afin d’éviter des pannes géantes et des problèmes d’alimentation, l’interconnexion des réseaux apparaît nécessaire. Avec la production d’électricité ou d’hydrogène, à partir de sources renouvelables, la question du transport de l’un et de l’autre se pose avec beaucoup plus d’acuité qu’auparavant. Les pays à fort ensoleillement pourraient revendre une partie de l’électricité produite à d’autres. La réalisation de lignes haute tension sous-marines pourrait être envisagée pour relier le Sud au Nord. La mutation énergétique est encore à construire d’autant plus qu’elle concerne tous les pays. La pandémie a démontré la difficulté à coordonner les actions sanitaires à l’échelle mondiale. Il convient d’espérer que l’expérience acquise pourra servir pour la lutte contre le réchauffement climatique.
La Russie, 30 ans après la fin de l’URSS
L’Union des républiques socialistes soviétique (URSS) a disparu, il y a trente ans, le 25 décembre 1991 après 69 ans d’existence. Cette union imposée par Staline à Lénine met un terme au processus d’autodétermination des peuples qui avait prévalu après la chute du tsar en 1917. La guerre, les craintes d’une contrerévolution et le risque de fragmentation du pays avec la sécession de l’Ukraine entraînent l’abandon de l’expérience fédérale pour un système centralisé autour du parti communiste. L’URSS proclamée le 30 décembre 1922, sera dotée le 31 janvier 1924 d’une constitution. L’URSS connaîtra la consécration avec la victoire contre l’Allemagne nazie en 1945 avec la création d’une zone d’influence allant jusqu’au cœur de l’Europe qui donna lieu à un célèbre discours de Winston Churchill prononcé le 5 mars 1946 devant les étudiants de Fulton dans le Missouri et qui marqua le début de la guerre froide, « de Stettin sur la Baltique à Trieste sur l’Adriatique, un rideau de fer s’est abattu sur le continent. Derrière cette ligne se trouvent toutes les capitales des anciens États d’Europe centrale et orientale. Varsovie, Berlin, Prague, Vienne, Budapest, Belgrade, Bucarest et Sofia ; toutes ces villes célèbres et leurs populations sont désormais dans ce que j’appellerais la sphère d’influence soviétique, et sont toutes soumises, sous une forme ou une autre, non seulement à l’influence soviétique mais aussi au contrôle très étendu et dans certains cas croissant de Moscou ». Durant une quarantaine d’années, au-delà des atteintes aux libertés individuelles, l’empire soviétique réussit, plus ou moins bien, à faire illusion. La compétition avec l’Occident servit de paravent pour masquer ses échecs économiques. La guerre en Afghanistan engagée en 1979, l’accroissement sans fin des dépenses militaires pour contrecarrer la guerre des étoiles du Président Ronald Reagan, et surtout la déliquescence du système politique provoquèrent la chute de l’URSS.
De la déliquescence de l’URSS à l’avènement de la nouvelle Russie
Après le long règne de Leonid Brejnev (1966/1982), l’URSS connaît une instabilité avec la nomination successive de deux chefs d’État en mauvaise santé, Iouri Andropov et Konstantin Tchernenko qui feront des mandats très courts. En 1985, Mikhaïl Gorbatchev est nommé à la tête de l’URSS et entend rapidement réformer le régime pour combattre la stagnation économique. La perestroïka (restructuration économique) n’atteint pas les objectifs qui lui étaient assignés. Les pénuries se multiplient tout comme les inégalités sociales entraînant une montée de la contestation au sein de la population. Gorbatchev lance alors un projet de démocratisation du régime, avec la glasnost (transparence). Ce projet aboutit à une exacerbation des conflits interethniques et à la montée des nationalismes. À bout de ressources et pour sortir d’une guerre sans fin, Gorbatchev décide au mois de février 1989 le retrait des troupes russes d’Afghanistan. Ce retrait et le mouvement de libéralisation interne à l’URSS sont perçus tout à la fois comme une opportunité et un aveu de faiblesse de part des populations des démocraties populaires. La Hongrie est la première à entamer un processus de libéralisation, elle sera suivie par les autres pays d’Europe centrale avec, comme symbole, la chute du Mur de Berlin le 9 novembre 1989.
