Le Coin des Tendances -Union européenne – élargissement – espérance de vie
Les défis de l’élargissement de l’Union européenne
Dix ans après l’adhésion de la Croatie, l’Union européenne envisage un élargissement à de nouveaux se situant dans les Balkans et à proximité de la Russie. En 2022, la guerre en Ukraine a profondément modifié la donne géopolitique sur le continent européen en mettant au cœur de l’actualité la frontière orientale de l’Union. Depuis la chute du Mur de Berlin en 1989 et l’éclatement de la Yougoslavie en 1992, aucun évènement n’avait eu autant de conséquences pour l’Europe.
La chute du Mur de Berlin avait conduit à la réunification de l’Allemagne en 1990, entraînant de facto l’intégration de l’ex-République Démocratique d’Allemagne (DDR) dans la Communauté Européenne. La dissolution du Pacte de Varsovie et la disparition de l’URSS en 1991 amènent une série d’adhésions. En 1995, des États neutres comme l’Autriche, la Finlande et la Suède intègrent l’Union. En 2004, dix nouveaux États, en majorité issus d’Europe centrale, s’ajoutent aux quinze déjà membres : Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la Slovaquie, la Slovénie et la Tchéquie. Deux États supplémentaires, la Bulgarie et la Roumanie, complètent en 2007 ce cinquième élargissement. En 2013, la Croatie devient le 28e membre de l’Union avant que cette dernière ne perde, en 2020, le Royaume-Uni. En parallèle aux élargissements, l’Union européenne s’est dotée en 1999 d’une monnaie commune (pour 20 États membres) et a renforcé son rôle en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense.
En 2022, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a créé un choc tant économique que diplomatique. L’arrêt des livraisons de gaz et de pétrole russe a souligné la vulnérabilité énergétique des États européens. Les États d’Europe centrale et du Nord ont pris conscience de l’hégémonisme croissant de leur puissant voisin russe. Face à cette menace, la Finlande a adhéré à l’OTAN et la Suède devrait le faire prochainement. Pour assurer une coordination des politiques étrangères, l’Union européenne a favorisé la création de la Communauté politique européenne qui est un forum régulier réunissant plus de 40 États européens – de l’océan Atlantique à la mer Noire. L’Union européenne a pris des décisions de grande envergure en encourageant les États membres à délivrer des armes à l’Ukraine et à mettre fin aux importations de gaz russe. Par peur de la Russie, de nouveaux États ont demandé leur adhésion à l’OTAN mais également à l’Union européenne. Leur adhésion est censée les protéger d’une attaque russe. L’Union de création avant tout économique devient un espace de sécurité pour les États membres. Ces dernières années, l’Union européenne n’attirait guère. Les dissensions internes, le départ du Royaume-Uni, les difficultés économiques limitaient les vocations. Les valeurs démocratiques et libérales de l’Union européenne attirent moins, au point que certains États membres, comme la Pologne ou la Hongrie les contestent de l’intérieur. Avant même la guerre en Ukraine, un frémissement s’était fait jour sur le front des adhésions. La crise covid a renforcé l’Union européenne en soudant dans l’adversité les membres. Dans un monde dominé par les grands ensembles que sont les États-Unis, la Chine ou l’Union européenne, les petits États européens souhaitent intégrer cette dernière afin de disposer d’un système de garantie en particulier sur le terrain commercial. La Commission de Bruxelles a mis en place un plan d’investissement, « Next Generation », financé par emprunt communautaire, afin de faciliter la transition énergétique. Elle facilite l’installation d’usines de batteries, de microprocesseurs, etc. Les autres États européens souhaiteraient également bénéficier de tels appuis.
Le 6 octobre dernier, les 27 chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne se sont réunis à Grenade notamment pour étudier un nouvel élargissement. Neuf nouveaux pays pourraient ainsi entrer dans l’Union dont la Serbie, l’Albanie et quatre autres pays des Balkans occidentaux, ainsi que l’Ukraine, la Moldavie et peut-être la Géorgie. Ses adhésions en portant le nombre d’États membres de 27 à 36 nécessite des changements institutionnels or ceux-ci sont toujours compliqués à réaliser comme en témoigne l’échec en 2005 du Traité Constitutionnel Européen.
