6 septembre 2024

Coin de la Conjoncture – production industrielle – finances publiques – industrie – TNS

Dérive sans surprise des finances publiques

L’annonce par le ministère de l’Économie et des Finances d’un déficit public pour la France en 2024, plus élevé que prévu, n’est pas une surprise en soi. L’exercice 2023 avait déjà été marqué par une dérive, le déficit atteignant 5,5 % du PIB alors qu’il ne devait pas dépasser 4,9 %. Les engagements européens apparaissent de plus en plus difficiles à respecter, et le futur gouvernement sera contraint de prendre de difficiles décisions.

Le déficit public pourrait s’élever à 5,6 % du PIB en 2024, selon des documents envoyés par Bruno Le Maire, le ministre démissionnaire de l’Économie, et Thomas Cazenave, le ministre délégué aux Comptes publics, aux principaux responsables parlementaires des questions de finances publiques. Ce taux est supérieur de 0,5 point à l’objectif fixé par le ministre du Budget. Pour 2025, le déficit pourrait, de manière tendancielle, atteindre 6 % du PIB.

Cette dérive est assez logique. Le projet de loi de finances pour 2024 avait été élaboré sur la base de la loi de finances 2023 et de son déficit de 4,9 %. Or, celui-ci a finalement été de 5,5 % du PIB. En outre, le projet de budget de 2024 a été conçu en prévoyant un taux de croissance de 1,4 %. Ce taux ne devrait cependant pas dépasser 1 %. Dans ces conditions, le montant des recettes sera plus faible. Depuis quelques semaines, Bercy constate des rentrées fiscales inférieures aux prévisions, notamment pour la TVA, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés. Par ailleurs, les finances des collectivités locales enregistrent un réel dérapage. Les dépenses des collectivités locales ont fortement augmenté et expliqueraient à hauteur de 16 milliards d’euros la dégradation des comptes publics pour 2024.

L’absence de gouvernement ne favorise pas la maîtrise des comptes publics, même si le ministre du Budget a effectué un gel de crédits de 10 milliards d’euros. L’annonce, en ce début de septembre, de la dégradation du déficit pourrait viser à dégager ou atténuer la responsabilité du ministère de l’Économie.

Pour maintenir le déficit autour de 5,1 % du PIB, les pouvoirs publics devront réaliser 15 milliards d’euros d’économies. Cette dérive complique singulièrement la conception du projet de loi de finances pour 2025. Une remise à niveau des comptes devra être effectuée, mais le futur gouvernement disposera de peu de marges de manœuvre. L’éventuelle suppression de la réforme des retraites, dont le coût varie entre 8 et 20 milliards d’euros, nécessitera des compensations. L’abrogation de cette réforme ne devrait concerner que les aspects liés à l’âge de départ. En revanche, les améliorations du minimum contributif et des droits des femmes en matière de retraite ne seraient certainement pas remises en cause. Or, ces mesures étaient financées par les gains générés par le report de l’âge légal.

Le ministère de l’Économie préconiserait une diminution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des collectivités locales en 2025 en cas d’absence d’économies de leur part. Les équipes de Bercy auraient également préparé des textes pour une taxation des rentes des énergéticiens et des rachats d’actions, des mesures qui pourraient rapporter 3 milliards d’euros en 2024.

Le futur gouvernement devra prendre d’autres dispositions afin de contenir le déficit public. Une surtaxe de l’impôt sur les sociétés, une majoration de l’impôt sur le revenu pour les contribuables aisés, ou encore la réinstauration de l’impôt sur la fortune sont autant de pistes envisageables.

Consommation, petite progression en juillet

En juillet 2024, les dépenses de consommation des ménages en biens augmentent de 0,3 % en France, après une baisse de 0,6 % en juin. Ce léger rebond est attribuable à l’augmentation de la consommation d’énergie (+0,9 %) et à celle des produits alimentaires (+0,4 %). La consommation de biens fabriqués, quant à elle, est restée stable.

