Conjoncture – démographie Corse – France – Emploi
La France face à un recul important de sa natalité
Pour la seconde année consécutive, le nombre de nouveau-nés a, en 2023, en France, fortement baissé, une tendance qui risque de s’accentuer avec la crise politique et économique.
En 2023, à peine 678 803 naissances ont été enregistrées, dont 639 503 en France métropolitaine. Jamais, depuis 1901, la France n’avait connu aussi peu de naissances, selon l’Institut national de la statistique, responsable de la démographie française, à l’exception de deux périodes de guerre mondiale. Durant la Première Guerre mondiale, le nombre de naissances avait été divisé par deux, tombant à 384 676 en 1916. Pendant le second conflit mondial, le nombre de naissances est resté en dessous de 600 000 par an. La France renoue avec le creux démographique des années 1930, marqué par un recul de la population.
Les données des dix premiers mois de l’année 2024 suggèrent que le recul des naissances se poursuit. La baisse pourrait atteindre 2,3 %. Le nombre de naissances devrait ainsi s’établir à 660 000 cette année. Le mois de juin a enregistré une diminution inédite avec seulement 1 757 naissances quotidiennes, le chiffre le plus bas de l’histoire récente, en retrait de 7,9 % par rapport à juin 2023. Ce décrochage surprenant pourrait être imputable à l’attaque terroriste du Hamas en Israël le 7 octobre 2023. La succession d’événements anxiogènes, les difficultés liées au pouvoir d’achat et les problèmes de logement accentueraient la baisse tendancielle de la natalité.
Jusqu’à la fin de la décennie 2010, la France avait maintenu un taux de fécondité relativement élevé, nettement supérieur à la moyenne européenne. Depuis, l’exception française se fissure. Le taux de fécondité, qui avoisinait deux dans les années 2000, est tombé à 1,68 en 2023, un niveau sans précédent depuis la fin de la Première Guerre mondiale. La moyenne européenne est de 1,46.
Comparées à leurs homologues européennes, jusque dans les années 2000, les Françaises étaient moins nombreuses à n’avoir aucun enfant et plus nombreuses à en avoir trois. Aujourd’hui, une augmentation de la part de femmes sans enfant est constatée, tout particulièrement chez les femmes diplômées, tandis que la proportion des enfants de rang trois diminue. En une quinzaine d’années, la France aurait ainsi perdu plus de 100 000 naissances par an.
L’écart entre le nombre d’enfants souhaité et le taux de fécondité tend à s’accroître : 2,3 contre 1,68 en 2023. Emmanuel Macron avait mis en avant, au début de l’année, la montée de l’infertilité pour expliquer une partie de cet écart. Il entendait mettre en œuvre un plan de lutte contre l’infertilité afin de faciliter « le réarmement démographique de la France ».
Au-delà du problème de fertilité, les ménages soulignent l’impossibilité de trouver des logements décents. La France souffre à la fois de pénuries de logements dans les grandes agglomérations et de prix élevés, tant à l’achat qu’à la location.
Les paradoxes démographiques de la Corse
La Corse est la région de France qui connaît la plus forte progression de sa population. Cette augmentation est exclusivement due au solde migratoire, le solde naturel (différence entre natalité et mortalité) étant négatif. L’île compte désormais plus de 350 000 habitants, contre 240 000 en 1980. La population a ainsi progressé de 45 % en environ quarante ans.
Cercle de l’Epargne – données INSEE
Au 1ᵉʳ janvier 2022, la population de référence en Corse s’établit à 351 276 habitants. Entre 2016 et 2022, la population régionale a augmenté en moyenne de 1 % par an, soit une croissance démographique trois fois supérieure à celle de la France (+0,3 %) et la plus forte parmi les régions métropolitaines.
Dans le détail, 11 742 habitants supplémentaires ont été comptabilisés en Corse-du-Sud et 9 079 en Haute-Corse. Ce dernier département reste le plus peuplé de l’île, avec 185 231 habitants, contre 166 045 pour la Corse-du-Sud. Cette dernière se classe au deuxième rang des départements les plus dynamiques, derrière la Haute-Garonne (+1,3 %) et devant l’Hérault (+1,2 %).
Cercle de l’Epargne – données INSEE
Un solde migratoire positif
La croissance démographique de la Corse repose exclusivement sur les arrivées sur l’île. Entre 2016 et 2022, la dynamique démographique régionale s’explique par un solde migratoire positif, avec plus d’arrivées que de départs (+3 900 habitants par an). Ainsi, la Corse affiche la plus forte contribution migratoire parmi les régions françaises (+1,2 %), devant l’Occitanie (+0,8 %), la Nouvelle-Aquitaine et la Bretagne (+0,7 %). Cette contribution est plus marquée en Corse-du-Sud (+1,4 %) qu’en Haute-Corse (+1,0 %).
