9 décembre 2017

Coin des Tendances du 9 décembre 2017

Des Français digitalement mobiles

La digitalisation des Français se poursuit à un rythme assez rapide depuis une quinzaine d’années. Ainsi, près des trois quarts des Français possèdent un smartphone contre 17 % en 2011. 44 % disposent d’une tablette. Symbole que la mobilité l’a emporté, le nombre d’abonnement au téléphone fixe diminue. La quasi-totalité des Français (93 %) est équipée d’un téléphone mobile. En 2017, seulement 12 % de la population ne se connecte jamais à Internet. Plus des trois quarts utilisent tous les jours Internet (76 % +2 points en un an).

La mobilité a pris le dessus. Autre preuve, le taux d’équipement des ordinateurs décline. En outre, les ordinateurs fixes sont désormais cantonnés au monde professionnel ou au monde des « gamers ». Les ordinateurs portables sont également désormais concurrencés par les smartphones. Le marché se segmente de plus en plus avec des offres de plus en plus ciblés. Les ordinateurs grands publics ressemblent de plus en plus à des tablettes que ce soit au niveau performance ou de la présentation. Les ordinateurs pour les professionnels constituent un marché spécifique avec des commandes sur mesure. Par ailleurs, compte tenu de l’engouement pour les jeux vidéo, des gammes spécifiques pour cette activité ont été réalisées par les producteurs d’ordinateurs. Ces derniers sont de moins en moins nombreux. Ils sont essentiellement chinois, Lenovo, Asus et Acer (Taïwan). Il reste encore deux producteurs américains (HP et Apple) et un Japonais (Toshiba).

La fin du téléphone fixe

Le téléphone fixe devient de plus en plus inutile. 79 % des Français utilisent tous les jours leur téléphone portable contre 21 % pour le téléphone fixe. Le téléphone fixe est un objet désuet pour les jeunes générations. 81 % des moins de 17 ans ne l’utilisent pas. Les seuls à encore téléphoner avec le fixe sont les plus de 70 ans (48 % d’entre eux l’utilisent tous les jours).

L’ordinateur reste incontournable surtout pour les diplômés et catégories sociales les plus élevées

Plus de la moitié des Français (53 %) allument chaque jour leur ordinateur à leur domicile. 69 % des diplômés de l’enseignement supérieur ouvrent chaque jour leur ordinateur contre 24 % des non-diplômés. De même, 68 % des détenteurs de hauts revenus s’en servent quotidiennement contre 42 % pour ceux ayant de faibles revenus.

L’ordinateur reste incontournable pour le travail (équipement le plus utilisé par 76 % de la population) tout comme pour effectuer ses achats sur Internet (67 % loin devant le smartphone, 23 %). Les Français privilégient encore les ordinateurs pour envoyer leurs mails (59 % contre 34 % pour les smartphones).

La tablette, un produit de niche

La tablette a du mal à s’imposer. En effet, seulement 21 % des Français s’en servent chaque jour mais 51 % de ceux qui en possèdent une ne l’utilisent jamais. L’utilisation de la tablette est très connotée socialement. 28 % des détenteurs de hauts revenus en ont un usage quotidien contre 14 % pour les bas revenus.

Ces résultats expliquent que le marché des tablettes tend, depuis plusieurs années, à stagner. La concurrence des smartphone, de plus en plus grands, explique cette situation. La tablette intervient en appoint à l’ordinateur. Elle est utilisée avant tout pour consulter la presse, jouer ou regarder des vidéos.

Le smartphone, la porte d’entrée pour Internet

Pour se connecter à Internet, les Français utilisent avant tout leur smartphone (42 %) devant l’ordinateur (38 %) et la tablette (7 %). 90 % des personnes de moins de 40 ans se connectent à Internet via leur téléphone mobile. Cette proportion est de 98 % chez les 18 à 24 ans. Elle atteint déjà 91 % chez les 12 à 17 ans. Les seniors se connectent également avec leur smartphone pour surfer sur Internet (65 % des 60 à 69 ans). Les plus de 70 ans sont 39 % à le faire.

L’accès aux réseaux sociaux s’effectue essentiellement par les smartphones (61 %). Il est à noter que ces derniers font désormais jeu presque égal avec les ordinateurs pour le visionnage des vidéos (46 % des Français préfèrent l’ordinateur contre 40 % le smartphone). Pour les jeux en ligne, en revanche, les smartphones ont la préférence des Français (43 % contre 39 % pour les ordinateurs).