Bien que le processus d’intégration soit long, les candidats ne devant réellement intégrer l’Union que vers 2030, il marque un changement majeur. Depuis l’adhésion de la Croatie, l’idée dominante était que l’Union avait atteint sa taille critique. Certaines voix se faisaient régulièrement entendre pour regretter les précédents élargissements. Le gouvernement français a été parmi les plus inflexibles sur le sujet des adhésions non seulement à l’encontre de la Turquie mais aussi à l’égard des États des Balkans et de l’Ukraine
Les candidats à l’entrée dans l’Union européenne sont des pays pauvres. Leur PIB par habitant est de 50 % inférieur à la moyenne de l’Union. Le plus pauvre et le plus peuplé est l’Ukraine. Le coût de l’adhésion sera élevé, ce qui a été soulevé notamment par la France en 2022. Emmanuel Macron avait alors indiqué que l’adhésion ne pourrait pas avoir lieu avant le milieu du siècle. Face à la pression des autres États membres, notamment de l’Allemagne et les États d’Europe centrale, il a opté pour une position plus ouverte sur le sujet.
Pour respecter les règles européennes, les candidats à l’adhésion devront réaliser des efforts importants en particulier en ce qui concerne le respect de l’État de droit. Par ailleurs, certains d’entre eux sont confrontés à une occupation militaire de la part de la Russie : La Moldavie, la Géorgie et l’Ukraine or, jusqu’à maintenant, l’Union était un espace de paix entretenant de bonnes relations avec ses voisins. La Serbie et le Kosovo connaissent des tensions régulières allant jusqu’à des escarmouches militaires. La Serbie demeure proche de la Russie et a refusé d’appliquer jusqu’à maintenant les embargos. La Bosnie est toujours déchirée par les tensions ethniques. Le Monténégro fait face depuis de nombreux mois à une crise politique intérieure. Parmi les pays candidats, si les coalitions au pouvoir sont en règle générale pro-européenne, il n’en est pas de même pour leur opposition, souvent nationaliste. Cette absence de consensus n’est pas spécifique aux États candidats, les pays membres étant également traversés par ces mêmes divisions au sein des partis politiques et des opinions.
L’Union européenne a souvent déçu les États candidats en reportant d’année en année l’examen de leur adhésion. Il en a résulté une incompréhension et une méfiance. Pour prouver la nouvelle volonté d’intégration de l’Union, la Commission de Bruxelles a indiqué que les pays candidats pourraient bénéficier des avantages de l’Union avant même d’en devenir membres à part entière. L’objectif est d’apporter des résultats immédiats aux réformes entreprises et de réaliser une intégration par étape. Les États candidats pourraient ainsi participer aux politiques de l’Union telles que les interconnexions énergétiques ou les échanges d’étudiants et recevoir des dotations au fur et à mesure de l’avancée des réformes.
En parallèle, les États membres doivent réformer les institutions européennes et préparer l’élargissement. Les enjeux seront notamment budgétaires. Même si le budget européen est faible, 1,2 % du PIB, il fait l’objet d’intenses négociations. L’arrivée de nouveaux membres pauvres signifie que les actuels bénéficiaires des fonds régionaux pourraient être moins bien traités. La politique agricole commune, représentant un tiers du budget, sera profondément modifiée avec l’arrivée de l’Ukraine, un État essentiellement agricole. La Pologne dont l’aptitude à la négociation et au compromis est reconnue a déjà pris les devants en bloquant les importations de céréales en provenance de l’Ukraine. En passant à 36, les États membres actuels deviendraient sans nul doute tous contributeurs nets quand, aujourd’hui, 18 sont bénéficiaires nets sur le plan budgétaire.
Sur le plan institutionnel, une Union à 36 posera le problème de la représentation des petits États au sein de la Commission. Le maintien de la règle de l’unanimité posera également un problème. À 36, tout État pourra être tenté de négocier son vote ou de bloquer toute décision ne le satisfaisant pas. Cette règle pourrait paralyser un peu plus l’Union européenne. Paris et Berlin sont favorables à étudier une réduction de la liste des sujets soumis à la règle de l’unanimité mais les États d’Europe centrale y sont opposés.
Pour avancer sur le terrain institutionnel, un groupe de réflexion mandaté par les gouvernements français et allemand a suggéré une structure « à plusieurs niveaux », avec davantage de projets (comme l’euro) adoptés par seulement certains États membres. D’autres veulent faciliter la punition des gouvernements qui bafouent les normes démocratiques, comme la Hongrie aujourd’hui, en suspendant leur droit de vote sur les questions européennes. Pour les pays d’Europe centrale, le projet de réforme institutionnelle viserait surtout à ralentir le processus d’adhésion.
