L’Allemagne, en fin de cycle ?
L’Allemagne, fin de cycle
Après un bon début d’année 2014, la croissance allemande a connu un net coup de frein au deuxième trimestre avec une contraction de 0,2%, soit un résultat inférieur à celui de la zone euro. Avec un taux de croissance de 0,1% au 3ème trimestre, une fois de plus l’Allemagne fait moins bien que la moyenne de la zone euro. Le taux de croissance de l’année devrait être néanmoins supérieur à 1,2%.
Il ne faut jamais se réjouir des problèmes de ses voisins surtout quand il s’agit des Allemands.
L’Allemagne est extrêmement vulnérable aux évolutions du commerce international et au retournement de la demande en biens industriels. Les commandes de machines-outils ont tendance à décliner du fait de la réorientation de l’économie chinoise vers les services et de la saturation du marché en biens industriels. Par ailleurs, la Chine a, de son côté, développé le secteur de la machine-outil. Par ailleurs, les tensions avec la Russie freinent également les exportations de biens industriels. De même, l’Allemagne doit faire face à une diminution des commandes en provenance de Syrie, d’Irak ou de Turquie. Enfin, la faible croissance de la zone euro et le recul de l’investissement se font également ressentir.
Le modèle économique allemand repose sur l’industrie qui emploie un tiers de la population active et qui contribue pour plus du quart de la valeur ajoutée totale. Elle réalise 80% des exportations représentant la moitié du PIB allemand.
De ce fait, toute variation à la baisse des exportations est immédiatement ressentie. La récession de 2009 avait abouti à une contraction de son PIB de 5,15 %. Depuis 2012, la croissance allemande est faible (0,69% en 2012 et 0,43% en 2013). Certes, en 2010 et 2011, l’Allemagne avait réussi à effacer les effets de la Grande récession avec une croissance qui avait atteint respectivement 4 et 3,3%.
Les entreprises allemandes doivent s’adapter aux nouvelles exigences de la demande. Ainsi, un des leaders de la machine à découpe laser, Trumpf, se repositionne sur le marché du laser médical et des plateaux techniques pour les hôpitaux.
L’Allemagne dispose néanmoins d’atouts enviables. L’Allemagne a présenté un budget en équilibre pour 2015 et son taux de dette publique diminue.
Son taux de chômage reste malgré le ralentissement économique à 6,7% et les salaires progressent à un rythme soutenu (3,4% en moyenne depuis le début de l’année contre 2,5% en 2013). Le pouvoir d’achat des Allemands augmente d’autant plus que l’inflation est faible. Au mois d’octobre, le taux d’inflation annuelle était de 0,8%. L’entrée en vigueur progressive du salaire minimum devrait à terme améliorer le niveau de vie de près de 4 millions d’Allemands. Dans les faits, la relance de la consommation aura des effets marginaux pour l’Allemagne comme pour ses voisins. La population âgée est peu sensible aux stimuli en faveur de la consommation. Compte tenu du haut niveau de vie, la propension à épargner est, en revanche, forte.
Face à cette situation, des voix s’élèvent en faveur d’un plan de relance axé sur l’investissement. Certains demandent à la Chancelière d’engager un programme supérieur à ce qui avait été fixé par le contrat de coalition. Pour le moment, ces voix n’ont pas été entendues. Le Ministre de l’Economie, Wolfgang Schaüble, a simplement annoncé une rallonge de 10 milliards d’euros sur trois ans, soit 0,11% du PIB par an avec une mise en œuvre prévue en 2016. Ce programme devra être financé sur les recettes supplémentaires escomptées de la reprise économique. De nombreux partenaires de l’Allemagne dont bien évidemment la France espère, avec la confirmation du ralentissement, un changement d’orientation de la politique économique. La rigueur budgétaire est devenue point de fixation dans le débat public. Le poids croissant des retraités au sein de la population allemande n’y est pas pour rien dans cette radicalisation.
Un nouveau cycle se met en place
La moindre croissance du commerce international, le développement des activités de services avec l’augmentation du niveau de vie des populations des pays émergents remettent en cause le modèle allemand de croissance. Le cycle de ses vingt dernières années a été favorable à l’Allemagne en raison des besoins importants en équipements industriels de la Chine et des autres pays émergents. Or, en ayant atteint un stade élevé de développement, ces pays réduisent leurs achats. Par ailleurs, il y a une régionalisation du commerce international qui est assez logique. A l’image de l’Europe, les Etats ont toujours tendance à privilégier les échanges de proximité d’autant plus quand les populations ont atteint un niveau élevé et comparable de consommation. Il en résulte que le modèle économique de l’Allemagne doit évoluer et que son avenir repose sur la bonne santé de zone euro, zone dans laquelle elle réalise plus de 40 % de ses exportations.