Ces dernières années, le Smartphone est de plus en plus présent et gagne des parts de marchés sur l’ordinateur et cela dans tous les segments. En 2017, 64 % des Français se connectent à Internet via leur téléphone mobile, 60 % pour lire leurs mails, 55 % pour télécharger leurs applications, 44 % pour regarder des vidéos, 43 % pour  échanger des messages instantanés via WhatsApp et 31 % pour téléphoner via des messageries instantanées.

Quand Internet devient téléphone

De plus en plus de Français recourent aux logiciels de voix sur IP (WhatsApp, Skype) pour téléphoner. Un tiers des Français utilisent plus souvent ce type de logiciel que la téléphonie classique. Cette utilisation signifie la fin du téléphone fixe qui survit avant tout par tradition et par le fait qu’il est un des éléments des packages distribués par les opérateurs. Le développement des « box mobile » pourrait sonner le glas des abonnements aux lignes fixes.

Les messageries instantanées sont de plus en plus utilisées au détriment du téléphone. Les jeunes sont les premiers consommateurs de ces messages, 65 % des 18/24 ans s’en servent tous les jours (moyenne de la population 35 %). Ces messageries permettent d’envoyer des messages écrits, des photos, des vidéos et de constituer des groupes. Le recul du téléphone comme moyen de communication orale est rapide chez les jeunes, les messages instantanés faisant désormais jeu égal avec la voix.

À la maison l’ordinateur reste le principal moyen de connexion à Internet mais il est de plus en plus concurrencé par la tablette et le téléphone mobile. Les Français passent de plus en plus d’un moyen à un autre pour se connecter.

Que font les Français avec Internet ?

L’e-administration

Plus de deux Français sur trois ont, dans les 12 derniers mois, eu recours à     l’e-administration. Ce taux est de 90 % pour les diplômés et pour les 25/39 ans. La France arrive, selon Eurostat en 8e position pour l’e-administration loin derrière les pays d’Europe du Nord mais devant l’Allemagne (55 %) et le Royaume-Uni (53 %). Le développement du paiement en ligne des impôts, l’obtention de certains documents administratifs et l’accès à certaines prestations sociales concourent au développement de l’e-administration. L’obtention des certificats d’immatriculation passe désormais obligatoirement par Internet. Ce basculement n’est pas sans poser des problèmes techniques et sociaux. Plus des trois quarts des Français seraient ouverts à une plus grande digitalisation des services administratifs.

Les achats sur Internet

61  % des Français ont effectué lors de ces douze derniers mois des achats en ligne. Cette proportion est stable depuis plusieurs années. Le paiement en ligne est toujours perçu comme un frein à l’achat (59 % des Français).

Les achats sur Internet sont avant tout réalisés par les personnes de 18 à 39 ans, diplômés, issus des catégories sociales les plus élevés et vivant dans un ménage comportant des enfants. 79 % des personnes à hauts revenus achètent en ligne contre 47 % de celles disposant de bas revenus. Le critère de revenus n’explique qu’imparfaitement la réalisation d’achats sur Internet. En effet, les personnes devant se restreindre financièrement achètent plus sur Internet que les autres. Ces personnes recherchent des promotions ou achètent d’occasion un certain nombre de biens. 84 % des 18/39 ans effectuent des achats en ligne contre 24 % pour les plus de 70 ans. 64 % des ménages constitués de quatre personnes réalisent régulièrement des achats sur Internet contre 43 % des célibataires. Le fait que de nombreux célibataires soient des personnes âgées explique en partie cet écart. Par ailleurs, les familles nombreuses ont recours plus fréquemment que les autres aux livraisons à domicile et donc aux commandes sur Internet. Les personnes qui achètent en ligne sont d’une nature plus confiante que les autres en la société et les autres (71 % contre 58 % pour ceux n’achètent pas en ligne).

Pour 38 % des Français, la sécurité des achats est, en 2017, mal assurée contre 36 % en 2016. Ce taux est de 33 % pour ceux ayant réalisé des achats. Les plus âgés sont les plus inquiets (44 % pour les 60 à 69 ans). 53 % des non-diplômés considèrent que la sécurité des paiements n’est pas fiable contre 35 % des diplômés de l’enseignement supérieur.

Pour 24 % des Français et 26 % des acheteurs en ligne, le fait de ne pas pouvoir toucher les produits constitue un frein au développement de la vente sur Internet. La non transparence, la méconnaissance des acteurs en charge de la vente gênent 12 % des acheteurs.