Cercle de l’Épargne – données INSEE

Quatre millions de non-salariés en France

Fin 2022, la France comptait, selon l’INSEE, environ 30 millions de personnes en emploi, dont 4 millions exerçaient une activité non salariée, soit à titre principal soit à titre secondaire. Ces non-salariés se répartissent entre entrepreneurs individuels, gérants majoritaires de sociétés (les non-salariés « classiques ») et micro-entrepreneurs. Parmi eux, 400 000 travaillaient dans le secteur agricole. En dehors de ce secteur, les non-salariés sont principalement présents dans les services aux entreprises (26 %), aux particuliers (22 %), la santé (15 %), le commerce (15 %) et la construction (12 %), tandis qu’ils sont moins représentés dans l’industrie (5 %) et les transports (4 %).

Augmentation des travailleurs non salariés grâce aux micro-entrepreneurs

En 2022, hors secteur agricole, le nombre de non-salariés a continué d’augmenter (+3,9 %), après +8,4 % en 2021 et +4,0 % en 2020. Depuis 2008, cette hausse atteint 72 %, soit 1,5 million de personnes supplémentaires. Cette croissance est largement due à l’essor des micro-entrepreneurs, dont les plafonds de chiffre d’affaires ont été relevés en 2018 et 2020. En 2022, le nombre de micro-entrepreneurs économiquement actifs a progressé de 7,9 %, bien que ce rythme soit inférieur à celui de 2021 (+18,9 %). Depuis 2018, le nombre de micro-entrepreneurs actifs a augmenté de 60 %, soit 705 000 personnes supplémentaires.

Quant aux non-salariés classiques, leur nombre a légèrement augmenté en 2022 (+0,4 %), après une stabilisation en 2020 (-0,2 %) et un rebond en 2021 (+0,5 %). Ils étaient 1,8 million fin 2022, répartis presque à égalité entre entrepreneurs individuels (51 %) et gérants majoritaires (49 %). Ces non-salariés se concentrent dans les secteurs de la santé (25 %) et des services aux entreprises (22 %), où leurs effectifs ont respectivement augmenté de 1,6 % et 2,3 % en 2022.

Prédominance des micro-entrepreneurs

Fin 2022, l’INSEE comptait 1,8 million de micro-entrepreneurs économiquement actifs, soit deux fois plus qu’en 2016. Ils représentaient près de la moitié (49 %) des non-salariés hors secteur agricole, et même plus des trois quarts dans certains secteurs comme les services à la personne ou le commerce de détail hors magasin. À l’inverse, ils sont quasi absents des professions réglementées comme les avocats ou les médecins.

En 2022, le nombre de micro-entrepreneurs a augmenté dans presque tous les secteurs, avec une forte hausse dans les services administratifs (+17,3 %) et personnels (+16,4 %). Toutefois, pour la première fois depuis la création du statut, leur nombre a diminué dans les transports (-16,6 %), en particulier dans la livraison à domicile, secteur qui avait fortement progressé pendant la crise sanitaire.

Des revenus très variables

En 2022, les non-salariés classiques percevaient en moyenne 4 030 euros de revenu mensuel. Toutefois, 11 % d’entre eux n’ont pas dégagé de bénéfices ou ne se sont pas versés de rémunération, un chiffre en hausse par rapport à 2019 (8 %). Les revenus varient considérablement selon les secteurs, allant de 9 720 euros pour les médecins à 1 480 euros dans le commerce de détail hors magasin. En moyenne, les revenus des non-salariés classiques ont baissé de 5,2 % en euros constants en 2022, en raison de la forte inflation et de la hausse des coûts.

Les micro-entrepreneurs, quant à eux, percevaient en moyenne 670 euros par mois pour leur activité non salariée, soit six fois moins que les non-salariés classiques. En 2022, un quart des micro-entrepreneurs (hors revenus nuls) gagnait moins de 90 euros par mois, tandis que 10 % d’entre eux percevaient plus de 1 750 euros mensuels.

En 2022, le revenu moyen des micro-entrepreneurs a progressé de 1,4 % malgré l’inflation, dépassant ainsi son niveau d’avant-crise de 6,1 %. Cependant, cette augmentation des micro-entrepreneurs, dont les revenus sont inférieurs à ceux des non-salariés classiques, pèse sur la moyenne globale des revenus des non-salariés, qui a baissé de 6,9 % en euros constants en 2022 par rapport à 2019.

