C’est déjà hier (2 juin 2018=
Inflation, la barre des 2 % est franchie
Depuis plus de cinq ans, l’objectif de la Banque centrale européenne était de replacer l’inflation annuelle à 2 %. Pour le moment, son atteinte n’est possible qu’en période de tension sur les prix pétroliers. L’inflation sous-jacente calculée sans prendre en compte les produits et services connaissant une forte volatilité, reste en-deçà des 2 %.
La remontée des prix n’est néanmoins pas sans incidence sur la conjoncture. Elle provoque une réduction du pouvoir d’achat des ménages, ce qui pèse sur la consommation et donc la croissance. Cette dernière au sein des pays avancés, et tout particulièrement en Europe, reste très sensible aux variations du prix du pétrole. La reprise intervenue fin 2016 et son épanouissement en 2017 se sont construits sur la base d’un pétrole bon marché. Le doublement du prix du baril en quelques mois pourrait peser plus lourdement que prévu sur la croissance de 2018.
En France, selon l’INSEE, les prix à la consommation auraient ainsi augmenté de 2,0 % sur un an après +1,6 % en avril. Sans surprise, le rebond d’inflation est imputable à l’augmentation des prix de l’énergie. Les prix des produits alimentaires ont, par ailleurs, contribué à l’accélération constatée en mai. Les prix des produits manufacturés reculeraient un peu moins que le mois précédent. Sur un an, l’indice des prix à la consommation harmonisé serait en hausse à +2,3 % après +1,8 % en avril. Avec un taux d’inflation à plus de 2 %, le rendement réel du Livret A est en chute libre. Cette situation devrait se poursuivre en raison du gel du taux jusqu’en 2019 et de l’instauration d’une nouvelle formule qui minore la composante inflation (le taux sera égal à la moyenne des taux des marchés monétaires et de l’inflation avec un plancher à 0,5 %).
Pour la zone euro, la hausse des prix aurait été de 1,9 % en mai 2018, contre 1,2 % en avril selon une estimation rapide publiée par Eurostat. Comme pour la France, l’énergie est responsable de ce passage au-dessus des 2 %. Le prix de l’énergie a augmenté de 6,1 % en mai comparé à 2,6 % en avril. Les prix de l’alimentation, alcool et tabac ont, de leur côté, progressé de 2,6 % (comparé à 2,4 % en avril), ceux des services de 1,6 % (comparé à 1,0 % en avril) et ceux des biens industriels non énergétiques de 0,2 % (comparé à 0,3 % en avril).
Les consommateurs français aux abonnés absents
Déjà peu vaillantes au cours du 1er trimestre, les dépenses de consommation des ménages ont reculé de 1,5 % au mois d’avril. Depuis le début de l’année, les Français privilégient l’épargne comme en témoignent les bons résultats de l’assurance vie et du Livret A. La hausse des prélèvements obligatoires (CSG, taxes sur le tabac et sur le gazole) pèse sur le pouvoir d’achat des ménages.
La baisse s’explique notamment par la contraction des dépenses d’énergie et des dépenses alimentaires. Les achats d’habillement sont en revanche orientés à la hausse.
En avril, la consommation d’énergie s’est contractée de 5,4 % après -0,9 % en mars. Le temps clément explique en partie cette évolution. La consommation alimentaire se replie de 1,8 %, après deux mois de hausse (+0,2 % en mars et +1,3 % en février). Les achats diminuent tant dans les produits agricoles non transformés (fruits, légumes), que dans les produits agro-alimentaires (viandes, produits laitiers) et les boissons. En revanche, la consommation de tabac se redresse très légèrement en avril, après la chute du mois précédent faisant suite à l’augmentation des prix au 1er mars 2018.
En avril, les dépenses en biens fabriqués ralentissent (+0,2 % après +0,5 % en mars). Les achats de biens d’équipement du logement sont en baisse (−1,8 %), notamment ceux de meubles et d’équipements de communication (smartphones). Les dépenses en matériels de transport sont quasi stables (+0,1 %) : le retournement du marché de l’automobile d’occasion est compensé par une reprise des achats de véhicules neufs. Après une baisse marquée en mars, les dépenses en habillement-textile rebondissent vivement en avril (+2,5 % après −1,7 %). Cette reprise est portée par les achats de vêtements et de chaussures.