L’accès aux réseaux sociaux

59 % des Français sont membres d’au moins un réseau social (Facebook, LinkedIn, etc.). Ce taux est de 67 % pour ceux disposant d’un accès à Internet. La France figure parmi les pays où la population est la moins adhérente aux réseaux sociaux. Les Français sont assez dubitatifs face à ces réseaux. 74 % déclarent qu’ils ne leur inspirent pas confiance (contre 59 % en moyenne au sein de l’Union européenne).

96 % des 18-24 ans fréquentent régulièrement un réseau social contre 13 % pour les plus de 70 ans. Les diplômés de l’enseignement supérieur sont plus assidus (67 %) que les non-diplômés (29 %).

Près d’un Français sur trois pratiquent le collaboratif

28 % des Français pratiquent l’économie du partage sur Internet. Cette proportion est en hausse de 9 points en deux ans. 22 % ont déjà eu recours à des plateformes collaboratives (le BonCoin, Ebay) pour acheter des biens neufs ou d’occasion. Par ailleurs, 6 % ont utilisé ces plateformes dans le cadre d’échange sans rémunération.

Les jeunes de 18 à 24 ans sont des adeptes de plateformes d’échange, 50 % y ont recours dans les 12 derniers mois. 20 % des personnes âgées de 25 à 29 ans ont fait de même. Ce taux descend à 22 % pour les 60 à 69 ans et à 9 % pour les plus de 70 ans. 45 % des diplômés achètent sur ces plateformes contre 8 % pour les non-diplômés. Les échanges entre pairs sont liés à la confiance vis-à-vis des autres et de la société. Les Français très sensibles au développement durable sont plus enclins à réaliser des échanges entre pairs (33 % contre 19 % pour ceux qui ne sont pas du tout sensibles).

Les Français et le numérique au travail

66 % des actifs ont déclaré avoir utilisé ces 12 derniers mois un ordinateur dans le cadre de leur travail (53 % en 2013). 54 % l’utilisent tous les jours. 86 % des cadres ont un usage quotidien de leur ordinateur contre 20 % des ouvriers. L’âge a de moins en moins d’incidence sur l’utilisation professionnelle de l’informatique. Les jeunes actifs de 18 à 24 ans qui occupent des emplois souvent à faibles qualifications ont un moindre recours à l’ordinateur que leurs aînés. Néanmoins, la proportion de ceux en ayant un usage quotidien est passée de 25 à 50 % de 2013 à 2017. Trois quart des diplômés de l’enseignement supérieur travaillent quotidiennement avec un ordinateur quand ce taux est de 18 % pour les non-diplômés.

34 % des actifs disposent d’un appareil numérique à vocation professionnelle (téléphone, tablette, ordinateur portable) qui le suit en permanence. 54 % des Français considèrent, en 2017, que l’usage de la micro-informatique en-dehors des horaires et des lieux de travail permet de mieux concilier la vie privée et la vie professionnelle (42 % en 2013). 33 % pensent que cet usage empiète trop la vie privée (40 % en 2013). Ceux qui utilisent en dehors de leur travail et leur lieu de travail les outils numériques sont moins critiques que ceux qui ne l’utilisent pas au regard de l’empiètement sur la vie privée.

5 % des actifs déclarent bénéficier du télétravail. Près de 40 % seraient intéressés à également travailler de la sorte. 56 % y sont, en revanche, opposés. Les adeptes du télétravail se retrouvent chez les diplômés de l’enseignement supérieur (48 %) et chez les employés (48 %)

Les Français sont-ils des geeks ?

67 % des Français se déclarent compétents dans la maîtrise de leur ordinateur, 62 % pour leur tablette et 69 % pour leur smartphone. En quatre ans, ces taux ont nettement progressé. Les outils numériques génèrent moins de peurs que dans le passé. Plus de la moitié des actifs déclarent avoir acquis seuls les compétences suffisantes même si 62 % considèrent que la formation continue leur a permis de mieux exploiter le potentiel de leurs outils numériques. Trois quarts des Français affirment être prêts à se former à de nouvelles techniques numériques, 24 % immédiatement et 52 % progressivement.