Répartition hommes-femmes

En 2022, 40 % des travailleurs non salariés étaient des femmes, contre 31 % en 2008. Les femmes non salariées classiques percevaient en moyenne 20 % de moins que leurs homologues masculins, en partie à cause d’un volume de travail plus faible et d’entreprises généralement plus petites. Chez les micro-entrepreneurs, les femmes gagnaient en moyenne 600 euros par mois, contre 720 euros pour les hommes, un écart de 17 %.

La montée en puissance du statut de travailleur non salarié est, en France, portée en grande partie par celle des micro-entrepreneurs. Elle reflète la transformation du paysage économique et le souhait d’un nombre croissant d’actifs de créer leur activité. Bien que le régime de micro-entrepreneur ait permis à un grand nombre d’individus d’accéder à une forme d’indépendance professionnelle, il n’est pas sans limite que ce soit au niveau des revenus ou de la protection sociale.

Pour l’avenir, les défis seront multiples. D’un côté, il sera essentiel d’accompagner les micro-entrepreneurs vers des activités plus pérennes et génératrices de revenus décents en facilitant la migration vers d’autres statuts. De l’autre, une réflexion doit s’engager sur la manière d’améliorer la protection sociale des TNS et des micro-entrepreneurs en particulier.

Production industrielle en fort recul, en juillet, en France

En juillet 2024, la production industrielle a enregistré une baisse, selon l’INSEE, de 0,9 % dans l’industrie manufacturière après une hausse de 0,9 % en juin. Pour l’ensemble de l’industrie, la baisse est de 0,5 % après une augmentation de 0,8 % le mois précédent.

La chute de la production a été particulièrement marquée dans la fabrication de matériels de transport (-4,9 % après +3,1 % en juin). Cette diminution atteint 4,6 % dans l’industrie automobile (après +2,8 % en juin) et 5,1 % dans la fabrication d’autres matériels de transport (après +3,3 %). La production a également reculé dans la fabrication des « autres produits industriels » (-0,6 % après +0,7 %) et de manière plus prononcée dans la cokéfaction et le raffinage (-9,9 % après +12,8 %). Elle diminue à nouveau dans les industries agroalimentaires (-0,3 % après -0,2 %). À l’inverse, la production a progressé dans les industries extractives, énergie et eau (+1,8 % après +0,3 %) et rebondi dans la fabrication de biens d’équipement (+2,0 % après -1,1 %).

Une baisse annuelle de 3 %

Sur les trois derniers mois (mai à juillet 2024), la production est inférieure à celle de la même période en 2023, avec une baisse de 3,0 % dans l’industrie manufacturière et de 2,3 % pour l’ensemble de l’industrie. La production a fortement reculé dans la fabrication de biens d’équipement (-6,8 %) et de matériels de transport (-7,1 %), avec un recul notable dans l’industrie automobile (-17,8 %), mais une légère hausse dans la fabrication d’autres matériels de transport (+0,8 %). La production a également diminué dans la cokéfaction et le raffinage (-5,1 %), ainsi que dans les « autres produits industriels » (-1,5 %) et les industries agroalimentaires (-0,9 %). À l’opposé, elle a progressé dans les industries extractives, énergie et eau (+1,1 %).

Cercle de l’Épargne – données INSEE

Dans le contexte de prix élevés de l’électricité et du gaz facturés aux entreprises, en raison des contrats négociés en 2022 et 2023 pour l’année 2024, les branches industrielles à forte intensité énergétique sont particulièrement vulnérables à l’augmentation de leurs coûts de production, ce qui pourrait affecter leur production. Pour ces secteurs, la production des trois derniers mois (mai à juillet 2024) reste nettement en retrait par rapport au deuxième trimestre 2021, période précédant la forte hausse des prix de l’énergie. Les baisses les plus marquées sont observées dans la sidérurgie (-29,5 %), la fabrication de produits chimiques de base (-17,5 %), la fabrication de verre et articles en verre (-17,3 %) et la fabrication de pâte à papier, papier et carton (-10,2 %).

En ce milieu d’année 2024, l’industrie française, notamment en ce qui concerne les secteurs à forte intensité énergétique, est toujours à la peine. Le recul est important dans des branches clés comme la fabrication de matériels de transport ou les produits chimiques.