La Corse attire des retraités, des jeunes actifs et d’anciens insulaires de retour. Ces migrations engendrent des tensions locales, notamment autour des questions d’identité et de la possession des sols, dans un contexte de prix immobiliers élevés. Les nouveaux arrivants tendent néanmoins à adopter assez rapidement les spécificités locales, notamment dans leurs comportements électoraux, souvent alignés avec ceux de la population d’origine.
Comme d’autres régions du sud de la France et de la façade atlantique, la Corse bénéficie d’une forte attractivité liée à la recherche de meilleures conditions de vie. Considérée comme une région plutôt sûre, elle rassure particulièrement les retraités. Cependant, le système de santé insulaire pousse certains d’entre eux à quitter l’île au-delà de 75 ans.
Un solde naturel structurellement négatif
Depuis 2013, le solde naturel est négatif en Corse, avec plus de décès que de naissances, contrairement à la tendance nationale. La contribution du solde naturel à l’évolution de la population est ainsi de -0,1 % en moyenne annuelle, contre +0,2 % au niveau national. Cette situation est comparable à celle de la Bourgogne-Franche-Comté et de la Nouvelle-Aquitaine, également marquées par une population relativement âgée.
La Corse affiche le taux de fécondité le plus faible de France, avec 1,28 enfant par femme, un chiffre proche de celui de l’Italie (1,24 en 2022).
Une population de plus en plus inégalement répartie
Au 1ᵉʳ janvier 2022, les communautés d’agglomération du Pays Ajaccien (CAPA) et de Bastia (CAB) regroupent 44 % de la population régionale. La CAPA compte 92 766 habitants et la CAB 61 920. Entre 2016 et 2022, la population de l’intercommunalité ajaccienne a augmenté de 1,4 % par an, tandis que celle de Bastia progresse de 1,0 %, soit un rythme similaire à celui de l’ensemble de la région.
Ces deux pôles d’emploi et de population dynamisent également les communautés de communes voisines. Ainsi, dans la communauté de communes de la Pieve de l’Ornano, qui comprend notamment Grosseto-Prugna (Porticcio), la population augmente de 1,4 %, tandis que celle du Celavu Prunelli progresse de 1,3 %. Autour de Bastia, les populations du Nebbiu Conca d’Oru (+1,3 %) et de Marana-Golo (+1,2 %) croissent également à un rythme soutenu. Certaines communes, comme Sarrola-Carcopino près d’Ajaccio (+2,2 %) ou Furiani en région bastiaise (+1,8 %), se montrent encore plus dynamiques.
À l’inverse, certaines zones rurales éloignées des bassins d’emploi perdent des habitants. La population diminue ainsi de 0,5 % en moyenne par an dans la communauté de communes du Cap Corse et de 0,3 % dans celle de Pasquale Paoli. Les territoires ruraux se vident au profit des deux grandes agglomérations. Par ailleurs, des villes balnéaires comme Porto-Vecchio subissent des évolutions démographiques défavorables, liées à l’essor des locations saisonnières.
Un essor démographique marqué et des défis à relever
En quarante ans, la Corse a connu une croissance démographique significative, accompagnée d’un processus d’urbanisation accéléré. Celui-ci s’est traduit par l’apparition de grands centres commerciaux et de cités-dortoirs. Parallèlement, l’île a vu se développer les locations saisonnières et les résidences secondaires, entraînant une forte hausse des prix de l’immobilier. Cette situation contraint de nombreux insulaires à s’éloigner toujours plus des centres des deux grandes agglomérations.
La crise du logement alimente également une peur de perte d’identité, exacerbée par l’arrivée massive de personnes venant du continent. La Corse est en outre confrontée à un vieillissement accéléré de sa population. En 2020, près de 30 % des habitants avaient plus de 60 ans, ce qui exerce une pression croissante sur les services de santé.
Au rythme actuel, la population corse pourrait atteindre 380 000 habitants en 2050. Cela nécessitera la réalisation d’infrastructures dans les domaines de la santé, des transports publics et de l’éducation.
Augmentation du nombre de demandeurs d’emploi en France
Selon la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du Travail, le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à l’ex-Pôle emploi, sans travail et tenus d’en chercher un, classés dans la catégorie A, a augmenté de 45 000 en novembre (hors Mayotte). Ce chiffre avait déjà progressé de 55 000 en octobre et de 42 000 en septembre, atteignant ainsi 3,14 millions de personnes.
Toujours à la fin novembre, le nombre d’inscrits ayant travaillé moins de 78 heures, en activité réduite courte, a diminué de 23 000, tandis que celui des inscrits ayant travaillé davantage est resté stable. Le nombre total de demandeurs d’emploi (catégories A, B et C) s’élevait à 5,5 millions à la fin du mois dernier, en hausse de 0,4 % sur un mois et de 1,5 % depuis le début de l’année (+80 000).
Les flux d’inscriptions à la suite d’une fin de contrat, d’une mission d’intérim, d’une rupture conventionnelle ou d’un licenciement économique sont restés stables depuis janvier. La hausse du nombre de demandeurs d’emploi sans activité traduit donc en partie — mais en partie seulement — un basculement dans cette catégorie de personnes qui occupaient auparavant un emploi, même partiel.