 Brexit, la bataille financière commence

Le Brexit prend lentement forme. Vendredi 8 décembre, la Commission de Bruxelles et le gouvernement britannique ont signé un premier accord qui traite des questions relatives aux droits des citoyens européens vivant au Royaume-Uni et de ceux des citoyens britanniques installés dans un pays de l’Union, de la frontière entre l’Irlande et l’Irlande du Nord et des conditions financières du divorce. Sur ce dernier point, le Royaume-Uni serait prêt à verser une soulte de 45 à 55 milliards d’euros à l’Union européenne. Si cet accord est entériné par le Conseil européen du 15 décembre prochain, les négociations sur les modalités pratiques de la séparation commenceront avec notamment la mise en place d’un cadre pour les échanges de biens et de capitaux. Dans l’attente de ce cadre, plusieurs villes dont Paris rêvent de récupérer une partie des activités de la City. La compétition est déjà vive mais, pour le moment, il est difficile d’évaluer l’ampleur des transferts. Par ailleurs, il n’est pas écrit que les activités financières domiciliées à Londres prendront le chemin du continent européen.

La force de la City repose sur la concentration de nombreuses sociétés financières et de savoir-faire. La capitale britannique dispose également d’atouts technologiques en étant en relation par câbles avec toutes les autres grandes places financières. Elle peut également compter sur une législation fiscale et sociale assez incitative.

La migration de certaines activités financières ne se réalisera que si le maintien à Londres est préjudiciable pour leur bonne réalisation. Est-ce que Paris, Francfort ou Bruxelles seront attractives pour bénéficier des migrations ? Les sociétés financières basées à Londres ne choisiront-elles pas de s’installer à New-York, Hong Kong ou Singapour qui disposent d’atouts reconnus en matière financière ? Le Brexit pourrait marginaliser l’Europe au moment même où le cœur de l’économie mondiale est de plus en plus en Asie.

Selon le Conseil d’Analyse Économique, avec plus de 350 000 personnes employées dans la finance, 37 % du marché mondial des changes, 39 % du marché mondial des dérivés de gré à gré, ou encore la quasi-totalité du marché des swaps de taux d’intérêt en euro, Londres est de loin la première place financière de l’Union européenne et de la zone euro. Cette spécificité s’est forgée au fil des décennies. Elle s’est renforcée depuis l’intégration du Royaume-Uni dans la CEE devenue Union européenne. En 1975, la finance et l’assurance représentaient environ 5,25 % de la valeur ajoutée au Royaume-Uni, contre 4,32 % en France. En 2015, leur poids respectif dans les deux pays était de 7,25 % et 4,48 %.

La répartition des dépouilles ne sera pas simple et automatique

Avec la fin de la libre prestation de service, avec la disparition du passeport financier et en cas d’absence d’accords aboutissant à les maintenir en l’état, le Royaume-Uni pourrait perdre la possibilité de commercialiser des services financiers depuis Londres (produits d’épargne ou d’assurance, gestion d’actifs, prêts bancaires), mais aussi des services de marché comme la compensation.

La disparition du passeport financier pénalisera les sociétés britanniques mais aussi les filiales d’entreprises américaines, japonaises ou autres installées à Londres, qui utilisent, aujourd’hui, la capitale anglaise comme point d’entrée dans le marché unique. Pour intervenir dans le cadre du marché unique européen, les banques devront obtenir des autorisations dans l’un des pays de l’Union européenne, y implanter des activités «  substantielles  » (management, personnel, capacité de contrôle des risques) et être régulées/ contrôlées par les autorités européennes.

Pour les activités de marché, elles seront assujetties au régime d’équivalence réglementaire qui s’applique aux pays tiers, à moins que les Européens n’imposent la relocalisation d’activités considérées comme très « systémiques ».

Si certains se félicitent de la possible arrivée de sociétés financières actuellement basées à Londres sur le vieux continent, ce dernier pourrait pâtir de l’affaiblissement de l’espace financier européen. En effet, avec le départ du Royaume-Uni du marché unique, l’Union européenne, et plus particulièrement la zone euro, pourraient souffrir d’une fragmentation du marché financier et/ou d’un moindre contrôle sur les risques.

Des acteurs financiers britanniques ou tiers (entreprises d’investissement, chambres de compensation notamment) pourraient, rester à Londres ou migrer vers d’autres États en-dehors de l’Union afin de bénéficier d’un cadre réglementaire et fiscal plus attractif.

Ce départ serait préjudiciable pour l’Europe car ces établissements qui ne seraient plus contrôlés par le régulateur européen pourraient faire porter un risque systémique pour la zone euro. La Commission européenne devrait veiller à pouvoir contrôler les activités financières concernant les États membres mêmes quand elles sont réalisées dans un pays tiers. Il faudra sans nul doute un renforcement de l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) pour le suivi des régimes d’équivalence des pays tiers. Les règles de réciprocité devraient être mieux appliquées. Certains considèrent que la BCE pourrait à terme fusionner avec l’ESMA. Cette question se pose également pour l’Autorité des marchés Financiers et de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution qui dépend de la Banque de France.