2017, la belle année !
2017 sera-t-elle, pour la France, une exception décennale par la vigueur de sa croissance économique ? Il est encore trop tôt pour conclure sur ce sujet. Le PIB de la France a donc atteint 2 291,7 milliards d’euros en 2017 en hausse de 2,2 % par rapport à 2016, plaçant la France en 3e position au sein de l’Union européenne derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni. Le retour de la croissance a facilité le passage du déficit public en dessous de 3 % du PIB. Cette embellie a été portée par la forte progression de l’investissement des entreprises et des ménages. La France a bénéficié des faibles cours du pétrole et de la croissance retrouvée du commerce international. L’année dernière, toutes les puissances économiques du G20 étaient en expansion, ce qui a favorisé les échanges commerciaux.
La consommation effective des ménages a été de 1 191 milliards d’euros en progression de 1 % par rapport à 2016. Leurs dépenses d’investissement ont atteint 120,9 milliards d’euros (+5,6 %). L’année dernière, les entreprises ont investi pour 515,9 milliards d’euros (+4,5 %). Les exportations se sont élevées à 707,7 milliards d’euros en hausse de 4,5 % quand les importations augmentaient de 4 % à 733 milliards d’euros. Le besoin de financement extérieur de la France a été de 12,8 milliards d’euros en 2017. Les services et les revenus des capitaux n’ont pas suffi à effacer le déficit commercial. Il en résulte un appauvrissement global du pays.
Une faible augmentation du pouvoir d’achat des ménages en 2017
Compte tenu de la croissance de la population et de l’évolution de la taille des ménages, le pouvoir d’achat au niveau individuel (pouvoir d’achat par unité de consommation) a augmenté de 0,7 % en 2017.
En 2017, le revenu disponible brut des ménages a progressé de 2,6 % en valeur (après + 1,7 % l’année précédente) mais les prix ont augmenté de 1,3 %. Le pouvoir d’achat du revenu disponible n’a donc progressé que de 1,3 % contre +1,8 % en 2016. La progression des revenus s’explique par l’amélioration de ceux liés à l’activité (contribution de 1,6 point) et de ceux liés au patrimoine (contribution de 0,8 point). Les salaires nets reçus par les ménages augmentent plus vite qu’en 2016 (+ 3,0 % après + 1,8 %) grâce à l’amélioration de la situation sur le marché du travail. Les revenus du patrimoine nets perçus par les ménages ont augmenté de 4,9 % après avoir baissé de 5,2 % en 2016. Cette progression est imputable à la hausse des revenus générés par les contrats d’assurance-vie. En prenant en compte les dépenses de consommation prises en charge par les collectivités publiques (éducation, santé, aides au logement versées aux locataires, etc.), le revenu disponible ajusté des ménages s’est accru en 2017 de 2,5 % après + 1,6 % en 2016
Un taux d’épargne en hausse grâce à l’immobilier
En raison de la moindre progression des dépenses de consommation, le taux d’épargne des ménages a progressé de 0,3 point pour s’établir à 14,3 %. En revanche, le taux d’épargne financière des ménages a stagné à 4,4 %, du fait de la vive progression de leurs dépenses d’investissement en particulier dans l’immobilier (+ 7,2 % après + 3,6 % en 2016).
Le taux de marge des sociétés non financières stable
L’excédent brut d’exploitation des entreprises a augmenté de 3,6 %, après + 1,6 % en 2016. En 2015, la hausse avait été de 8,8 % grâce à la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Du fait de l’évolution des salaires et des impôts sur la production, le taux de marge est resté stable à 31,9 % en 2017.
Le secteur financier en phase de digestion des taux d’intérêt faibles
La valeur ajoutée des sociétés financières baisse de 9,0 % après -6,7 % en 2016. Cette évolution est imputable pour les banques à la contraction des marges d’intermédiation pénalisées par la hausse des taux interbancaires. En revanche, la production de services facturés augmente, mais insuffisamment pour compenser la baisse des marges d’intermédiation.
Avec une fin d’année en fanfare, l’économie française semble avoir atteint un maxima compte tenu de son niveau de productivité et de l’employabilité de sa population active. Malgré le retard de croissance accumulé notamment avec l’Allemagne, la France n’apparaît pas, pour le moment, en situation de compenser rapidement l’écart qui s’est ainsi créé.
