Le Coin de la Conjoncture du 13 août 2016
Aux franges de l’emploi et du chômage
Le taux de chômage est, en France, selon Eurostat, de 9,9 % au mois de juin 2016 mais ce résultat ne traduit qu’imparfaitement le sous-emploi d’une partie de la population. Depuis la fin des années 80, de nombreux travaux sont consacrés à l’étude des zones grises autour du chômage mesuré par les instituts statistiques. C’est ainsi qu’a été mis en avant la notion de halo autour du chômage constitué d’inactifs n’étant pas au chômage au sens du Bureau international du travail mais étant dans une situation qui s’en approche.
Dans ce halo, il y a tout d’abord des personnes « se déclarant spontanément comme chômeurs » dans l’enquête Emploi, alors qu’elles ne remplissaient pas les différents critères du BIT. Se trouvent dans cette catégorie, les personnes sans emploi et qui ne recherchent pas d’emploi. Une autre catégorie est constituée des personnes postulant à un emploi sans pour autant effectuer de démarches effectives et officielles. Enfin, sont prises en considération les personnes sans emploi qui ne sont pas disponibles pour travailler immédiatement mais qui qui sont à la recherche d’un emploi.
En 2013, L’lNSEE a affiné son questionnaire de son « Enquête Emploi ». Désormais, toutes les personnes concernées sont interrogées sur leur souhait de travailler, sur leur recherche d’emploi et sur leur disponibilité pour travailler. Celles qui déclarent chercher un emploi sont questionnées précisément sur les démarches qu’elles effectuent : prise de contact avec une agence d’intérim ou un opérateur de placement, notamment Pôle emploi, contact avec des relations personnelles ou professionnelles (anciens collègues, syndicat, etc.), recours aux réseaux sociaux, passage d’un entretien d’embauche et/ou d’un concours de la fonction publique, dépôt de candidature spontanée, participation à un salon professionnel, consultation ou réponse à une annonce d’offre d’emploi ou passage d’une annonce pour en trouver un, etc.
L’actualisation de l’inscription à Pôle emploi, hors autre contact, n’est plus reconnue comme une démarche active de recherche d’emploi selon la définition européenne, car il s’agit d’une démarche liée à l’indemnisation et pas à la recherche d’emploi en tant que telle. Les personnes qui déclarent ne pas chercher d’emploi sont interrogées sur la raison principale pour laquelle elles ne font pas de démarche : attente de résultat de démarches antérieures, en études ou formation, garde d’enfants ou d’une personne dépendante, problèmes de santé, en vacances, absence d’’emplois disponibles dans leur domaine de compétence, incapacités professionnelles, etc. Enfin, les personnes qui se déclarent indisponibles pour travailler dans les deux semaines sont interrogées sur la raison principale de cette situation : fin d’études ou de formation, garde des enfants ou d’une personne dépendante, maladie, vacances, déménagement.
En 2015, la France dont la population active s’élève à 28,7 millions de personnes comprenait 1,4 million de personnes se situant dans le halo et 2,9 millions de chômeurs au sens du BIT. La population du halo représente 3,5 % de la population active. Avec la crise, le halo a augmenté progressivement avec la crise. Sa progression est néanmoins moins rapide que celle du nombre de demandeurs d’emploi.
Par sa structure socio-démographique, la composition du halo est proche de celle du chômage tout en étant plus féminin. Comme les chômeurs, les personnes qui se trouvent dans le halo ont à la fois des parcours et des profils très variés. Certaines, relativement diplômées, se situent dans le halo autour du chômage pour des raisons temporaires. Leur passage vers le chômage, voire vers l’emploi, est fréquent. D’autres, moins diplômées, sont plus souvent découragées dans leur recherche d’emploi. Enfin, se trouvent dans le halo des personnes qui se sont éloignées du marché du travail pour des raisons durables ou liées à des difficultés de conciliation avec un emploi (études, maternité, enfant ou personne à charge, maladie, invalidité).
Dans le halo, environ 300 000 personnes recherchent un emploi mais ne sont pas disponibles dans les deux semaines pour travailler et près de 700 000 souhaitent un emploi, n’en recherchent pas mais seraient disponibles pour en prendre un. Enfin, un peu plus de 400 000 souhaitent un emploi même s’ils n’en recherchent pas et ne sont pas disponibles pour en prendre un.
L’immobilier sous pression ?