La délicate question des chambres de compensation

La crise de 2008 a démontré l’importance des chambres de compensation qui permettent de sécuriser les transactions entre établissements de financiers. Les chambres de compensation sont des organismes financiers ayant pour objectif de supprimer les risques de contrepartie sur les marchés dérivés. Concrètement, la chambre de compensation est la contrepartie unique de tous les opérateurs. Elle  assure la surveillance des positions et exige la formation dans ses livres d’un dépôt de garantie le jour de la conclusion d’un contrat. En cas de perte potentielle d’un intervenant, elle procède à un appel de marge. Deux tiers au moins des opérations en euros sont compensés à Londres. Avec le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne, cette compensation deviendra extraterritoriale entraînant l’intervention de plusieurs régulateurs, ce qui constitue toujours une source de risques. En cas de différends ou en cas de retard de traitement lors d’une crise, le système européen pourrait être confronté à un problème de liquidité. Certains imaginent de relocaliser de manière obligatoire les chambres de compensation au sein de la zone euro. Cette option pose néanmoins la question des coûts occasionnés par la fragmentation du marché qui en résulterait.

Le Brexit nécessite de franchir une nouvelle marche vers le fédéralisme

Le Brexit renforce l’idée de relancer la création d’un véritable espace financier européen. La segmentation du marché actuel rend complexe et coûteux le financement des entreprises qui, sur le vieux continent, s’effectuent essentiellement par voie bancaire.  En Europe continentale, le marché financier entreprise (actions, obligations, private equity, capital-risque) est notoirement sous-dimensionné. Une convergence réglementaire et fiscale est nécessaire pour aboutir à une union des marchés de capitaux. Sans cette convergence réglementaire, il y a peu de chances qu’émergent des fonds paneuropéens permettant de financer des PME.

Paris, un potentiel à confirmer

La France dispose d’atouts indéniables comme la décision de Bruxelles de transférer le siège de l’Autorité bancaire européenne (EBA) de Londres à Paris.

Le secteur financier représente, en France, de 4 à 5 % de la valeur ajoutée nationale contre 7 % au Royaume-Uni. Mais le poids français est comparable à celui de l’Allemagne, de l’Italie ou de l’Espagne. Les banques et les compagnies d’assurances françaises sont reconnues pour leur solidité. Plusieurs groupes sont de taille internationale. Cinq établissements financiers français comptent parmi les quinze premières banques européennes, soit le même nombre que pour le Royaume-Uni. Francfort ne compte qu’une seule banque figurant dans ce classement. En ce qui concerne l’assurance, Paris compte quatre représentants parmi les vingt premiers groupes européens dont le premier assureur mondial. La France est le deuxième marché de l’assurance en Europe derrière celui du Royaume-Uni. Si l’Allemagne dispose également de grands groupes, ceux-ci n’ont pas installé leur siège à Francfort (Munich et Hanovre).

750 000 personnes travaillent en France pour le secteur financier contre plus d’un million de personnes au Royaume-Uni dont plus de 50 % sont concentrées sur Londres. Ce phénomène de concentration se retrouve à Paris qui emploie 40 % du personnel du secteur financier. Paris se situe donc derrière Londres mais loin devant Francfort (76 000 emplois dans la finance) ou Amsterdam (54 000).

Paris occupe un rang honorable sur différents segments du secteur financier. Le total des actifs bancaires est similaire à Paris et à Francfort (de l’ordre de 7 000 milliards d’euros, contre 10 000 milliards à Londres), tandis que dans le secteur de l’assurance, la France devance légèrement l’Allemagne en termes d’actifs gérés (1 800 milliards d’euros, contre 1 600 milliards en Allemagne). La France doit faire face à la concurrence du Luxembourg. Notre pays n’a capté que 4 milliards d’euros de primes d’assurances en provenance de l’étranger quand ce montant atteint 20 milliards d’euros au Luxembourg. Les assureurs français installés au Luxembourg auraient encaissé, en 2015, pour 7 milliards d’euros de primes quand le marché domestique de ce pays ne pèse que 1,3 milliard d’euros.