En 1990, pour la première fois depuis le début de l’ère soviétique, des élections libres ont lieu, les partis politiques sont autorisés. Dans les États fédérés de l’URSS, les courants autonomistes et nationalistes l’emportent. Au mois de juin 1990, Boris Eltsine, président du Soviet suprême de la République de Russie déclare la souveraineté de cette dernière. En août 1991, un putsch organisé par des généraux conservateurs se produit à Moscou pour mettre un terme au processus de libéralisation. Les réformistes emmenées par Boris Eltsine l’emportent en ralliant une part importante de l’armée. Cet évènement conduit les républiques constituantes de l’URSS à proclamer, au cours de l’automne 1991, l’une après l’autre, leur indépendance contraignant Gorbatchev à démissionner de son poste de Président de l’URSS vidé de son pouvoir le 25 décembre 1991. Le CAEM (Conseil d’Assistance Économique Mutuelle) créé en 1949 afin de concurrencer la CEE en regroupant économiquement les pays d’Europe de l’Est, et le Pacte de Varsovie, l’alliance militaire concurrente de l’OTAN née en 1955, disparaissent dans la foulée.
Avec la disparition de ses liens avec les anciennes démocraties populaires qui se tournent vers les États-Unis et l’Europe occidentale, la Russie a enregistré, au début des années 1990, une chute de son PIB de plus de 50 %. L’inflation atteint alors 1 000 % et le chômage plus de 15 % de la population active. La période est marquée par d’importants mouvements de populations avec l’arrivée de Russes en provenance des États devenus indépendants et par l’émigration de Russes diplômés qui fuient leur pays en raison des difficultés économiques et de la violence. La guerre en Tchétchénie marquée par la défaite de la Russie en 1995/1996 marque profondément l’opinion publique car elle symbolise le déclin d’une armée soviétique sacralisée depuis 1945.
Les problèmes économiques s’accumulent durant les années 1990 au point d’aboutir à un défaut de paiement partiel de la dette russe le 17 août 1998. Le PIB enregistre un fort recul entraînant une nouvelle montée de la pauvreté. En 1999, la Russie doit faire face à une série d’attentats causant la mort de 293 personnes. Les autorités accusent les Tchéchènes d’en être responsables, ce qui conduit à une nouvelle guerre au sein de la république séparatiste. De plus en plus contesté, le 31 décembre 1999, Boris Eltsine annonce son retrait du pouvoir qu’il confie à Vladimir Poutine, un ancien du KGB, maire de Saint Pétersbourg et proche du clan Berëzovski.
La Russie à la recherche de sa voie sur fond de nationalisme
En instaurant un régime présidentiel fort, Vladimir Poutine prend des mesures rapides afin de lutter contre la fraude fiscale et l’inflation. Il décide l’arrestations d’oligarques qui avaient profité des privatisations pour se construire de petits empires économiques. L’augmentation des cours des matières premières et de l’énergie permettent, par ailleurs, le retour de la croissance, la Russie entrant ainsi dans le club des pays émergents. Jusqu’à la crise financière de 2008, le taux de croissance annuelle atteignait 7 % par an. Un processus de modernisation est engagé avec à la clef l’essor du secteur tertiaire et notamment des banques. Après la crise financière, l’activité économique tend à s’étioler et les relations avec l’Occident se compliquent. La Russie tend à restaurer sa sphère d’influence au sein de plusieurs anciens États de l’URSS (Ukraine, Biélorussie, Ossétie, Tchétchénie, etc.). Vladimir Poutine mène, en effet, une politique étrangère de plus en plus active en s’appuyant sur la puissance renforcée de l’armée russe. La Russie est redevenue un acteur clef au Moyen Orient en s’impliquant aux côtés de la Syrie lors de la guerre civile. La Russie dispose de sa propre alliance l’Organisation du Traité de Sécurité Collective (OTSC) créée en 2002 qui regroupe la Russie, la Biélorussie, l’Arménie, le Kazakhstan et le Kirghizistan. La Russie multiplie des accords militaires en Asie comme en Afrique tant en réaction à l’influence croissante de la Chine qu’en opposition avec les États-Unis.