La baisse des taux d’intérêt et la légère amélioration de la conjoncture économique ont contribué à sortir l’immobilier du marasme dans lequel il était plongé depuis 2011. Cette amélioration est-elle passagère et ne peut-elle pas déboucher sur la constitution d’une bulle spéculative ? La chute des taux facilite l’acquisition de biens immobiliers et incite les investisseurs à se tourner vers la pierre faute de pouvoir trouver ailleurs des rendements attractifs.
Le marché résidentiel est en nette reprise depuis début 2015. Le nombre de transactions de logements a progressé de 15 % sur un an. Dans l’ancien, il a retrouvé les niveaux antérieurs à la crise de 2008. Le premier semestre 2016 a confirmé ce retournement avec une légère augmentation des prix.
Le marché français reste essentiellement tiré par la région Ile-de-France et par quelques métropoles. Les prix se sont peu corrigés et demeurent très élevés. Les professionnels considèrent qu’il n’y a pas de réelle surévaluation. Néanmoins, au regard des prix, la rentabilité tend à s’éroder d’autant plus que l’environnement économique demeure qu’incertain.
Les paramètres du marché immobilier ne devraient pas subir de véritables changements dans les prochains mois. L’immobilier restera porté par une concentration de la population au sein des grandes métropoles et par la démographie. La pierre devrait conforter sa position de valeur refuge comme l’a souligné la dernière enquête du Cercle de l’Epargne (juin 2016). L’interrogation porte sur l’évolution des taux d’intérêt. Ils devraient rester bas jusqu’en 2017 avant de légèrement remonter. Compte tenu de la sensibilité de l’immobilier aux taux d’intérêt, une possible érosion du nombre de transactions est possible au cours du second semestre 2016. Une contraction de 5 % est plausible pour l’ancien. Pour le neuf, après une progression des volumes de vente de 10 % cette année, une stagnation est attendue en 2017. Les prix de l’ancien seraient en légère hausse, +2% par an.
Pour les logements anciens, les transactions ont atteint un point bas en 2014 avec 694 000 unités vendues. Elles sont remontées à 802 000 unités en 2015, soit une hausse de 15,6 % sur un an. Elles devraient atteindre entre 830 000 et 840 000 en 2016. Un tel résultat se situerait dans la fourchette haute du cycle d’avant crise de 2003-2007 (820 000 unités par an en moyenne avec une progression des prix de 12 % par an). En Ile de France, les ventes ont augmenté de 17 %. Par rapport au cycle précédent, les prix des logements anciens après une baisse continue entre 2012 et 2014 (-2 % en moyenne annuelle) ne connaissant pas de réelle flambée. Néanmoins, une hausse est attendue en 2016 comme en 2017. Au premier trimestre 2016, les prix des logements anciens se sont accrus de 0,5 % sur un an. Ils sont remontés de 1,1 % pour les maisons ; mais sont restés en très léger recul, -0,2 %, pour les appartements. Ils se sont accrus de 0,2 % en Ile-de-France, de 0,7 % en province et 1,2 % à Paris. De ce fait, la baisse cumulée des prix dans l’ancien depuis le début du processus de correction (fin 2011) n’est que de 6 % quand les prix avaient augmenté de 150 % entre 1998 et 2011.
Le marché de l’immobilier est géographiquement de plus en plus segmenté. Ainsi, si au quatrième trimestre 2015, les prix ont augmenté de 0,4 % en Rhône-Alpes-Auvergne et de 0,7 % dans les Hauts de France, ils ont reculé de 0,9 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Toujours au quatrième trimestre, les prix des appartements ont reculé de 11 % à Nîmes et à Mulhouse, de 8 % à Amiens, et de 6,5 % à Saint-Etienne. Les prix stagnent à Lyon et Bordeaux et sont en hausse à Reims, Rennes et Bayonne. Selon les indicateurs avancés des Notaires de Paris, les prix des appartements en Ile-de-France enregistreraient une hausse de 1,2 % sur Paris et de 0,4 % sur l’ensemble de la région Ile-de-France pour 2016.
Les transactions de logements neufs enregistrent également de bons résultats en particulier en ce qui concerne les opérations de promotion. Les ventes promoteurs (programmes d’au moins cinq logements) qui avaient baissé entre 2011 et 2014, ont progressé de 19 % sur un an soit 103 500 ventes. Cette reprise est imputable au segment « investisseurs », avec des ventes en hausse de 44 %, tandis que les ventes accédants ont stagné. Au premier trimestre 2016, la hausse est encore présente, + 15 % sur un an. Mais sur ce créneau, le nombre de ventes demeure inférieur de près d’un cinquième à celui d’avant crise (2007).