La place parisienne est en deuxième position, derrière Londres, pour les marchés de gré à gré. En Europe, elle se situe au deuxième rang (derrière Londres) pour le montant des actifs sous gestion et au troisième pour la domiciliation de fonds (derrière le Luxembourg et Dublin). Malgré tout, la place de Paris est trop franco-française. Elle n’arrive que marginalement à capter des flux de capitaux internationaux. En outre, depuis une dizaine d’années, le secteur financier constate des sorties d’actifs au profit du Luxembourg. En matière de fonds d’investissement, la France est également deuxième, cette fois derrière le Luxembourg et à quasi-égalité avec l’Irlande. Sur les marchés dérivés de gré à gré, enfin, Paris est loin derrière Londres, mais devant Francfort.

L’attractivité de la France a décliné ces dernières avec, à la clef, la moindre présence de filiales d’entreprises étrangères. La place financière de Paris est moins internationalisée que celles de Londres, Francfort ou Dublin. Parmi les filiales implantées à Paris, un quart appartient à un groupe britannique, les autres investisseurs venant essentiellement des États-Unis, de Suisse et d’Irlande. Le coût et la réglementation du travail et l’instabilité fiscale ont pénalisé, depuis 1990 la place parisienne. Par ailleurs, le manque de structuration du Grand Paris, les retards dans la modernisation et la réalisation de nouvelles infrastructures jouent également en notre défaveur. La saturation des établissements d’enseignement internationaux, essentiellement situés dans l’ouest de la région parisienne (lycée international de Saint Germain en Laye) constitue un frein pour attirer des cadres internationaux.

Paris apparaît également à la traîne pour les FinTech. En la matière, la capitale est devancée par Londres, Francfort et Dublin. Néanmoins, les montants investis sont en forte augmentation, +750 % en 2015. Trois FinTech françaises figurent parmi les 100 premières mondiales. En outre, la France est, bien représentée sur le marché du financement participatif.

La France peut néanmoins s’appuyer sur des structures d’enseignement réputées pour la finance. Chaque année, plus de 8 000 étudiants sont formés pour les métiers du front-office et 18 000 pour les métiers du middle et back-office. Notre pays dispose d’une filière mathématique classée parmi les meilleures du monde et dont les diplômés se dirigent en partie vers le secteur financier. En 2016, 5 écoles françaises figurent parmi les 10 premières au sein du classement mondial des masters de finances. Les entreprises étrangères font appel à de nombreux étudiants français avant même leur arrivée sur le marché du travail, preuve du bon niveau des formations délivrées. Entre 2000 et 2015, la France a, en moyenne, formé 250 000 diplômés par an en commerce, administration, droit, mathématiques, statistiques et sciences de l’information (l’Allemagne en a formé environ 140 000, le Royaume-Uni 185 000, les Pays-Bas 38 000 et l’Irlande 19 000).

Paris peut également mettre en avant un marché de l’immobilier de bureaux dynamique et de qualité. Il s’élève à plus de 1,950 million de mètres carrés contre 470 000 à Francfort.

Paris a l’avantage d’abriter 29 sièges de sociétés comptant parmi les 500 plus importantes à l’échelle mondiale ce qui la place au 1er rang européen et au 3e rang mondial derrière Tokyo et Pékin. Francfort est pénalisée par la dissémination des sièges sociaux dans les grandes villes allemandes (Berlin, Munich, Stuttgart, etc.).

Parmi les autres atouts dont dispose Paris figure la présence de deux grands aéroports internationaux, Charles de Gaulle et Orly, qui ont cependant comme défaut d’être mal reliés aux quartiers d’affaires.

Le système de retraite français, au-delà de sa complexité, peut par ailleurs se révéler pénalisant pour des expatriés choisissant de travailler en France. La mise en place d’un régime universel par points serait une source de simplification d’autant plus si,un système européen d’épargne retraite était mis en place comme le souhaite la Commission de Bruxelles depuis des années.

Le Brexit offre donc une opportunité pour moderniser de nombreuses structures tant européennes, françaises que régionales. Paul Delouvrier, délégué général au district de la région de Paris de 1961 à 1969, avait élaboré le Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région de Paris (SDAURP) dans lequel figurait la réalisation des lignes de RER, nous venons à ce titre de célébrer les 40 ans de la ligne A. Il a été le père des villes nouvelles et de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la Région. Depuis les projets menés par les équipes de Paul Delouvrier dans les années 60, la région parisienne avait peu évolué jusqu’au lancement du « Grand Paris » par Nicolas Sarkozy et repris par ses successeurs.

L’attribution à Paris de l’organisation des Jeux Olympiques de 2024 et de la possible Exposition Universelle de 2025 devraient également contribuer à renforcer l’attractivité de la place de Paris.