La crainte de l’encerclement avec l’adhésion éventuelle de l’Ukraine à l’OTAN et la volonté de contrôler cet État qui est considéré par les Russes comme partie intégrante de leur pays entraîne, en 2014, une crise frontale avec les États-Unis et l’Union européenne, surtout après l’annexion de la Crimée. La mise en place d’embargos et la chute des cours du pétrole en 2016 provoquent une nouvelle crise économique dont les effets sont moindres que ceux constatés en 1998 grâce aux réserves constituées dans le cadre de plusieurs fonds souverains. La Russie se tourne davantage vers la Chine et vers les États-membres de l’Union Économique Eurasiatique (UEE), une union fondée par la Biélorussie, le Kazakhstan et la Russie qui a été, depuis, rejointe par l’Arménie. L’Union européenne reste le premier partenaire de la Russie même si ses parts de marché dans les échanges extérieurs sont passées de 49 à 38 %, entre 2013 et 2020, en raison notamment des embargos.
Malgré les sanctions mises en œuvre à partir de 2014 par l’Union européenne et les États-Unis, l’économie russe fait preuve de résilience. La crise sanitaire a entraîné une chute des prix du pétrole et du gaz, principales sources de recettes pour l’État et le pays mais celle-ci a été de courte durée et a pu être compensée par les fonds souverains sans recours massif à l’endettement. La dette extérieure russe s’élevait fin avril à 459 milliards de dollars, en recul de 37 % par rapport à son niveau de 2013. Les comptes extérieurs de la Russie restent excédentaires de plus de 2 % du PIB. Avec la hausse du cours du pétrole depuis la fin de l’été, celui-ci devrait s’accroître. Les comptes publics sont relativement sains même si la dépendance au pétrole reste forte. Après un déficit de 3,9 % du PIB en 2020, le solde public devrait être à nouveau positif en 2021. La dette publique demeure faible à 18 % du PIB. Après avoir atteint des sommets à la fin des années 1990, le taux de chômage demeure faible en Russie, aidé par la baisse de la population active. En juin 2021, il s’élevait à 4,7 %.
Au-delà des chocs conjoncturels, la croissance potentielle de la Russie est faible en raison notamment de son déclin démographique et de la faiblesse de l’investissement. De 1991 à 2020, la population russe est passée de 149 à 145 millions d’habitants, après avoir connu un point bas à 143 millions dans les années 2000. L’épidémie de covid a entraîné une diminution de la population de plus de 500 000 personnes. La Russie se caractérise par une faible natalité qui s’accompagne d’une mortalité précoce, l’espérance de vie étant de 72 ans. Pour contrecarrer la diminution de la population active, les autorités ont décidé en 2018 de reculer l’âge de la retraite. Malgré la succession des plans de modernisation, la Russie reste dépendante de la rente pétrolière. La transition énergétique l’oblige à revoir son modèle. Le gouvernement a comme atouts d’importantes réserves de terres rares nécessaires pour l’essor des énergies renouvelables. Le gaz qui est moins émetteur de gaz à effet de serre que le pétrole permettrait de palier également au déclin programmé de ce dernier. La place de la Russie dans le commerce international est amplement discutée au sein du pouvoir. Certains souhaiteraient réduire l’influence des échanges en optant pour un isolationnisme quand d’autres souhaitent les maintenir tout en développant des outils pour s’affranchir des États-Unis, en particulier en ce qui concerne les moyens de paiements. De l’époque des tsars à celle d’aujourd’hui en passant par le régime soviétique, les problématiques russes sont constantes : la crainte de l’encerclement, l’isolationnisme ou la tentation de l’immersion soit à l’ouest soit à l’est dans le commerce international, ainsi que la réflexion autour de la constitution d’une grande zone d’influence. Le plus grand pays du monde en termes de superficie, doté, en quantité, d’importantes réserves de matières premières et soutenu par une histoire millénaire est toujours à la recherche, quels que soient les régimes en place, d’un modèle de croissance viable.