Les ventes de maisons individuelles hors promoteurs se sont élevées en 2015 à 111 000 ventes soit +11 % sur un an. Au mois d’avril 2016, la hausse est de 14 % sur un an à 116 000 unités. Ces niveaux restent toutefois nettement en deçà, d’environ 40 %, aux points hauts de 2006-2007 (189 000 unités par an). Ce secteur est toujours pénalisé par le fait que les primo-accédants éprouvent des difficultés à financer leur projet.
Les mises en vente de logements neufs (promoteurs) avaient diminué en 2013 et 2014. Elles se sont accrues en 2015, de 8,2% sur un an, à 101 300 unités. L’encours de logements neufs (achevés, en cours ou en projet) proposés à la vente reste assez élevé, mais se réduit peu à peu. Il a atteint 97 800 unités au cours du premier trimestre 2016. Le ratio encours/ventes, qui mesure le délai moyen d’écoulement de l’encours, est ramené à 10,5 mois de vente. L’encours était monté jusqu’à 107 000 unités au troisième trimestre 2014, soit 15,6 mois de vente. Il se réduit peu à peu grâce à un double mouvement : un nombre élevé de ventes et un niveau de mises en ventes un peu plus modéré. Ce ratio reste toutefois assez haut par rapport au niveau moyen de 8,3 mois observé entre 1995 et 2011. Les stocks proprement dits (encours de logements achevés ou en cours de construction) restent faibles, 41 000 unités : 7% des encours sont achevés, 35 % en cours de construction, 58 % en projet. En Ile-de-France, l’encours de logements neufs se réduit également. Il atteint 9,9 mois de vente au premier trimestre 2016, après 12,9 au quatrième trimestre 2014. Les prix des logements neufs (promoteurs) sont en légère reprise. Les prix des appartements se sont accrus de 1,4 % sur un an au premier trimestre 2016, après -0,3 % au quatrième trimestre 2014. Les prix des maisons sont remontés de 4 % sur un an au premier trimestre, après -0,8% au quatrième trimestre 2014. Il s’agit des prix à la réservation.
Le nombre de mises en chantier reste encore en-deçà de son niveau de 2011 où il était de 423 000. Il était tombé à 350 000 en 2014. Pour le moment, la progression des ventes ne s’est pas traduite par une recrudescence des mises en chantier. Néanmoins, en mai 2016, les mises en chantier (cumulées sur douze mois) progressent de 5,2 % sur un an et les permis de 9,9 %. Sur la période mars-mai, les mises en chantier remontent de 3,8 % sur un an, et les permis augmentent de 12,1%. Les prévisions pour 2016 et 2017 sont plutôt positives même si les résultats du deuxième trimestre ont été plutôt décevants en ce qui concerne l’investissement pour le secteur de la construction.
Cette reprise de l’immobilier s’accompagne d’une augmentation de l’encours de crédit habitat. Ce dernier a progressé de 4 % sur un an en décembre après une hausse de 2,2 % fin 2014. Si jusqu’en 2015, les renégociations de prêt faisaient presque jeu égal avec les nouveaux prêts, ce n’est plus le cas depuis le dernier trimestre 2015.
L’immobilier bénéficie des mesures de soutien pris récemment par les pouvoirs publics qui ont, en partie, effacé les effets de la loi Duflot. L’accès au Prêt à Taux Zéro a été renforcé avec un recentrage sur les zones assez ou peu tendues (B1, B2, C). Le plafond de ressources a été augmenté et le montant du prêt peut atteindre désormais 40 % de l’opération contre 18 à 26 % auparavant. Par ailleurs, le différé de remboursement et la durée de prêt ont été allongés.
La France fait bande à part en matière immobilière. En effet à la différence des pays ayant connu dans les années 90 et 2000 une forte augmentation de leurs prix immobiliers, il n’y a pas d’assainissement dans notre pays. Chez nos voisins, les prix ont connu des baisses de 20 à 50 %. En France, au regard d’un taux d’effort de 30 % pour un ménage souhaitant acquérir une surface de 90 m², il n’y aurait pas de surévaluation de l’immobilier mais cela n’est dû au fait que les taux d’intérêt sont à des niveaux historiquement bas. En 2008, les prix étaient surévalués de 20 %. L’engouement actuel pour la pierre peut déboucher sur un retournement brutal surtout si plusieurs facteurs négatifs s’ajoutaient les uns aux autres : hausse des taux, aggravation du chômage, stagnation des revenus, durcissement de la fiscalité.