Coup de blues sur la croissance confirmé
L’INSEE a corrigé la croissance du 1er trimestre à la baisse à 0,2 % contre 0,3 % initialement. Cette révision s’explique par un ralentissement plus fort que prévu de l’investissement des entreprises, mais aussi de la consommation des ménages. Ce résultat affiné confirme le coup d’arrêt par rapport au quatrième trimestre 2017, où la croissance avait atteint 0,7 %.
Dans le détail, les dépenses de consommation des ménages n’ont progressé que de 0,1 % entre janvier et mars, quand elles avaient augmenté de 0,2 % lors des trois mois précédents. La consommation en biens est « en léger repli » pour le deuxième trimestre consécutif tandis que celle en services « ralentit légèrement ».
Les investissements des entreprises n’ont été que de +0,1 % quand la progression avait été initialement évaluée à +0,5 %. La note de l’INSEE souligne que « ce ralentissement est principalement dû au repli de l’investissement en biens manufacturés (-1,3 % après +1,6 % au dernier trimestre 2017) ». L’investissement des ménages a également enregistré une moindre croissance avec un taux de +0,2 % contre +0,6 % au trimestre précédent, du fait d’un ralentissement dans le secteur de la construction.
Le commerce extérieur, qui s’était fortement redressé entre octobre et décembre, a quant à lui eu un effet nul sur la croissance au cours du 1er trimestre. Les exportations ont reculé de 0,3 % après une hausse de 2,3 %. Les importations ont, de leur côté, diminué de 0,3 % après avoir augmenté de 0,1 %.
Selon l’Insee, ce piètre résultat n’est pas encore inquiétant compte tenu du dynamisme de la fin de l’année dernière. L’acquis de croissance est estimé à 1,2 %. La tendance est néanmoins mauvaise. Pour le 2e trimestre, la Banque de France considère que la croissance ne va pas dépasser 0,3 %. La hausse du prix du pétrole et la montée des incertitudes européennes avec l’Italie et l’Espagne ainsi que la résurgence du protectionnisme sont autant de facteurs pouvant jouer contre la croissance. En France, l’augmentation des prélèvements obligatoires et le recul du niveau de confiance des chefs d’entreprise ainsi que des ménages pèsent sur l’activité.
Le gouvernement, dans son programme de stabilité budgétaire publié mi-avril, a misé sur une croissance de 2 % cette année. Cette prévision qui est légèrement supérieure à celle de la Banque de France (1,9 %) mais inférieure à celle du FMI (2,1 %) n’est pas complètement obsolète mais sera, sans nul doute, plus difficile à atteindre que prévu.
Plein emploi dans le Nord et à l’Est mais pas dans le Sud
L’Europe à deux vitesses est avant tout celle de l’emploi. D’un côté, plusieurs États sont en situation de plein emploi quand d’autres sont encore confrontés à un chômage de masse au sein de l’Union européenne et de la zone euro. Au mois d’avril dernier, les taux de chômage les plus faibles ont été enregistrés en République tchèque (2,2 %), à Malte (3,0 %) et en Allemagne (3,4 %). Les taux de chômage les plus élevés ont quant à eux été relevés en Grèce (20,8 % en février 2018), en Espagne (15,9 %), la Croatie (11,2 %) et la France (9,2 %). La France se caractérise par la lenteur de la baisse de son chômage. Il n’a baissé que de 0,3 point en un an quand il a diminué de 1,7 point en Espagne et de 2,4 points en Croatie. Seule l’Italie obtient un moins bon résultat en la matière avec un gain nul sur un an.
Pour l’ensemble de la zone euro, le taux de chômage corrigé des variations saisonnières s’est établi à 8,5 % en avril 2018, en baisse par rapport au taux de 9,2 % en avril 2017. Il s’agit du taux le plus faible enregistré dans la zone euro depuis décembre 2008. Dans l’Union européenne, le taux de chômage s’est établi à 7,1 % en avril 2018, en baisse par rapport au taux de 7,8 % d’avril 2017. Cela demeure le taux le plus faible enregistré depuis septembre 2008. En avril 2018, le taux de chômage aux États-Unis s’est établi à 3,9 %, en baisse par rapport au taux de 4,4 % en avril 2017.