La vie éternelle, le dernier rêve
À la veille de sa mort en 1603, à quelques mois de ses 70 ans, la Reine Elisabeth Ire déclara « tous mes biens pour un instant ». Une des femmes les plus riches de son époque ne put repousser l’heure de sa disparition. Aujourd’hui des milliardaires et des chercheurs entendent pouvoir allonger de manière significative l’espérance de vie. Les moyens dépensés pour y parvenir sont conséquents. Les recherches menées soulèvent cependant des questions éthiques, d’autant plus que les résultats sont encore faibles.
Chaque année depuis 1950, l’espérance de vie moyenne dans le monde a augmenté de 18 semaines. Au sein des pays occidentaux, elle se situe aujourd’hui autour de 80 ans. Les pays émergents rattrapent rapidement ces derniers. En 2050, la planète comptera 3,7 millions de centenaires, soit trois fois plus rapporté au nombre d’habitants en 2015. L’espèce humaine n’est pas sans limite. Seul un centenaire sur 1000 vivra au-delà de 110 ans, 120 ans demeure une frontière difficilement dépassable. Le record de Jeanne Calment de 122 ans est même sujet à caution. Ces dernières années, l’espérance de vie est en recul dans plusieurs pays dont les États-Unis. L’espérance de vie en bonne santé tend à augmenter moins lentement que celle à la naissance.
Des milliardaires comme Peter Thiel, co-fondateur de PayPal, Larry Page et Sergey Brin, co-fondateurs de Google, ou encore Jeff Bezos, fondateur d’Amazon, investissent dans des laboratoires de recherche qui étudient les moyens de ralentir le vieillissement. En mars 2023, Sam Altman, directeur d’OpenAI, a révélé avoir investi en 2021, 180 millions de dollars dans Retro Biosciences, une société de la Silicon Valley fondée dans le but d’ajouter dix ans à l’espérance de vie humaine en bonne santé. La lutte contre le vieillissement est un marché en pleine progression qui attire de réels chercheurs mais aussi des charlatans à la recherche de gains rapides. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration refuse de reconnaître la « vieillesse » comme un état pathologique, et donc comme une cible thérapeutique appropriée pouvant donner lieu à des aides publiques et à une couverture sociale. Néanmoins, des progrès sont réalisés. Des expériences menées par plusieurs laboratoires de recherche ont réussi à allonger de manière substantielle la durée de vie de souris. La modification des gènes ouvre de nouveaux horizons à la recherche. L’accès s à de grandes quantités de données sur les séquences génétiques, la capacité de produire des cellules souches personnalisées, qui restent éternellement jeunes permettent aux chercheurs de travailler sur de nouvelles options thérapeutiques. Des outils de diagnostic offrent également aux scientifiques les moyens de calculer les « âges biologiques » des corps et des organes et de les comparer aux âges réels du calendrier. Cela permet d’expliquer les facteurs de vieillissement et de trouver des solutions pour le ralentir. La modification des gênes est un art difficile. Des chercheurs ont prouvé que des gènes impliqués dans la maladie d’Alzheimer offrent un avantage reproductif aux jeunes. Les supprimer ou les modifier pourrait porter atteinte à la fertilité. Des recherches sont menées afin de faciliter la réparation interne du corps en jouant sur les gènes. Cela sera sans nul doute une voie à approfondir à condition que les gènes se transmettent de génération en génération sans effets négatifs.
La plupart des gènes ont des variantes, appelées allèles, fruit de mutations héréditaires, Les centenaires ont en règle générale de telles variantes qui expliquent leur longévité. Ces mutations expliquent pourquoi les centenaires sont moins susceptibles de mourir d’un cancer ou d’une maladie cardiaque que les octogénaires. Cela suggère que les personnes qui vivent longtemps peuvent le faire parce qu’elles bénéficient d’une forme de protection relativement rare contre les maladies qui tuent les jeunes personnes âgées. Mais ces mutations ne constituent pas une garantie contre toutes les maladies. Une étude de l’établissement d’enseignement supérieur britannique, King’s College, a révélé que les centenaires étaient bien souvent vulnérables aux pneumonies. La biotechnologie est également un axe de recherche important. Une équipe de l’Université d’Harvard, menée par le chercheur George Church, estime que la lutte contre le vieillissement nécessite d’intervenir sur plusieurs cibles en même temps. Elle s’intéresse notamment à la question de l’accumulation de protéines aberrantes qui accélèrerait la maladie d’Alzheimer et sur les inflammations chroniques. Au-delà de ces recherches, parmi les explications de la longévité demeurent les facteurs liés à l’alimentation, à l’exercice et au sommeil. Ce triptyque offre l’avantage d’être moins coûteux que les solutions en cours d’expérimentation par les différentes équipes de chercheurs et plus faciles à diffuser auprès des populations